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Section Thématique 57

Comment étudier les clubs, les fondations politiques et les « think tanks » ?
How to study clubs, political foundations and think tanks ?

Responsables

Mathieu LAURENT (Centre d’études et de recherche en science administrative – Université Paris 2) mathieulaurent@hotmail.com
Thibaut RIOUFREYT (Laboratoire Triangle (UMR5206) – ENS Lyon/Université Lyon2)  thibaut.rioufreyt@univ-lyon2.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

La visibilité des fondations politiques et des « think tanks », leur nombre et la diffusion de leur production ne cessent de s’accroître dans la vie politique des démocraties occidentales. Loin d'être un fait nouveau dans les pays anglo-saxons, on trouve trace de tels groupements dès les années 1940-1950 (comme la Rand Corporation créée en 1946, la Société du Mont-Pélerin en 1947 ou l'Institute of Economics Affairs en 1955), voire même avant selon les définitions retenues. Toutefois, c'est au cours des années 1970-1980 que l'on assiste au développement spectaculaire du nombre de think tanks aux États-Unis (Heritage Foundation en 1973, Cato Institute en 1977) et au Royaume-Uni (Centre for Policy Studies en 1974, Adam Smith Institute en 1977, Institute for Public Policy Research en 1988). Ce développement explique que ce sont des chercheurs états-uniens et britanniques qui se sont intéressés les premiers à ces groupements à la croisée du savoir et du pouvoir. De son côté, la science politique française semble encore balbutiante dans son appréhension de ces objets : si les études portant sur les clubs politiques des années soixante sont nombreuses, les travaux sur les organisations plus récentes sont plus rares, alors que ces dernières se sont multipliées. En effet, à partir de la fin des années 1990 et sous des formes sensiblement différentes, des groupements reprenant des labels ou certaines des méthodes issus des fondations et des think tanks anglo-saxons sont apparus en France, qu'ils soient proches de la gauche antilibérale (ATTAC, Fondation Copernic), de la social-démocratie (En Temps réel, Terra Nova, République des Idées...) ou de la droite libérale (Fondation Concorde, Fondation pour l’innovation politique…). L'objet de cette section thématique est de s'interroger à la fois sur les apports des enquêtes réalisées et sur les perspectives de recherche qui s'ouvrent. Ce sera ainsi l'occasion d'engager une réflexion plus systématique sur ces groupements autour de trois axes principaux :

Axe 1 : Quels outils conceptuels pour appréhender ces groupements ?
Il s'agira dans un premier temps d'aborder la question du classement de ces groupements, c'est-à-dire de réfléchir aux outils notionnels et conceptuels permettant de les appréhender tout en mettant à distance les luttes de classement qui se jouent entre les acteurs de cet espace. Relèvent-ils de la catégorie des groupes d’intérêt ? Comment les différencier des lobbies ? Comment les situer par rapport aux organes de conseil et de réflexion institutionnels, tels que le Centre d'analyse stratégique ou le Conseil économique, social et environnemental ? Par ailleurs, la circulation du label think tank, de ses usages dans l'espace politique ou intellectuel français ainsi que des formes concrètes qu'elle revêt (en termes de financement, d'organisation interne, de statut...) permettrait sans doute d'objectiver les importantes différences structurelles avec d'autres pays, ce qui ne signifie pas qu’il n’y ait pas certaines logiques communes à la création de ces groupements, au-delà des différences entre les contextes politiques nationaux. Ils semblent ainsi contribuer à une externalisation de la production programmatique en dehors des partis et mobiliser des groupes sociaux plus rétifs à l’engagement partisan (universitaires, experts…).

