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Section Thématique 14

Gouverner les langues
Governing languages

Responsables

Selma K. Sonntag (Humboldt State University, Californie) selma.sonntag@humboldt.edu
Nuria Garcia (Centre d’études européennes, Sciences Po, Paris) nuria.garcia@sciences-po.org

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

La littérature sur les politiques des langues se caractérise par une forte hétérogénéité, à la fois par la variété des approches disciplinaires et à l’intérieur même de la science politique. Après une période de prédominance des travaux de théorie politique, centrés sur les « droits linguistiques », on assiste actuellement à un regain d’intérêt pour la question du « gouvernement » des langues et les perspectives d’analyse des politiques publiques. Or ces travaux se caractérisent par une absence de dialogue entre approches instrumentales des langues, soulignant leur dimension communicationnelle et les bénéfices économiques liés à leur maîtrise, et approches identitaires des langues, liées à l’école du nation-building, insistant sur leur dimension symbolique. Par ailleurs, le degré de cumulativité de ces travaux est relativement faible, face à une multiplicité d’études de cas présentant peu de liens entre elles.
La section thématique proposée vise à dépasser cette faiblesse caractéristique en reliant l’étude des politiques des langues à des questionnements plus généraux de l’analyse des politiques publiques et de la sociologie politique. Dans une perspective de « normalisation » de l’étude des politiques linguistiques, seront abordées les questions des limites du politique, des instruments de l’action publique, des résistances au changement de ces politique, et le lien entre politiques publiques et régime de citoyenneté. A travers une perspective comparative, il s’agira de dégager les conditions d’exercice des politiques linguistiques dans les sociétés démocratiques contemporaines et complexes. Cette volonté de relier les questions de politiques des langues à la science politique générale s’inscrit dans le prolongement des réflexions menées actuellement au sein du RC50 « Langue et politique » de l’IPSA.  
Afin de construire une réflexion collective autour de ces questions, nous avons privilégié des contributions comportant une dimension comparative et cherchant à articuler des études de cas empiriques à une réflexion plus générale sur la question du gouvernement des langues. Le dialogue entre les différentes contributions est réalisé à travers l’adoption d’un niveau d’analyse méso, permettant un va-et-vient entre montée en généralité et contextualisation. Nous avons par ailleurs encouragé la diversité des approches à la fois en termes des types de politiques linguistiques étudiées, en termes d’échelle de l’analyse (nationale, régionale, supranationale) et de sources et de méthode utilisées. Finalement, la section thématique a visé une diversification des études de cas en termes d’aires géographiques afin de permettre une confrontation entre des cas plus « classiques », i.e. notamment des pays multilingues comme le Canada, et des cas moins étudiés. Plutôt que d’insister sur la singularité de chacun de ces cas, la discussion collective aura pour objectif de mettre en lumière des régularités entre ces derniers afin de contribuer de cette manière à une meilleure compréhension des mécanismes régissant le gouvernement des langues.
Deux dimensions seront privilégiées au sein de la section thématique :

1.    Qu’est-ce qu’une politique linguistique ?
Une première session se placera dans une perspective d’analyse des politiques publiques pour soulever la question de la délimitation des politiques linguistiques: Les politiques linguistiques constituent-elles un secteur de politique publique spécifique ou s’agit-il d’un ensemble hétérogène de politiques issus de secteurs différents ? Ces politiques se caractérisent-elles par des instruments et des finalités spécifiques ? On s’intéressera ainsi d’abord à l’interconnexion entre différents types de politique linguistique : entre politiques dirigées vers l’intérieur ou l’extérieur, les politiques d’enseignement, les politiques culturelles, etc. La session soulèvera ensuite la question du lien entre le changement des politiques linguistiques et la transformation plus générale de l’action publique.
Plus largement, il s’agira aussi de réfléchir à l’articulation entre dimensions instrumentale et symbolique de la politique des langues : Comment tenir compte de cette spécificité de l’objet « langue » dans l’analyse des politiques linguistiques ?
Ces questions seront abordées à travers des études de cas empiriques privilégiant l’analyse des politiques linguistiques « au concret ». Si la littérature sur la politique des langues se caractérise souvent par l’adoption d’un angle d’analyse excessivement généralisant, il s’agira au contraire de s’intéresser à des secteurs de politique publique moins étudiés et d’analyser la mise en œuvre et les implications des régimes linguistiques sur le terrain : Dans quelle mesure observe-t-on des disparités dans l’application d’un même régime linguistique entre différents secteurs de politique publique ou selon le niveau d’action publique? Quelles sont les implications d’un régime bilingue ou multilingue sur le recrutement fonctionnement de l’administration publique ?

