Section thématique 35

Du fait colonial à l’immigration contemporaine. La représentation des groupes minorisés, de l’Outre-mer français à l’hexagone.

f Responsables

Stéphanie Guyon (Université Paris I - CRPS) stephanie.guyon@ens.fr
Marie-Emmanuelle Pommerolle (Université des Antilles et de la Guyane - CRPLC) mepommerolle@free.fr

Présentation scientifique

Dates des sessions

Programme Résumés Participants

 

f Présentation scientifique

L’émergence du thème de la diversité depuis quelques années en France métropolitaine amène à s’intéresser plus précisément à cette expression devenue courante et pourtant polysémique. Elle renvoie en effet à de nombreuses formes de différenciations sociales (sexe, ethnies, religion, orientation sexuelle) et à des groupes minoritaires ou minorisés selon différentes logiques sociales. L’emploi actuel du terme de diversité sur la scène politique française est néanmoins plus réducteur puisqu’il renvoie en fait à la prise en compte de formes de différenciation racialisée : la diversité y désigne les personnes d’origine maghrébine ou noires (qu’elles soient issues de l’immigration ou d’origine antillaise) à l’exclusion d’autres groupes issus de l’immigration mais blancs [AVANZA Martina, 2008, « La question de la diversité aux élections municipales 2008 », JE « les processus électoraux dans les grandes villes françaises », Bordeaux, 19 mai 2008].

En cela, cette expression, même si elle n’y est pas toujours explicitement utilisée, renvoie à des pratiques courantes dans les sociétés françaises d’Outre-mer fortement structurées par des différenciations racialisées et/ou ethniques héritées de la colonisation et dans lesquelles la représentation de groupes minorisés est apparue, de manières diverses, comme un élément obligé de la représentation électorale. Evidemment, l’Outre-mer français se caractérise par une forte hétérogénéité due à la singularité de l’histoire coloniale de chaque territoire (présence ou non de population autochtone, absence ou présence de descendants de colons blancs, importance des migrations pendant la période coloniale). Ces rapports sociaux racialisés et ethnicisés y sont renforcés par l’importance des vagues migratoires dans la majorité des territoires, durant la période postcoloniale, qui tendent à introduire de nouvelles formes de différenciation en même temps qu’elles redéfinissent les rapports entre les groupes issus de la période coloniale. Au terme de « communauté » souvent employé dans ces sociétés et dont l’usage comme catégorie d’analyse apparaît problématique, on préférera le terme de groupe minorisé qui ne préjuge pas d’un quelconque contenu culturel et permet d’englober ces différents groupes parce qu’ils « font précisément l'objet d'un processus social de minoration par le fait de leur appartenance supposée à un groupe stigmatisé » [NDIAYE Pap, 2008, La condition noire. Essai sur une minorité française, Calmann-Lévy, p.58]

La question émergente de la reconnaissance identitaire en Outre-mer, se substituant désormais en partie aux demandes d’égalité sociale, a donné encore plus d’acuité à la question de la représentation identitaire en politique [DANIEL Justin, 2006, « Une vie politique locale sous influence métropolitaine ? »,  La France et ses outre-mers- Regards sur l’actualité, 323]. De ce fait les scènes politiques locales ultra-marines ont précocement pris en charge cet enjeu de la représentation politique des groupes minorisés. Le propos de ces deux séances thématiques sera donc de revenir sur la genèse de cette représentation, ses pratiques, ses déclinaisons, les imaginaires qui la sous-tendent et ses acteurs afin de mieux en comprendre les enjeux, sur ces territoires, mais aussi d’éclairer les pratiques actuelles de la diversité en France métropolitaine.

Il s’agira d’abord de proposer une socio-histoire de l’émergence de la question de la représentation des groupes minorisés sur ces scènes politiques. Les chronologies différentielles de l’émergence de cet enjeu selon les territoires (dès l’après-guerre pour la Nouvelle Calédonie, les années 1980 en Guyane, par exemple) permettront d’interroger les conditions locales d’apparition de ces pratiques et discours (discrédit des élites locales, mutations démographiques, apparition d’une élite au sein de ces groupes minorisés, etc…).

