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Section Thématique 6

Politiques publiques et démocratie. Les « policy feedbacks » et les attitudes et comportements politiques
Policy and democracy. Policy feedbacks, political attitudes, and behaviors

Responsables

Claire DUPUY (ISPOLE/ Université catholique de Louvain) claire.dupuy@uclouvain.be
Virginie VAN INGELGOM (ISPOLE/ Université catholique de Louvain) virginie.vaningelgom@uclouvain.be

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Comment les politiques publiques affectent-elles, de manière générale, le rapport des citoyens à la politique ? Cette question, directement tirée de l’analyse classique selon laquelle « new policies create new politics », est au cœur de la section thématique. Centrée sur la notion de « policy feedback », celle-ci vise à explorer comment l’action publique des gouvernements affecte, en retour, les citoyens (1). Si les rapports entre opinion publique et politiques publiques restent encore largement sous-étudiés, l’attention s’est jusqu’à présent davantage, même si timidement, centrée sur les modalités par lesquelles les citoyens influencent le contenu des politiques publiques (ces rapports sont explorés plus spécifiquement par la ST 7). Afin de caractériser ces modalités d’influence, les recherches ont été consacrées à l’étude de la représentation et des mobilisations des partis politiques, des mouvements sociaux ou des groupes d’intérêt. Les policy feedbacks sur les citoyens, en revanche, ont été beaucoup moins étudiés (Mettler & Soss, 2004 ; Soss & Schram, 2007). On ne dispose encore que de connaissances parcellaires sur les ressources que l’action publique peut fournir aux individus et sur les mécanismes par lesquels elles favorisent leur intérêt pour la politique et leur participation politique (Campbell, 2003 ; Lynch, 2006), sur les effets de légitimation du système politique ou de la démocratie que l’action publique génère (Dupuy & Van Ingelgom, 2012 ; Ervasti, Andersen, Fridberg, & Ringdal, 2012 ; Huseby, 1998), ou encore sur les mécanismes par lesquels les messages sur la communauté politique que les politiques publiques véhiculent jouent sur les comportements politiques et sur la construction des identités politiques (Mettler, 2005).
Travailler aujourd’hui à l’étude empirique des policy feedbacks sur les citoyens engage un certain nombre de questions d’ordre analytique et méthodologique que la section thématique se propose d’explorer. En premier lieu, la section thématique s’interrogera sur ce que sont les policy feedbacks. La littérature est relativement peu claire sur cette question. Les travaux qui leur ont été initialement consacrés les définissent comme les effets des politiques publiques sur la structuration des attitudes et des comportements politiques. Ils sont observables sur une période relativement longue, et sont véritablement transformatifs. La recherche de Suzanne Mettler sur la G.I. Bill est exemplaire de cette démarche (Mettler, 2005). Elle montre comment cette loi qui a ouvert aux soldats de la Seconde Guerre mondiale l’accès à l’enseignement supérieur et à l’enseignement professionnel a profondément accru leurs sentiments civiques et leur participation politique, électorale et non électorale. Certains travaux plus récents comprennent les policy feedbacks de manière plus large. Ils les définissent comme la réaction d’individus ou de groupes sociaux à des politiques publiques. En contribuant à l’analyse du soutien que le système génère, ces analyses s’inscrivent dans la perspective de David Easton, et analysent par exemple comment des changements dans la générosité des politiques sociales affectent le soutien à la démocratie (Kumlin, 2012 <#_ENREF_7> ). A l’aune de terrains empiriques, il va s’agir d’examiner les avantages heuristiques de chacune de ces positions, ainsi que leur potentiel explicatif.
 

