Accueil

Inscriptions

Programme

Sessions
(CP, ST, MPP, MTED)

Evénements

Index

Partenaires

Infos pratiques
(accès, transports, hébergement)

Contacts

Congrès organisé en partenariat avec

Section Thématique 50

« Plaidoyer » et advocates. Acteurs et formats internationaux des mobilisations
Advocacy and Advocates. Actors and international forms of mobilizations

Responsables

Etienne OLLION (CMH-ETT) e.ollion@cso.cnrs.fr
Johanna SIMÉANT (Université Paris-1, CESSP) jsimeant@univ-paris1.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Ces dernières années ont vu la diffusion du « plaidoyer » (advocacy) tant dans la pratique que dans l’étude des causes transnationales. Le terme, qui désigne le plus souvent l’activité de promotion de la ligne politique d’ONG ou plus généralement d’organisations du « tiers-secteur », a fait florès. Alors que de nombreuses organisations non gouvernementales et institutions internationales ont créé des postes spécifiques de « plaideurs » (advocates), et que certaines ont réorganisé une partie de leur activité autour de cette pratique, l’étude de l’advocacy a connu un engouement certain parmi les spécialistes des mobilisations internationales.
 
À la croisée de la sociologie politique et des relations internationales, toute une littérature a depuis vingt ans embrassé cet objet. Cette attention récente n’est pas allée sans un certain flou dans l’analyse. Le plaidoyer a souvent été identifié aux réseaux transnationaux d’ONG (Keck et Sikkink, 1998), à des formes d’action particulières (mobilisation de l’opinion, des médias), et à des causes humanitaires (droits de l’Homme, développement). Il est souvent aussi souvent présenté comme une forme à la fois radicalement nouvelle et particulièrement efficace de défense des intérêts, en particulier au niveau international.
 
S’il est certain qu’une injonction à « faire de l’advocacy » s’est rapidement imposée dans certains espaces, la pratique est de fait une origine plus ancienne (Minkoff, 1994), elle est canonique dans certains pays où elle constitue une forme établie de revendication (Andrews et Edwards, 2004; Minkoff, Aisenbrey, et Agnone, 2008), et ne se limite pas aux formats internationaux. D’autres travaux ont montré la difficile diffusion du terme selon les organisations (Siméant, à paraître) et ont tenté de mettre en avant les déterminants de son adoption (Prakash et Gugerty, 2010). L’étude concrète des stratégies mises en œuvre par les plaideurs montre par ailleurs des proximités avec d’autres formes de défense des causes (Busby, 2010), la concurrence qui peut exister entre plaideurs de différents groupes (Ollion, 2010), et l’efficacité différentielle selon les contextes (Hertel, 2006; Stroup, 2012).  
 
Dans la lignée de cette « approche révisionniste » (Price, 2003; Prakash et Gugerty, 2010) sur de l’advocacy, cette section voudrait proposer tout à la fois un état des savoir et un regard nouveau sur les pratiques de plaidoyer. La diffusion de cette injonction à l’advocacy renvoie en effet à des questions théoriques délicates, à la jonction des questionnements sur l'action collective, des liens entre contextes institutionnels et formats de la revendication, et des mobilisations expertes. Les communications, qui s’appuieront nécessairement sur une étude empirique précise et explicitée, pourraient s’inspirer des axes de réflexion suivants :  
 
Un premier enjeu concerne le développement de plaidoyer comme secteur professionnel, en France comme à l’étranger. Deux questions peuvent être distinguées. La première, organisationnelle, est celle de la diffusion et des adaptations de cette pratique. D’où vient le plaidoyer ? Quelles pratiques concrètes ce terme polysémique recoupe-t-il? Où et quand a-t-il été adopté ? Quels ont été les vecteurs de sa diffusion, les résistances et les conséquences internes de la création de postes de « plaideurs » ? Quelle réorganisation du travail (au sein d’une association, ou d’un domaine d’activité) cette nouvelle situation a-t-elle entrainé ? À cette première ligne d’interrogation s’en ajoute une seconde, qui peut être qualifiée de positionnelle, et qui cherche à dresser le portrait social du groupe que forment les plaideurs. Qui sont-ils ? Quelle est leur trajectoire professionnelle ? Personnelle ? Militante ?
 