2.    Quels liens entre politiques des langues et citoyenneté ?
Une deuxième session abordera la question du gouvernement des langues à partir d’un angle de sociologie politique en analysant les liens entre politiques linguistiques et citoyenneté : Dans quelle mesure les politiques linguistiques sont-elles la traduction de modèles de citoyenneté, et comment agissent-elles comme vecteurs de représentation, de définition et de délimitation de la communauté civique ?
Si la littérature sur la politique des langues a souvent privilégié l’étude des processus de mise en place d’un régime linguistique ou celle de l’émergence de revendications ou mouvements linguistiques, nous nous intéresserons également à des configurations où l’enjeux de la langue est moins saillant, et où en l’absence de conflit ou de mobilisation ouverte, les politiques linguistiques contribuent à reproduire des modèles de citoyenneté ou au contraire de les changer.
Le lien entre politiques des langues et citoyenneté sera ainsi analysé au sens large pour inclure: les politiques linguistiques conditionnant l’accès à la citoyenneté, les politiques linguistiques règlementant l’exercice de la citoyenneté (en régissant la (non)reconnaissance de différentes langues dans la sphère publique), les politiques linguistiques définissant la formation des citoyens (les politiques d’enseignement des langues nationales, régionales, minoritaires, étrangères et d’origine). Seront également abordées les politiques linguistiques formulées aux niveaux sub- et supranational et leur relation avec les changements affectant la nature de la citoyenneté, qui au-delà de sa dimension nationale comporte un caractère cosmopolite.
De cette manière, il s’agira d’aborder la question de la citoyenneté à la fois à travers sa dimension démocratique et identitaire. A travers l’étude de différentes configurations politiques (Etats fédéraux, Etats unitaires, rapport entre métropole et anciennes colonies, entités supranationales…) nous nous intéresserons notamment au lien entre régime linguistique et structure de la distribution du pouvoir politique, et ses implications pour l’exercice de la citoyenneté.

 
This thematic section aims to overcome a lacuna in the literature on language and politics by grounding the study of governing languages in political analyses typical of public policy and political sociology perspectives. Integrating language politics within the domain of political science shifts our focus away from normative studies of language rights and descriptive studies of nation-building, characteristic of the literature in recent decades, and builds on the current efforts of the IPSA Research Committee “Language and Politics” (RC50).
To achieve this aim, presentations and discussions across a range of public policy arenas and geographically diverse cases studies will collectively facilitate mid-range analyses of the mechanisms and structures involved in governing languages. Contributions will be grouped into two sessions, with six presentations scheduled for each:

1.    What are language policies?
The first session will focus on language and politics primarily from a public policy perspective: Do language policies form a specific sector of public policy or are they a heterogeneous set of policies belonging to different sectors? Are language policies characterized by specific instruments and objectives? What are the links between different types of language policies? How do shifts in policy goals in general affect changes in language policies? What are the instrumental and symbolic dimensions of language policies in specific cases and how can we take these into account in analyzing the governing of languages?
 
2.    What are the links between language politics and citizenship?
A second session will focus on the governing of languages primarily from a political sociology perspective by interrogating the link between language politics and other modalities of governing such as citizenship: How do language policies condition access to citizenship, regulate citizenship activities, and contribute to the formation of future citizens? Presentations will focus less on language demands and language movements characterizing civil society and more on instruments of governmentality in regard to the language dimension of citizenship. Also germane to this session will be discussions of the changing nature of citizenship, no longer bound only to national identity but also of a more cosmopolitan character, and its relationship to language policies formulated across different political configurations and distributions of power.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment J (13 rue de l'Université), salle J 104


Programme

Axe 1 / Qu’est-ce qu’une politique linguistique ?

