Accueil

Inscriptions

Programme

Sessions
(CP, ST, MPP, MTED)

Evénements

Index

Partenaires

Infos pratiques
(accès, transports, hébergement)

Contacts

Congrès organisé en partenariat avec

Section Thématique 43

Une échelle parmi d’autres ? La fabrique européenne des politiques de réconciliation
A policy level among others? The making of European reconciliation policies

Responsables

Laure NEUMAYER (CESSP, Paris 1) laure.neumayer@univ-paris1.fr
Cécile JOUHANNEAU (CERI, IEP de Paris & ISP, Paris Ouest) jouhanneau.c@gmail.com

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

La fin du communisme et la réévaluation des histoires nationales dans les pays postsocialistes, ainsi que la réouverture de certains dossiers historiques restés clos pendant la guerre froide, ont suscité une résurgence des questions mémorielles dans de nombreuses sociétés européennes depuis les années 1990. Dans le champ scientifique, une vaste littérature s’est intéressée à la production de « politiques de réconciliation », au sens de dispositifs censés permettre la coexistence entre anciens adversaires après un conflit armé ou un changement de régime. Initialement centrés sur les politiques publiques nationales, ces travaux ont été complétés par une approche sociologique des relations internationales qui a déplacé la focale vers les arènes internationales et transnationales afin d’analyser la fabrication et la diffusion de « méthodes » et de « techniques » toujours plus standardisées de production de la réconciliation. Parallèlement, un pan entier des études européennes s’est penché sur « l’européanisation des politiques publiques », en analysant les interactions entre les structures politiques des Etats membres de l’UE et le système décisionnel européen. Si elle n’a pas toujours échappé au risque de concept stretching, l’approche par l’européanisation a produit un tableau assez complet des dynamiques à l’œuvre dans le rapprochement tendanciel des politiques publiques en Europe, tout en pointant les divergences persistantes des structures politiques nationales en raison de réappropriations locales diversifiées des injonctions communautaires.
Or les études sur l’européanisation ont longtemps négligé les politiques de gestion du passé, bien que le traitement de l’histoire par les instances européennes ait été profondément modifié par la fin de la guerre froide. Il ne s’agit plus seulement pour celles-ci de mettre en avant une histoire et des valeurs partagées, mais aussi de répondre à des demandes de reconnaissance d’histoires douloureuses. L’Union européenne, le Conseil de l’Europe et l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe sont devenus des caisses de résonance, des acteurs de médiation, voire des agents de sanction dans les luttes mémorielles, comme en attestent leurs interventions variées dans des conflits d’interprétation du passé (médiations politico-diplomatiques dans des querelles bilatérales, condamnation solennelle des « crimes des régimes non démocratiques », constitution d’un « acquis communautaire mémoriel » dans la politique d’élargissement…).
Cette section thématique se donne pour objectif de réexaminer les politiques de réconciliation en Europe en dépassant le cloisonnement actuel entre ces deux traditions d’étude. Il s’agit d’adopter une conception inclusive de la réconciliation pour englober non seulement les sorties de conflit mais aussi les mesures mémorielles prises au niveau européen afin de « réconcilier les histoires nationales », et de centrer la réflexion sur les logiques de constitution d’un espace social transnational européen spécifique, qui repose sur des multipositionnements et des trajectoires professionnelles internationalisées. Ce double parti pris permettra de saisir ce qui est spécifique aux dynamiques d’européanisation par rapport aux logiques d’internationalisation mises en lumière par la littérature existante, et d’examiner en retour dans quelle mesure l’étude de ce nouveau secteur d’action européen peut enrichir l’approche par l’européanisation.
Deux questionnements transversaux structureront cette section thématique sur les politiques européennes de réconciliation : l’articulation entre européanisation et internationalisation, d’une part ; la production de politiques publiques dans des formes « molles » de gouvernance européenne, d’autre part. Pour explorer l’articulation entre européanisation et internationalisation, cette section thématique explorera les façons dont les organisations européennes (UE, COE, OSCE) contribuent à la consolidation de « modèles européens de gestion du passé », mais aussi de sites d’intervention différents de ceux des agences de l’ONU ou des ONG plus fréquemment prises pour objet. Plusieurs contributions se demanderont si les dispositifs européens font l’objet de réappropriations locales spécifiques, et si l’échelle européenne occupe une place singulière dans les processus d’autonomisation relative des professionnels internationaux de la réconciliation. En outre, cette section thématique espère contribuer à l’étude de la production des politiques publiques dans des formes « molles » de gouvernance européenne en montrant en quoi les investissements d’acteurs politiques et sociaux qui cherchent à inscrire un nouveau champ de compétence dans l’espace institutionnel de l’UE, ainsi que les pratiques des fonctionnaires et des experts qui prennent en charge ces demandes, éclairent les dynamiques d’institutionnalisation de secteurs de politique publique dont l’intégration ne repose pas sur une contrainte juridique. Dans quelle mesure permettent-ils de « dénaturaliser » l’européanisation, en replaçant ces dynamiques européennes dans des temporalités plus larges et des contextes localisés ?
 