On s’interrogera ensuite sur les conditions et les mécanismes producteurs des policy feedbacks. La littérature existante s’accorde pour souligner qu’il ne suffit pas qu’une politique publique soit développée et mise en œuvre pour qu’elle produise un effet retour. Soss et Schram s’attachent à distinguer les conditions dans lesquelles une politique publique peut exercer cet effet. Ils mettent l’accent sur la visibilité de la politique et sa proximité aux citoyens (Soss & Schram, 2007 <#_ENREF_15> ). Certaines recherches proposent de distinguer plusieurs mécanismes explicatifs des policy feedbacks (Mettler & Welch, 2004 <#_ENREF_11> ; Pierson, 1993 <#_ENREF_12> ). Elles distinguent en particulier l’effet par les ressources et l’effet interprétatif. L’effet par les ressources décrit “how resources and incentives provided by policies shape patterns of behaviour” alors que l’effet interprétatif renvoie quant à lui à “how policies convey meanings and information to citizens” (Mettler & Welch, 2004, p. 500 <#_ENREF_11> ). Mais il reste à explorer si ces deux mécanismes sont les seuls à rendre compte des policy feedbacks.


Enfin, on s’interrogera sur les méthodes d’étude des policy feedbacks. La plupart des travaux sur la question repose sur le traitement de données de sondage. Mais quel serait l’apport des méthodes qualitatives à l’étude des policy feedbacks ? Un certain nombre de travaux francophones mobilisant des méthodes qualitatives apportent des éléments très fructueux à l’analyse des policy feedbacks, sans toutefois nécessairement mobiliser cette notion (Dubois, 2010 ; Duchesne, 2012 ; Warin, 2010). On s’interrogera donc sur les apports de chacune de ces méthodologies à l’analyse des policy feedbacks.
 
(1) Les policy feedbacks sur les bureaucraties ou les groupes d’intérêt ont, pour leur part, été précisément explorés, en particulier par les travaux du néo-institutionnalisme historique (e.g. Pierson, 1994 , 2001 ; Weaver, 2010). En effet, ils peuvent s’exercer sur les organisations ou sur les individus (Pierson, 1993).


How do policies impact the relation of citizens to politics? Derived from the seminal statement that "New Policies create new politics", this panel’s main focus is on policy feedback. The reciprocal relations between public opinion and public policies are largely under-researched. So far, attention has mainly been paid to the ways in which citizens’ political attitudes and behaviors influence the content of public policies (see panel n. 7). Research on political parties, social movements and interest groups has offered stimulating insights. The other side of the coin, that is, policy feedbacks on citizen’s political attitudes and behaviors, has been far less investigated (Mettler & Soss, 2004; Soss & Schram, 2007). The literature offers fragmentary knowledge of the resources that public policies may provide to individuals; the mechanisms through which policies promote or discourage citizens’ interest in politics and their political participation (Campbell, 2003, Lynch 2006); the legitimation effects on the political system and democracy that policies may trigger (Dupuy & Van Ingelgom, 2012; Ervasti, Andersen, Fridberg, & Ringdal, 2012; Huseby, 1998); and the mechanisms through which the messages on the political community that public policies convey impact on political behaviors and the construction of political identities (Mettler, 2005).

Researching policy feedbacks raises a number of analytical and methodological issues that this panel aims to tackle. First, the issue of the nature of policy feedback is worth investigating, as this existing literature is still rather unclear on this issue. Originally, policy feedbacks were defined as the effects of public policies on political attitudes and behaviors. They were deemed to be observable over a relatively long period, and as being truly transformative. Mettler’ research on the GI Bill is an example of this approach (Mettler, 2005). She shows how, by giving veterans of the Second World War access to higher and vocational education, this law deeply increased the veterans’ feelings of civic duty and their political participation, both in electoral and non-electoral terms. Other works, recently published, argue for a broader understanding of policy feedbacks. They defined them as reactions of individuals or social groups to public policy. Thereby, such research contributes to the analysis of system’s support in the perspective defined by David Easton, for instance in analyzing how changes in the generosity of social policy impact on the support for democracy (Kumlin, 2012). Based on empirically-based contributions, the panel examines the assets and explanatory power of both understandings of policy feedbacks.
 