Axe 2 : Quelles relations entre ces groupements et les formations partisanes ?
Le second objectif de cette section sera d'aborder la question des rapports qu'entretiennent ces groupements et les formations partisanes, et en particulier les moyens d'objectiver et de mesurer l’« influence » supposée des premiers sur le champ politique : l’étude de la carrière d'« idées » élaborées dans un de ces groupements jusque dans le programme ou la doctrine officielle d'un parti permettrait sans doute de mieux cerner les interactions qui se nouent entre ces structures. Par ailleurs, l'analyse même de ces interactions, à la croisée des différents champs intellectuel, économique, administratif et politique, gagnerait sans doute à puiser dans les outils tant notionnels que pratiques élaborés par l'analyse des réseaux sociaux. Il s’agira d’approfondir la réflexion portant sur le rôle des idées dans le champ politique, en insistant sur les méthodes permettant d’objectiver la circulation transnationale ou transsectorielle des idées ou de mettre à distance la vision des acteurs engagés dans les luttes politiques ou intellectuelles tout en prenant au sérieux leur discours.

Axe 3 : Acteurs centraux et fonctionnement concret de ces groupements
Il s’agira enfin d’identifier les acteurs investis dans ces structures, qui peuvent se situer au carrefour de différents secteurs comme à l’intersection de plusieurs courants idéologiques organisés. La reconstitution de la trajectoire et des dispositions d'acteurs centraux tels que François Furet ou Pierre Rosanvallon, par exemple, pourront être utiles à l’analyse des conditions d'émergence et de développement de ces organisations. A cet égard, les travaux portant sur l’engagement des intellectuels et des experts pourront être mobilisés. Par ailleurs, le fonctionnement concret de ces structures intersectorielles devra être abordé : semblant favoriser un militantisme souple centré sur le travail intellectuel, ces groupements intellectuels mobilisent des réseaux d’experts, travaillant au sein de groupes de travail et de commissions, qu’on tentera d’appréhender plus finement.
 
 
The visibility of political foundations and think tanks, their number and the impact of their work has been expanding in politics of western democracies. Far from being a new phenomenon in Anglo-American countries, the trace of such groups dates back to the 1940 and 1950’s, and even before depending on the definitions chosen. However, it’s during the 1970 and 1980’s that a spectacular increase of the number of think tanks took place in the United States and in the United Kingdom. This development explains why Anglo-American scholars first became interested in the study of these groups which lay at the crossroad of knowledge and power.
 French political science still approaches these objects of study with apprehension : though quite a good deal of research on  political clubs of the 1960’s can be found, works on more recent groups are quite rare, despite the fact that these organizations have multiplied. The purpose of this thematic section is to question both the contributions of investigations undertaken and the areas of research which are opening up.

Area 1: Which Conceptual Tools?
The first step consists in classifying these groups, i.e to question which notional tools used to seize them. How can we distinguish them from lobbies? How do we situate them in relation to institutional think tanks? Besides, the use of the think tank "label" could highlight the structural differences between France and other countries, even if common trends can be found.

Area 2: The Relationship between Think Tanks and Political Parties
The second goal of this section is to analyze the supposed influence of think tanks on political parties: the study of ideas provided by these groups could help to study the interaction between these two types of structures, with further help, maybe, from work on social networks.

Area 3: Central Actors and Concrete Functioning of these Groups
In the third stage, we will try to identify the key actors of these structures, located at the crossroads of different social or ideological sectors: career reconstruction of central actors such as François Furet or Pierre Rosanvallon could help one to understand  the conditions of development of this type of organization. Moreover, the internal functioning of think tanks will be questioned: they seem to encourage flexible activism, mobilizing networks of experts who work in small task groups and commissions.

