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Congrès organisé en partenariat avec

Section Thématique 51

L’art comme indice et matrice des conflits armés
Art as an indication and a source of armed conflicts

Responsables

Thomas LINDEMANN (Université d’Artois) lindemannt@yahoo.com
Frédéric RAMEL (Sciences Po Paris, CERI) framel@free.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

L’étude des relations internationales est aujourd’hui caractérisée par un tournant esthétique (Bleiker, 2009). Celui-ci consiste à appréhender la réalité internationale à partir de sources et expressions artistiques, objets jusqu’à présent oubliés ou considérés comme accessoires. Notre propos consiste à explorer comment l’étude des créations artistiques améliore notre compréhension des conflits armés. Il entretient des affinités avec la posture de recherche élaborée par l’école de Cambridge, laquelle envisage les créations artistiques comme des « idées non-conscientes » et même matériellement incorporées, comme par exemple pour l’architecture gouvernementale (von Beyme 1996) ou la peinture à finalité publique (Skinner, 2003).
 
Il s’agit, en d’autres termes, d’explorer la composante stratégique du tournant esthétique : l’œuvre d’art comme expression identitaire du pouvoir politique, comme objet de conflit, les ressources artistiques comme outil de guerre, la circulation des œuvres comme facteur d’apaisement stratégique, l’action artistique comme vecteur de résolution des conflits.
 
Les contributions ayant un ancrage empirique seront privilégiées. Elles s’intéresseront aux processus artistiques de légitimation et de délégitimation de la violence guerrière. L’art sera défini dans un sens large car les produits culturels banalisés comme le cinéma, les séries télévisées ou les BD participent aussi à ce cadrage du « sens(es) belliqueux ». Nous considérons aussi l’espace artistique comme un espace conflictuel où des acteurs divers s’affrontent pour imposer la « bonne » lecture des guerres. Cette perspective permettra d’examiner ainsi le rôle des artistes, des musées ou des organisations non gouvernementales par rapport aux Etats (rapport entre diplomatie culturelle formelle et informelle) dans la création des « cultures » de paix ou de guerre.
 
International Relations studies benefit from an aesthetic turn (Bleiker, 2009). It aims at handling international reality thanks to artistic sources, expressions or performances : objects of research that have been forgotten or qualified as peripheric in academic production. This section is dedicated to armed conflicts : how artistic creations improve our understanding of such phenomena. This perspective has links with Cambridge School of political ideas that studies creations as “non-conscient ideas” and materially incorporated, as for governmental architecture (von Beyme 1996) or public paintings (Skinner, 2003).
 
We propose to analyse the strategic dimension of this aesthetic turn : artistic pieces as expression of identity for political power, as object of conflict, artistic resources as war instrument, exchange of pieces as peaceful factor, artistic action as a mean to conflict resolution.
 
We also will focus on empirical descriptions that deal with artistic process of legitimization and delegitimization of war. Art will be defined in a large perspective because cultural products as movies, TV series, or comics help to understand the signification of bellum. We are convinced that artistic space is also a conflictual one where actors cope with in order to impose the relevant meaning of war. This posture allows us to analyse the role of artists, museums or non-governemental organizations faced to States (relations between formal cultural diplomacy and informal cultural diplomacy) in the creation of war or peace cultures.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment A (27 rue Saint-Guillaume), salle A32


Programme

Axe 1 / L’art comme propagande

Discutant : Philippe Braud (IEP de Paris)

Axe 2 / L’art comme résistance

Discutant : Dominique Colas (IEP de Paris)


Résumés des contributions

Thomas Meszaros (Université Jean Moulin Lyon 3)

L’exposition nationale américaine de 1959 à Moscou une illustration de la guerre froide culturelle