Un second axe s’intéresse à l’articulation entre advocacy et action publique, nationale et internationale. Quel est le rôle des plaideurs dans la mise à l’agenda d’un sujet, et si oui comment peut-on le mesurer ? Quelles sont les contraintes organisationnelles et institutionnelles qui orientent l’action des plaideurs et le choix de ce registre ?  Une attention particulière pourrait être prêtée aux raisons de la diffusion de cette pratique (conformation aux exigences des bailleurs, aux formats de la revendication acceptables des cibles de l’action).
 
Une dernière piste de réflexion porte sur les pratiques et les théories de l’action collective. Comment, concrètement, s'effectue la production des frontières entre l’advocacy et d’autres formes de défense des intérêts ? Quel type de relations entretiennent les groupes qui font du plaidoyer entre eux ? avec ceux qui n’en font pas ? L’adoption  du plaidoyer comme forme légitime de l’action se fait-elle au détriment d’autres formes d’action – le cas échéant, avec quelles conséquences ? Cette forme de revendication est-elle plus fréquente dans certains contextes nationaux et / ou institutionnels que d’autres ? En creux, ces questions invitent à s’interroger sur ce que la diffusion du plaidoyer fait à l’action collective et aux théories qui entendent en rendre compte, dans deux directions au moins : assiste t-on à une nouvelle division du travail qui mérite de repenser les frontières entre groupes d’intérêt ? Le plaidoyer est-il une forme privilégiée mais peu visible de l’action collective internationale ?

This session examines the development and varied practices of advocacy as a form of mobilization. Building upon the extensive literature that takes advocacy as an object, it sets itself two main goals. The first one is to empirically assess the extent this practice just like its forms. Based on case studies, organizational studies and on statistical approaches, the panellists will try to assemble and compare relevant data about advocacy – in France just like abroad. When did advocacy practices emerge and expand? Which organizations endorsed them and with which consequences (on the internal division of labour, on the relations to other organizations and partners). How people define and practice advocacy nowadays? The panels will provide both a historical perspective and a snapshot of contemporary advocacy.
 
The second goal of this session is to discuss and to further classic approaches on advocacy as a form of mobilization. While the first wave of researches on the topic focused mostly on (often successful) campaigns and that they tended to over-emphasize the importance of this form of collective action, this session seeks to apply the methods and tools of political sociology to this practice. Describing advocacy as just one form within the broader repertoire various movement draw from; highlighting the (institutional, economic, organizational) determinants of advocacy; taking cues from the debates and oppositions to such form of action and its possible alternatives or focusing on the consequences (on the organizations, on their claims, on the field of social movements, the session will offer a “revisionist approach to advocacy” (Prakash & Gugerty, 2010) and by so doing, it will contribute to the nascent, “second wave” of advocacy studies.

Bibliographie sélective

Andrews, K.T. et B. Edwards, « Advocacy organizations in the US political process » Annual Review of Sociology, 2004, 479-506.
Busby, Joshua, Moral Movements and Foreign Policy. Cambridge Cambridge University Press, 2010
Hertel, Shareen, Unexpected power : conflict and change among transnational activists. Ithaca, N.Y., Cornell University Press, 2006.
Keck, Margaret E. et Kathryn Sikkink, Activists Beyond Borders : Advocacy Networks in International Politics. Ithaca, N.Y., Cornell University Press, 1998.
Minkoff, D., S. Aisenbrey, et J. Agnone, « Organizational Diversity in the US Advocacy Sector » Social Problems, 2008, 525-548.
Minkoff, Debra, « From service provision to institutional advocacy: The shifting legitimacy of organizational forms » Social Forces, 1994, 943-969.
Ollion, Etienne, « Summits of Information. Advocacy officers, Journalists and Newsmaking at  International Summits. » Qualitative Sociology, 33 (3), 2010, 211-227.
Prakash, Aseem et Mary Kate Gugerty (dir.), Advocacy organisations and collective action.  Cambridge, Cambridge University Press,2010.
Price, Richard, « Transnational civil society and advocacy in world politics » World Politics, 55 (4), 2003, 579-606.
Siméant, Johanna, « Un mot, et un peu plus qu'un mot. Sur la diffusion internationale de l'advocacy comme pratique et impératif de conformation de la société civile. » Humanity, à paraître.
Stroup, Sarah, Borders Among Activists: International Ngos in the United States, Britain, and France. Ithaca, Cornell University Press, 2012.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 1 : 9 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment J (13 rue de l'Université), amphi Jean Moulin