Bibliographie indicative

ANDRIEU Claire, Pour l’amour de la République. Le Club Jean Moulin : 1958-1970, Paris, Fayard, 2002.
BELORGEY Nicolas, CHATEIGNER Frédéric, HAUCHECORNE Mathieu & PÉNISSAT Étienne, « Théories en milieu militant. Introduction », introduction et présentation d'un numéro spécial intitulé « Théories en milieu militant » de Sociétés contemporaines, n° 81, vol. 1, 2011, pp. 5-25.
BLONDIAUX Loïc, « Les clubs : sociétés de pensée, agencement de réseaux ou instances de sociabilité politique ? », Politix, n° 2, printemps 1988, pp. 29-42.
CARPENTIER-TANGUY Xavier, « Influences et innovations politiques : les think tanks (perspective historique) », Études européennes, n° 9, 2006.
CARPENTIER-TANGUY Xavier, 2006, « Tours d’ivoire ou tours de contrôle : les think tanks, une nouvelle élite pour penser l’Europe ? », communication au colloque « Une Europe des élites ? », Bordeaux, 27-29 avril 2006.
DENHAM Andrew, GARNETT Mark & STONE Diane, Think tanks across nations : a comparative approach, Manchester, Manchester University Press, 1998.
KANDIAH David Michael & SELDEN Anthony (dir.), dossier spécial « Ideas and Think tanks in Contemporary Britain », Contemporary British History, vol. 10, 1-2, printemps-été 1996, pp. 73-87.
MEDVETZ Thomas, « Les think tanks aux États-Unis. L’émergence d’un sous-espace de production des savoirs », ARSS, n° 176-177, mars 2009, pp. 83-93.
PAPAZIAN Patrick, « Think tanks…à la française ! Évolution et moyens des groupes de réflexion », in Rapport Anteios, Paris, PUF, 2007, pp. 181-185.
RICH Andrew, Think tanks, public policy and the politics of expertise, New York, Cambridge University Press, 1994.
STONE Diane, Capturing the Political Imagination : Think Tanks and the Policy Press, London, Frank Cass, 1996.
VAYSSIÈRE Bertrand, « La Fondation Saint-Simon : l'intellectuel, l'expert et la "complexification du monde" », in KOUVOUAMA Abel, GUEYE Abdoulaye, PIRIOU Anne & WAGNER Anne-Catherine (dir.), Figures croisées d'intellectuels. Trajectoires, modes d'action, productions, Paris, Karthala, 2007, pp. 371-385.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment J (13 rue de l'Université), salle J 201


Programme

Axe 1 / Approches et méthodes

Axe 2 / Études de cas sur les think tanks néo-libéraux, libertariens et patronaux


Résumés des contributions

Corinne Delmas (CERAPS (UMR 8026) – Université Lille 2)
 
Les think tanks et la démocratie participative

Ce papier traite du positionnement des think tanks français sur le thème de la démocratie participative, lors des dernières campagnes électorales. Le rôle des think tanks dans les processus de démocratisation a fait l’objet de nombreuses études qui insistent sur leur croissance et leur audience à l’échelle mondiale. Leur poids grandissant dans le débat et la décision publique incite à prendre au sérieux leurs positionnements sur le thème de la démocratie participative. Il s’agit ici d’orienter le regard sur la France, moins étudiée et marquée ces dernières années par une forte visibilité médiatique de ces structures. La communication interroge ce poids croissant des think tanks depuis le début des années 2000. La campagne électorale a été retenue en tant que moment propice à une telle étude des positionnements contrastés des think tanks sur les questions de démocratie participative. Ils peuvent se présenter comme des instruments de démocratie participative par souci de légitimation. Chacun porte toutefois une vision spécifique de la participation publique. La communication analyse ces positions contrastées.

Think tank and participative democracy

The paper deals with positions of the French think tanks on the topic of the participatory democracy during the last electoral campaigns. The role of think tank in the processes of democratization was the object of many studies which insist on their growth and their audience all over the world. Their increasing weight in the debate and the public decision incites to take their position on the topic of the participatory democracy seriously. The paper enlightens the case of France, less studied and marked these last years by a strong media visibility of these structures. It examines the increasing weight of think tanks from the beginning of 2000s. The election campaign is a moment particularly convenient to such a study of contrasted positions of think tank on the questions of the participatory democracy. They can present themselves as tools of participatory democracy with an aim of Legitimization. But each of them has a specific vision of the participation. The paper analyzes these special features.

Agathe Cagé (Centre européen de sociologie et de science politique (CESSP) – Université Paris 1)
 
Le concept de « champ faible », un outil heuristique pour une sociologie des think tanks ?