Présidence de session : Nuria Garcia (CEE Sciences Po)  
Discutant-e-s : Jérôme Saulière (Ecole Polytechnique), Aude-Claire Fourot (Simon Fraser University)

Axe 2 / Quels liens entre politiques des langues et citoyenneté ?

Présidence de session : Selma K. Sonntag (Humboldt State University, Californie)
Discutantes : Rosemary Salomone (St. Johns University), Hilary Sanders (Université Paris Diderot Paris 7) (sous réserve)


Résumés des contributions

Selma Sonntag (Humboldt University, Asha Sarangi, Jawaharlal Nehru University)

Le fédéralisme linguistique de l’Inde comme politique linguistique
 
L’Inde a commencé une réorganisation linguistique de ses Etats dans les années 1950, peu après l’indépendance. Si à l’époque on s’inquiétait que la validation des identités régionales linguistiques par le fédéralisme allait déchaîner les « tendances fissipares », le fédéralisme linguistique indien est aujourd’hui perçu comme un succès en ce qu’il a permis d’affirmer « l’unité dans la diversité » de l’Inde. Notre intervention analyse le fédéralisme linguistique de l’Inde comme politique linguistique et les objectifs et les résultats de cette politique. Nous défendrons l’idée que la politisation de la langue au niveau des Etats de l’Inde qui découle du fédéralisme linguistique, a précipité l’émergence une nouvelle construction politique au niveau national, celle des coalitions. Ce changement d’échelle de la politisation linguistique vers le bas au niveau des Etats, a en effet dépolitisé les enjeux linguistiques au niveau national, permettant une « diffusion » moins politisée des langues officielles de l’Inde, qui sont le hindi et l’anglais. Ces deux langues fonctionnent comme modes de communication marchandisés – comme des compétences et des ressources destinées à la consommation et à la production – plutôt que comme des marqueurs identitaires. Nous concluons que le fédéralisme linguistique est, en général, un mécanisme politiquement efficace pour gouverner les langues dans un pays caractérisé par une aussi grande diversité que l’Inde. Notre analyse s’appuiera sur l’étude de la mise en œuvre du fédéralisme linguistique dans le cas des différents Etats indiens.
 
India’s Linguistic Federalism as Language Policy
 
India embarked on a linguistic reorganization of states in the mid-50s, soon after independence. Although there was concern at the time that validating regional linguistic identities through federalism would unleash “fissiparous tendencies,” threatening India’s national integrity, current assessments often herald the success of India’s linguistic federalism in strengthening India’s “unity in diversity.”This paper analyzes India’s linguistic federalism as a language policy and the political objectives and outcomes of this policy. We argue that the politicization of language at the state-level, stemming from linguistic federalism as language policy, has in turn restructured national-level politics in India, resulting in coalition politics. This shift of the politicization of language downward, to the state level, has also de-politicized language issues at the national level, allowing for a less politicized “spread” of India’s national-level official languages, Hindi and English. The latter increasingly function more as commodified modes of communication—skills and resources to be accessed in both consumption and production—than markers of identity. We conclude that, in general, linguistic federalism has been a fairly politically effective mechanism of governing languages in a multilingual state as diverse as India. We support our analysis by focusing on specific instances of how linguistic federalism as language policy has “played out” in various Indian states.


Helaina Gaspard (Université d’Ottawa)
 
Un compromis ou un droit? : L’impact des mécanismes d’aménagementlinguistique dans la fonction publique fédérale du Canada.
 
La politique linguistique du Canada a subit une transformation passant d’un compromis politique codifié dans la Loi sur les langues officielles (LLO) de 1969 à un droit dans le cadre des droits humains selon l’amendement de la LLO de 1988.  Malgré la reconnaissance de cette transformation dans la littérature (voir Macmillan, 1998), il manque une analyse des mécanismes introduits pour effectuer le changement au sein de la fonction publique fédérale.
Par l’analyse des mécanismes, cette communication songe à déterminer si la transformation a encouragé un changement dans les efforts d’aménagement linguistique du gouvernement fédéral.  Si, par une réorientation de mécanismes, l’approche a changé, quels étaient les résultats pour le programme des langues officielles ainsi que pour les fonctionnaires?
La communication offrira une contribution empirique aux études de la politique linguistique au Canada en expliquant le trajet du programme des langues officielles dans la fonction publique.  D’une perspective théorique, je songe à offrir une approche interdisciplinaire à l’étude des politiques linguistiques par un engagement de la littérature de l’aménagement linguistique avec celui de l’institutionnalisme historique.
 