On étudiera également en pratique les mécanismes et les acteurs de la représentation des différents groupes minorisés dans ces espaces locaux. Quelles sont les origines et les carrières de ces représentants ? Quelle place ont-ils dans les partis, sur les listes, dans les exécutifs ? Quels sont les ressorts locaux de cette représentation ? On s’intéressera en particulier aux pratiques de patronage et de clientélisme qui ont largement contribué à l’échange politique entre les élites et ces groupes minorisés. Il conviendra aussi d’étudier les organisations communautaires et /ou traditionnelles, les Eglises, les institutions locales qui sont autant d’instances où se sont développés des échanges politiques et/ou des luttes entre ces groupes.

L’insertion des groupes minorisés dans le jeu politique procède également de la construction d’identités, tributaires des rapports aux groupes majoritaires mais également intimement liées à la trajectoire collective de ces groupes. Les usages sociaux et politiques des mémoires de l’immigration et de l’esclavage (pour les ultra-marins présents en métropole) sont ainsi au cœur de ces processus de représentation symbolique et politique. La représentation politique fonde ainsi, en retour, de nouvelles formes d’identification au sein de ces groupes et, éventuellement, de nouvelles hiérarchies sociales.

Centrées principalement sur des études de cas, les communications donneront un aperçu large des situations variées de l’Outre-mer français, et pour certaines nous permettront de comparer les situations outre-mer et le contexte hexagonal. Cette perspective comparative pourra être élargie lors de la discussion : on pourra partir de l’étude des périphéries politiques pour en retirer des questionnements sur le fonctionnement du champ central. On pourra faire par exemple l’hypothèse que les discours relatifs à la diversité, s’ils ne sont parfois qu’une rhétorique inefficiente en France métropolitaine, s’ancrent aussi dans des relations sociales et politiques marquées par l’échange politique et le clientélisme [BRIQUET Jean-Louis, SAWICKI Frédéric (Dir.), Le clientélisme politique dans les sociétés contemporaines, Paris, PUF, 1998], qu’il s’agirait de mettre au jour. Un deuxième élément justifiant l’intérêt de cette démarche est de s’intéresser à la circulation des registres de légitimation entre le centre et la périphérie. On peut penser que dans certains territoires (comme la Guyane), l’importation du registre de la diversité permet de légitimer des pratiques anciennes (quota de membres des groupes minorisés sur les listes) et de les imposer à la frange des groupes dominants qui y était réfractaire.

From colonialism to contemporary migration: the representation of minority groups in French overseas

The concept of « diversité » (diversity) has arisen in France as a necessity to improve the representativeness of democratic institutions. Whereas this concept generally refers to several social differences (gender, age, religion, etc…), it has actually a restrictive and implicit meaning in the French political life referring to racial or ethnic differences: “diversité” designates the promotion in democratic institutions of people originating from former French colonies. New in the national context, the issue of representing minority groups (based on racial/or ethnic differences) has had a long history in French territories overseas (the “départements et territoires d’outre-mer”). Indeed, French overseas territories have been structured along racial/ethnic hierarchies since colonial times, leading to political arrangements dedicated to the representation of minorities. Recent immigration in these territories has also changed the racial and ethnic classifications and hierarchies leading to new ways of representing (or not) these “communities”.
This panel will address this specific issue of representing minorities (the term minority can be defined here as such: it refers to groups who are designated as “minor” in a society because they are stigmatised) in French overseas territories. Based on intensive fieldworks, the papers will trace the genesis of the representation of minority groups underlining the local factors (demography, new elites, etc…) explaining the emergence of these groups on the political scene. They will also describe the ways minority are included in official institutions, the intermediaries between the state and the groups (Churches, commercial networks) and changes it bring in political institutions and the constitution of local elites. Some contributors will also explore the moving identities of these minorities and especially the social construction of collective memories related to migration and slavery.


f Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 7 septembre 2009 16h40-19h
Session 3 : 8 septembre 2009 9h-11h20
Voir planning général...