A l’âge de la globalisation, où les identités des Etats se trouvent menacées par de nouveaux défis transnationaux, le facteur culturel occupe une place de plus en plus importante. Partie intégrante de la notion de culture, l’art, parce qu’il véhicule certaines valeurs et certaines images, s’inscrit dans la dialectique de définition des identités et des intérêts des Etats. Il apparaît comme un moyen au service de la politique étrangère des Etats pour assurer leur rayonnement sur la scène internationale. L’art trouve ainsi un écho particulier dans le champ de la discipline au travers notamment des notions de soft power et de diplomatie culturelle (formelle et informelle). Il constitue également un indice manifestant l’hétérogénéité ou l’homogénéité de certaines sociétés internationales ainsi que leurs degrés de conflictualité. L’exposition américaine de Moscou en 1959 constitue une illustration de cette idée. A partir de ce cas de figure cette contribution s'intéressera à la stratégie mise en place par les Etats-Unis pour valoriser la diversité de l’art Américain et l’american way of life, ce qui leur a permis de remporter la « guerre froide culturelle ». Finalement, la présente proposition interrogera la politisation de l’art comme outil de propagande, comme outil de légitimation et délégitimation de la violence, comme arme et attribut de la puissance.
 
Art as an indication of the homo-heterogeneity of international societies and source of conflictuality
 
At the age of globalization, when identities of states are threatened by new transnational challenges, the cultural factor plays a more and more important role. Integral part of the concept of culture, art, because it conveys certain values and images, is part of the dialectical definition of States' identities and interests. It is a mean for States' foreign policy to secure their influence on the international scene. Art refers in the field of IR discipline to particular concepts as the notion of soft power and cultural diplomacy (formal and informal). It is also an indication of the heterogeneity or homogeneity of international societies as well as their degrees of conflictuality. The American exhibition in Moscow in 1959 is an illustration of this thesis. From this particular case this contribution will focus on the strategy implemented by the United States to enhance the diversity of American Art and the American way of life, which allowed them to win the « cultural Cold War ». Finally, this proposal will examine the politicization of art as a propaganda tool, as a tool of legitimation and delegitimation of violence, as a weapon and an attribute of power.

 
Solène Soosaithasan (IEP de Lille)

Entre guerre(s) et paix, l'art comme vecteur de légitimation de la violence des 'Tigres tamouls'  
 
L'art et la guerre ont une relation particulière et très étroite en Asie du Sud, notamment en Inde et au Sri Lanka. Les héros sont souvent dépeints dans des fresques légendaires à travers la musique et la danse, les films. La légende du Ramayana retrace les faits héroïques de certains dieux et semi-dieux. Les films actuels indiens retracent aussi l'histoire d'hommes ordinaires qui se révèlent finalement être des "super héros"  (des policiers, des militaires,…). Ceux-ci défendent les intérêts de la nation vis à vis des criminels, des traîtres ou encore des étrangers venus semer le chaos, etc. L'art tend par ailleurs à valoriser le genre masculin. L’homme est perçu comme viril, il n'a pas peur de mourir mais combat pour ses idéaux tandis que l'ennemi du héros est un être perfide et vil qui sera châtié tôt ou tard. La plupart de ces représentations est donc manichéenne, les réalisateurs ou les metteurs en scène cherchent à transmettre un ou plusieurs messages, à "éduquer" les spectateurs. C'est ainsi que les thématiques du sang, du sacrifice et de la bravoure sont par exemple très importantes dans les discours, les chants, la danse et la représentation théâtrale encadrés par les membres du LTTE (Ligue des Tigres tamouls de l’Eelam). D'où une forte perméabilité entre fiction et réalité qu'utilisèrent ingénieusement Prabhakaran (chef du LTTE de 1974 à 2009) et les cadres du LTTE pour défendre leur cause (la naissance de l'Eelam, un Etat sécessionniste du reste du Sri Lanka) et légitimer ainsi la violence. Les ressources artistiques sont alors utilisées comme une « propagande intégrative » [Silverstein, 1987]. Le LTTE a su s’imposer dans le paysage politique et social en provoquant l’adhésion d’une grande partie de la population sri lankaise tamoule, et en particulier celui de la diaspora.
 