The salience of so-called ‘mnemonic’ issues has increased in many European societies since the 1990s. In the scientific field, a whole stream of scholarship has been centered on ‘reconciliation policies’, understood a set of tools and methods aiming at facilitating coexistence between former adversaries after a violent conflict or a regime change. In addition to studies focused on national-level policy making, a more recent sociological approach to international relations has shed light on the transnational and international arenas where these standardized techniques of reconciliation are being crafted and implemented. Simultaneously, a dynamic sub-field of European studies has analyzed the interactions between member states’ political structures and the European policy-making system, in order to understand the logics at work in the ‘Europeanization of public policies’. Although it faces many pitfalls and sometimes risks conceptual stretching, the study of Europeanization has produced a comprehensive overview of the gradual convergence of public policies in Europe – while stressing that domestic political structures retain their specific national characteristics, which account for somewhat diversified answers to EU requests.         
The study of Europeanization has for a long time overlooked past-related policies, although the end of the Cold War dramatically changed the way European arenas deal with history. As a result of the numerous demands for recognition of wounded histories, these institutions go beyond the mere ritual celebration of the ‘common history and shared values’ of European nations. The European Union, the Council of Europe and the OSCE have become sounding boards, mediators, and even arbitrators in mnemonic fights.
This panel aims to re-examine reconciliation policies in Europe in order to bridge the current gap between Europeanization studies and transnational analysis of reconciliation policies. Our objective is to investigate the making of a specific transnational social space in Europe, devoted to ‘reconciliation policies’ devised by internationalized professionals situated at the intersection of several national and social (legal, academic, bureaucratic, activist…) spaces. What is specific to Europeanization, compared with the process of internationalization that has been extensively analyzed by transnational studies? To what extent can this new field of European-level public policy broaden our understanding of Europeanization?
 

Bibliographie

Cohen, Antonin (2008). « Transnational Statecraft: Legal Entrepreneurs, the European Field of Power, and the Genesis of the European Constitution », in Petersen, Hanne et al., dir. Paradoxes of European Legal Integration, Aldershot, Ashgate, p. 111-127.
Coles, Kimberley (2007). « Ambivalent Builders: Europeanization, the Production of Difference, and Internationals in Bosnia-Herzegovina », in Bougarel, Xavier ; Helms, Elissa et Duijzings, Ger, dir. The new Bosnian mosaic. Identities, memories and moral claims in a post-war society, Aldershot, Ashgate, p. 255-272.
Delcourt, Barbara ; Martinelli, Marta et Klimis, Emmanuel, dir. (2008). L’Union européenne et la gestion de crises, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles / Institut d’études européennes.
Dezalay, Sara (2008). « Des droits de l’homme au marché du développement. Note de recherche sur le champ faible de la gestion de conflits armés », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n° 174, p. 70-79.
Dezalay, Yves et Madsen, Mikael (2006). « La construction européenne au carrefour du national et de l’international », in Cohen, Antonin ; Lacroix, Bernard et Riutort, Philippe, dir. Les formes de l’activité politique. Eléments d'analyse sociologique, du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, PUF, p. 277-296.
Georgakakis, Didier, dir. (2002). Les Métiers de l'Europe politique : acteurs et professionnalisations de l'Union européenne, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg.
Lefranc, Sandrine, dir. (2006). Après le conflit, la réconciliation ? Paris, Michel Houdiard.
(2008). « Du droit à la paix. La circulation des techniques internationales de pacification par le bas », Actes de la recherche en sciences sociales, n°174, p. 48-67.
Madsen, Mikael (2010). La genèse de l’Europe des droits de l’homme – enjeux juridiques et stratégies d’Etats (France, Grande Bretagne et pays scandinaves, 1945-1970), Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg.
Mégie, Antoine (2011). « L’européanisation au prisme des acteurs transnationaux : entre circulations sociales et cognitives ». Congrès de l’AFSP - ST 46 : L’européanisation et ses coins d’ombre : Vers une normalisation des études européennes ?, Strasbourg.
Mink, Georges et Neumayer, Laure, dir. (2007). L’Europe et ses passés douloureux. Paris, La Découverte.
(2012). History, Memory and Politics in Central and Eastern Europe. Basingstoke, Palgrave MacMillan.
Mink, Georges et Bonnard, Pascal, dir. (2010). Le passé au présent: gisements mémoriels et politiques publiques en Europe centrale et orientale. Paris, Michel Houdiard.
Müller, Jan-Werner, dir. (2002). Memory and power in post-war Europe – Studies in the presence of the past, Cambridge, Cambridge University Press.
Ragaru, Nadège (2007). « L’opération Althea en Bosnie-Herzégovine et la gestion européenne du ‘post-conflit’ ». Etudes du CERI, n°139.
Stråth, Bo et Pakier, Małgorzata, dir. (2010). A European memory? Contested histories and politics of remembrance, New York, Berghahn Books.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 1 : 9 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment A (27 rue Saint-Guillaume), amphi Leroy Beaulieu