Lieu : Amphi MSH


f Programme

Axe 1
La représentation des groupes minorisés après le « moment » colonial

Discutants : Romain Bertrand (CERI, FNSP), Anne-Christine Trémon (CMH, CNRS/EHESS)

Axe 2
Représenter les groupes minorisés aujourd’hui : « cuisine » électorale et arrangements institutionnels

Discutants : Eric Fassin (ENS, IRIS, CNRS/EHESS), Camille Hamidi (Triangle, Université Lyon-II)


f Résumés des contributions

Axe 1

Daniel Justin (UAG, CRPLC, UMR-CNRS 8053) et Giraud Michel (UAG, CRPLC, UMR-CNRS 8053)

La marque du passé colonial dans les représentations des minorités issues d'une immigration. Le cas des immigrants aux Antilles françaises et des émigrants antillais en Métropole.

La Guadeloupe et la Martinique présentent l’originalité d’être à la fois des terres d’immigration et d’émigration. Elles offrent à travers la comparaison des migrations « ultramarines » (celles de tous les immigrants aux Antilles) et « métropolitaines » (celles des émigrants antillais installés dans l’Hexagone) les conditions de l'analyse d’une double série de mécanismes : d'une part, les modalités, les déterminants et les effets des discriminations auxquelles sont souvent confrontés les migrants; d'autre part, les stratégies mobilisées par ces derniers pour faire face à une telle situation dans leur société d'installation ainsi que les représentations qui sous-tendent ces discriminations et ces stratégies. Cette contribution porte ainsi sur la place de tous les migrants considérés dans la mémoire collective des sociétés où ils vivent et sur les figures dominantes de l’altérité selon lesquelles ils tendent à être perçus par la « population de souche ». Partant, elle insiste sur les processus d’ethnicisation des rapports sociaux en repérant les procédures par lesquelles de vieux schèmes coloniaux sont actuellement repris et modifiés ainsi que les stratégies qui les fondent. L’accent est, enfin, mis sur les procédés selon lesquels ces migrants se construisent leurs propres identités, les usages sociaux et politiques qu'ils font de ces constructions et, en particulier, de la mémoire qu'ils se sont constitués de leurs histoires (où le passé de l'esclavage prend une part croissante).

The mark of the colonial past in the representations of minorities stemming from immigration. The case of the immigrants in the French Antilles and West-Indian emigrants in mainland France.

Guadeloupe and Martinique present the originality of being at the same time lands of immigration and emigration. They thus offer through the comparison between the “overseas” migrations (those of all the immigrants in the Antilles) and the “metropolitan” migrations (those of the West-Indian emigrants set up in the Hexagon) the prerequisites for the analysis of a double series of mechanisms: on the one hand, the procedures, determinants and effects of the discriminations with which the migrants are often confronted; on the other hand, the strategies which the latter use to cope with such a situation in their host society as well as the representations which underlie the said discriminations and strategies. This contribution will thus focus on the place of the migrants in the collective memory of the society where they live and on the dominant figures of otherness according to which they tend to be perceived by the “population of old stock”. Therefore, it insists on the processes of ethnicization of social relationships by pointing out the procedures by which the old colonial schemes are currently reactivated and changed as well as the strategies which found them. Finally, the emphasis will be on the mechanisms upon which these migrants build their own identities, the social and political uses that they make of these constructions and, in particular, of the memory which they constituted from their histories (where the past of slavery takes an increasing part).