Programme

Axe 1/ Plaideurs et plaidoyer

Discutante : Sandrine Lefranc (ISP - Université Paris 10)

Axe 2 / Plaidoyer, action publique et action collective

Discutante : Sarah S. Stroup ( Middlebury College Political Science)  


Résumés des contributions

Hélène Baillot (Université Paris 1)

Combattre l’ennemi avec ses propres armes. La diffusion stratégique des pratiques de plaidoyer au sein des militants anti-dette aux États-Unis

Ma communication porte sur les plaideurs qui ont participé à la campagne de Jubilé 2000 en faveur de l’annulation de la dette des pays pauvres. Débutée au Royaume-Uni en 1996, cette campagne a obtenu des résultats politiques concrets : le lancement de l’initiative Pays pauvres très endettés renforcée (PPTE renforcée) lors du sommet du G8 de Cologne en juin 1999. M’appuyant sur le cas de la coalition de Jubilé aux Etats-Unis, je discuterai comment des militants sont parvenus à influencer des politiques économiques généralement négociées au sein de cercles restreints regroupant ministres des finances et bureaucrates multilatéraux. Je porterai une attention particulière à un petit groupe d’une dizaine de personnes réunies au sein du « comité politique » dont le principal objectif est de faire passer une loi en faveur de l’allègement des dettes des pays pauvres au Congrès américain. Au mois de décembre 1998, alors que la coalition de Jubilé Etats-Unis  hésite encore quant à la pertinence de poursuivre une stratégie législative, le comité politique rompt avec la campagne officielle et continue son travail de plaidoyer sous la bannière du « groupe législatif ». Dans une première section, je m’intéresserai de près aux acteurs impliqués dans la campagne américaine, à leurs caractéristiques sociales et à leur carrière professionnelle, ainsi qu’à leurs croyances éthiques et politiques. L’analyse des stratégies et tactiques des membres du groupe législatif feront l’objet d’une seconde section. Il s’agira de retracer au plus près les pratiques de ces acteurs durant les années 1998-2000, depuis la création du « groupe législatif » jusqu’à l’appropriation des fonds nécessaires à la mise en œuvre de PPTE renforcée par le Congrès américain. Enfin, un dernier point s’intéressera aux logiques de concurrence qui animent le mouvement Jubilé 2000 et au rôle joué par les pratiques de plaidoyer dans ce contexte. Les stratégies du groupe législatif, bien qu’empruntes d’une certaine efficacité, ont fait l’objet de nombreuses critiques qui émanaient des autres militants de la coalition Jubilé 2000 tant sur le plan national qu’international. Cette communication s’appuie sur un travail de terrain réalisé à Washington D.C. en juin-juillet 2011.
 
Fighting them on their own turf. The strategic diffusion of advocacy techniques within the debt-relief network in the USA

My communication focuses on the US advocates who took part in Jubilee 2000, an international campaign which aimed at cancelling the debt of poor countries.  This campaign was launched in 1996 in the United Kingdom and resulted in concrete outcomes with the G8 agreeing on the enhanced Heavily Indebted Poor Countries Initiative (HIPC 2).  Drawing on the case study of the Jubilee coalition in the Unites States, I will discuss how activists succeeded in influencing policies usually negotiated in private circles of finance ministers and multilateral bureaucrats. As we will see, the US campaign encompassed a range of different positions that resulted in different and sometimes contradictory strategies. I will pay a particular attention to a small group of around 10 people, referred to as the “Policy group”, whose members decided to focus on passing legislation in favor of debt relief in Congress. By December of 1998, as the whole Jubilee USA coalition was still hesitating, whether or not pursue legislation in Congress, the Policy Committee split away from the official campaign and continued its work under the banner of the legislative group. In a first section, I take a close look at the actors involved in the US anti-debt movement, their social and professional backgrounds, as well as their political and ethical assumptions.  I then turn on the strategies and tactics of the legislative group. How did they advocate in favor of debt relief? What did they concretely do between December 1998 and October 2000, when Congress agreed on delivering the funds US administration requested to fulfill its commitment regarding HIPC 2? As I will demonstrate in the third section, the strategies of the legislative group, although quite effective, proved to be highly controversial within the Jubilee coalition, nationally and internationally.  This communication builds on field research conducted in Washington D. C. in June-July 2011.