Importé des États-Unis à partir des années 1970, le « modèle » du  think tank s’est imposé parmi les outils incontournables de la montée en puissance et des recompositions de la figure de l’expert en France. Une véritable sociologie des think tanks en France reste toutefois à faire, qui pose le problème central de l’unité, de l’hétérogénéité, et en définitive de l’« existence » même de la catégorie de think tanks. Il s’agit de penser des logiques de structuration de l’espace des think tanks au-delà du seul recours à une étiquette et à un système de représentations communes. Reconstruire l’espace des relations dans lequel s’inscrivent les think tanks et, plus largement, déterminer leur position au sein de l’espace du pouvoir, pourrait en effet contribuer à renforcer l’appréhension par la science politique française de ces groupements. La spécificité des think tanks tient avant tout à la nature structurellement hybride de ces organisations – situées dans les interstices d’espaces de pouvoir multiples – et des propriétés sociales de leurs promoteurs, qui font de leur multipositionnalité une stratégie et érigent l’hybridité en critère de compétence.
Les think tanks en France se caractérisent comme des lieux d’échanges dont la majorité des acteurs, d’une part, dépendent largement d’activités professionnelles extérieures et dont, d’autre part, le succès, lorsqu’il est au rendez-vous, se caractérise selon un apparent paradoxe par une sortie de ces acteurs de l’organisation. L’espace des think tanks peut ainsi être pensé, en s’appuyant sur le concept forgé par Christian Topalov dans son étude de la nébuleuse réformatrice, comme un « champ faible », c'est-à-dire comme un espace hétéronome, éclaté entre logiques politico-étatiques, académiques, médiatiques et économiques, espace dépendant de pouvoirs extérieurs mais aussi lieu de production conceptuelle à l’impact extérieur réel. Le concept de « champ faible » permet en effet de penser, au-delà de la mise en lumière des convergences symboliques et structurelles de l’espace des think tanks, les « sorties de champ » comme des critères de réussite. Il laisse de plus entrevoir que le degré « d’influence » des think tanks ne saurait être déterminé au seul regard de leur capacité à durer, à grandir, ou à atteindre « la masse critique ». Il ouvre enfin la possibilité d’une analyse fine, c’est-à-dire s’appuyant sur des trajectoires individuelles, des conditions d’une possible reconversion dans les univers politico-étatiques, médiatiques, universitaires et/ou économiques, des capitaux spécifiquement accumulés grâce à l’inscription dans un think tank.
 
The concept of “weak field”, an heuristic tool for a sociology of think tanks?

Imported from the United States in the 1970s, the think tanks “model” is today a key tool of the “expert” figure in France. An actual sociology of think tanks is however left to do. It raises the central question of the unity, the heterogeneity and of the very “existence” of the think tanks’ category. One has to study the structuring logic of the think tanks space beyond any reference to labels or systems of shared representations. Rebuilding the space of relations in which the think tanks are incorporated and, more broadly speaking, determining their position in the space of power, could indeed contribute to reinforce the perception of these organizations in French political science. Think tanks’ special feature first comes from the structurally hybrid nature of these organizations. They are located in multiple spaces of power’s interstices. It also comes from their promoters’ social properties. These promoters indeed turn their multipositionnality into a strategy and set up hybridity as a criterion for skill. French think tanks are places for exchange in which most of the participants broadly depend on external professional activities. Moreover participants’ success, when it occurred, is paradoxically characterized by their exit of the organization. The think tanks space can thus be thought as a “weak field”, referring to Christian Topalov’s concept in his study of the “nebula reform” (“nébuleuse réformatrice”). It is an heteronomous space, fragmented in politico-public, academic, media-centred and economic logics. This space is dependent on external powers but at the same time is a field of conceptual production with an actual external influence.  The concept of “weak field” indeed allows us to think, beyond the highlight of the think tanks space symbolical and structural convergences, the “exits of the field” as criteria of success. Moreover, this concept indicates that think tanks’ degree of “influence” could not only be determined by their capacity to go on, to grow or to reach the “critical mass”. Finally, this concept opens the opportunity of a subtle analysis, that is to say an analysis based on the study of life trajectories and of the conditions of a potential conversion of specifically accumulated capitals through the participation in think tanks into politico-public, media-centred, academic and/or economic worlds.