Programme

Axe 1 / La fabrique de politiques européennes de réconciliation

Présidente de séance : Isabelle Delpla (Université Montpellier III, Triangle)

Discutant : Charles Tenenbaum (IEP de Lille, CERAPS)

Discutante : Nadège Ragaru (CERI)

Axe 2 / Réappropriations locales des normes européennes

Président de séance : Georges Mink (ISP)

Discutant : Mathias Delori (IEP de Bordeaux, Centre Emile Durkheim)

Discutante : Elsa Tulmets (CERI)


Résumés des contributions

Nathalie Duclos (Université de Tours, ISP)

L’OSCE au Kosovo, promotrice d’une politique de réconciliation autonome ?

La communication s'interrogera sur le rôle de l'OSCE au Kosovo, dans le cadre de la mission de paix instaurée par la résolution 1244 de l’ONU de 1999 pour se demander dans quelle mesure sa politique de réconciliation est autonome par rapport aux autres organisations internationales présentes au Kosovo (ONU, UE, HCR).
L'OSCE a eu un rôle important au Kosovo puisqu'elle a été en charge de la mise en place d'une nouvelle police multiethnique (KPS). Toutefois, son action a été entravée par l'intervention d'autres organisations sur ce dossier, conduisant notamment à l'intégration d'ex-combattants dans le KPS, ce qui a limité considérablement le recrutement de policiers auprès de la communauté serbe.
Aussi peut-on dire que l’OSCE est au Kosovo une institution faible dont l’action est « brouillée » par les autres organisations.

Is OSCE promoting an autonomous policy of reconciliation in Kosovo?

The communication deal with OSCE's role in Kosovo since 1999, where the organization tries to promote a policy of reconciliation. OSCE was in charge of the constitution of a new multiethnic police service (KPS). Nevertheless, its action has been hindered by the UNMIK's decision to recruit former combatants in the KPS, decision that provoked a reluctance of Serbian people to become policemen. In sum, we can consider that OSCE in Kosovo is a weak institution, which action is blurred by other organizations.

Romuald Coussot (Université de Strasbourg, SAGE)

L'Union européenne et la fabrique des politiques de réconciliation en Bosnie-Herzégovine

Si en 1995 les Accords de Dayton ont mis fin aux violences en Bosnie-Herzégovine, ils n’ont pas apporté la paix pour autant, mais ont figé une situation de « guerre sans guerre » avec pour principe la séparation des belligérants. La Constitution temporaire qui en découle a mis en place un système institutionnel qui repose sur le principe de la séparation ethnique. Près de 20 ans après, cette architecture institutionnelle est toujours en place et a installé dans le paysage politique bosnien des logiques permanentes d’affrontements politiques entre les communautés.
Les acteurs de l’UE en charge du dossier tentent d’inverser ce processus d’ethnicisation de la société. Cependant, ils se retrouvent contraints de lutter pour maintenir une forme de statu quo, quand bien même cette architecture institutionnelle issue des Accords de Dayton est loin d’être satisfaisante, voire à l’origine de la situation problématique. Dans cette optique de réconciliation entre les communautés en Bosnie-Herzégovine, nous analyserons comment se construit la politique de « multiethnicité » au sein des institutions européennes. Sur la base d’entretiens semi-directifs au sein des Institutions européennes, nous tenterons de « rentrer dans la boîte noire » de la fabrication de cette politique de multiethnicité. Nous verrons que ces pratiques et discours révèlent en réalité une absence de stratégie de la part de l’UE et que la politique menée s’appuie davantage sur des discours symboliques que sur de véritables actions. Pire encore, une sorte de « jeux de faux-semblants » s’est figé, à l’image de l’état de désarroi qui règne face à une situation bloquée.