Trépied Benoît (IRIS-EHESS/CNRS)

Quand les chefs « ouvraient » la mairie. Engagement politique et légitimité « coutumière » des premiers conseillers municipaux kanak (Koné, Nouvelle-Calédonie, 1954-1961)

Citoyens français depuis 1946, les Kanak de Nouvelle-Calédonie ont participé pour la première fois à des élections municipales en octobre 1954. Dans la commune de Koné, malgré la supériorité démographique de la population kanak locale, le nouveau conseil municipal issu des urnes était composé de 9 Européens et 5 Kanak. Ces 5 élus mélanésiens occupaient tous simultanément des fonctions de « chefs administratifs » dans leurs « tribus » respectives. L’objectif de cette présentation est d’explorer ces particularités du premier scrutin municipal ouvert aux Kanak de Koné. Nous reviendrons d’abord sur la façon dont les relations entre les fonctions de « chef » et de conseiller municipal kanak furent discutées statutairement au Conseil Général en 1953-54, puis nous analyserons comment elles furent fixées en pratique dans la commune de Koné lors des élections municipales d’octobre 1954. Notre propos se centrera ainsi sur les caractéristiques, spécifiques à la commune de Koné, du passage d’un mode institutionnalisé de gouvernement mélanésien local (les chefferies administratives) à un autre (la municipalité). Il témoignera d’un moment politique particulier, marqué par le prolongement temporaire dans la citoyenneté d’un pouvoir kanak consacré par l’administration coloniale sous l’Indigénat, moment qui s’achèvera avec le déclin partiel de ces formes d’autorité spécifiques au profit d’autres logiques sociales et politiques investies localement dans la municipalité.

When the Chiefs inaugurated the Mairie. Political commitment and customary legitimacy of the first Kanak Elected Members (Koné, New Caledonia, 1954-1961)

In New Caledonia, the Kanaks – becoming French citizens in 1946 – participated to municipal elections for the first time in October 1954. In the commune of Koné, despite the demographic majority of the Kanak population, the newly elected Municipal Council was composed by 9 Europeans and 5 Kanaks. These 5 Melanesian elected members also held specific positions as “administrative chiefs” in their respectives “tribes”. Our goal in this paper is to explore the particularities of the first municipal elections opened to the Kanaks of Koné. We shall retrace how the issue of the relations between “administrative chiefs” and Kanak elected members of Mairies was discussed by the General Council in 1953-54. Then we shall analyse how this issue was settled in practice in the commune of Koné, just before the actual scrutiny in October 1954. Rooted in the specific case of Koné, our demonstration shall therefore focus on a major political shift: the passage from of a previous institutionalised mode of local Melanesian government (administrative chiefdoms) to a new one (the Municipal Council). It shall examine a very peculiar political moment, that of the temporary extension, into citizenship politics, of a specific Kanak power recognised and officialised by French administration under indirect colonial rule. This moment will end when these very forms of Kanak authority will slowly decline, and when other social and political logics will be locally mobilised into municipal politics.

Rettig Isabelle (IRIS, CNRS/EHESS)

Wallisiens et Futuniens en Nouvelle-Calédonie. Migration, démocratie locale et indépendance kanak.

Dans la continuité des recrutements de main d’œuvre extérieure pour sa colonie, la France favorisa, après la seconde guerre mondiale, la migration puis l’installation de travailleurs Wallisiens et Futuniens en Nouvelle-Calédonie. En 1961, une dizaine d’année après les indigènes de Nouvelle-Calédonie, les protégés de Wallis et Futuna obtinrent la citoyenneté française. La scène politique calédonienne était alors dominée par l’Union Calédonienne (UC), parti consensuel, rassemblant autochtones mélanésiens et colons européens. Alors que les Kanak redevenaient majoritaires en nombre sur leurs terres, l’UC prit une orientation autonomiste puis indépendantiste entraînant la formation d’un bloc antagoniste d’obédience loyaliste. Dans cette nouvelle configuration bipolaire, l’enjeu démographique et la masse électorale représentée par les nouveaux arrivants et leurs familles devinrent centraux. Tout au long des années 1970 le vote relativement homogène des migrants Wallisiens et Futuniens contribua, à tous les niveaux de scrutins, aux victoires des partis loyalistes et donc aux défaites indépendantistes. Selon le dernier recensement autorisant les statistiques ethniques (1996), les Wallisiens-Futuniens et les Calédoniens d’origine wallisienne-futunienne représentent environ 12% de la population, leur vote pourrait une fois de plus s’avérer déterminant lors du référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie prévu entre 2014 et 2019.