Second, the panel examines the political conditions and mechanisms that produce policy feedback effects. The existing literature agrees that the development and implementation of a policy does not by itself produce in return an impact on citizens’ attitudes and behaviors. Soss and Schram distinguish the political conditions under which public policy can actually produce an effect, and emphasize the role of a policy’s visibility and its proximity to citizens (Soss & Schram, 2007). Other research suggests several explanatory mechanisms of policy feedback effects (Mettler & Welch, 2004; Pierson, 1993). In particular, they differentiate resources effects from interpretive effects, respectively addressing the question of
how resources and incentives provided by policies shape patterns of behaviourand how policies convey meanings and information to citizens” (Mettler & Welch, 2004, p. 500). But it is still to explore whether these two mechanisms are the only ones at play when observing policy feedbacks, as well as the political conditions under which policies feed back citizens’ political attitudes and behaviors.
 
Finally, a methodological issue needs to be addressed in order to further develop the study of policy feedbacks. Mainstream literature relies on survey data. But what would be the contribution of qualitative methods to the field? A number of Francophone studies mobilizing qualitative methods offer fruitful alternatives without necessarily drawing on the notion of policy feedback (Dubois, 2010; Duchesne, 2012; Warin, 2010). The panel discusses therefore the contributions of each of these methodologies to the analysis of policy feedback.



Bibliographie

Campbell, A. L. (2003). How Policies Make Citizens. Senior Political Activism and the American Welfare State. Princeton: Princeton University Press.
Dubois, V. (2010). Politiques au guichet, politique du guichet. In O. Borraz & V. Guiraudon (Eds.), Politiques publiques, 2. Paris: Presses de Sciences Po.
Duchesne, S. (2012). National Identification, Social Belonging and Questions on European Identity. In R. Friedman & M. Thiel (Eds.), European Identity & Culture: Narratives of Transnational Belonging: Ashgate.
Dupuy, C., & Van Ingelgom, V. (2012). Policy Feedback and Multi-Level Legitimacy. The Exploratory Case of Belgium. Paper presented at the 19th Conference of the Council for European Studies/ ECPR Joint Sessions, Boston/ Antwerp.
Ervasti, H., Andersen, J. G., Fridberg, T., & Ringdal, K. (Eds.). (2012). The Future of the Welfare State. Social Policy Attitudes and Social Capital in Europe: Edward Elgar Publishing.
Huseby, B. M. (1998). Attitudes Towards the Size of Government. In O. Borre & E. Scarbrough (Eds.), The Scope of Government (pp. 87-117). Oxford: Oxford University Press.
Kumlin, S. (2012). Policy Feedback in Political Context: Unemployment Benefits, Elections Campaigns, and Democratic Satisfaction. Paper presented at the Paper presented at the ECPR Joint Sessions, University of Antwerp.
Lynch, J. F. (2006). Pension Inequality and Pension Policy Preferences in Europe: Self-Interest, Policy Feedbacks, or None of the Above? Council for European Studies Working Paper.
Mettler, S. (2005). Soldiers to Citizens. The G.I. Bill and the Making of the Greatest Generation. New York: Oxford University Press.
Mettler, S., & Soss, J. (2004). The Consequences of Public Policy for Democratic Citizenship. Bridging Policy Studies and Mass Politics. Perspectives on Politics, 2(1), 55-73.
Mettler, S., & Welch, E. (2004). Civic Generation: Policy Feedback Effects of the GI Bill on Political Involvement over the Life Course. British Journal of Political Science, 34(3), 497-518.
Pierson, P. (1993). When Effect Becomes Cause. Policy Feedback and Political Change. World Politics, 45(4), 595-628.
Pierson, P. (1994). Dismantling the Welfare State? Reagan, Thatcher, and the Politics of Retrenchment. Cambridge: Cambridge University Press.
Pierson, P. (Ed.). (2001). The New Politics of the Welfare State. Oxford: Oxford University Press.
Soss, J., & Schram, S. (2007). A Public Transformed? Welfare Reform as Policy Feedback. American Political Science Review, 101(1), 111-127.
Warin, P. (2010). Les politiques publiques face à la non-demande sociale. In O. Borraz & V. Guiraudon (Eds.), Les politiques publiques, 2. Paris: Presses de Sciences Po.
Weaver, K. R. (2010). Paths and Forks or Chutes and Ladders? Negative Feedbacks and Policy Regime Change. Journal of Public Policy, 30(2), 137-162.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 1 : 9 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : CERI (56 rue Jacob), salle Jean Monnet pour la session 1 et Batiment A (27 rue Saint-Guillaume), salle A 13 pour la session 3 