The European Union and the elaboration of reconciliation policies in Bosnia and Herzegovina

If in 1995 the Dayton Peace Agreement ended the violence going on in Bosnia and Herzegovina, not only did it not bring peace back, but  having  for principle  the combatants’ separation, it has created a permanent state of ”war without a war”. The resulting temporary Constitution has set up an institutional system based on the principle of ethnic segregation. Nearly twenty years later, this institutional structure is still there and is the cause of logical permanent political fights between the communities of Bosnia.
The EU actors in charge of this issue are trying to reverse the ethnic citizenship process. However, they have to struggle to maintain a form of status quo, although this institutional structure, resulting from the Dayton Peace Agreement is far from being satisfactory and is also the cause of the problem.  In the perspective of community reconciliation in Bosnia and Herzegovina we will analyse the making of the multi ethnic policies within the European Institutions. Starting from semi-structured interviews within the European institutions, we will try to “get inside” the black box of the political process” designing this multi ethnic policy. We will see that the policy enforced is based more on symbolic speeches than on real actions. What is much worse is that some kind of make-believe games have been set, reflecting the disarray prevailing in front of a situation without any issue.


Anne Bazin (IEP Lille, CERAPS), Sara Dezalay (Université de Toronto, Munk School for Global Affairs), Charles Tenenbaum (Sciences Po Lille, CERAPS, Lille 2)

De la gestion de crise au marché européen de la pacification

Cette contribution présente les premiers résultats d’une enquête menée dans le cadre du projet « Irene – programme de recherche sur les professionnels internationaux de la paix » (ISP - Nanterre) sur l’espace européen de la pacification. L’investissement, relativement récent (années 1990-2000), de l’Union européenne dans ce domaine s’est matérialisé par la création d’instruments (par ex. Instrument de Stabilité) et de catégories « européennes » - celle de la « crise » ou « crisis management » - qui ont renouvelé la division des rôles entre Piliers et aménagé une sphère de compétence institutionnelle sur les « crises » au sein même de la Commission européenne à mi-chemin entre l’humanitaire et le développement. En s’appuyant notamment sur des réseaux d’organisations non gouvernementales (ONG) spécialisées dans la prévention et résolution de conflits, cet investissement de la Commission européenne dans la « gestion de crise » a en retour favorisé la genèse d’un espace européen de gestion de crise, et au-delà, de prévention, médiation et construction de la paix. Favorisant une entrée par l’institution, celle du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) mis en place par le Traité de Lisbonne (2007), cette enquête s’intéresse à la structuration de cet espace en étudiant le processus d’institutionnalisation et de professionnalisation d’une expertise et de compétences dédiées à la pacification internationale au sein et autour du SEAE. Cette recherche s’articule autour de trois grandes interrogations :
1) La place de la « gestion de crise » au sein du SEAE : Quelle continuité avec la période précédente, en terme de appréhension/définition, d’acteurs ? Comment est pensée/élaborée la nouvelle (?) approche européenne de la médiation/gestion des conflits extérieurs ? Quelles ONG/experts interviennent pour « conseiller » ? Comment est construite l’identité / la légitimité de l’UE dans ce secteur ?
2) Dans quelle mesure peut-on parler d’un processus de professionnalisation au sein, et autour, des institutions de l’UE ? Formation des fonctionnaires, institutionnalisation, définition/identification/reconnaissance de compétences spécifiques.
3) Quels sont les instruments financiers mis en œuvre ? Quels en sont les bénéficiaires ? Quels sont les choix opérés par l’UE dans le financement de projets ? Quels sont les acteurs impliqués ? Comment contribuent-ils à façonner l’approche européenne de la médiation/gestion des conflits ?