Dorota Dakowska (SAGE – Sciences Po Strasbourg)

Entrepreneurs politiques de tous les pays. Pour une approche transnationale des fondations politiques

Si les fondations politiques et autres « laboratoires d’idées » suscitent de plus en plus d’attention, à mesure que leur visibilité dans l’espace public s’accroît, ces organismes sont souvent étudiés dans un cadre national. En dépit de leur intérêt indéniable, ces travaux laissent en suspens deux aspects. Tout d’abord, d’un point de vue étymologique, l’usage du terme think tank tend parfois à minorer le fait qu’il s’agit d’une notion émergée dans un contexte spécifique et qui recouvre des réalités très hétérogènes. Ensuite, la mise en parallèle des cas nationaux ne parvient pas toujours à saisir la complexité de la genèse et de l’institutionnalisation de ces organisations, surtout lorsque celles-ci impliquent des phénomènes de circulation transnationale.
En partant de ces travaux et en nous basant sur nos propres enquêtes empiriques, nous proposons d’enrichir l’analyse des « fondations politiques » par l’attention portée au prisme transnational. Privilégiant une démarche croisée, notre démonstration se penchera sur la circulation du modèle de fondation politique et la constitution de réseaux transnationaux par ces organisations. Ce cas permet de réfléchir au travail de traduction, voire d’hybridation dans la circulation internationale des dispositifs des fondations aux lendemains de la Guerre froide. L’attention portée à la constitution des réseaux par les fondations proches des partis politiques au niveau européen aide à saisir les logiques à l’œuvre dans ce type de mobilisation mais aussi les asymétries persistantes entre les différents membres de ces réseaux.

Political entrepreneurs of all countries. For a transnational approach of political foundations  

Political foundations and think tanks have become the subject of increasing interest as their visibility in the public space has grown. Yet, these organizations have been analyzed mainly in their national context. Though stimulating, existing studies have failed to address two aspects. First, from an etymological point of view, the word ‘think tank’ tends to be used without consideration of the specific context in which it emerged and of the heterogeneous realities it covers. Secondly, comparisons of national cases have not always accounted for the complexity of the emergence and institutionalization of these organizations, especially insofar as they relate to transnational circulation phenomena.
Based on the existing literature and on my own empirical research, I suggest refining the analysis of the political foundations by adopting a transnational perspective. Opting for a sociological analysis inspired by the ‘entangled history’ approach, I focus on the circulation of the political foundations’ model and on the way these organizations set up transnational networks. I then go on to investigate the hybridization of the foundations’ model and its translation in the aftermath of the Cold War. This focus on the networking of political foundations in relation to the political parties at the European level gives us a better understanding of the way foundations mobilize as well as an opportunity to pinpoint persisting imbalances among the members of these networks.  


Thomas Alam (CERAPS – Université de Lille 2)
 
« Enquêter « en sous-marin » dans un think and do tank européen », l’Epode European Network

Ma proposition ne vise pas à faire la promotion de « la » bonne méthode pour étudier les think tanks, clubs ou fondations mais cherche plutôt à revenir sur les vertus heuristiques d’un engagement – largement contraint par la nécessité économique – dans un de ces groupements : l’Epode European Network – un programme de recherche appliquée financée par la Commission européenne et par certains groupes de l’industrie agroalimentaire. Une telle entrée permet ainsi d’éclairer les transformations de l’action publique contemporaine et, plus généralement, de renseigner les processus sociopolitiques qui affectent le périmètre des États sociaux européens en ajustant la focale sur les activités de ce think and do tank. En particulier, ma communication cherche à tirer profit de la richesse empirique offerte par la participation observante (Soulé 2007) qui ne se résume pas à la seule collecte de données difficilement accessibles de l’extérieur. Cette posture de recherche implique précisément de marier approches externaliste et internaliste de la production d’expertise. En d’autres termes, les vertus heuristiques de la participation observante ont à voir avec une certaine forme de « sociologie charnelle » (Wacquant 2000). De même que pour appréhender l’habitus de boxeur, il faut payer de sa personne dans la salle de gym et sur le ring, je voudrais suggérer qu’on peut mieux comprendre le travail intellectuel réalisé dans les think tanks en devenant soit même un expert embarqué dans la réforme de l’Etat (Alam, Gurruchaga, O’Miel 2012). C’est en effet par le biais de l’indigénisation qu’on parvient à mieux cerner les attentes de rôle de l’expert ainsi que la contribution que la sociologie est sensée produire (Alam 2011). C’est aussi cette indigénisation – toujours relative et inaboutie – qui permet d’appréhender l’orthodoxie et l’orthopraxie du milieu enquêté, en mettant ici particulièrement à profit les gaffes et les bévues que n’a pas manqué de commettre le néophyte que j’étais (Goffman 1974, Gellner 1986). Enfin, parce qu’elle utilise directement comme medium d’enquête le chercheur engagé par et sur le terrain étudié, la participation observante invite à prendre au sérieux le potentiel heuristique de la perturbation (Devereux 1980 : 30). Assurément, la destinée du programme Epode en France et les avatars de l’EEN à l’échelle internationale invitent à souligner l’ambivalence des sciences sociales, tour à tour ressource de légitimation et de subversion.  
 
