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Section Thématique 42

La « dépolitisation » : registres, processus et interprétations
The « depoliticization » : styles, processes and interpretations

Responsables

Fabien DESAGE (Université Lille 2/CERAPS, Université de Montréal) fabien.desage@gmail.com
Raphaëlle PARIZET (Université Lille 2, CERAPS) raphaelle.parizet@univ-lille2.fr
Manuel SCHOTTÉ (Université Lille 2, CERAPS) manuel.schotte@univ-lille2.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Il y a dix ans paraissait l’ouvrage collectif dirigé par Jacques Lagroye, appréhendant la notion de « politisation » à travers une multitude d’entrées empiriques et d’usages. Celle-ci y apparait autant centrale pour l’approche socio-historique du politique, que polyphonique et relativement peu stabilisée dans ses usages. J. Lagroye, dans sa propre contribution, définit la politisation comme un « processus de requalification des activités sociales les plus diverses, requalification qui résulte d’un accord pratique entre des agents sociaux enclins, pour de multiples raisons, à transgresser ou à remettre en cause la différenciation des espaces d’activité ». Si la politisation peut donc être considérée a minima comme un processus de décloisonnement, de « dépassement des limites », de transfiguration d’objets sociaux non naturellement considérés comme politiques, comment envisager et penser dès lors ce qui précède cet état et/ou ce qui s’y oppose ?  
 
Bien que la notion de « dépolitisation » soit très couramment utilisée à cette fin, tant dans les espaces profanes qu’académiques, elle renvoie à des phénomènes multiples, voire contradictoires : désidéologisation ; départisanisation ; technicisation et/ou accaparement par des professionnels d’un enjeu ; confinement des décisions dans des arènes non publiques ; déconflictualisation des assemblées ou d’enjeux sociaux ; évitement ou déni du débat et de la montée en généralité ; indifférence pour les enjeux a priori constitués comme politiques ; etc. Aussi, malgré (ou à cause de) ces usages variés, cette notion a rarement fait l’objet d’une réflexion spécifique, en France ou à l’étranger, autrement que sur un mode normatif. Tout se passe comme si la définition des processus de politisation suffisait à expliquer, en creux ou en négatif, la dépolitisation.
 
Cette section thématique vise à la fois à recenser les usages de ce terme par les chercheurs, à préciser les processus spécifiques auxquels ils renvoient et à évaluer les interprétations auxquelles les diagnostics de « dépolitisation » donnent lieu.  

On y entendra les communications de chercheurs travaillant sur des objets et des terrains variés, mais qui ont en commun d’avoir mobilisé la notion de dépolitisation de façon plus ou moins centrale : soit comme « constat » à expliquer (un comportement, une institution et/ou une politique publiques jugés « dépolitisés » ou dépolitisants), soit comme variable explicative d’autres phénomènes (le désengagement, les consensus inter-partisans, la non mise à l’agenda d’un problème public, etc.), soit enfin comme registre/catégorie du discours de certains acteurs sociaux.

Les notions de politisation et de politisation seront donc appréhendées non comme des pôles distincts et antagonistes, qui renverraient à deux ordres de réalité spécifiques ou successifs, mais plutôt comme des formes de labellisation concurrentes, souvent simultanées et entremêlées, résultant du travail de groupes d’acteurs, agissant dans des configurations et selon des socialisations qui favorisent la qualification politique ou son « évitement » (Eliasoph 2010). À l’instar de la politisation, la dépolitisation apparaît dès lors comme le produit d’une lutte de classement, plutôt que comme un état stabilisé d’un problème ou d’un enjeu, ou comme la simple manifestation d’une "absence du politique".
 
Ten years ago the collective work directed by Jacques Lagroye was published (Lagroye 2003), considering the concept of “politicization” through a multitude of empirical inputs. It appears as central to the socio-political history of politic but also polyphonic and relatively unstable in its uses. J. Lagroye defines depoliticization as process of “adapting the most diverse social activities, an adaptation that produces a practical agreement between social agents inclined, for a variety of reasons, to transgress or to challenge the differentiation of spheres of activity”.
 
If the “politicization” is therefore a minima a process of decompartmentalisation, of exceeding the boundaries, of the transfiguration of social objects naturally not regarded and considered as political, how considering and thinking its foregoing and/or its opposite ? Actually, this topic has received little direct scientific attention until now, despite the fact it is widely used, both in common language and in the scientific literature. Our aim is to tackle this issue, scrutinizing its different faces and confronting the “concept” to a wide range of topics or fields (local democracy, sport policies, indigenous relationships, cultural policies, civic life, etc.).
 