From crisis management to a European market of international pacification

This contribution presents the first results of empirical research conducted in the framework of the project “Irene – research program on international peace professionals” (ISP-Nanterre), on the European space of pacification. The relatively recent investment (1990s-2000s) of the European Union in this domain was materialized by the creation of instruments (for ex. Stability instrument) and “European” categories – that of “crisis” and “crisis management” – that have renewed the division of labour between Pillars and opened of sphere of institutional competency for the European Commission midway between humanitarian and development activities. Relying in great part on networks of specialized non-governmental organizations (NGOs), this investment of the European Commission in turn has accompanied the genesis of a European space of crisis management, and beyond for prevention, mediation and peace-building activities. Favouring an institutional entry-point, through the European External Action Service (EEAS) set up by the Lisbon Treaty (2007), this research focuses on the structuration of this space, by studying the process of institutionalization and professionalization of an expertise and competencies dedicated to international pacification within and around the EEAS. It is articulated around three main interrogations:
“Crisis management” within the EEAS: What are the continuities with the previous phase (divisions of labour/definitions used)? How is this new (?) approach on mediation/crisis management defined? Which NGOs/experts intervene to provide expertise? How is the legitimacy of the EU in this sector built?
Is there a professionalization process at play within and around EU institutions? Formation of EU staff, institutionalization, definition/identification/recognition of specific areas of expertise?
What are the financial instruments used? Who are their beneficiaries? What are the choices operated by the EU for the funding of projects? What actors (NGOs?) are involved? What role do they play in building this European approach for the mediation/management of crises?


Elisabeth Claverie (ISP/CNRS)

La correspondance entre le TPIY et l'ONU, vingt ans d'évaluations des politiques de réconciliations en ex-Yougoslavie

Les juridictions pénales internationales - la Cour Pénale Internationale et les tribunaux ad hoc, TPIY ou TPIR - envoient chaque année un rapport d’activité à l’ONU. Nous partirons de cette correspondance pour tenter d’éclaircir et d’analyser les rapports entre ces deux institutions, s’agissant de la tentative de mise en forme, dans ce cadre, des types de justifications quant à la « politique des poursuites » des procureurs, en tant que celles-ci seraient défendues au nom de la  « Communauté internationale ».  
 
Mladen Ostojić (Queen Mary, University of London)

 Conditionnalité européenne et politiques de coopération de la Serbie avec le TPIY (2000-2011)

L'Union européenne a joué un rôle clé dans le processus de justice transitionnelle dans les Balkans en permettant au Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) de traduire les auteurs de crimes de guerre et crimes contre l'humanité en justice. Bien qu'il ait été créé comme un mécanisme obligatoire par le Conseil de sécurité des Nations Unies, le TPIY dépend de la bonne volonté des États pour appréhender les accusés. En l'absence de volonté politique pour coopérer avec le TPIY en Serbie et en Croatie, le Tribunal s'est appuyé sur les États occidentaux et les organisations internationales pour inciter les autorités Serbes et Croates à arrêter et transférer les inculpés à la Haye. Cet article se concentre sur le cas de la Serbie afin d’examiner l'impact des politiques de conditionnalité déployés par les États-Unis et, en particulier, l'UE pour inciter les autorités Serbes à coopérer avec le TPIY. J’affirme que, bien qu’elles aient été indispensables pour mettre en vigueur la coopération avec le TPIY en Serbie, ces politiques ont involontairement entravé la démocratisation et la justice transitionnelle en sapant la stabilité politique. J'affirme aussi que l'arrestation et la remise des derniers inculpés au TPIY est avant tout le résultat de la consolidation démocratique, plutôt que de l'adoption de normes et de principes européens. Le cas serbe démontre ainsi comment le succès des politiques de conditionnalité de l'UE et le processus d’européanisation sont conditionnés par les dynamiques politiques locales.