Delphine Thivet (CMH-EHESS)

Défendre et promouvoir la cause paysanne internationalement : la construction des droits paysans par La Vía Campesina

Cette communication se propose d’analyser le processus par lequel des petits producteurs agricoles du « Nord » et du « Sud » en sont venus à investir une nouvelle arène de l’action collective au niveau global et transnational. Pour ce faire elle se centre sur le mouvement La Vía Campesina, né en mai 1993 et qui revendique officiellement aujourd’hui plus de deux cent millions de membres. Les militant-e-s de La Vía Campesina s’efforcent depuis quelques années de faire reconnaître les « droits des paysans et des paysannes » au niveau international. C’est précisément le choix de cette stratégie de plaidoyer auprès des institutions onusiennes des droits humains en particulier que nous nous proposons de mettre en lumière. Il s’agit de comprendre quelle forme d’advocacy est utilisée et en quoi cette dernière constitue pour ce mouvement social un mode d’action légitime pour faire avancer la défense des intérêts des paysan-ne-s. Dans cette perspective, l’enjeu central de cette contribution repose sur l’analyse de la configuration dans laquelle l’investissement de La Vía Campesina dans ce mode d’action collective s’est accompli (réappropriation du discours des droits humains, circulation et diffusion d’une pratique d’action collective des mouvements de peuples autochtones et féministes aux mouvements paysans, contexte institutionnel national et international, réseaux relationnels nationaux et transnationaux, etc.).
 
Peasants’ rights advocacy at the international level by La Vía Campesina

This paper aims to explore how small farmers from the global South and North have engaged in a new arena of collective action at the global and transnational level. To this end it focuses on the movement La Vía Campesina, born in May 1993 and nowadays officially claiming more than two hundred million members. In recent years, the activists of La Vía Campesina have been engaged in promoting the peasants’ rights internationally as a strategy of mobilization. This is precisely this advocacy work with UN human rights institutions in particular that we intend to highlight, so as to understand what form of advocacy is used and how it constitutes for this social movement a legitimate mode of action to defend peasants’ interests. In this perspective, this paper will try to analyze the configuration wherein La Via Campesina develops and implements advocacy activities (incorporation of human rights discourse, circulation and dissemination of indigenous and feminist practices of advocacy, national and international institutional context, national and transnational networks, etc.).

Virginia Lickert (Université Paris 1)

Construction d’un registre de mobilisation: l’advocacy et les ressources extractives au Cameroun

Cette communication propose de s’arrêter sur l’étude de l’émergence du registre de l’advocacy comme registre de mobilisation au Cameroun dans le cadre des «enquêtes militantes » portant sur les ressources naturelles (forêts, terres, ressources extractives). Un petit groupe d’ONG camerounaises a fait du plaidoyer le socle de son activité de dénonciation des expropriations de terres de population locales face aux compagnies étrangères minières et agro-industrielles. Ce noyau d’ONG s’est impliqué depuis la fin des années 1990, et ce en particulier depuis le lancement du projet de pipeline Tchad-Cameroun, dans la collecte d’informations et le dialogue avec les décideurs camerounais. Mais dans un contexte difficile et face un Etat centralisateur et opaque, ce « militantisme de dossier » pratiqué par ces quelques « militants-experts » valorise plus les militants « bac+5 » et leurs stratégies d’internationalisation entraînant de fait une professionnalisation et une concentration de l’expertise.
 
On a slippery slope: advocacy and extractives resources in Cameroon

Built upon a case study based on the observation of the genesis of the advocacy in Cameroun, this communication describes how this form of mobilization is used in the field of natural resources (land, forests and extractives resources). A small group of Cameroonian NGOs has made of the advocacy the basis of its activity of mobilization against the expropriation of local Cameroonians chased by the arrival of mining and agribusiness companies. This small core of NGOs is involved since the end of the nineties, more exactly since the launching of the Chad-Cameroon pipeline, in building an extensive documentation and a dialogue with the Cameroonian authorities. Facing a strongly centralized and opaque State, this “file-militancy” used only by a few “experts-activists” enhances those who have a solid academic background and theirs strategies of internationalization, features which therefore lead to a professionalization and a concentration of the expertise.
 