Programme

Axe 1 / Politiques sociales, citoyenneté et publics-cibles

Axe 2 / Les policy feedbacks pour appréhender la légitimité de l'UE ?

Axe 3 - Politiques publiques et élections

Table ronde avec Pierre Muller, Sophie Duchesne, Céline Belot et Charlotte Halpern
« Qu’a-t-on appris sur les policy feedbacks et comment les étudier ? »

L'axe 1 se déroulera sur la session 1 et les axes 2 et 3 se dérouleront sur la session 3.


Résumés des contributions

Frédéric Falkenhagen, Andreas Rösener (Universität Oldenburg)

L'agriculteur face à l'Union Européenne – La légitimité de la PAC auprès d'agriculteurs allemands

Notre communication vise à explorer la réaction et l'adaptation d'un public fortement tributaire économiquement et dans son organisation politique d'une politique publique face à un changement d'objectifs et de moyens échelonnés sur le long moyen-terme. L'étude porte sur la réforme 2013 de la Politique Agricole Commune de l'Union Européenne (PAC, fortement européanisée et corporatiste) et sa mise en application dans une région fortement agricole en Basse-Saxe (Allemagne). L'adéquation de l'autoreprésentation du public aux politiques publiques revêt une importance capitale car elle a été façonné par les politiques agricoles depuis la fin du XIXe siècle (Anderegg 1999, Mettler & Soss 2004). Dans le cadre de la PAC les agriculteurs se considèrent et ont été principalement adressés comme entrepreneurs (Bruckmeier & Ehlert 2002). La réforme de la PAC procède à un changement troisième ordre selon Hall (1993). Elle change l'objectif de la politique (vers une logique de subsides directs à l'exploitation) et les instruments associés (vers une dotation directe largement indépendante de la production) ce qui implique un changement de traitement du public (sur la base d'un service de maintien des espaces) et demande un changement social (particulièrement de l'autoreprésentation vers un rôle de gardien et d'intendant). Notre recherche se concentre sur ce point : quel a été l'impact de ce changement profond de la PAC  sur l'autoreprésentation des agriculteurs et leur vision du processus politique ?
 
Farmers facing the EU - The legitimacy of CAP among German farmers

Our paper will explore how highly economically dependent clients of a public policy react and adapt to major objective and tool changes in the medium to long term. We will study the implementation of the 2013 EU Common Agricultural Policy (CAP) reform in a highly agricultural area in Lower Saxony (Germany). The agricultural clients' self-image has been shaped since the 19th century by public policy and thus presents an interesting case of a long feedback loop (Anderegg 1999, Mettler & Soss 2004). The CAP has generally treated farmers as entrepreneur and achieved a fairly good fit between treatment and self-image (Bruckmeier & Ehlert 2002). Recent reforms have started a third order change in Hall's (1993) terms. The CAP reform changes its objectives (now oriented towards direct subsidies for farmsteads) and instruments (towards direct payments decoupled from production), which implies a new way to see the clients (based on the delivery and preservation of public goods) and require social change (especially in self-image towards a role as regional steward and custodian). Our research will focus on this last point: How have the CAP reforms changed the farmers' self-image and their perception of political process?