Firstly, the common opposition between “politicization” and “depoliticization” processes has to be questioned, assuming that the latter is not (only and necessarily) the opposite of the former. Precisely, we would like to think about types of “borders” (and therefore borders makers and borders guards) separating what can be considered as political and what can not. It may be more relevant to consider this relationship in terms of dynamics than of strict boundaries. Doing so, “politicization” and “depoliticization” appear as the result of a simultaneous work, wherein groups of players (some with an interest in framing an issue as political, others in preventing this process or in assigning distinct qualities) compete to define the meaning of (a) reality.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment A (27 rue Saint-Guillaume), salle A22


Programme

Axe 1 / La production politique de la dépolitisation

1. Les formes d’évitement du politique

Discutant : Jean-Gabriel Contamin (CERAPS, Lille 2)

2. Les registres experts de la dépolitisation ou l’expertise dépolitisée ?

Discutante : Emmanuel Henry (SAGE, Université de Strasbourg)

Axe 2 / Luttes de classement et usage des labels

3. La dépolitisation comme mode de légitimation

Discutant : Cécile Robert (sous réserve, TRIANGLE, IEP de Lyon)

4. Se prévaloir ou se défier du politique

Discutant : Nicolas Mariot (CURAPP, Université d'Amiens)


Résumés des contributions

Audrey Freyermuth (SAGE, Université de Strasbourg)

La dépolitisation: une forme de politisation prescrite par des configurations politiques spécifiques
 
Loin d'être déconnectées des affrontements politiques, la « dépolitisation » de l'action publique et sa « technicisation » sont le produit de la compétition politique. L'apparente dépolitisation d'une catégorie d'intervention publique constitue une forme de politisation au sens où sa mise en scène est prescrite par les configurations politiques, c'est-à-dire par les règles formelles et informelles qui structurent une arène politique et par l'état des concurrences entre les forces politiques en présence. Pour preuve, concernant les traitements municipaux de la délinquance d'abord, seules les configurations politiques ayant rendu possible l'alternance favorisent la constitution de la sécurité en catégorie administrative d'intervention municipale. L'appel à d'anciens policiers et le traitement individualisé des plaintes contribuent à la mise en scène d’une offre politique « neutralisée » et par conséquent à la construction de l’image d’un maire « au service de tous » exclusivement intéressé à la satisfaction des « usagers ». Ensuite, l’entre-soi communautaire des maires génère une déconflictualisation des questions culturelles. Les délégués communautaires développent des stratégies de dénégation et de désamorçage des conflits, si bien que la politisation de la culture dans l’espace intercommunal passe par une rhétorique de la neutralité dont « le territoire », référence consensualiste qui disqualifie tout dissensus, constitue la figure centrale.
 
The depoliticization: a kind of politicization in particular configurations

The « depoliticization » and the « technicization » of public policy result from the political compétition. The formal and informal rules of a political arena and the exchanges of political blows can order to show an apparent depoliticization. My demonstration is based on different sectors and different levels of public policies: the municipal treatment of security and the cultural intercommunality. Security is promoted as an administrative category of municipal intervention only in very volatile configurations which lead to a change in power. In this context, the hiring of former cops and the individualized treatment of grievances help to make the mayor's intervention look like « neutral » and « in the service of every resident ». The representatives of  intercommunality multiply strategies to neutralize clashes. Therefore the politicization of culture in the intercommunal arena is based on the rhetoric of consensus of which « territory » is a central figure.


Damien Boone (CERAPS, Université Lille 2)

« L'innocence politique des enfants » comme outil de dépolitisation. Quand des représentations de sens commun sont envisagées comme un postulat à l'action publique
 
Si les conseils municipaux d'enfants (CME) sont présentés par leurs promoteurs comme un moyen d'ouvrir le champ politique à ceux qui en étaient jusqu'alors exclus par l'âge, la dimension politique des CME est en pratique largement niée au motif que leurs membres, des enfants généralement âgés de 9 à 11 ans, seraient par nature imperméables à toute forme de politisation. Cette réhabilitation institutionnelle de ce que Percheron appelait « l'innocence politique des enfants » apparaît anachronique, la sociologie ayant montré il y a bien longtemps que la jeunesse était une réalité multiple et hétérogène, dont les représentations, idées et opinions politiques, pour peu qu'on adopte une méthodologie adéquate pour les déceler, apparaissent de façon précoce.
Cette communication analyse de quelles manières et selon quels intérêts divers acteurs (élus, employés municipaux, adultes encadrants, enseignants, parents d'élèves) concourent à la dépolitisation des CME. Les références à la nature supposée de « l'enfance » et de « l'enfant » semblent dispenser ces acteurs de recourir à toute autre forme d'argumentation : les enfants sont un argument en eux-mêmes. En retour, les rares tentatives de politisation des CME sont contraintes par la puissance de cet étiquetage qui fait passer pour naturelle une « innocence politique des enfants » aux fondements institutionnels, éminemment favorables à la majorité municipale en place.
Il apparaît que les CME ne porte pas eux-mêmes un caractère (a)politique, c'est le contexte de perception de ses entrepreneurs en (dé-)politisation qui, à une période donnée ou dans un lieu donné, les (dé)politise, soulignant ainsi toute la contingence de cette qualification.
 
« Chidren's innocence » as a depoliticized tool. When the common-sense representations are thought as public action premises.