Between war and peace, Art as an instrument to legitimate the Tamil Tigers’ violence
  
The art and the war have a very specific relation in South Asia, particularly in India and in Sri Lanka. The heroes are often described in legendary frescoes through music, dance and the movies. The legend of Ramayana traces the heroic actions of gods and semi-gods. The current Indian movies also picture the story of ordinary persons who finally turn out to be "great heroes" (policemen, military officers,…). They protect the interests of the nation, facing criminals, traitors or even some foreigners who try to bring the chaos into the country.
Moreover, this type of artistic resources praises men’s actions. The hero is perceived as virile, he is not afraid of dying but he fights for his ideals. Whereas his enemy is his opposite who will be chastised one day or later. Most of these representations are thus Manichean ones. The film directors try to give one or several messages and try "to educate" the audience.
That’s why themes are based on the blood, the sacrifice and the bravery. It is clearly seen in the speeches, the songs, the dance and the dramas controlled by the LTTE members (League of Tamil Tigers of Eelam). There is a strong connection between fact and fiction. Prabhakaran, leader of the LTTE (from 1974 till 2009) certainly understood that. He and his officers fought for their aim (the birth of Tamil Eelam, a secessionist State from the rest of Sri Lanka). Through the process, they tried to legitimize the use of violence. The artistic resources are then used as "integration propaganda" [Silverstein, 1987], the LTTE knew how to dominate the political and social scenes by having the support from a major part of the Sri Lankan Tamil population, and particularly from the Tamil Diaspora.

 
Christian Olsson (Université Libre de Bruxelles)

Film de propagande et guerre en Irak. « La forces du faible » : les deux traditions iconographiques dans les guerres contemporaines dites asymétriques
 
Dans de nombreuses doctrines militaires « conventionnelles », il y a l'idée que pour anéantir la volonté de l'adversaire, il faut recourir à la force écrasante, celle qui éblouit et paralyse l'adversaire, lui signifie sa supériorité, suscite « choc et frayeur », voire même la « terreur et l’admiration ». Pourtant, dans biens des contextes, les stratégies sacrificielles poursuivis par certains groupes « rebelles » tournent cette approche à leur avantage en esthétisant non pas la force écrasante, mais celui qui, conscient de sa faiblesse, décide de la confronter en choisissant héroïquement la mort certaine.
Ainsi les « idiomes de la force » pour reprendre l’expression de Schelling, mais aussi les représentations esthétisées de la guerre (et les symboles à l’efficacité mobilisatrice) qui en découlent, vont souvent être différents, voire incompréhensibles, de part et d’autre (à supposer qu’il y ait deux « camps ») dans ces conflits dits asymétriques. La fréquence des oxymores et des paradoxes dans le langage stratégique qui s’y réfère témoigne du caractère hors norme de ces guerres au regard du raisonnement stratégique dominant : la « force du faible », l’« impuissance de la puissance »....
Dans ce contexte, cette présentation vise - au travers d’une analyse des représentations esthétisées de la guerre mobilisées dans le cadre de ces conflits (images, films, romans…) - à retracer la généalogie de ces deux iconographies de la violence, celle de la force éblouissante d’une part, celle de la résistance du faible face au fort d’autre part, cela afin de comprendre comment émerge la pensée oxymorique (et non moins esthétisée) des « guerres asymétriques ».
 
« The Force of the Weak »: The Two Iconographic Traditions in Contemporary So-Called “Asymmetric Wars”