 
Heidi Mercenier (Institut d’études européennes / Université Saint-Louis)

Légitimité de l’Union européenne : Quels instruments pour étudier les effets de l’action européenne du point de vue des citoyens ?

Cette communication s’inscrit dans la première phase d’un projet de recherche visant à appréhender les effets de légitimation de deux champs d’action européens – libre circulation et frontières extérieures – du point de vue des citoyens. Dans ce cadre, la théorie des policy feedbacks apparaît comme une grille d’analyse essentielle à développer pour étudier l’influence de politiques publiques européennes sur l’acceptation sociale de l’UE. Le projet propose d’aborder cette vaste question comme à travers un « microscope », en se fondant sur la mise en place de focus groups sur un terrain bruxellois. Etudier de plus près les perceptions des citoyens dans ces domaines d’action permettra également d’approfondir avec finesse la notion d’output legitimacy. Cette communication propose donc de soumettre à la discussion une grille d’analyse basée sur les policy feedbacks, qui sera mobilisée ultérieurement afin d’étudier empiriquement les conséquences, sur les attitudes des citoyens, de l’action européenne. L’on vise ainsi à faire dialoguer les recherches portant sur les effets des politiques publiques et celles attachées aux processus de légitimation en jeu au niveau européen.
 
Legitimity of the European Union: Which tools to study the European action from the citizens’ viewpoint?

This paper presents the first part of a research project aiming to understand the effects induced by two fields of European action – freedom of movement and external borders – on the legitimacy of the European political system from the citizens’ viewpoint. In this context, the policy feedbacks theory is a relevant analytical framework to study the effects of those European fields on the social acceptance of the EU. This paper suggests exploring these assumptions by using a ‘microscope’, through the setting up of focus groups in Brussels. Studying more closely the citizens’ perceptions of two salient European public policies will also enlighten us as to the output-oriented legitimacy of the EU. Essentially, this paper proposes to discuss a highly developed research design based on the policy feedbacks theory, which will be then used to study empirically the consequences of the European action on the attitudes of the citizens. In doing so, it links research on the effects of public policies with those on the legitimization processes relative to the European integration project.

 
Clémentine Berjaud (CESSP-CRPS / Université Paris 1)
 
La mise en œuvre des Missions Bolivariennes au Venezuela : Appréhender les « Policy Feedbacks »
 
Cette communication a pour objectif de déconstruire les processus qui convertissent les effets des politiques publiques en facteur explicatif des attitudes à l’égard du politique tout en proposant une approche méthodologique qualitative à même de saisir ces phénomènes, à partir du cas des missions bolivariennes mises en place au Venezuela depuis 2003. L’enquête de départ, centrée sur les processus de réceptions des discours présidentiels d’Hugo Chávez, a pris la forme d’entretiens collectifs (focus groupes) menés auprès de citoyens ordinaires vénézuéliens selon un échantillon socio-politiquement construit. Cette approche qualitative, complétée par des entretiens individuels et des observations ethnographiques, permet d’avancer plusieurs pistes pour l’analyse des policy feedbacks. Premièrement, les politiques publiques, et plus particulièrement ces missions, peuvent fonctionner comme des ressources interprétatives mobilisées par les citoyens pour donner du sens au politique. Deuxièmement, leurs perceptions sont constitutives d’instruments de jugement porté sur le politique. Enfin, elles semblent jouer un rôle non négligeable dans la construction des rapports ordinaires au politique, notion-clef pour comprendre les comportements politiques, notamment en termes d’adhésion, d’attentes, ou de rejet, envers le système politique vénézuélien d’aujourd’hui.
 