If the Children's town council (CTC) are presented by their promoters as a method to open the political sphere to those who were excluded by age issues, the political dimension of CTC are in practice mainly ignored due to the fact that the members, children between the age of 9 and 11, are by nature impervious to any kind of politicization.
This institutional rehabilitation called by Percheron "Children's political innocence" seems anachronistic. As Sociology demonstrated a long time ago that youth was a mixed and numerous reality, of which representations, ideas and political opinions appears in a precocious manner, if the methodology is adapted to detect them.
This statement analyzes, by which manners and according to which interests, various actors (elected people, city hall employees, teachers, adult with authority, representative parents) take part in the CTC de-politicization.  The references to the supposed "child" and "childhood" nature seems to allow these actors to lack arguments: Children are themselves the argument. In return, the rare attempts to politicize these CTC are restrained by the power if this label that makes "the political innocence of children" a natural fact to the eyes of institutional foundations, eminently in favor for the municipal majority put in place.
It appears that if the CTC do not carry a(n) (a)political character, it is the contextual perception of the (de-)politicization promoters who, at a given time and place, (de-) politicize them, demonstrating the whole contingency of this label.

 
Claude Gilbert (PACTE, Politique et organisations, Institut d’Etudes politiques de Grenoble)

L’apolitisme préservé. A propos des crises sanitaires.

Bien que les crises survenues dans le domaine sanitaire semblent immédiatement avoir un caractère politique (interpellation des autorités,  remise en question de leur légitimité…), bien qu’elles aient des effets politiques (fragilisation des gouvernements affectés par les scandales), elles tendent à demeurer dans une zone apolitique avec une conversion incertaine des enjeux en termes politiciens.
Deux raisons peuvent être avancées : 1/ les acteurs mobilisés ne cherchent habituellement pas des soutiens politiques et s’efforcent plutôt de conserver à leurs luttes un caractère apolitique en accord avec des valeurs universelles (respect de l’intégrité physique, de la santé publique comme bien commun…) ; 2/ les acteurs politiques utilisent peu les opportunités liées aux crises et scandales sanitaires, comme si ces problèmes se situaient hors du jeu politique classique. ll n’en demeure pas que moins que la préservation d’une forme d’apolitisme lors des crises sanitaires demeure énigmatique.
La communication visera à rendre compte de la façon dont des chercheurs familiers des crises sanitaires se sont confrontés à cette question, quelles sont les éventuelles hypothèses faites à ce sujet. Elle visera également à déterminer ce qui s’est plus particulièrement joué lors de crises associées aux menaces de pandémie grippale.

Vincent-Arnaud Chappe (ISP-ENS Cachan)

Le droit dépolitise-t-il la lutte contre les discriminations ? Réflexions sur la portée (a)politique de l’instrument juridique.

L’adoption au début des années 2000 de mesures favorisant le contentieux pour lutter contre les discriminations a été analysée comme le signe d’une juridicisation du phénomène. Cette lecture assimile l’instrumentation juridique à une mise à l’écart des dimensions proprement politiques du problème public. L’enquête empirique permet de relativiser cette conclusion. Si l’adoption par les acteurs politiques du discours de l’effectivité juridique participe bien à la technisation des enjeux, l’observation des usages du droit par des acteurs collectifs – syndicats, associations, autorités administratives -  montre des formes plurielles et volontaires de débordement à des fins de montée en généralité et de politisation. Ces dernières empruntent des voies plus ou moins institutionnalisées selon les contraintes liées aux arènes dans lesquels les acteurs sont positionnés.
Ces pratiques de politisation restent néanmoins dépendantes de la maîtrise d’une grammaire juridique qui rend le travail de traduction politique incertain. Si les acteurs cherchent ainsi à politiser les affaires en les extrayant des arènes judiciaires, les logiques propres à ces dernières contraignent fortement ce processus de politisation. Le langage du droit fait peser à ce titre une menace de dépolitisation nécessitant des pratiques inventives de la part des acteurs qui tentent de la contrer.
 
Antidiscrimination law: a way to un-politicized the issue of discrimination?

In the beginning of the 2000’s the French Parliament adopted various measures to facilitate access to justice for victims of discrimination. This policy was analyzed as a way to un-politicize the public issue of discrimination. But the mobilization of antidiscrimination law by various collective actors – unions, voluntary associations, state agencies – is at odds with this analysis. The collective mobilization of law leads to effects and consequences beyond the judicialized case. Those effects depend on the strategy of the collective actors and their position in the public arena.
Those strategies can be descript as politicization attempts. But they are constrained by the legal norms and procedures and are very uncertain. The language of law and rights threatens the scope of collective legal actions and forces collective actors to stay inventive in their strategies.


Moritz Hunsmann (École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris et Albert-Ludwigs-Universität Freiburg, Allemagne)

« Dépolitisations » d’une épidémie au cœur du politique : la réponse au VIH/sida en Tanzanie entre récits causaux, triage et dépendance de l’aide
 
Le VIH/sida étant l’épidémie la plus politisée de l’histoire de la santé publique, prétendre analyser sa « dépolitisation » relève d’un paradoxe. Cette contribution est fondée sur une recherche de terrain réalisée entre 2007 et 2010, qui inclut notamment 92 entretiens approfondis avec des acteurs clés de la lutte contre le sida en Tanzanie. S’appuyant sur des exemples empiriques, elle met en lumière différentes facettes d’un processus de dépolitisation de l’épidémie elle-même et de la réponse à celle-ci : négation des responsabilités politiques dans la propagation du virus à travers des récits causaux centrés sur le comportement individuel ; déploiement d’une logique technique internationale qui conduit à un contournement des institutions représentatives nationales ; omission systématique du fait que toute politique de lutte contre le sida – en distinguant de fait ceux qui vivront et ceux qui mourront – implique des choix irréductiblement politiques, car basés sur une hiérarchisation de valeurs incommensurables et d’intérêts incompatibles. À un niveau théorique, cette contribution interrogera les conditions d’utilisation du concept de « dépolitisation » dans les sciences sociales du politique en montrant que l’emploi de ce concept dans une perspective émancipatrice suppose une conception essentialiste du politique.