In many a “conventional” military doctrine, the aim of war is said to be to annihilate the will of the enemy by resorting to overwhelming fire-power that paralyses the adversary and induces “chock and awe” or even “terror and admiration”. However, frequently in the contemporary wars involving “conventional” armies, the “rebel” or “insurgent” groups confronting them will manage to turn this approach to their own advantage by estheticising not “overwhelming decisive force”, but he/ she who, conscious of his/ her weakness, decides to confront it heroically by choosing certain death.
The idioms of military force, to borrow Schelling’s expression, but also the estheticised representations of war (and the mobilizing symbols) that flow from it, will hence often be different, or even incomprehensible, on both sides fighting (if only two sides can be distinguished) in these so-called asymmetric conflicts. The frequent use of oxymora and paradoxes in the strategic discourses on these wars highlights their irregular character from the point of view of these very discourses: superior firepower does not any longer establish superiority it is said, since it will only strengthen the weak…
In this context, this presentation aims at analysing, through the estheticised representations of war mobilized in these conflicts (images, films, novels…), the genealogy of these two iconographies of violence (the one of overwhelming force on the one hand, the one of the heroic resistance of the weak on the other). Our hope is thus to better grasp how the paradoxical and oxymoric (and not less estheticised) thinking in terms of “asymmetric war” emerges.

Xavier Crettiez, Pierre Piazza (Université Versailles St-Quentin en Yvelines, Université Cergy-Pontoise)

L’iconographie nationaliste contestataire en Corse, Pays Basque et Irlande du Nord

Cette intervention repose sur un travail de terrain de plusieurs semaines qui a permis un relevé exhaustif des fresques, graffs, stickers, dessins et pochoirs présents dans l’espace public de ces trois régions secouées par des velléités nationalistes souvent violemment exprimées. Sur la base d’un important corpus de plusieurs milliers de signes iconographiques, allant des Murals en Irlande du Nord aux simples graffitis en Corse, on proposera une réflexion sur l’usage de l’espace public à des fins militantes par des organisations ou individus se réclamant du nationalisme (et du loyalisme dans le cas nord irlandais). Il s’agira ici de présenter ce que les murs ont à dire : un discours caché, évoqué de façon sauvage et non institutionnelle, parfois en contradiction avec le discours public des organisations porteuses de la lutte nationaliste. Plus largement, on utilisera l’image comme support réflexif à une sociologie des mobilisations en centrant le propos sur son potentiel affectuel : cadre cognitif de l’action collective en proposant ce que Michael Billig appelle un « nationalisme banal » (banal nationalism), l’image est aussi un important support émotionnel à l’engagement politique, parfois violent.
 
Protesting nationalist iconography in Corsica, Basque Country and Northern Ireland
 
This contribution is based on a field work of many weeks which allows an exhaustive inventory of murals, graffiti, stickers, draws and stencils which may be seen in the public space of these three areas, shacked by nationalist reclamations, even violent ones. On a more than one thousand corpus of iconographic signs, from Murals in Northern Ireland to single graffiti in Corsica, we’ll propose a reflexion on public space militant practices, from organization or individuals claiming nationalist orientations (or loyalist orientation in the Northern Ireland case). We’ll intend here to present what walls want to yell: an hidden discourse, non institutional, mainly in opposition with the official public discourse used by nationalist political organizations. Broadly, we’ll use the picture as a tool for sociology of mobilizations, mainly as an emotional carrier: picture may be used as a cognitive frame in order to impose a “banal nationalism” (Michael Billig) in the public space, but may also be used as an emotional support to political commitment and may even encourage violence.

 
Johanna Gonzales, Denis Lawson (Sciences Po Bordeaux Université Bordeaux IV)

Expression artistique et violence politique en Colombie (1948-1958)

L’idée générale de notre communication repose sur une vision non classique de la production artistique. Il ne s’agit pas donc pour nous de travailler à partir des matériaux acceptés de manière générale comme objets d’art : ouvrages littéraires, tableaux, sculptures, productions audiovisuelles… réalisés au cours de la période allant de 1948 à 1958 en Colombie. En effet, nous chercherons à démontrer que les rituels de mise à mort de l’autre qui ont caractérisés cette période peuvent être perçus comme « des formes de production artistique », en tant que mécanismes d’expression de l’imaginaire collective. On verra donc dans ces rituels une sorte de « mise en scène » évoquant des figures empruntes « d’expression artistique ».
Dans cette décennie colombienne, ce que nous appelons la « production artistique » était devenue un « processus » quotidien saisissable de façon temporaire (ce qui révèle sa matérialité), mais dont l’histoire, la permanence et l’impact sur les consciences sont dans sa dimension linguistique. Comme « processus » elle est donc difficilement saisissable puisqu’elle varie dans le temps et épouse continuellement le jeu de la violence. La forme du produit change ainsi à volonté à mesure qu’elle entre et prend vie entre les mains de « l’artiste».