François Briatte (PACTE) et Pierre Gueydier (Mines-ParisTech)

Artistes, lobbyistes et pirates : l’opposition de plaidoyers professionnels et activistes autour du droit d’auteur sur Internet en France, 2005-2009

L’objet de cette communication est d’analyser, dans les années récentes, l’activité de plaideurs opérant au croisement des politiques de la culture et des télécommunications. Au cours d’une succession de conflits gravitant autour d’intérêts industriels transnationaux, plusieurs collectifs d’activistes ont en effet élaboré des plaidoyers denses et relativement efficaces en opposition aux argumentaires professionnels dominants du téléchargement illégal sur Internet et de la répression du “piratage” par les pouvoirs publics.
À partir de terrains d’observation complémentaires menés pendant et après le vote des lois DADVSI (2006) et HADOPI (2009), le texte examine deux plaidoyers complémentaires. Le premier d’entre eux s’exprime à travers le lobbying professionnel du secteur culturel auprès des décideurs politiques. Le texte examine ensuite, chez des activistes initialement liés à la promotion des logiciels libres, l’émergence parallèle d’une activité autonome de contestation et de plaidoyer au niveau national, puis européen et international.
Dans l’analyse que nous en proposons, le parallèle entre lobbying professionnel et plaidoyer d’activistes met en valeur le rôle des relais médiatiques et des technologies de la communication dans la mise en place d’une activité de plaidoyer reconnue et publicisée. Les stratégies observées se fondent toutefois sur une relation très ponctuelle avec les actions conventionnelles de mobilisation de masse, et n’ont eu jusqu’ici qu’une incidence résiduelle sur la compétition électorale et partisane.

Artists, lobbyists and pirates: professional advocacies in intellectual properties conflicts (2005-2009)

We analyze advocacy work in the strategic action field formed around the issue of piracy i.e. illegal downloading in France. Using data from two complementary fieldwork periods that cover the passing of the DADVSI and HADOPI bills by the French Parliament, we show how activists who protest against the lasting influence of transnational industrial interests over copyright law and telecom regulation have challenged these dominant stakeholders by elaborating relatively successful counter-frames, leading to several standstills in the overall legislative history of digital law enforcement.
The first part of our analysis examines the advocacy work of professional lobbyists in the French cultural sector, and its impact on law-making and policy-making in relationship to the reform of copyright law. The second part deals with the parallel construction of dissent by activists with strong ties to free software organizations. Both parts show that the media and information technology were critical to the diffusion of frames that led to an open conflict between the silent mobilization of incumbent interests and the vocal mobilization of activists operating at the national and then transnational levels.  
We conclude our analysis by assessing the somewhat residual impact of this conflict on mass mobilization and party conflict in France.


Ioana Popa (ISP-CNRS)

Savants engagés en faveur des droits de l’homme : internationalisation de la science et activisme transnational

Cette communication porte sur un cas de mobilisation transnationale des acteurs du champ scientifique en faveur des droits de l’homme. Il se situe dans un contexte particulier des relations internationales (la guerre froide) et pendant une période de (re)définition et de professionnalisation de l’espace des « plaideurs » de cette cause (les années 1970 et 1980). L’analyse prend pour objet deux comités initiés par des savants: ils sont créés en France, puis étendus à d’autres pays occidentaux, en réponse à la persécution de scientifiques vivant dans des pays socialistes (leur action pouvant ensuite se déployer dans d’autres pays à régime autoritaire). Il s’agira de mener une sociologie des principaux animateurs de ces comités, restituant leurs trajectoires sociales et professionnelles ainsi que leurs socialisations politiques préalables. L’analyse rendra également compte de la gamme de leurs pratiques et des modes d’intervention estimés par eux comme appropriés. Enfin, elle articulera ancrages nationaux des « défenseurs de cause » et construction des réseaux transnationaux et retracera les substrats organisationnels de leur action. Cette communication interrogera ainsi le lien entre internationalisation de la science et activisme transnational, tout en contribuant à historiciser la défense d’une cause spécifique.

Human Rights Advocacy Networks: Internationalization of Science and Transnational Activism

This paper discusses a case study of human rights advocacy network involving scientists and fostered by their professional domestic and transnational ties. It is set in a particular historical configuration of the foreign policy and the international relations (the Cold war) and more particularly, during a period when the human rights advocates are professionalizing and are (re)defining their tasks and practices (the 70s and 80s). The analysis is focused on two committees initiated by French scientists, then extended to another Western countries. They are created in order to counteract the violations of human rights, particularly those of scientists living in socialist countries (and later, under other authoritarian regimes). The paper proposes a sociological analysis of the leaders of these committees, examining their social and professional characteristics as well as their previous political socialisation. It also studies their practices of advocacy and tactical choices. Finally, the analysis aims to connect the national location of the advocates and their capacity to develop linkages by forming transnational coalitions and communication networks. Thus, it probes the link between internationalization of science and transnational activism, providing a historical perspective on the advocacy of a particular issue.