A Compromised Right?: Comparing Language Planning Mechanisms and their Effects in the Canadian Federal Public Service
 
In Canada, official languages policy transformed from a tool for political compromise with its inception encapsulated in the Official Languages Act (OLA) 1969 to a right within a human rights framework with the revision of the OLA in 1988. Although the shift in this conception of official languages has been studied (see for instance, Macmillan, 1998), there has been little analysis of the mechanisms used to achieve these goals within federal institutions, notably within the federal public service. This paper seeks to contribute to the literature on language policy analysis and particularly, the case of language policy implementation in the Canadian federal public service by asking:
Did a shift from language as a political compromise to language as a right alter the federal government’s approach to language planning? If the approach changed – evidenced through a reorientation of mechanisms – what were the results for public servants?
This paper intends to make an empirical contribution to the literature on Canadian language policy by providing an explanation of the program’s implementation. Further, this paper hopes to contribute to the study of language policy through the lens of public policy by proposing an interdisciplinary approach engaging language planning literature and historical institutionalism.  


Rémi Léger (Simon Fraser University)
 
Les trois sphères d'actions du régime linguistique canadien
 
Plusieurs études récentes exposent la convergence entre l’aménagement linguistique et la gestion horizontale en contexte canadien. Elles montrent comment la mise en application des responsabilités gouvernementales en matière de langues officielles s’est largement inspirée de principes de collaboration, de coopération et de partenariat. D’ailleurs, il est désormais courant d’utiliser la formule « gestion horizontale des langues officielles » pour décrire le gouvernement des langues au Canada. Le présent texte se propose d’exposer une représentation plus complexe mais également plus exacte de la gouverne canadienne des langues. Sa thèse est qu’en insistant sur la convergence entre l’aménagement linguistique et la gestion horizontale, les chercheurs ont contribué à construire une vision globale et moniste du régime linguistique canadien. En revanche, s’intéressant aux mesures en matière de langues officielles et non leur mise en application, ce texte montre que le régime linguistique canadien comporte trois sphères d’actions distinctes pouvant commander des modes de gouvernements distincts. Et donc peu importe si l’ensemble du régime linguistique canadien s’organise actuellement selon les principes de la gestion horizontale, en réalité il s’avère qu’il pourrait coexister trois modes concurrents de gouvernement des langues en contexte canadien. Plus concrètement, le texte résume brièvement le consensus sur la gestion horizontale des langues officielles, présente les trois sphères d’actions qui sont celles de l’administration publique fédérale, les relations fédérales-provinciales et la société civile, et enfin fait recours aux cas gallois et irlandais afin de montrer que cette nouvelle représentation de l’aménagement linguistique au Canada ouvre la voie à des comparaisons fructueuses sur la gouverne des minorités linguistiques.
 
The three tracks of Canada's federal language regime

A number of recent studies underscore the confluence of language planning and horizontal management in the Canadian context. They show how the federal government relied on principles of collaboration, cooperation and partnership in following through on its obligations in the area of official languages. Indeed, it is now commonplace to refer to the “horizontal management of official languages” in Canada. This paper offers a more complex but also a more accurate depiction of language management in Canada. Its thesis is that researchers, in insisting on the confluence of language planning and horizontal management, have articulated a global and monistic representation of Canada’s language regime. In contrast, distinguishing between the theory and practice of official languages in Canada, this paper suggests that Canada’s language regime contains three distinct spheres and that each sphere could be organized following a distinct mode of governance. It is thus to say that the present overarching mode of horizontal management could be altered in favour of modes of governance that are better suited for each sphere. Concretely, the paper briefly presents the consensus on the horizontal management of official languages, introduces the three spheres of action, which are the federal public administration, intergovernmental relations and the civil society, and last appeals to the cases of Ireland and Wales in order to show that this new understanding of language management in Canada opens the way for new and fruitful comparisons on the governance of linguistic minorities.