The “depoliticizations” of an epidemic at the heart of the political: causal narratives, triage and aid dependency in Tanzanian AIDS control programmes

Claiming that the world’s most politicized epidemic is being depoliticized is obviously paradoxical. This contribution is based on 92 in-depth interviews with key AIDS policymakers that were conducted between 2007 and 2010 during fieldwork on the politics of AIDS control in Tanzania. Drawing on a series of empirical examples, it analyses the following aspects of a multi-faceted depoliticization of the Tanzanian epidemic and the response to it: the role of behaviour-centred causal narratives in the negation of political responsibilities in the spread of HIV; the bypassing of national representative government via international “technical” assistance; the systematic omission of the fact that the formulation of HIV-treatment and -prevention policies implies a prioritization of incommensurable values and incompatible interest, and that therefore it involves irreducibly political trade-offs. At a theoretical level, the contribution argues that using the concept of “depoliticization” in an emancipatory perspective implies an essentialist conception of the political.


Stéphanie Dechezelles (CHERPA - Institut d’Études Politiques d’Aix-en-Provence)

Le maire, l’esthète et l’éolienne. Dispositifs de sensibilisation et registres de dépolitisation d’élus locaux opposés à des projets de parcs éoliens (Aude et Ariège)
 
Depuis les années 1980, les pouvoirs publics en Europe et en France promeuvent les énergies renouvelables. Mais de nombreux projets éoliens dans les zones réputées les plus favorables ont été l’occasion de mobilisations importantes d’opposants. La plupart des travaux sur les oppositions contre des projets d’aménagement du territoire s’appuient sur l’idée que le ressort principal serait un « effet NIMBY ». Toutefois, ils se sont rarement attachés à aller au-delà et à comprendre les conditions de (im)possibilité sociales et politiques de tels registres discursifs de justification des acteurs mobilisés. L’analyse s’attachera plus particulièrement aux modalités évolutives selon lesquelles des entrepreneurs locaux de la cause anti-éolienne, notamment des élus municipaux ruraux, hybrident alternativement ou concomitamment registres politisés et dépolitisés. On verra notamment de quelle(s) façon(s) ils combinent répertoires politiques classiques (votes en conseil, lobbying…) et dispositifs relativement dépolitisés tels que des prescriptions émotionnelles sur des valeurs esthétiques et incommensurables de leur cadre de vie d’une part et formulation expertes visant à alerter des publics élargis des « dangers » d’un développement « incontrôlé » de l’éolien industriel en raison des « menaces » qu’ils sont susceptibles de faire peser sur l’environnement, le patrimoine et le développement local d’autre part. Ils s’agira ainsi de comprendre les combinaisons complexes des jeux de rôles alternant politisation et dépolitisation des enjeux.
 
The mayor, the esthete and the wind machine. Local elected representatives, awareness enhancements and depolitization repertoires against wind farms project (Aude and Ariège, France)

Since the 1980’s, European and French public authorities have promoted renewable energies. But lots of wind farms projects have been largely contested even in the most windy zones. Most of studies about struggles against regional planning consider that the main reason would be a « NIMBY effect ». However they rarely try to go further to understand the social and political conditions that make such kinds of justification discourses (im)possible. This analysis will pay a specific attention to the changing ways in which some local leaders of the anti-wind machines cause, more precisely the local rural representatives, alternatively or at the same time, cross politicized and depoliticized registers. How do they combine classical political repertoires (city councils votes, lobbying…) and relatively depoliticized devices as some emotional prescriptions about esthetical and measureless values concerning the living environment from the one hand, and expert discourses to alarm large publics about the “risks” of an uncontrolled development of industrial wind machines on the local environment, heritage and local development on the other. Thus the aim is to understand the complex role games arrangements which take it in turn politicization and depoliticization processes.


Annalisa Lendaro (CRÉVAL ENAP, Montréal / LEST-CNRS, Aix-en-Provence)

La dépolitisation de l’insertion professionnelle des jeunes immigrants. Sur la rhétorique de la « continuité des services » à Montréal

Depuis quelques années, l’ensemble des acteurs concernés par la conception, le financement, et la mise en œuvre des politiques d’insertion professionnelle semblent s’accorder sur une chose : l’objectif à viser est la « continuité des services », c’est à dire la complémentarité et la fluidité des programmes qui permettrait à l’individu, en fonction de l’évolution de ses besoins, de rentrer dans l’un ou dans l’autre, sans se retrouver dans un vide de droits. Dans un contexte de contraction budgétaire et de souci d’efficacité quantifiable, la rhétorique de la « continuité des services » est porteuse de valeurs largement consensuelles comme la lutte contre le gaspillage de l’argent public et la complémentarité des dispositifs. Le partenariat, notamment entre les organismes communautaires censés mettre en œuvre les mesures d’insertion, est présenté par les décideurs et les bailleurs de fonds (ministères, Emploi-Québec) comme la clé pour atteindre cette « rationalisation collaborative » de l’action publique dans le domaine de l’insertion professionnelle. Cette communication se propose de porter un éclairage sur les enjeux de la continuité des services, en comparant le point de vue des décideurs et celui des professionnels de l’insertion. A partir du cas de Montréal et d’une enquête qualitative par entretiens et observations, il s’agira d’approfondir la question de la dépolitisation de la continuité des services, en tant qu’enjeu technique et financier.