Wallisians and Futunans in New Caledonia. Migration, local democracy and kanak independence.

To ensure continuity in recruiting an external workforce for its colony, France favored, after the Second World War, the migration then the settlement of Wallisians and Futunans workers in New Caledonia. In 1961, about ten year after the indigenous people of New Caledonia, the “protégés” of Wallis and Futuna obtained the French citizenship. The Caledonian political scene was then dominated by the Union Calédonienne (UC), a consensual party, gathering Melanesian natives and European colonists. While Kanak became again a majority in number on their land, the UC took a separatist then independentist orientation leading to the formation of an opposing block of loyalist obedience. In this new bipolar configuration, the demographic issue and the electoral mass represented by the newcomers and their families became central. Throughout 1970s the vote of the Wallisians and Futunans migrants contributed at every level of the voting system to the victories of loyalist parties and consequently to the defeats of the independentist’s. According to the last census authorizing ethnic statistics (1996), Wallisians-Futunans and Caledonians of wallisian-futunan origin represented approximately 12 % of the population, their vote might once again be crucial during the referendum on the independence of New Caledonia planned between 2014 and 2019.

Axe 2

Bargel Lucie (Université Paris 1 – CNRS, CRPS)

La composition des listes candidates à l’Assemblée de Polynésie française depuis le début des années 2000, entre compétence et représentativité

Cette communication analyse les transformations contemporaines des ressorts de la représentation des différents groupes racialisés de Polynésie française. D’abord, l’accentuation du transfert de compétences au Pays, ainsi que la politique d’« océanisation des cadres », concourent à l’élévation du degré de professionnalisation de l’activité politique. Un registre de la « compétence », réputée de plus en plus nécessaire aux élus locaux, vient ainsi concurrencer celui de la « représentativité ». L’application de la loi sur la parité, ensuite, est prise dans cette concurrence, en même temps qu’elle l’accentue, en déstabilisant les logiques traditionnelles de composition des listes candidates à l’Assemblée de Polynésie française. Au même moment, l’irruption inattendue des « indépendantistes » sur la scène politique jusqu’alors dominée par les « autonomistes » contribue à politiser la question de la représentation politique des « ma’ohi » (polynésiens), par rapport à celle des « demis » (métis) mais aussi des cadres administratifs « popa’a » (métropolitains). Ainsi, les effets des évolutions des règles électorales et juridiques varient selon la position des faiseurs de liste dans la compétition politique, caractérisé par une bipolarisation inédite, qui oppose d’abord « indépendantistes » et « autonomistes », puis ces deux partis, alliés, et les « îliens » (hors Tahiti), chaque camp se réclamant conjointement de ces deux registres de la compétence et de la représentativité.

The selection of candidates running for the Assembly of French Polynesia since the beginning of the 2000s, between proficiency and representativeness

This communication analyzes the contemporary transformations of the patterns shaping the representation of the various racialised groups in French Polynesia. At first, the growing transfer of competence to the Pays, as well as the policy of "executives océanisation", contribute to the rise of the professionalization of political activity. A register of proficiency, considered more and more necessary for local elected representatives, so comes to compete with that of "representativeness". The application of the parité law, then, is taken in this competition, at the same time as it stresses it, by destabilizing the traditional logics of making up the candidate lists running for the Assembly of French Polynesia. At the same moment, the "indépendantistes" unexpected burst on the political stage until then dominated by the "autonomistes" contributes to politicize the question of the "ma’ohi" (Polynesian) political representation, with regard to that of the "demis" (half-blood) but also the "popa'a" (metropolitans) administrative executives. So, the effects of the evolutions of the electoral and legal rules vary according to the position of lists’ makers in the political competition, characterized by a new polarization, which sets at first "indépendantistes" and "autonomistes", then these two parties, allied, and the "islanders" (outside of Tahiti), every camp referring at the same time to these two registers of proficiency and representativeness.