EU Conditionality and ICTY Cooperation in Serbia 2000-2011

The European Union has played a key role in enabling the International Criminal Tribunal for the former Yugoslavia (ICTY) to bring perpetrators of war crimes and crimes against humanity to justice. Although it was created as a mandatory mechanism by the United Nations Security Council, the ICTY depended on the goodwill of target states for apprehending indictees. In the absence of political will to cooperate with the ICTY in Serbia and Croatia, the Tribunal relied on powerful states and international organisations to enforce cooperation. This paper focuses on the case of Serbia to examine the impact of the policies of conditionality deployed by the US and, in particular, the EU in order to enforce ICTY cooperation in post-Milosevic Serbia. I argue that, while essential for enforcing ICTY cooperation, these policies unintentionally hindered democratization and transitional justice in Serbia by undermining political stability. I also contend that, rather than reflecting the adoption of European norms and principles, the arrest and handover of the last ICTY indictees essentially came as a result of democratic consolidation. The Serbian case thus demonstrates how the success of EU conditionality policies and Europeanization are conditioned by local political dynamics.

Magali Bessone (Université de Rennes 1)

La réconciliation par l’histoire en Bosnie-Herzégovine : un modèle européen pour un ‘sujet national’ ?

C’est devenu un lieu commun de la littérature sur la justice transitionnelle : la réforme des systèmes d’éducation, et tout particulièrement de l’enseignement de l’histoire, est un moyen indispensable pour atteindre les objectifs élargis de la réconciliation (M. Minow 1998, E. Cole 2007, Freedman et al. 2008). La représentation, l’interprétation et la transmission du passé, invoquées au nom du « plus jamais ça », font partie de l’effort de formation des citoyens : l’histoire enseignée, à la fois institutrice et reflet des représentations sociales partagées sur l’identité collective d’une nation, doit contribuer à consolider la paix et à justifier les processus de justice distributive.
En me centrant ici sur le cas de la Bosnie-Herzégovine, et en me plaçant du côté des discours sur l’histoire plutôt que du côté des pratiques de l’enseignement, je voudrais mettre l’accent sur l’ambiguïté conceptuelle et politique qui est au cœur de cette réévaluation du passé national par des instances internationales de réconciliation. Les institutions européennes qui se sont chargées de réécrire l’histoire de la Bosnie dans les manuels scolaires l’ont fait avec un modèle multi-perspectiviste et critique, hérité notamment de l’histoire de la réconciliation franco-allemande, peu adapté à la réalité institutionnelle de la Bosnie, échouant ainsi à produire un récit national commun.

Reconciliation through History in Bosnia-Herzegovina: a European model for a ‘national subject’?

It is now a commonplace of transitional justice: education reform, particularly regarding history teaching, is considered a key element to reach the ultimate objectives of reconciliation (M. Minow 1998, E. Cole 2007, Freedman et al. 2008). Representing, interpreting and transmitting the past, in the name of “never again”, are indispensable parts of a citizen’s proper education. History taught in school, both as tutor and reflection of shared social representations about the nation’s collective identity, must contribute to consolidate peace and justify redistribution procedures.
I will focus here on the case of Bosnia-Herzegovina and on discourses about, rather than on practices of, history teaching. I would like to throw light on the conceptual and political ambiguity that lies at the core of the rewriting of the national past by international bodies of experts in reconciliation. European institutions who worked on history textbooks in Bosnia-Herzegovina had a multi-perspectivist and critical model in mind, partly inherited from French-German reconciliation processes, which was poorly adapted to the institutional reality of B-H which they also had contributed to create. Unsurprisingly, such a model failed to produce a shared national narrative.

Emmanuelle Hebert (Collège d’Europe, Bruges)

Pologne-Russie : une nouvelle réconciliation européenne ?

Katyn, l’occupation du Kremlin par les Polonais en 1610 sont autant d’exemples d’événements d’un passé conflictuel entre la Pologne et la Russie. Les deux Etats ont pourtant décidé de collaborer et d’établir un « groupe sur les questions difficiles » en 2008. Cette nouvelle coopération a lieu quand la Pologne est membre de l’Union européenne et tente de s’affirmer comme une puissance moyenne, tandis que la Russie semble avoir besoin de dialoguer avec l’Union dans un esprit plus apaisé. Quel rôle le contexte européen et international de réconciliation a-t-il joué dans ce dialogue entre les deux nations ennemies héréditaires ? Une première réponse à cette question consiste à affirmer que le groupe a bénéficié d’une diffusion des modèles de réconciliation, européens et mondiaux, tout en essayant de créer une forme nouvelle de dialogue entre voisins.
Pour mener cette étude, il sera fait référence à des entretiens effectués avec des membres du groupe, à l’analyse des textes publiés par le groupe ou à l’examen d’éventuels discours politiques. Ce papier s’inscrit dans un cadre constructiviste, qui permet d’étudier l’importance des cadres cognitifs et du contexte des événements. Quelques éléments de sociologie de l’action publique seront aussi appliqués. Ainsi, les notions de circulation, de réappropriation et de création d’un modèle de réconciliation seront évoquées, tandis que la question des résultats de la politique publique de réconciliation sera posée.