Ritualized violence as « artistic production »: The case of Colombia (1948-1958)

The overall idea of our communication is based on an unconventional vision of artistic production. We are not working on materials generally accepted as art such as: literary books, paintings, sculptures, audiovisual productions…made in Colombia during the period 1948 to 1958. Rather, we aim to demonstrate that the ritual killing of the “other” which characterized this period can been seen as “forms of artistic production” and as mechanisms of expression of collective imagination. We therefore see in these rituals a sort of “depiction” evoking figures borrowed from “artistic expression”. During this decade, what we refer to as “artistic production” became a daily “process” understood in a temporary way (which revealed its materiality), but whose history, permanence and impact on awareness were in a linguistic dimension. As a “process” it is therefore difficult to understand because it varies in time and is continually linked to a violent game. The form of the product also freely changes as it enters into, and takes life, in the hands of the “artist”.

Mathias Delori (Centre Emile Durkheim)
 
Une poésie enfin dialogique? Les poèmes de Guantanamo comme demande de reconnaissance
 
Dans la littérature spécialisée, la poésie de résistance est tantôt analysée comme un genre littéraire dont il convient de dévoiler la grammaire, tantôt comme un acte politique dont on cherche à mesurer la portée. Ce papier propose de jeter un pont entre ces analyses « littéraires » et « socio-politiques » de la poésie de résistance à partir d’une réflexion sur les poèmes de Guantanamo. Pour ce faire, je reprends l’idée avancée par J. Butler selon laquelle ces poèmes sont une réponse au déni  de reconnaissance subi par les détenus. Plus précisément, je montre que ces poèmes sont un des rares exemples de poésie « polyphonnique » au sens de M. Bakhtine. Ces poèmes sont une tentative de « dialogue » avec plusieurs personnes : avec les tortionnaires, les lecteurs, les autres poètes arabes et/ou résistants, etc.
 
A Dialogical Poetry after all ? The poems of Guantanamo as a denial of recognition
 
So far, resistance poetry has led to two kinds of analyses. First, specialists of literary theory have observed that resistance poetry is a literary genre of a particular kind, and therefore tried to uncover in what sense it formally differs from other kind of poetry. Second, students of politics have analyzed resistance poetry as a political act, and therefore tried to measure its political significance. This paper aims at bridging the gap between these two approaches by focusing on a recent example of resistance poetry: the poems from Guantanamo. To do so, I draw upon the idea put forward by J. Butler that these poems are a response to the denial of recognition experienced by the detainees. More precisely, I show that these poems are a rare example of “polyphonic” poetry in the sense of M. Bakhtin. These poems are an attempt to “dialogue” with many people: with the torturers, the readers, the other Arabic/resistant poets, etc.

 
Damien Simonneau (Sciences Po Bordeaux, Centre Emile Durkheim / IRSEM)

Art et murs : Exemples de subversions artistiques de séparations sécuritaires

L’érection de murs de séparation s’accompagne d’une prolifération d’expressions artistiques diverses, allant du simple graffiti amateur à des projets artistiques élaborés. Le mur se donne à voir. Cet impératif de visibilité est investi par des artistes pour remettre en cause la stratégie sécuritaire-militaire dominante. Au-delà de constituer un support idéal pour des formes d’expressions à visées sociales, guerrières ou politiques, il existe des œuvres picturales sur les parties solides du mur  (taule, bêton) ou des performances artistiques utilisant le mur comme décor. Se fondant sur notre expérience de terrain auprès de deux murs  (Jérusalem & Arizona), nous avons observé que les créations artistiques sur ou avec le mur visent à délégitimer la nature sécuritaire de la séparation imposée. Elles cherchent surtout à démontrer l’artificialité de la séparation en mobilisant des références culturelles locales ou universelles.  Nous proposons donc d’étudier les procédés artistiques de subversion du dessein sécuritaire-militaire du mur dans ces deux contextes géopolitiques distincts. Notre analyse se fonde sur deux types de réflexions : d’une part la dénonciation de la déshumanisation que génèrent les murs, ce que conceptualise Marc Augé comme la constitution de non-lieux ; d’autre part, la dénonciation de l’artificialité de la séparation par la création de lieux « autres » hors du mur mais qui pourtant restent localisables, ce que Michel Foucault nomme des hétérotopies.
 