An undercover investigation in a European think and do tank européen: the Epode European Network
 

My ambition is not to promote « the » best method to study think tanks, clubs or foundations but to recall the heuristic value of an engagement – largely constrained by economic necessity – in one of these groups: the Epode European Network, an applied research programme funded by the EU Commission and certain food giants. Such an entry on the field enable to highlight the transformations of contemporary policy-making and, more generally, to give empirical evidence of the socio-political processes that are affecting European Welfare States, by focusing on the think and do tank activities. In particular, my communication will take advantage of the empirical wealth provided by observant participation (Soulé 2007) which goes beyond the sole collection of data hard-to-reach from outside. The methodological design implies linking externalist and internalist approaches to the production of expertise. In other words, the heuristic values of observant participation have a lot to do with “carnal sociology” (Wacquant 2000). Just as to get to grip with the “pugilistic habitus” one has to give of oneself in the gym and on the ring, I suggest that the intellectual work done in think tanks can only be understood by becoming an embedded expert in the State reform (Alam, Gurruchaga, O’Miel 2012). Going native helps to understand what are the expectations regarding experts and sociology (Alam 2011). Always relative and never completed, the process of indigenisation helps to know better the orthodoxy and orthopraxy of the studied milieu, by particulary reflecting on gaffes and blunders which were unavoidable for the rookie I was. Last, because the embodied experience of the ethnographer is the core medium of enquiry, observant participation suggests taking the relevance of disturbance (Devereux 1980: 30) seriously. Clearly, the destinies of Epode in France and of the EEN at the international level highlight the ambiguous role of social sciences as resource of legitimation and of subversion.

 
Marc Patard (IEP Paris)
 
Sociologie d’un groupe professionnel : les think tankers français
 
Notre étude des think tanks français s’inscrit dans le cadre d’une sociologie des groupes professionnels à partir d’une lecture interactionniste des pratiques observées au sein des think tanks depuis une observation participante et 54 entretiens semi-directifs. Il s’agissait pour mener cette étude d’isoler une population de think tanks français d’une part, et d’objectiver leur placement sur une carte ordonnée à partir d’une matrice à deux directions (l’axe savoir / pouvoir et l’axe droite / gauche) d’autre part. En premier lieu, il convenait d’analyser les obstacles épistémologiques puisque « l’acte même de qualifier » se heurte à des « résistances de la matière à classer » . Le cas des think tanks est, en effet, exemplaire de ces résistances liées, non seulement à l’élasticité du vocable et à la malléabilité de ces organisations, mais surtout aux « jeux entre façons de se définir ». Il s’agissait donc de démêler les think tanks d’autres instances qui leurs sont proches (communautés épistémiques, NMS, groupes de pression, clubs, sociétés de pensée, micro-partis et même partis politiques). En second lieu, c’est la méthode quali-quantitative ou Qualitative Comparative Analysis (QCA) qui fut sollicitée. Quels enseignements se dégagent de notre étude ? Les think tanks constituent des officines politiques et les think tankers, des groupes professionnels qui déploient des stratégies multiples pour pénétrer le champ politique par le biais de la production de recommandations politiques. S’inscrivant entre le savoir et le pouvoir, les think tanks sont engagés dans une triple logique, celle de la politique, celle des intérêts et celle de la professionnalisation.
 