The depoliticization of the immigrant employment policies. The rhetoric of the continuity of services in Montreal.  

In the field of employment policies, Montreal policy makers have recently developed a “continuity of services” rhetoric that tries to promote the idea of complementarity between different social policies. The aim is to include and protect the beneficiary with a range of social measures that evolves in accordance with his/her needs, but also to rationalize the costs of these measures by reducing waste of time and financial investments, and by introducing a quantifiable evaluation process of their effects. This paper compares the logics of both the policy makers and the social workers, and tries to explain why this issue is mainly depolitized within the Montreal political scene.


Alice Mazeaud (CEJEP-Université de La Rochelle) et Magali Nonjon (LBNC-Université d’Avignon)

La dépolitisation, ressource politique et professionnelle des « professionnels de la participation » ?
 
Dans l'univers de la démocratie participative, les termes de politisation et de dépolitisation  servent notamment à caractériser, qualifier et in fine à classer les expériences participatives. Tout se passe comme si l'ingénierie participative objectivait dans ses propriétés sociales et dans ses activités l'existence même d'indicateurs gradués de politisation et de dépolitisation des politiques participatives.
A l'inverse, nos recherches, basées sur l'observation de ces « professionnels de la participation » en mouvement, attentives aux trajectoires personnelles et collectives, soulignent à quel point travailler sur l'ingénierie participative oblige à abandonner toute taxinomie descriptive de l'univers participatif reposant sur le caractère politisant ou dépolitisant de tel ou tel dispositif participatif. S'intéresser aux « professionnels de la participation » donne en effet d'une part la possibilité d'objectiver la porosité, les glissements constants de la politisation à la dépolitisation rendant caduque l'idée même d'un continuum. D'autre part, étudier ces « professionnels » en action démontre que les usages des notions de politisation et de dépolitisation constituent des ressources (savoir-faire, label) essentielles à l'existence même de ce groupe professionnel. In fine, dans cette communication, il ne s'agit pas de stabiliser les contours d'une définition scientifique de la dépolitisation  mais au contraire d'en saisir les définitions indigènes et toujours mouvantes dans les discours et les pratiques des professionnels de la participation.

Depoliticization : political and professional resources of “professionals of participation”?
 
In the world of participatory democracy, the notions of politicization and depoliticization are particularly used to characterize, describe and ultimately to classify participatory experiences. Everything happens as if the development of participatory engineering and its activities objectified the existence of graduated indicators of politicization and depoliticization in participatory policies. In contrast, our research, based on the observation of these "professionals of participation", focused on their personal and collective trajectories, highlights the need to abandon any descriptive taxonomy of participatory universe based on these indicators: politicizing or depoliticizing. On the one hand, analyzing these "professionals of participation" in action allows us to objectify the constant porosity between the process of politicization and depoliticization in the participatory experiences. This fact makes it obsolete the idea of ​​a continuum. On the other hand, studying these "professionals" shows that nowadays the use of the notions of "politicization and depoliticization" is an essential resource (expertise, label) for the existence of this professional group. Ultimately, in this paper, our aim is not to stabilize the contours of a scientific definition of politicization but rather to grasp the native definitions and always moving in the discourse and practices of participatory engineering.


Kevin Matz (SAGE UMR 7363, Université de Strasbourg) et Julien O'Miel (CERAPS UMR 8026, Université Lille 2)

Sociologie des acteurs non politiques face aux stratégies d'évitement : trajectoires biographiques, contraintes structurelles et frontières au politique
 
Les stratégies d'évitement du politique par les élus ont donné lieu à de nombreux travaux. Néanmoins, la place des acteurs non élus dans la concrétisation de ces stratégies d'évitement demeure un angle mort de la littérature. Aussi, notre communication entend s'intéresser à la réception par les fonctionnaires, consultants et experts de toutes sortes, des injonctions à la dépolitisation formulées par leurs élus de référence. A travers une comparaison de deux politiques publiques – la culture et la démocratie participative – mais également de deux échelons de gouvernement – la Région et l'agglomération – il s'agira de comprendre les réactions différenciées de ces acteurs non élus à la dépolitisation. Entre participation à la mise en scène de l'évitement et tentative de politisation de l'action publique, la gamme des réponses à l'évitement demeure extrêmement variée. En effet les matériaux ethnographiques dont nous disposons – discussions informelles, observations de réunions de travail – mais également les entretien semi-directifs réalisés montrent que la manière dont réagissent les acteurs non politiques à l'évitement dépend largement des configurations politico-administratives dans lesquelles ils sont pris mais également de leur trajectoire biographique. Au total, notre communication tente de poser les jalons d'une sociologie de la fabrique de l'évitement qui ne se confine pas aux seuls élus. Plus loin, cette communication interroge le rôle des acteurs non élus dans la fabrique du politique.
 