Hélène Dufournet (ISP)

L'espace du plaidoyer : cartographie des espaces et des pratiques d'advocacy

Initiée aux pratiques de l'advocacy au moment de la campagne contre les mines antipersonnel, Handicap International a, depuis cette date, systématisé le recours à cette pratique en créant un « bureau du plaidoyer » et un « service communication » chargés d'exprimer ensemble les revendications de l'association. Le choix de cette division du travail en interne n'est pas anodin pour la définition du travail de plaidoyer. L'analyse des rapports entre le « plaidoyer » et « le service communication » révèle en effet combien les modes d'action et les stratégies diffèrent d'une activité à l'autre, parce qu'ils se déploient dans des univers différents. Cette communication montre ainsi les tensions qui traversent l'activité des plaideurs, tentés de radicaliser leur message quand ils interviennent dans l'espace public ou les médias, mais contraints dans le même temps de nuancer leur position pour maintenir le dialogue avec les autorités, tentés de se mobiliser contre les injustices et les dégâts humanitaires, mais conscients des contraintes de faisabilité auquel le soutien des bailleurs les contraint. À partir de là, l'idée de cette cartographie des espaces de confrontation et des pratiques de défense de cause qui leur sont associées est de montrer comment les messages, les formats et les modes de revendication varient d'un espace à l'autre, en fonction des contraintes propres à chacun d'eux.
 
The space of advocacy: mapping spaces and practices of advocacy

Initiated to practice of "advocacy" during the campaign to ban land-mines, Handicap International  has, from that time on, systematically resorted to this practice by creating an "Office of Advocacy" and "communication department" both responsible for expressing claims of the organization. The choice of this internal tasks division is void of consequences when it comes to defining advocacy work. Analysis of the relationship between "advocacy" and "communication service" shows that modes of action and strategies differ from one activity to another, as they are deployed in different spaces. This paper focuses on internal tensions inside advocacy activities. It shows how advocates are in the same time attempted to radicalise their message toward the media inside public space, and forced to mitigate their position to maintain dialogue with the authorities; attempted to mobilize resources against injustice and human damage, and limited by the sponsors support. From this point, mapping spaces of confrontations and identifying advocacy framework developed in each space underlines how messages, frames and modes of claim vary from one area to another, according to their constraints.
 
Nathalie Berny (Centre Emile Durkheim – Sciences-Po Bordeaux)

La diffusion de l'advocacy parmi les organisations environnementales en France : facteurs et conséquences

Affectées par une professionnalisation relativement récente, les organisations environnementales françaises constituent un cas intéressant pour aborder la diffusion du plaidoyer comme mode d'action et évaluer sa réelle nouveauté. Le Grenelle de l'environnement, qui a été organisé par les pouvoirs publics en 2007, a fait connaître plusieurs d'entre elles du grand public. La plupart des organisations non gouvernementales associées à ce processus de consultation, mobilisant des acteurs "parties prenantes" dans des débats sur des enjeux sélectionnés, entretenaient pourtant déjà des relations avec l'administration.
Sur la base d'une comparaison entre organisations nationales d'environnement, cette communication explorera l'hypothèse d'une homogénéisation des pratiques en termes de représentation d'intérêts collectifs dans le secteur environnement. Quelles sont les pratiques et compétences concrètes auxquelles elle est associée dans chaque organisation? Existe-il des fonctions équivalentes de l'une à l'autre? Sont-elles prises en charge par des professionnels ou responsables associatifs? Les finalités stratégiques de l'activité d'advocacy sont-elles bien établies? Quels sont les facteurs ayant favorisé son émergence, notamment du point de vue des possibilités de financement? Le niveau de l'organisation sera privilégié pour retracer les logiques dictant les décisions à l'origine de ses choix de modes d'action, tout en montrant les conséquences de ces activités d'advocacy sur l'organisation elle-même.