Linda Cardinal (Université d’Ottawa, Anne Mévellec, Université d’Ottawa)
 
Langue et services d’urgence à la ville d’Ottawa : un couple étrange?
 
Les politiques linguistiques occupent une place transversale dans l’action publique. En s’imposant à un découpage sectoriel des politiques publiques, elles exigent de penser de façon conjointe les relations langue-politique. Ainsi, les politiques linguistiques nous amène à réfléchir sur leurs effets dans les différents secteurs d’intervention mais également sur les enjeux linguistiques des politiques sectorielles. Quels sont les facteurs les plus importants pour comprendre ces effets? Grâce à une étude de cas des rapports entre le bilinguisme (français-anglais) et les services d’urgence au sein de la ville d’Ottawa au Canada, nous montrerons l’importance de prendre en compte le contexte institutionnel et politique dans lequel les politiques linguistiques sont formulées.
Ce texte portera donc sur la relation intime entre les débats sur le bilinguisme (français-anglais) et les services d’urgence au sein de la ville d’Ottawa, depuis les années 1980 (services de police, de pompiers, d’ambulance). Étant la capitale du Canada, un pays bilingue et multiculturel, on pourrait s’attendre à des services d’urgence municipaux bilingues. Or, tel n’est pas le cas. De fait, nous montrerons comment Ottawa est un cas de figure pour étudier l’incidence des facteurs institutionnels et politiques sur la relation entre bilinguisme et services d’urgence. Le cas d’Ottawa est particulièrement intéressant, puisque la ville est à la fois subordonnée aux contraintes des régimes linguistiques en place et soumise au principe de subsidiarité en raison des ordres de gouvernements qui sont en jeu dans le contexte municipal.

Language and Emergency Services at the City of Ottawa : A Strange Couple?

Language policies play a transversal role in the realm of public action. They interact with public policies and they also help address language issues within those same sectors of public policy. What is the impact of language policies on sector-based public policies? What are the specific language issues within those policies? This paper will try to answer those broader questions, using data from a case study on the relationship between language and emergency services at the city of Ottawa,
The paper will look more specifically at the debates on bilingualism (English-French) in the area of emergency services in Ottawa since the 1980. By emergency services, we mean policing, firefighting and ambulance services. Ottawa being Canada’s capital, it might be taken for granted that those services would be offered in the country’s both official languages. In fact, it should not be assumed that those services would be offered in French. How can we explain this situation? Which factors should we isolate? Our case study will address more specifically the role of institutional and political factors in explaining why citizens of a city such as Ottawa, where there is a substantial linguistic minority, the French-speaking minority, should not expect bilingual services.

Aline Hartemann (Centre Marc Bloch Berlin/EHESS-IMM)
 
Le rôle de la politique des langues dans l'avènement d'un 'citoyen européen'. Etude de cas: la chaîne de télévision ARTE et l'usage des langues.
 
Depuis le milieu des années 2000, force est de constater que la dimension « bilingue » et « multilingue » de la chaîne ARTE tend à être considérée par les acteurs et les téléspectateurs davantage comme un problème que comme une ressource, voire un objectif. La dimension « plurilingue » de la chaîne est ainsi actuellement en recul. Comment, dans ses conditions, la chaîne peut–elle faire advenir, par la voie des ondes, un espace commun, doté d’une « langue européenne », capable de porter ce qui est désigné par les tutelles comme une « identité européenne » ?
Nous tenterons de proposer une analyse de ce repli « national » sur les langues de chacun des partenaires, et essaierons d’en mesurer les conséquences sur la construction de l’objet et du téléspectateur « européens » que la chaîne a pour mission de mettre au jour. Nous essaierons également de rendre compte de ce qui est en jeu dans l’expression « langue européenne ». Nous poserons notamment une hypothèse : cette aspiration désignerait une utopie, un mythe régulateur, une fiction orientatrice qui aurait pour fonction de guider l’action des acteurs, mais qui n’aurait pas vocation à s’incarner dans l’action. Nous montrerons également comment cette fiction est instrumentalisée par des acteurs à des fins stratégiques.