Sociologie des acteurs non politiques face aux stratégies d'évitement : trajectoires biographiques, contraintes structurelles et frontières au politique
 
Numerous essays about  “how can political questions be avoided by the elected representatives” have been written. Nevertheless, the importance of the non-elected actors in the realization of those strategies has never been assessed in literature. So, our communication intends to focus on the reaction of all sorts of bureaucrats, consultants and experts when they’re given the order of depoliticizing by elected people.
Thanks to a comparison between two public policies - culture and participative democracy - but also thanks to a comparison between two steps of the government - region and town - we’ll try to understand the different reactions in front of depoliticization. The range of the answers to the question of depoliticization keeps extremely various: from the participation in the performance of the avoidance strategy to the politicization attempt of the public action.
The ethnographic materials we’ve at our disposal  - informal discussions-remarks made during work meetings - but also interviews we’ve conducted, show that the reaction of the non political actors in front of the avoidance greatly depends on the politico-administrative system in which they evolve but also on the paths they’ve followed in their social background.


 Sahar Aurore SAEIDNIA (Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux, IRIS – EHESS)

Dépolitiser pour faire du politique : Les conseils de quartier en République Islamique d’Iran
 
En 1999 la municipalité de Téhéran crée les conseils de quartier. Ces 375 conseils élus au suffrage universel ont été définis dans les textes juridiques comme des institutions consultatives et apolitiques. Ce statut est d’ailleurs revendiqué par les conseillers qui rejettent le qualificatif politique et définissent leurs pratiques de « sociales et culturelles ». Cette dépolitisation est symptomatique du contexte autoritaire de la république iranienne où l’accès au politique est fortement contrôlé. Cependant l’analyse de l’expérience de ces conseils révèle que ces processus de dépolitisation ne signifient pas une fin ou une absence du politique mais une expression de ce dernier dans d’autres espaces et d’autres pratiques, moins visibles. Dans le contexte iranien c’est cet apolitisme qui permet à ces acteurs de discuter et d’agir sur de nombreux enjeux. En mettant à contribution les habitants dans la gestion de la ville, ces conseils transforment le rapport des citoyens aux institutions et plus largement au pouvoir. Cette communication souhaite exposer les caractères parfois « mêlés et simultanés » des processus de dépolitisation et de politisation à l’œuvre dans ces institutions. Il s’agira de montrer comment, en revendiquant leur statut bénévole et en plaçant le don au centre de leurs engagements, les conseillers de quartier brouillent et renouvellent les frontières traditionnelles entre le politique et l’apolitique.

Depoliticize to do politics: the neighborhood councils in the Islamic Republic of Iran

The Tehran municipality created the neighborhood councils in 1999. The 375 councils are elected by universal suffrage and defined as apolitical and consultative institutions. In the authoritarian Iranian regime where the access to politics is strongly controlled, the councilors claim their practices to be social and cultural, not political. However, the analysis of the neighborhood councils experience reveals that this apparent depoliticization must be clarified and put into perspective. By allowing inhabitants to participate in the municipal administration, these councils transform their relation to citizenship and power. Indeed depoliticization allows these actors to act and discuss many issues. This paper aims at underline the complex relation of politicization/ depoliticization processes we can observe in these institutions. It will show how the councilors, while mainly characterizing their engagement as volunteer and charity work, confuse and renew the traditional boundaries between political and apolitical.


Igor Martinache (CERAPS, Université de Lille 2)
 
« Ni neutres, ni orientés ». Les ambivalences du militantisme sportif : le cas du CSPTT (1959-1999)

Les activités physiques et sportives sont le terrain d'une « politique de l’apolitisme » (Defrance, 2000) par laquelle leurs organisateurs entendent les préserver à l'écart des conflits qui traversent le reste du monde social et en particulier le champ partisan. Certaines entreprises de politisation tentent pour autant de rompre cette prétendue « neutralité », avec des fortunes diverses, et non sans ambiguïtés particulières. Le cas du Club Sportif des PTT (CSPTT), créé par et pour des agents de l'administration des postes et télécommunications, fournit ainsi une bonne illustration de ces dernières. Qu'il s'agisse de revendiquer leur autonomie en même temps que la reconnaissance de la part de la hiérarchie, de s'appuyer sur le soutien logistique et moral nécessaire de la CGT tout en affirmant sa neutralité syndicale, ou encore de s'opposer terme à terme à l'association sportive déjà existante dans l'administration -l'ASPTT-, tout en déniant venir la concurrencer, ses animateurs ont été pris dans un faisceau de contradictions tout au long des quatre décennies qu'a duré l'expérience. Outre ce qu'elle révèle des enjeux du sport à l'entreprise, la mobilisation particulière qu'a constituée le CSPTT donne également à voir que, loin d'être exclusifs, les processus de « politisation » et « dépolitisation » peuvent s'entremêler dans une même action collective aux yeux de ses participants, du fait même de la polysémie constitutive de la notion de « politique ».

« Neither neutral, neither positioned ». The necessary ambiguity of mobilization in sport : the case of the CSPTT (1959-1999).