Poland-Russia: a New European Reconciliation?

Katyn, the occupation of the Kremlin by Poles in 1610 are manifest examples of a conflicting past between Poland and Russia. Nonetheless, the states decided to collaborate and to establish a ‘group for difficult matters’ in 2008. This new cooperation takes place when Poland is a member of the European Union and tries to become a medium power, while Russia seems to need a more appeased dialogue with the European Union. What role did the European and international context of reconciliation play in this dialogue between the two hereditary enemies? A first answer to this question would be the following: the group took advantage of a diffusion of European and International reconciliation models, while trying to create a new model of dialogue between neighbours.
To conduct this study, we will refer to interviews with members of the group, to analyses of the texts published by the group, as well as to the examination of political speeches. The framework of this paper will be contructivist, so that we can take the context and the cognitive dimension of the events into account. Some elements of sociology of public policy will be added to the framework: the notions of circulation, reappropriation and creation of a reconciliation model will be used. The question of the results of the public policy of reconciliation will also be posed.

Philippe Perchoc (ISPOLE (CECRI), Université Catholique de Louvain)

Après le Rideau de Fer ? Physionomies et politisations de la mémoire au Parlement européen et au Conseil de l’Europe

Les institutions tendent à produire un discours visant à les légitimer. Or, l’élargissement de l’Union européenne en 2004 aux pays d’Europe centrale et orientale a modifié la physionomie des discours de légitimation des institutions communautaires. Là où un récit sur l’Europe victime et victorieuse face au nazisme tendait à se consolider dans les années 1980, l’élargissement a permis aux nouveaux Etats membres de faire valoir leur vision de l’histoire du XXe siècle, notamment au Parlement européen. Il en résulte un grand nombre de débats et quelques résolutions emblématiques du Parlement européen sur le nazisme et le stalinisme.
Pourtant, le Parlement européen n’est pas la seule institution a avoir vu se développer ce genre de débats. L’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a aussi été saisie de ces sujets. Pourtant, la composition des deux assemblées (la Russie et la Turquie sont membres du Conseil de l’Europe) et leurs modes de fonctionnement poussent à s’interroger sur l’impact de la politisation différente de ces deux assemblées sur la construction d’un discours sur la mémoire européenne.

After the Iron Curtain. Shapes and politizations of memory at the European Parliament and the Parliamentary Assembly of the Council of Europe

Institutions usually produce narratives in order to self-legitimize. The 2004 EU enlargement to Central and Eastern Europe transformed the EU narrative. Nuancing the narrative of Europe as a victim and as a hero against Nazism that spread in the 1980’s, the accession of new member states created a new debate, including at the European Parliament, about their understanding of the History of the 20th century. This resulted in a number of debates and some emblematic resolutions of the European Parliament on Nazism and Stalinism.
But these debates did not take place only at the European Parliament, but also at the Parliamentary Assembly of the Council of Europe (PACE). These two parliaments are different by their composition (Russia and Turkey are member of the Council of Europe) and by their rules of procedures. This leads us to question the impact of the different politization on the production of a European memory.

Pascal Bonnard (IEP de Paris, CERI)

Transfert des normes européennes sur les minorités et gestion d’un héritage soviétique : la constitution d’une expertise en matière de gestion des populations minoritaires en Lettonie

La présence nombreuse de populations minoritaires sur le territoire letton est perçue par les élites politiques lettones comme une conséquence de l’exercice du pouvoir soviétique. L’introduction des normes européennes sur les minorités donne lieu à la constitution d’une expertise ayant vocation à gérer cet encombrant héritage. L’expertise académique sur la situation des populations minoritaires et sur les politiques à mener à leur égard se constitue dans la rivalité entre des chercheurs qui occupent des positions prééminentes à l’issue de la période soviétique et des chercheurs qui s’attachent à renforcer leurs positions en profitant de l’arrivée de nouvelles traditions et thématiques scientifiques. De même, la conversion dans la compétition politique des normes européennes se joue dans la rivalité entre des acteurs politiques qui intègrent les gouvernements et d’autres qui demeurent de manière durable dans l’opposition. On note par ailleurs que les acteurs clefs de l’introduction des normes européennes sont des « praticiens savants », sortes de go-between entre le monde académique et le monde politique. L’analyse de la constitution d’une expertise en matière de gestion des populations minoritaires requiert donc de restituer le processus de transfert des normes européennes, d’une part, dans les compétitions se déroulant au sein à la fois du champ politique et du champ académique et, d’autre part, dans l’enchevêtrement de ces deux champs.