Art and walls: subversive artistic technics against security-motivated separations
 
The imperative of visibility behind the building of separation walls offers opportunities for amateur and professional artists to express their creativity as well as to question the mainstream military security thinking. On many concrete or sheet metal parts of walls, some artistic performances are displayed. The wall is also used as scenery. Thanks to a fieldwork research in the shade of two contemporary separation walls in Jerusalem and the U.S. Southwest, I have observed that in both contexts artists tend to delegitimize the security nature of the implemented separation. Such performances aim to demonstrate the artificiality of the separation by mobilizing local or universal cultural references. I propose to study some of the processes of artistic subversion in both contexts. I will refer to two conceptual thinking; namely, Marc Augé’s “non-lieux” and Michel Foucault’s “hétérotopies” to illustrate subversive artistic strategies to first denounce dehumanization, and secondly to denounce the artificiality of the separation.


Olivia Leboyer (Chercheur associée au PACTE)
 
1913 : Rêveries militaires de Valery Larbaud autour de petits soldats de plomb

Le romancier et poète Valery Larbaud a écrit des textes d’une grande finesse sur les rêveries militaires : dans Enfantines, la nouvelle « La Grande Epoque » (1913) retrace les jeux guerriers et les fantasmagories de trois enfants. Les stratégies enfantines, aussi subtiles que celles des adultes, expriment des aspirations confuses et un rêve de grandeur encore conforme à l’idéal guerrier de l’époque d’avant la Grande Guerre.
Dans le court texte Questions militaires, écrit cette même année 1913, Valery Larbaud s’interroge toujours sur le pouvoir de l’imagination. En quelques pages aussi précises qu’insolites, il livre une réflexion étonnante sur sa passion de collectionneur pour les petits soldats de plomb, figurines des plus précieuses à ses yeux et prétextes à la rêverie. La dernière phrase du texte, très frappante, nous servira de pivot pour étudier les liens, chez Larbaud, entre la guerre et l’imagination :
« J’achèterai des pièces non peintes, je combinerai des têtes avec des corps, j’inventerai des uniformes, et j’aurai une armée à moi ! Oui, mon armée à moi, et mon drapeau, et mes maréchaux… » Au fond, c’est ce que nous désirons tous : avoir notre armée à nous. »
En étudiant ces belles pages de Valery Larbaud, écrites au moment charnière de 1913, nous nous pencherons sur un imaginaire singulier, sensible, qui s’appuie sur la tradition, sur les rêveries militaires de la fin d’une époque.
 
1913 : Military fantasies of Valery Larbaud around tin soldiers

The novelist and poet Valery Larbaud has written very fine texts on military fantasies: in Enfantines, the short novel « La Grande Epoque » (1913) describes war games and fantasies of three children. The childish strategies, as subtle as the adults’ ones, reflect confusing expectations and grand ambitions that are still aligned with the war ideals of the period before the Great War.
In the short text Questions militaires, written in the same year 1913, Valery Larbaud questions again the powers of imagination. In a few pages that are as precise as they are unusual, he delivers a surprising reflection on his passion for tin soldier collection, which he considers a most precious pretext for dreams and fantasies.
The last sentence of the text, particularly striking, could be considered a pivot articulation to study the links between war and imagination in Labaud’s works :
« I will buy non decorated pieces, I will combine heads and bodies, I will invent uniforms and I will have my own army ! Yes, my own army, my flag, my generals […]. Eventually, what all of us we want is : to have our own army. »
By studying those beautiful pages by Valery Larbaud, written in the turning point of 1913, we will focus on a singular and sensitive imagination, which is anchored in traditions, in military fantasies signalling the end of an era.