A sociology of the French « think tankers »
 
This study of French think tanks is based on some professional groups’ sociology using an interactionist perspective thanks to a participant observation and 54 interviews.
In order to complete this study, the point was, on the one hand, to isolate members of French think tanks and, in the other hand, to position them on a dual matrix (axis knowledge/power & axis right/left). The plan was then to study any epistemological obstacles think tanks could be impacted by.
The objective was to make a clear difference between think tanks and other groups close from them (epistemic communities, NMS, lobbies, clubs, micro parties and even political parties).
The Qualitative Comparative Analysis (QCA) has then been utilized. What are the main conclusions of this study? Think tanks can be considered as political offices and think tankers as professional groups that desire to penetrate the political field through a large variety of political recommendations. Between knowledge and power, think tanks are playing on a triple scale: politics, interests and professionalism.

 
Kevin Brookes (Laboratoire PACTE – IEP de Grenoble)

Le rôle des clubs et des réseaux d’intellectuels libéraux dans la diffusion du néo-libéralisme en France. Le cas de l’ALEPS et du groupe des Nouveaux Économistes

Les idées néo-libérales ont connu en France, à partir du début des années 1980, une certaine audience tant dans le champ intellectuel que dans le champ politique. Alors que l’existence d’un « tournant » ou d’un « moment » néo-libéral dans la vie intellectuelle et politique apparaît dans la littérature scientifique, la « carrière » de ces idées est moins abordée. L’objectif de cette communication est double. Il s’agira d’une part d’analyser les conditions de la circulation du néo-libéralisme en France à travers la nébuleuse gravitant autour de l’Association pour la Liberté Economique et le Progrès Social. D’autre part, nous étudierons les usages de ces idées dans les années 1980 par des acteurs politiques de droite. Discuté dans des Universités d’été réunissant des hommes politiques et des prix Nobels d’économie, dans des commissions de partis politiques, dans des revues telles que Commentaire et dans différents clubs politiques, le néo-libéralisme porté par cette nébuleuse des « Nouveaux Economistes » insérés dans des réseaux militants internationaux contribuera à reconfigurer le discours et l’offre programmatique de la droite partisane dans les années 1980. Notre travail de reconstitution de la trajectoire intellectuelle de ces idées nous invite à contribuer à une réflexion plus générale sur les approches conceptuelles et les méthodes concrètes permettant de comprendre à la fois les conditions de l’émergence des think-tanks en France, mais aussi les moyens d’objectiver la mesure de leur influence sur l’offre partisane.
 
From the beginning of the 1980s onwards, neo liberal ideas have generated a degree of interest in France, both in the intellectual and the political domains. While the existence of a neoliberal 'turning point' in both the intellectual and political arenas in scientific literature is well referenced, the impact and the spread of these ideas are not as thoroughly researched. The aim of this report is twofold. Firstly, it examines the conditions for the spread of neoliberalism and its reception in France through the 'Association pour la Liberté Economique et le Progrès Social'. Secondly, it looks closely at the take up of these ideas by right wing political actors. Neoliberalism was at that time intensely discussed during summer schools gathering politicians and Nobel laureates in Economics, within political parties, in French publications such as 'Commentaire' as well as within political clubs. Promoted by 'New Economists' active in international militant networks, neoliberalism will contribute to restructure the political discourse of the right in France in the 1980s. This reconstruction of the spread of neoliberal ideas, invite us to contribute to a global reflection on the conceptual approaches and on the concrete methods which help us to understand the conditions of the rise of think-tanks in France, but also the way of measuring their influence on partisanship configuration.

 
Maïlys Gantois (CESSP/CRPS – Université Paris 1)
 
La négociation collective : une « success story » ?