Transferring European minority norms and coping with a Soviet legacy: The constitution of an expertise in the management of minority populations in Latvia

The numerous minority populations on the Latvian territory are perceived by the Latvian political elites as a legacy of the Soviet power. The introduction of European minority norms leads to the formation of an expertise meant to cope with this troublesome legacy. The academic expertise in the situation of minority populations and in the policies to be implemented towards them develops thanks to the rivalry between a group of researchers who enjoy well-establishes positions in the academia at the end of the Soviet Union and a group of researchers who try to take benefit from the introduction of new scientific traditions and topics in order to reinforce their positions. In a similar vein, the accommodation of the European norms to the political competition takes place in the context of the rivalry that opposes political actors who join governments and others who constantly remain in the opposition. Key actors of the transfer of minority norms in Latvia besides turn out to be “practitioner scholars”, go-betweens between the academic and political spheres. To highlight the formation of an expertise in the management of minority populations, one therefore needs to analyse the transfer of European minority norms in combination with, on the hand, the struggles within the political and academic fields and, on the other hand, the intricacy of these both fields.

Aline Hartemann (EHESS-IMM et Centre Marc Bloch, Berlin)

La réconciliation par les ondes : Zoom Europa sur ARTE, une émission de télévision européenne aux prises avec des logiques nationales

La chaîne de télévision culturelle européenne ARTE fait partie des dispositifs mis en place, au début des années 1990, pour accompagner le processus politique de la construction européenne. Les adversaires d’hier, l’Allemagne et la France, se sont engagés à travailler ensemble, unis désormais par la voie des ondes : des équipes, issues des deux pays, conçoivent des émissions au siège de la chaîne à Strasbourg, ville symbole.
L’exposé est articulé en 2 temps :
« ARTE, figure de la diplomatie franco-allemande et européenne, outil au service d’une politique de la mémoire et de la réconciliation » : Négligeable en termes d’audimat, l’impact d’ARTE est capital du point de vue symbolique. La chaîne a vocation à diffuser des programmes « européens » sur l’ensemble du continent, avec pour objectif de réunir les populations et de faire émerger « un sentiment d’appartenance européen ».
« Les avatars d’une émission européenne » : nous analysons différentes formules auxquelles  a donné lieu l’émission hebdomadaire d’information Zoom Europa, qui se doit d’être « une vitrine de l’Europe institutionnelle ». « Europhile » pour les uns, « eurocritique » pour les autres, le magazine fait l’objet de logiques de réappropriation nationales et de retraduction du dispositif de réconciliation au niveau local, de part et d’autre du Rhin.


Participants

BAZIN Anne bazinbegley@gmail.com
BESSONE Magali magalibessone@yahoo.fr
BONNARD Pascal pascal.bonnard@sciences-po.org
DELORI Mathias m.delori@sciencespobordeaux.fr
DELPLA Isabelle idelpla@free.fr
CLAVERIE Elisabeth claverie@ehess.fr 
COUSSOT Romuald romuald.coussot@yahoo.fr 
DEZALAY Sara sara.dezalay@gmail.com 
DUCLOS Nathalie nduclos@club-internet.fr
HARTEMANN Aline aline.hartemann@gmail.com
HÉBERT Emmanuelle emmanuelle.hebert@coleurope.eu
MINK Georges mink@u-paris10.fr
OSTOJIC Mladen ostojicmladen@gmail.com
PERCHOC Philipp p.perchoc@gmail.com
RAGARU Nadège ragaru@ceri-sciences-po.org
TENENBAUM Charles charles.tenenbaum@sciencespo-lille.eu
TULMETS Elsa elsa.tulmets@sciences-po.org

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

© Copyright 2012 Association Française de Science Politique (AFSP)
27 rue Saint-Guillaume 75337 Paris Cedex 07 France
Téléphone : 01 45 49 77 51
Courriel : afsp@sciences-po.fr