Advocacy as a mode of action: the drivers and consequences of its diffusion among environmental organisations in France

Given their recent professionalization, the French environmental organisations represent a relevant case to address the diffusion of advocacy as a new mode of action for such actors. The ' Grenelle de l'environnement', organized in 2007 by the public authorities, threw a spotlight on several organizations the general public knew little about. However, most of the non-governmental organizations participating in this consultation process, which involved 'stakeholders' within debates on a limited number of chosen topics, had already been exchanging information and arguments with the administration. On the basis of a comparison between four main national environmental organizations, this communication will address the potential homogenisation of advocacy practices.
By focusing on the organisation as the unit of analysis, the purpose here is to examine more closely the activity corresponding to the advocacy within each environmental groups, before drawing a more general argument regarding the environmental NGO sector as a whole. What are the concrete advocacy activities and competences deployed by organizations? Are the corresponding functions within each organization similar? Do the employed staff and the elected representative play an equivalent part? What are the drivers of advocacy activities, regarding notably the possibilities of funding? Addressing these questions, the analysis will also examine the effects of advocacy within organizations themselves.


Aude Lejeune (CERAPS-CNRS)

Appliquer le droit ou le contester ? L’advocacy au sein du réseau européen des agences de promotion de l’égalité

Si l’advocacy constitue une forme de revendication de plus en plus commune au sein des organisations non-gouvernementales, elle tend également à se diffuser dans les agences gouvernementales. Dans le domaine de la lutte contre les discriminations, la législation européenne invite les pays membres à créer des organismes nationaux de promotion de l’égalité des chances afin d’accompagner les plaignants individuels dans le processus de dépôt de plaintes et de mener des actions structurelles de lutte contre les discriminations. Dans cette communication, je propose d’étudier la manière dont ces agences sont susceptibles de se positionner en advocates lorsqu’elles sont amenées à défendre les droits des citoyens qui s’estiment victimes de discrimination, à partir des cas de la Belgique et de la Suède.
Les travaux sur les mobilisations collectives ont étudié le rôle des agences de l’Etat dans la promotion de causes politiques. Par contre, l’influence des réseaux transnationaux et internationaux dans la diffusion de ces pratiques d’advocacy au sein des agences gouvernementales a été largement ignorée. Cette contribution ambitionne donc de proposer des pistes de réflexions sur les contraintes et ressources dont bénéficient ces agences au niveau national et sur le cadrage de leur activité par le réseau européen de promotion de l’égalité Equinet, qui vise à favoriser les échanges de « bonnes pratiques » et la diffusion d’une culture commune de promotion des droits parmi ces agences. Comment l’advocacy est-elle promue par le réseau européen et par les agences au niveau de chaque Etat ? De quelle manière cette activité est-elle susceptible d’entrer en tension avec le principe de neutralité revendiqué par ces organisations de défense de l’égalité en tant que principe universel ? Comment les acteurs qui travaillent au sein de ces agences, pour la plupart issus du monde associatif et syndical, envisagent-ils leur mission et les contraintes liées à la forme bureaucratique des agences au sein desquelles ils travaillent ?
Le matériau empirique de cette communication se compose principalement d’entretiens (N=21) qui ont été conduits avec les juristes de ces agences en Belgique et en Suède, ainsi qu’avec les membres du réseau européen Equinet. A travers l’étude de la diffusion de pratiques d’advocacy, il s’agit de s’interroger sur l’articulation entre l’application du droit et la mise en cause de ce même droit au sein d’agences gouvernementales ainsi que sur les frontières entre l’advocacy et d’autres types d’activité de défense et de promotion des droits. Plus largement, ceci permet de réfléchir aux logiques de transnationalisation et d’influences réciproques entre les pays de l’Union Européenne ainsi qu’à leurs influences sur les pratiques de ces agences nationales.

Enforcing or Criticizing the Law? Advocacy within the European network of Equality Agencies

If advocacy is a common form of protest for non-governmental organizations, it also tends to be used by governmental agencies. In the field of non-discrimination, the European legislation requires member states to create a national body devoted to promote equal opportunity in order to support individual plaintiffs in their mobilization of the law and to implement policy to fight discrimination. Through this talk, I will examine how equality agencies in Belgium and Sweden might advocate when they represent the rights of citizens who have experienced discrimination.
Some scholarly works on collective mobilization studied how government agencies promote political causes. However, they often neglect the influence of transnational and international networks in the diffusion of advocacy. This contribution aims to examine what encourages or constraints the national agencies and how the European network Equinet, which aims to favor exchange of “good practices” and the diffusion of a common culture of rights among these agencies, frames their practices. How is advocacy promoted by the European network and by national states? Does advocacy run counter to the principle neutrality promoted by these agencies defending equality as universal value? How do legal professionals working for these agencies, with professional background in community-based organizations and labor unions, experience working for a bureaucratic organization?
Investigative techniques consist primarily of open-ended interviews with lawyers working in equality agencies in Belgium and Sweden and member of the European network Equinet (N=21). Through the diffusion of advocacy, I suggest examining the connection between enforcement and criticize of the law, as well as comparing advocacy with others forms of rights vindication. More broadly, this contribution aims to call into question the processes of transnationalisation and policy transfer from one country to another within the European Union as well as its influence on national agencies’ practices.