Guyon Stéphanie (Université Paris 1, CRPS)

Groupes minorisés, pratiques de composition des listes et campagne électorale à St Laurent du Maroni (Guyane)

Tout bouleversement morphologique des marchés politiques a des effets sur les pratiques de mobilisation électorale. Ville interface entre l’espace politique national et des espaces locaux postcoloniaux, ville à très forte croissance démographique, Saint-Laurent du Maroni est ainsi un site particulièrement riche d’observation des transformations des formes de légitimation des élus locaux. Dans un contexte de raréfaction des ressources clientélaires et de bouleversement des rapports démographiques entre le groupe créole et les groupes minorisés - amérindiens et noirs-marrons -, les stricts échanges clientélaires (échange des voix contre des biens matériels) ne suffisent plus à fidéliser les nouveaux inscrits. Dans la veine de travaux existants portant sur les campagnes électorales comme processus interactif localisé, cette étude des élections municipales de 2008 permet d’observer, dans une configuration locale affectée par un fort bouleversement démographique, la manière dont les listes en concurrence s’ajustent à de nouvelles contraintes locales en faisant appel à des registres de légitimation racialisés relativement inédits dans les stratégies de composition des listes comme dans les discours de campagne.

Minorized groups, selection of candidates running and campaigning in St Laurent du Maroni (French Guiana)

Any political markets’ morphological change modifies electoral mobilization’s practices. Interface between national political space and postcolonial local space, high demographic growth’s city, Saint-Laurent du Maroni is a particularly interesting site for observing the transformations of local authorities’ legitimization. In a context of decreasing votecatching resources and disruption of the demographic balance between Creole group and minorized groups such as Amerindians and Maroons - the strict votecatching exchange (exchange of votes against tangible goods) are no longer sufficient to retain the new electors. In the vein of existing work on electoral campaigns as localized interactive process, this 2008 local elections’ study is an opportunity to observe in a local configuration affected by a strong demographic change, the way candidates fit to new local constraints using relatively new racialised legitimation patterns in the composition of lists as in campaign speeches.

Laëthier Maud (IRD, URM 205)

Les associations haïtiennes sur la scène multiculturelle guyanaise : Enonciations identitaires et représentation d’une « communauté haïtienne de Guyane »

Cette communication porte sur la migration haïtienne en Guyane. Elle traite de l’émergence, de la représentation et de la manipulation de la catégorie de « communauté haïtienne » sur la scène multiculturelle guyanaise. Après avoir mis au jour les processus sociaux à l’œuvre dans la production de la situation migratoire que connaissent les Haïtiens dans le département, deux axes de réflexion retiendront successivement notre attention. Le premier est celui d’une identité collective haïtienne, telle que la construisent les leaders du réseau associatif, institués en tant que sujets représentants leur groupe d’appartenance. Le deuxième est celui de l’activation de ce « nous haïtien » dans la situation politique et culturelle locale. L’exemple du premier projet de coopération et de co-développement que le Conseil Général met en place en Haïti sera retenu pour l’illustrer et l’appréhender du double point de vue des acteurs politiques créoles et des responsables associatifs haïtiens. À partir des enjeux identitaires contenus dans cette expérience, ces deux temps illustreront les déclinaisons de la catégorie « communauté haïtienne » dans son lien à la politisation du pluralisme ethno-culturel guyanais porté par la minorité créole.