François Colombera-Gleize (Université de Lille2)

Guerre et occupation du sud Liban : le cinéma contemporain israélien comme reflet de la perception conflictuelle d’une société
 
Le cinéma israélien contemporain a abordé récemment au moyen de trois films la question de l’opération « Paix en Galilée » de 1982 et l’occupation du Sud du Liban qui s’ensuivra jusqu’en 2000 : « Valse avec Bashir » d’Ari Folman (2008), de « Lebanon » de Samuel Maoz (2009) –et  « Beaufort » de Joseph Cedar (2007). Une analyse de ces trois œuvres cinématographiques offre une illustration didactique et heuristique de la construction de la réalité conflictuelle israélienne et du rapport de la société israélienne avec ses voisins. S’il s’agit de réalisations critiques de la guerre et de l’occupation elles éclairent des concepts sociaux israéliens propres utilisés en sciences sociales expliquant la perception conflictuelle de ce pays. Que l’on prenne les réflexions sur le complexe de Massada, symbolisant l’idée qu’Israël serait assiégé par ses voisins ou les notions d’En Brera, désignant le sentiment que les guerres dans lesquelles Israël s’engage sont non voulues et même subies, et de Tohar HaNéchek, désignant une moralité supérieur des soldats israéliens par rapport à ses adversaires ces notions se retrouvent éclairées par les scénarii et mises en scènes de ces films.

War and occupation of southern Lebanon: Israeli contemporary cinema as a reflection of the conflicting perception of a company
 
Contemporary Israeli cinema has recently addressed through three films the question of "Operation Peace for Galilee" in 1982 and the occupation of southern Lebanon that will ensue until 2000: "Waltz with Bashir" by Ari Folman (2008), "Lebanon" by Samuel Maoz (2009), and "Beaufort" by Joseph Cedar (2007). An analysis of these three films gives a didactic and heuristic illustration of construction of Israeli conflict reality and relations of Israeli society with its neighbors. If these movies are critic of war and occupation they enlighten some Israeli social concepts used in the social sciences who explain their conflict perception. Whether we take reflections on Masada complex, symbolizing the idea that Israel is besieged by its neighbors, the En Brera notion, designating the feeling that wars in which Israel commits are unwilled and even suffered and Tohar ha-nechek designating a superior moral of Israeli soldiers against his opponents, found these notions enlightened by screenplays and mises-en-scène of these films.


Participants

BRAUD Philippe ph.braud.paris@orange.fr
COLAS Dominique dcolas@noos.fr
COLOMBERA François francois.colombera@gmail.com
CRETTIEZ Xavier xavier.crettiez@wanadoo.fr
DELORI Mathias Mathias.Delori@EUI.eu
GONZALES Johanna johisg@yahoo.com
JEANGENE VILMER Jean-Baptiste jb.jeangene.vilmer@gmail.com
LAWSON Denis Lawson_denis@yahoo.fr
LINDEMANN Thomas lindemannt@yahoo.com
MESZAROS Thomas thomas.meszaros@noos.fr
NAVEAU Pascale pascalenaveau@yahoo.fr
LEBOYER Olivia olivia.leboyer@wanadoo.fr
OLSSON Christian Christianolssonfr@yahoo.fr
PIAZZA Pierre piazza@cesdip.fr
RAMEL Frédéric frederic.ramel@sciences-po.org
SIMONNEAU Damien dam.simonneau@gmail.com
SOOSAITHASAN Solène solene.soosaithasan@yahoo.fr

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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27 rue Saint-Guillaume 75337 Paris Cedex 07 France
Téléphone : 01 45 49 77 51
Courriel : afsp@sciences-po.fr