Notre communication interroge la carrière d’une « idée » à l’origine controversée et aujourd’hui promue au sein d’une configuration d’acteurs dominants. Notre question de départ peut se résumer ainsi : pourquoi et comment le « milieu patronal » en est venu à promouvoir la pratique de la négociation collective ? Pourquoi et comment la négociation collective, notamment en entreprise, est-elle passée d’une pratique contestée par les organisations patronales au motif d’une mise en cause de leur pouvoir de direction à une « bonne » pratique, une pratique valorisée ? Afin de saisir le passage d’une réticence – voire d’une résistance – envers la négociation collective au travail de valorisation et de légitimation de sa pratique, nous cherchons à retracer la carrière de cette idée au sein de l’espace patronal avec un intérêt porté tant sur les organisations patronales que sur les clubs, cercles de réflexion ou think tanks qui gravitent autour. Nous montrons les conditions du « succès » de cette idée en restituant les interactions entre passeurs et promoteurs de celle-ci entre différents espaces : patronal, syndical et politique. Notre enquête s’appuie sur un travail sur archives, entretiens et observations.
 
Collective Bargaining: a « success story »?
 
Our proposal questions the career of one idea initially contested and now promoted within a social configuration of dominant actors. Our question is: why and how the employer’s environment came to promote the practice of collective bargaining? Why and how did collective bargaining, particularly in enterprise, from a contested practice by employer’s associations due to challenge their power of management became a “good” practice, a valorised practice, notably in enterprise? In view to understand the transition from a reticence – and even a resistance – toward collective bargaining to a work of valorization and legitimation of this practice, we try to retrace the career of this idea inside employer’s associations with a focus on employer’s organizations as well as clubs, circles and think tanks around. We show the conditions of this “success” for this idea by putting the light on interactions between promoters of this idea in different spaces: employers, unions and political. Our investigation is founded on a work on archives, interviews and observations.


Mickaël Ciccotelli (Laboratoire IRISSO (UMR 7170) – Université Paris-Dauphine)
 
« Influencer » les politiques publiques ou socialiser à la fonction patronale ? L'action des mouvements patronaux de sociabilité et de réflexion.

Les mouvements patronaux de sociabilité et de réflexion se proposent de produire des principes d'action censés guider les syndicats patronaux ou le monde des affaires. Un retour sur les propriétés sociales de l'adhésion à ces mouvements met pourtant en lumière les productions différenciées qui résultent de cette forme d'action collective. Les mouvements qui rassemblent des entrepreneurs à la tête de petites et moyennes entreprises apparaissent surtout comme des entreprises de production de patrons. Les mouvements qui sont aux mains de firmes multinationales disposent de ressources bien plus importantes qui en font des entreprises de structuration du patronat et de proposition de politiques publiques. Les mouvements qui regroupent tous les types d'entreprises oscillent entre ces deux pôles et fournissent donc la preuve du lien entre ressources et formes de l'action collective.

“Influencing” public policies or socializing to the employer function ? The action of the the sociability and thinking employers' movements.
 
The sociability and thinking employers' movements intend to produce principles supposed to guide the business organisations and the business world. Yet, a return on these movements' membership social properties show that different productions may result from this collective action. The Petites et Moyennes Entreprises rulers' movements mainly appear as undertaking producing employers. The multinational firms' movements get much more resources, enabling them to undertake the organization of the employers world. The movements that gather different kinds of companies swing between these two ways, proving the link between the resources and the forms of the collective action.


Participants

ALAM Thomas thomas.alam-3@univ-lille2.fr
BROOKES Kevin  kevin_brookes@hotmail.com
CAGÉ Agathe acage@clipper.ens.fr
CICCOTELLI Mickaël mickael.ciccotelli@gmail.com
DAKOWSKA Dorotha dorotha.dakowska@misha.fr
DELMAS Corinne corinne.delmas@univ-lille2.fr
GANTOIS Maïlys mailysgantois@yahoo.fr
LAURENT Mathieu mathieulaurent@hotmail.com
PATARD Marc marcpatard@free.fr
RIOUFREYT Thibaut thibaut.rioufreyt@univ-lyon2.fr

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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