Physical and sport activities are surrounded by a strong myth of political neutrality. Their organizers indeed intend to keep them away from any of the conflicts that occur in the rest of society, and especially in the political field. Nevertheless, some mobilizations attempt to break this assumption of « neutrality », with more or less success but not without a specific ambiguity. The case of the Club Sportif des Postes, Télégraphes et Télécommunications (CSPTT), created by and for workers from this very administration, represents a claiming illustration of such an ambiguity. All along its 40 years of existence, its leaders kept on struggling into several contradictions, for instance claiming autonomy as well as recognition from their hierarchy, being materially and humanly supported by a specific trade union – the CGT- while asserting their independence towards labor organizations, or rejecting all the features presented by the official direction-supported sport association for the “PTT” administration workers (the ASPTT) while denying compete with it. This peculiar kind of  collective action does not only reveal what may be at stake in the organization of sport activities on workplaces, but also that process of “politization” and “depolitization” do not necessarily exclude one another but can mix together in the eyes of its participants, insofar as the very definition of what is politics or not is itself far from being stabilized in their mind.


Anne Bory (Clersé, Université Lille I), Olivier Baisnée (LASSP, IEP Toulouse) et Bérénice Crunel (LASSP, IEP Toulouse)
 
Politisation et dépolitisation au sein d’une association d’anciens salariés de l’industrie

Deux ans après la fin d’une lutte collective longue et très médiatisée contre la délocalisation d’une usine rurale du sud de la France, on questionnera l’évolution dans le temps du rôle joué par l’association de soutien des anciens ouvriers. Au cœur du conflit, elle apparait d’abord comme un lieu d’échange et de réflexion où, au contact de responsables syndicaux notamment, un certain nombre de salariés non-militants entreprennent l’élaboration et l’activation de schèmes politiques autour de la globalisation économique, de la place des ouvriers dans le système productif ou encore de l’action des responsables politiques nationaux. Juste après la fermeture, son local devient un lieu où perdure la sociabilité apparue autour des piquets de grève et où sont élaborées les actions permettant le maintien de la mobilisation. Cependant, avec l’émergence de nouvelles préoccupations (chercher un emploi, négocier une mutuelle collective, protéger les plus isolés), les activités de l’organisation et les interventions des anciens représentants syndicaux se sont déplacées vers l’action sociale. Les débats liés à cette cohabitation, entre prestation de service dédiée à la gestion des situations individuelles et vocation initiale de maintien d’un groupe combatif décidé à ne pas perdre tous ses droits, relèvent avant tout d’un conflit autour de l’attribution ou non d’une fonction politique à cette association.

Politicization and depoliticization within a nonprofit founded by ex-industry workers

This communication aims at analyzing the evolution of the roles played by a nonprofit organization founded by ex-industry workers, two years after the end of a long and highly mediatised collective mobilization against the closure of the rural plant that employed them in South France. During the mobilization, this organization first appeared as a place for discussion and thinking, where numerous workers built and mobilised political schemes about the economic globalization, blue collars’ position in the productive system and national political leaders’ activities. They did so, partly, thanks to their discussions with union leaders. Right after the closure, the organization’s local became a space to preserve the relationships and sociability built during the mobilization, and to organize the activities that maintained the mobilization despite the closure. However, new issues have emerged (looking for new jobs, negotiating a new mutual fund contract, protecting the most isolated ex-workers), and both the organization’s activities and the union leaders’ interventions have focused on social action. The debates existing about this cohabitation, between a service dedicated to managing individual social situations and the initial goal of maintaining alive the group fighting for its rights, mainly comes around the (non)-attribution of a political function to the organization.

Alexia Morvan (EXPERICE, Université Paris VIII, CRAPE, Université de Rennes 1/Sciences Po Rennes)

Le travail des frontières entre politique et non politique dans le champ de l’Education populaire

Les termes de « frontières du politique » (Arnaud et Guionnet, 2005) tentent de rendre compte de la souplesse de cette notion à travers un processus social permanent d’étiquetage des réalités sociales comme étant ou non « politiques ». La question de la dépolitisation est ici abordée dans le même champ, avec trois axes privilégiés de recherche. La première dimension sociohistorique éclaire le jeu des frontières des acteurs de l’Education populaire à l’épreuve de la construction des politiques publiques. La deuxième approche recense les usages de ce terme par les chercheurs universitaires et intellectuels organiques dans ou proches de ce champ depuis le milieu des années 1990. Enfin mon enquête ethnographique, menée de 2003 à 2006 à partir d’un dispositif de recherche-action, explore les luttes de classement (étude des discours) entre acteurs de l’éducation populaire contemporaine au début des années 2000 dans le travail de (dis)qualification politique. Je m’inspire du modèle de fabrication des Cités (Thévenot et Boltanski, 1991 ; Boltanski et Chiapello, 1999) pour rendre intelligible les conflits de valeurs entre ces différentes appréhensions de la dépolitisation et de la politisation. Sur quels thèmes, en faisant référence à quels clivages, et avec quels effets, ces éducateurs populaires mobilisent-ils la notion de dépolitisation et prennent-ils le risque de controverser ?