Nuria Garcia (Centre d’études européennes, Sciences Po)
 
De la production du citoyen monolingue à celle du citoyen multilingue: une comparaison franco-allemande
 
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale on assiste à un changement de régime linguistique dans des Etats-nations traditionnellement monolingues, tels que la France et l’Allemagne. Comparant le rôle joué historiquement par les systèmes éducatifs dans l’unification linguistique des Etats-nations européens au 19e siècle au rôle contemporain de ces mêmes systèmes d’enseignement dans la diffusion des langues étrangères, ce changement de régime linguistique sera conceptualisé en termes de transition de la production de citoyens monolingues vers celle de citoyens multilingues.
Dans une perspective de néo-institutionnalisme historique, il s’agira dans un premier temps de mettre en lumière les mécanismes de dépendance au sentier permettant d’expliquer la structuration différentielle du secteur de la politique d’enseignement des langues en France et en Allemagne. Dans une perspective systémique, il s’agira ensuite de montrer que la conception et la problématisation différente de la production du citoyen multilingue dans les deux pays renvoie à la fonction spécifique qu’occupe l’enseignement des langues, et plus largement l’enseignement en général, au sein de chacune des configurations sociétales et politiques.

From the production of the monolingual citizen to that of the multilingual citizen: a comparison between France and Germany
 
Since the end of the Second World War we have been witnessing a change in the language regimes of traditionally monolingual nation-states such as France and Germany. Comparing the role historically played by national education systems in the linguistic unification of European nation-states in the 19th century to the contemporary role of the same education systems in the diffusion of foreign language skills, this language regime change will be conceptualized in terms of transition from the production of monolingual citizens to that of multilingual citizens.
From a historical neo-institutionalism perspective, this paper will first show how mechanisms of path-dependency allow to explain dissimilarities in the structure of the language education policy sectors between France and Germany. From a systemic perspective, it will then be argued that the different conception and problematisation of the multilingual citizen observed in both countries is linked to the specific function fulfilled by language education policies, and education policies in general, inside each political and societal configuration.

Ericka A. Albaugh (Bowdoin College, Maine)
 
Les guerres, les villes, et les écoles: la diffusion des langues et la citoyenneté en Afrique
 
Les politistes pensent en général que la gouvernance est plus facile dans des milieux linguistiques homogènes. Les linguistes qui étudient l’Afrique focalisent d’habitude leur attention sur l’éducation comme véhicule pour la préservation des langues indigènes; mais quand l’éducation est multilingue, cela pourrait inhiber la rationalisation des langues qui est politiquement avantageuse. Ce papier examine trois facteurs influençant le paysage linguistique dans les Etats africains: la guerre, l’école, et l’urbanisation. En commençant avec les années 1960, et en choisissant plusieurs Etats qui se sont ressemblé en hétérogénéité linguistique à cette époque là, l’étude évalue l’impact relatif des trois facteurs pendants les 50 ans après. Il teste l’hypothèse que la guerre civile et l’urbanisation servent à uniformiser une population par la diffusion d’une langue véhiculaire, tandis que l’éducation multilingue contraint la diffusion parmi les frontières délimité. Ensuite, en utilisant les réponses de l’enquête Afrobarometer, l’étude examine comment cette variation d’extension d’une langue véhiculaire a des effets sur les sentiments de loyauté des citoyens – loyauté au groupe ethnique contre loyauté à l’état national. Les résultats préliminaire indiquent qu’on trouve un attachement national plus grand dans les milieux avec une plus grande diffusion d’une langue véhiculaire, mais que dans les milieux avec une éducation multilingue, on trouve des attachements partagés: entre le groupe ethnique et l’Etat national.
 