Haitian associations on the Guyanese multicultural scene: identity enonciation and representation of a “Haitian community of Guyana”

This communication deals with the Haitian migration in Guyana and the emergence of the representation and manipulation of the category of "Haitian" on the Guyanese multicultural scene. Having discovered the social processes at work in the production of the migratory situation faced by Haitians in the department, we will develop two main ideas. First, a collective Haitian identity, built by the network of associations’ leaders, established as representatives of their group. The second is the activation of a "we Haïtian" in the political and cultural situation. The first example of the cooperation project and co-development that the General Council set up in Haiti will be used to illustrate and understand the point of view of political actors and Creole Haitian charitable organizations. These two ideas illustrate issues of identity and variations of the category of "Haitian community" in its relationship to the politicization of ethno-cultural pluralism supported by the Guyanese Creole minority.

Richard Estelle (IHTP, Montpellier I)

L’impossible représentation politique des migrants à Mayotte

En 1975, un référendum a déterminé le maintien de Mayotte dans le giron Français ouvrant une crise régionale opposant la France à l’état comorien, ce dernier affirmant sa souveraineté sur l’île de Mayotte jusque devant les organisations internationales. On assiste dès lors sur « l’île aux parfums » à un travail politique de construction de l’identité mahoraise ainsi que celle de la figure du comorien, stigmate négatif qui affirme l’existence d’une communauté culturelle et politique proprement mahoraise et dont l’impact est décuplé par la construction de « l’immigration » comme problème politique dans la sphère nationale. La question identitaire traverse ainsi le métier politique à Mayotte et se lit autant dans les prises de positions des élus sur l’immigration comorienne que dans les stratégies de présentation d’eux-mêmes, ces derniers entretenant un rapport complexe à la question de leurs origines comoriennes. Il nous semble ainsi que les stratégies politiques développées par les élus mahorais dans le cadre de leur lutte pour le maintien de l’île dans la république, puis pour la départementalisation a contribué à faire de la minorité comorienne une construction hétéronome. Malgré son importance numérique, celle-ci est dans l’incapacité de se saisir des leviers de sa propre construction en tant que minorité politique, ce qui rend dans ce contexte impossible sa représentation.

The impossible political representation of the migrants on Mayotte

In 1975, a referendum resulted in the maintenance of Mayotte in the wombs of France and led to a regional crisis that opposed France to the Comorian government, while the latter asserted its sovereignty over the island of Mayotte and took the question to the international organisations. From that moment on, the political work of a Mayorese identity construction has taken place on the « Island of perfumes ». On the other hand, the figure of the Comorians as such is a distinguishing mark of of social disgrace. Nevertheless it confirms the existence of a cultural and political community that is actually Mayorese and the impact of which is somewhat multiplied by the construction of a « immigration » considered as a political problem in the national sphere. The identity problem is at the core of Mayorese politics, as well as in the stands of politicians as regard the Comorian immigration, in their adopted strategies as candidates. We have a feeling that the strategies developped by the Mayorese representative in their political struggle to maintain the island under French rule has contributed to making the Comorian minority a heteronomous construction. The Comorian minority in spite of its sizeable importance is unable to catch hold of the control levers of it own construction as a political minority which entails an impossible representation of the community.


f Participants

Bargel Lucie lucie.bargel@ens.fr
Bertrand Romain romain.bertrand@sciences-po.fr
Daniel Justin d.justin@wanadoo.fr
Fassin Eric eric.fassin@ens.fr
Giraud Michel michel-p.giraud@wanadoo.fr
Guyon Stéphanie stephanie.guyon@ens.fr
Hamidi Camille camillehamidi@hotmail.com
Laëthier Maud laethier.maud@wanadoo.fr
Pommerolle Marie-Emmanuelle mepommerolle@free.fr
Rettig Isabelle isa_rettig@yahoo.fr
Richard Estelle richard.estelle1@voila.fr
Trémon Anne-Christine anne-christine.tremon@ehess.fr
Trépied Benoît benoit_trepied@yahoo.fr