Crossing the frontiers of the politics in the field of Popular Education

The formula « frontiers of the politics » (Arnaud et Guionnet, 2005) tries to render the flexibility of this idea through the permanent process of labelling social activities as being political or not. My article examines the various aspects of depoliticization related to the field of popular education through three main research areas. Firstly using a socio-historical approach I question the game on the political borders played in France by the collective actors of popular education confronted by the implementation of public policies. Secondly I aim at listing the different uses of   depoliticization by academic researchers and organic intellectuals from or close to this field since the middle of the nineties. Thridly I report on my ethnographical investigation out of a research action (2003-2006) which emerged from a group of twenty popular educators in 2003 in Brittany on this issue: how popular educators contribute to political education. The normative issues on what was political or not were salient: participants had opposed views on the diagnosis and were in competition to control the borders of the politics. I borrowed the concept of ‘greatness’ and ‘justification’ (see Boltanski and Thevenot, 1991; Boltanski and Chiapello, 1999) to observe these border disputes, the different ideologies in the speeches depending on the source of indignation and the effects of this activity of labelling.


Layla Baamara (CHERPA – Sciences Po Aix)
 
Quand les protestataires s’autolimitent. Éléments pour la compréhension d’une mobilisation « apolitique » à partir du cas du mouvement étudiant de 2011 en Algérie

Malgré des tentatives d’action unitaire réclamant la « chute du régime », les principales protestations observées en Algérie en 2011 demeurent sectorielles. Comment expliquer cette sectorisation persistante des mobilisations et leur caractère apparemment « apolitique » ? Au-delà de la question de l'intériorisation d'un langage normalisé lié à des logiques de négociation, d'échange de rétributions, certes particulièrement prégnantes en situation autoritaire (Vairel & Zaki, 2011), l’immersion sur le terrain incite s’intéresser davantage aux logiques internes de l’action collective protestataire. À travers le cas des mobilisations étudiantes, nous proposons de montrer comment des processus d’autolimitation flous et contingents (Dobry, 1988) imprègnent les logiques et les dynamiques d’une protestation de type sectoriel. L’évitement du politique (Eliasoph, 1998) qui caractérise les propos des acteurs résulte, en réalité, d'un travail de légitimation de la mobilisation qui implique d'une part, d'anticiper le tolérable, et d'autre part, de se différencier d’autres acteurs de la scène protestataire. Cela dit, les frontières du revendiquable et du faisable ne sont pas figées ; au contraire, elles se déplacent synchroniquement – au gré des luttes entre acteurs – et dans le temps – au gré des mobilisations (Bayart, 1985 :367).
 
When Protesters Restrain Themselves. Elements for Understanding an « Apolitical » Mobilization Based on the 2011 Student Movement in Algeria

Despite the attempts at unified action calling for the « fall of the régime, » the main protests witnessed in Algeria in 2011 remained sectorial.  How can we explain this persistent division in mobilizations and their apparently « apolitical » character? Beyond the question of the interiorization of a normalized language tied to logics of negotiation, the exchange of remunerations, which are particularly significant in authoritarian settings (Vairel & Zaki, 2011), immersion on fieldwork prompts to notice the internal logics of the collective action.  Through the case of student mobilizations, we will show how the fluid and contingent process of restraint (Dobry, 1988) pervade the logics and dynamics of a sectorial protest. The political avoidance (Eliasoph, 1998) that characterizes the actors’ speech results, in fact, from a work to legitimize the mobilization that implies anticipating what is tolerable, on the one hand, and differentiating themselves from other actors engaged in protest, on the other. That said, the borders of that which is claimable and that which is doable are not fixed; on the contrary, they move synchronically – according to struggles between actors – and in time – on the basis of mobilizations (Bayart, 1985: 367).


Participants

BAAMARA Layla layla.baamara@gmail.com
BAISNÉE Olivier obaisnee@club-internet.fr
BOONE Damien damien.boone@yahoo.fr
BORY Anne anne_bory@yahoo.fr
CHAPPE Vincent-Arnaud vincent.chappe@gmail.com
CONTAMIN Jean-Gabriel jgcontamin@noos.fr
CRUNEL Bérénice berenice.crunel@gmail.com
DECHEZELLES Stéphanie stephanie.dechezelles@sciencespo-aix.fr
DESAGE Fabien fabien.desage@univ-lille2.fr
FREYERMUTH Audrey audrey.freyermuth@hotmail.fr
GILBERT Claude claude.gilbert@msh-alpes.fr
HENRY Emmanuel emmanuel.henry@misha.fr
HUNSMANN Moritz moritz.hunsmann@ehess.fr
LENDARO Analisa annalisa.lendaro@univ-amu.fr
MARIOT Nicolas nicolas.mariot@ens.fr
MARTINACHE Igor igor.martinache@univ-lille2.fr
MATZ Kevin kevin.matz@misha.fr
MAZEAUD Alice alicemazeaud@yahoo.fr
MORVAN Alexia alexia.morvan@wanadoo.fr
NONJON Magali mnonjon@yahoo.fr
O'MIEL Julien julien.omiel@gmail.com
PARIZET Raphaëlle raphaelle.parizet@univ-lille2.fr
ROBERT Cécile cecilerobert2@yahoo.com
SAEIDNIA SAHAR Aurore saharsaeidnia@hotmail.com
SCHOTTÉ Manuel manuel.schotte@univ-lille2.fr

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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