Wars, Schools, and Cities: Language Diffusion and Citizenship in Africa
 
Political scientists generally believe that states are more stable and governance easier in homogeneous language settings. Linguists studying Africa typically focus on education as the vehicle to local language preservation, and where education is regionally multilingual, this could be viewed as inhibiting a politically beneficial rationalization of language. This paper looks at three influences on language landscapes in African states: war, schooling, and urbanization. Taking as a baseline 1960, and selecting several cases of similar heterogeneity, it assesses the relative impact of these three factors over time. It tests the hypothesis that civil war and urbanization serve to homogenize by diffusing a lingua franca, whereas multilingual education constrains language diffusion within defined boundaries. Then, using Afrobarometer survey responses, it looks at how this variation in the spread of a lingua franca affects national versus ethnic sentiment among citizens. Preliminary results appear to show greater national sentiment in areas with wider lingua franca diffusion, but greater attachment to both ethnic and national identities in areas with multilingual education.

Alice Goheneix (NYU/Sciences Po)
 
La langue comme filtre d’accès à la citoyenneté : Le cas des nouvelles colonies françaises (1880-1962).

En métropole, le suffrage universel (1848) a précédé la capacité linguistique des citoyens. En revanche, pour les populations d’Algérie, d’AOF et de Cochinchine la maîtrise de la langue française apparaît comme un filtre d’accès à la citoyenneté.
Dans un premier temps, nous montrerons que la politique publique de la langue française dans l’Empire a reposé sur un réseau de représentations des langues vernaculaires et française contradictoires : d’une part la supériorité et les vertus commerciales et civilisatrices supposées de la langue française ont incité à sa diffusion ; d’autre part, considérée dans l’imaginaire national comme un instrument d’émancipation (depuis 1789), en même temps que le signe et le critère de la citoyenneté, sa diffusion massive aux colonies était réputée dangereuse.
Dans un deuxième temps, nous mettrons l’institutionnalisation législative de la langue française comme critère majeur de naturalisation en regard des effectifs restreints formés au français jusqu’en 1945. C’est en effet après cette date qu’est mise en place une politique de scolarisation massive en français dans les colonies, en même temps que progressent les droits politiques des populations d’Outre-mer.
En conclusion nous soulignerons, a la lumière de l’histoire coloniale, que la faible reconnaissance en France de droits linguistiques et l’imposition d’une langue nationale participent paradoxalement d’un enracinement de l’égalité politique.

Language as a filter to access citizenship: The case of the French new colonies (1880-1962).
 
In the French « métropole », universal suffrage for men (1848) preceded the ability of French citizens to speak French (1880). While for the native populations of Algeria, French West Africa and Cochinchina, being illiterate in French appears to have filtered the access to citizenship.
Initially, we will demonstrate that the public language policy in the French Empire was based on a  contradictory network of perceptions and prejudices about the French language and about the vernaculars: on one hand,  the so-called superiority, commercial and civilizing virtues of the French language were pushing toward its spreading, but on the other hand, because it was considered (since 1789) a symbol of citizenship and a tool for emancipation, a massive French language spreading in the colonies was believed to become a likely instrument of rebellion.
Then, we will study the mastery of the French language as a criteria for the naturalization of natives, and we will give an estimation of the number of natives who were taught French until 1945. It was indeed only after World War II, that a universal schooling policy in French was implemented in the Empire, when political rights were expending in the colonies.
In conclusion, in the light of French colonial history, we will underscore that in France, the weak acknowledgment of linguistic rights and the imposition of the national language paradoxically plays a part in the building of political equality.


Jeff Millar (York University, Canada)
 
Le gouvernement des langues et la néolibéralisation de lacitoyenneté: Étude de cas comparative sur les politiques linguistiques et d’immigration.
 