 
Juliana Lima (Université Paris 1) & Sarah Dezalay (University of Toronto)

Plaider l’accès à la justice au Burundi : stratégies de plaidoyer et politiques publiques de « justice transitionnelle »


Cette communication est inscrite dans le cadre du projet ANR « Irène » (ISP-Nanterre) et s’appuie sur des enquêtes collectives au Burundi. Basée sur une cartographie relationnelle des acteurs (ONG nationales et internationales, réseaux professionnels, bailleurs de fonds internationaux, organisations internationales) investis dans la “justice de transition” au Burundi - expression large permettant de comprendre l’évolution et la diversité des vocables et stratégies mobilisés autour de la justice - elle examine les liens entre action publique internationale et locale et advocacy, et les stratégies et activités de plaidoyer de professionnels internationaux de la paix au prisme de leur rapport avec société civile et acteurs politiques locaux. Elle s’articule autour de deux axes. Le premier étudie la réorientation des stratégies des ONG internationales (en particulier, Avocats sans frontières, RCN-Justice et Démocratie, et Global Witness) par rapport aux acteurs publics internationaux et nationaux et avec la société civile nationale au prisme du contexte de transition ouvert par les Accords d’Arusha (2000) et de la brutalisation actuelle du pouvoir. En retour, elle examine les effets de cette temporalité de transition et de l’investissement d’acteurs internationaux sur les stratégies des acteurs locaux, tant ONG locales (en particulier le FORSC (Forum pour le renforcement de la société civile) et le Groupe de réflexion sur la justice de transition) qu’acteurs publics.

Advocating for access to justice in Burundi: advocacy strategies and public policies targeted at “transitional justice” in a post-conflict situation

This communication is developed in the context of the “Irène” project (ISP-Nanterre) and is based on collective investigations in Burundi. Based on a relational cartography of international and local actors (NGOs, international organizations and donors, professional networks and local organizations) invested in “justice of transition” - used as a broad expression to encapsulate the evolution of terminologies and strategies around justice in Burundi - to explore the links between international and domestic public policy and advocacy, and the strategies and advocacy activities by international peace professionals in light of their relationship with domestic civil society and political actors. It is articulated around two axes. The first examines the orientation of the strategies of international NGOs (in particular Avocats sans frontières, RCN-Justice et Démocratie, and Global Witness) and their relationships with international and national public actors, as well as with local civil society, in light of the context of transition opened by the Arusha agreement (2000) and the current brutalization of the government in power. In turn, it examines the effects of this transition framework and the investments of international actors on the positions and strategies of local NGOs (in particular the FORSC (Forum pour le renforcement de la societé civile) and the Groupe de réflexion sur la justice de transition) and public actors.


Participants

BAILLOT Hélène hbaillot@gmail.com
BERNY Nathalie n.berny@sciencespobordeaux.fr
BRIATTE François f.briatte@ed.ac.uk
DEZALAY Sara sara.dezalay@gmail.com
DUFOURNET Hélène helene.dufournet@isp.ens-cachan.fr
GUEYDIER Pierre pierre.gueydier@mines-paristech.fr
LEJEUNE Aude aude.lejeune@ulg.ac.be
LICKERT Victoria victoria_lickert@yahoo.fr
LEFRANC Sandrine slefranc@u-paris10.fr
LIMA Juliana ju.lvcpm@gmail.com
OLLION Etienne eollion@ens.fr
POPA Ioana ipopa@u-paris10.fr
SIMÉANT Johanna jsimeant@univ-paris1.fr 
STROUP Sarah sstroup@middlebury.edu
THIVET Delphine delphine.thivet@ehess.fr

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

© Copyright 2012 Association Française de Science Politique (AFSP)
27 rue Saint-Guillaume 75337 Paris Cedex 07 France
Téléphone : 01 45 49 77 51
Courriel : afsp@sciences-po.fr