Les politiques linguistiques dans le domaine de l’immigration et de la citoyenneté reflètent la relation entre le gouvernement des langues et autres modalités de gouvernement. Dans leurs affinités avec d’autres politiques économiques et sociales de caractère ‘post-Etat-providence’, ces politiques de langue (tests de connaissance de la langue et de citoyenneté, mesures d’intégration) sont articulées avec une modalité de gouvernement néolibéral de la société, y compris la citoyenneté. Ce papier présente les résultats d’une étude de cas comparative des politiques linguistiques canadiennes et britanniques, révélant les liens entre le gouvernement de langue dans le domaine de l’immigration et de la citoyenneté, et les stratégies néolibérales de concurrence dans l’économie du savoir globale, et les politiques ‘troisième voie’ pour le gouvernement de l’exclusion sociale. De cette manière, l’analyse démontre comment le ‘gouvernement de langue’ dans le domaine de l’immigration contribue à une néo-libéralisation de la citoyenneté, c’est à dire, la convergence des modèles de citoyenneté sur une redéfinition de la communauté civique comme champs d’action du citoyen actif et responsabilisé, type idéal du sujet néolibéral.

Language governance and the neo-liberalization of citizenship: A comparative case study of language in immigration policies
 
The domain of immigration policy is a prime site for examining the relation between language policies and modes of governance. Besides their gate-keeping function, language policies in relation to immigration, naturalization and citizenship reflect modes of governance dominant in other social and economic policy domains. In particular, the affinities between language testing and integration measures for immigrants and post-welfare state social and economic policies applied to domestic born populations reveal the connection between language governance and the broader neo-liberalization of modes of governance, including citizenship. This paper presents findings from a comparative case study of Canadian and British language policies in relation to immigration, naturalization and citizenship. In both cases, these policies have been shaped by neo-liberal reform projects: in Canada, by an economic project for increasing competitiveness and creating a knowledge-based economy; in Britain by a Third Way approach to the governance of social exclusion. More significantly, as part of a revaluation of citizenship, these practices of governance of immigration through language reflect a neo-liberalization of citizenship, in which distinct citizenship regimes are converging around a restructured civil society and civic community constituted as the field of action of an active, responsibilized economic agent, the ideal citizen/subject of neo-liberal governance.

Lontzi Amado Borthayre (Sciences Po Bordeaux)
 
De la contestation nationaliste à la gouvernance transfrontalière: les politiques de la langue au Pays Basque et la Catalogne
 
La construction collective de manière transfrontalière des politiques linguistiques de la langue,en Pays Basque et en Catalogne, montre combien les acteurs collectifs deviennent des acteurs essentiels à la mise en œuvre de politiques publiques contemporaines. Et ce, non seulement en les cadrant lors des luttes politiques et lors de leurs élaborations mais également en étant des acteurs essentiels à l’expertise et à la mise en œuvre, puisqu’ils en sont la cause et les bénéficiaires à part entière. Finalement, les réseaux d’action collectif transfrontalier en faveur de la langue vont se transformer, une fois la langue devenue enjeu et objectif de politique publique, en réseaux d’action publique local ouvrant ainsi un nouveau cycle d’action.

The collective action of public policy in favor of a language in a cross-border frame in the Basque Country and Catalonia   
 
The collective construction and across borders of language policies,in the Basque country and in Catalonia, shows how collective actors become key players in the implementation of contemporary public policy, not only framing politics and policy making but also being essentials in the expertise and implementation because they are the cause and the beneficiaries. Finally, policy networks based on language turn, once the language become issue and target of public policy, on local public networks opening a new cycle of action.


Participants

A. ALBAUGH Ericka ealbaugh@bowdoin.edu
BORTHAYRE Lontzi Amado lontzi@hotmail.com 
CARDINAL Linda linda.cardinal@uottawa.ca 
FOUROT Aude-Claire afourot@sfu.ca 
GARCIA Nuria nuria.garcia@sciences-po.org
GASPARD Helaina helaina.gaspard@uottawa.ca
GOHENEIX Alice alice.goheneix@sciences-po.org 
HARTEMANN Aline aline.hartemann@gmail.com
LÉGER Rémi rleger@sfu.ca 
MARIJNEN Anne a_marijnen@yahoo.it 
MÉVELLEC Anne mevellec@uottawa.ca 
MILLAR Jeff jmillar@yorku.ca 
SALOMONE Rosemary rosemary.salomone@stjohns.edu
SANDERS Hilary hilary.sanders@gmail.com
SARANGI Asha ashasarangi@gmail.com 
SAULIÈRE Jérôme jerome.sauliere@polytechnique.edu 
SONNTAG Selma selma.sonntag@humboldt.edu

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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