The implementation of Bolivarian Missions in Venezuela: Understanding “Policy Feedbacks”
 
This communication aims to deconstruct the effects of public policies, in order to understand how they can be an explicative factor of citizens’ political attitudes and behaviors. It will also propose a methodological approach able to apprehend theses phenomenons, based on the Venezuelan case and the Bolivarian Missions since 2003. The main enquiry, focused on the reception processes of President Hugo Chávez’s discourses, has been conducted by way of collective interviews (focus groups) realized with ordinary Venezuelan citizens selected according to their socio-politic properties. This qualitative approach, completed by individual interviews and ethnographic observations, allows various reflections about policy feedbacks. First, public policies, especially theses
missions, could function as interpretative resources for citizens, who will use them to give meaning to politics. Second, their perceptions by citizens are constitutive of judgment tools about politics. Finally, public policies seem to have a deep impact on the construction of ordinary relationship to politics. The later is then a key-notion to understand political behaviors, in particular in terms of adhesion, expectations, or non-acceptance, towards the actual Venezuelan political system.

 
Antoine Jardin (CEE / Sciences Po Paris)

Des politiques pour faire voter les abstentionnistes en France et en Grande Bretagne, Mission Impossible ?

La France et le Royaume Uni sont d'anciennes démocraties. Depuis plus de 30 ans, ces pays européens font face à un déclin de la participation électorale, alimenté par une hausse de la défiance politique et de la participation intermittente. Ces évolutions sont particulièrement fortes chez les jeunes, les descendants de migrants et les habitants des quartiers marginalisés. Depuis la fin des années 1990, plusieurs politiques publiques spécifiques ont été déployées pour tenter de renforcer la participation électorale. La stratégie française s'appuie sur des mécanismes généraux de réduction du coup social de participation pour l'ensemble de la population. En Grande Bretagne, ce sont les actions ciblées pour mobiliser les électeurs de certains groupes sociaux qui sont privilégiées. Nous verrons comment ces différentes politiques s'articulent avec les contextes sociologiques locaux à Birmingham et dans la banlieue parisienne, afin d'évaluer leurs effets sur l'inscription et la participation électorale.

Policies to get out the vote in France and Britain, Mission Impossible ?

French and Britain are old democracies. For more than 30 years, both countries faced a decline in voting turnout, fueled by rising political apathy and intermittent electoral participation. Those changes are specifically importants among youngsters, people with a migrant background, and  deprived neighborhoods dwellers. Since the end of the 1990's, several public policies were deployed to reinforce the level of voting turnout. The french strategy is based on generalistic administrative tools aiming at reducing the social cost of voting for the whole population. In Great Britain, targeted actions were taken to mobilize voters among specific social groups. We'll see how those different policies are taking shape in local contexts in Birmingham and in the parisian banlieue, in order to evaluate their impact on registration and voting turnout.



Emiliano Grossman, Nicolas Sauger (CEE, Sciences Po)
 
Juger d’un bilan. Evaluation rétrospective des électeurs du mandat de Nicolas Sarkozy

L’évaluation rétrospective de l’action des gouvernements par les électeurs a été intégrée depuis longtemps tant à la théorie de la démocratie représentative qu’aux analyses du comportement électoral. Ces évaluations rétrospectives ont néanmoins été la plupart du temps menées sur une évaluation globale du bilan ou de la performance du gouvernement sortant, que ce soit de manière objective, notamment à partir d’indicateurs macro-économiques, ou subjective, à partir de données d’opinion. Nous proposons ici d’aller plus loin dans la compréhension de l’évaluation subjective du bilan d’un gouvernement. Plus qu’un bilan global, nous nous intéressons au jugement spécifique des électeurs sur les politiques publiques d’un gouvernement sortant. Nous nous intéressons particulièrement à la capacité des électeurs de formuler un jugement sur des politiques publiques spécifiques (question de la compétence), et sur le rôle de ces jugements dans les décisions électorales. Notre analyse portera plus spécifiquement sur le cas de l’élection présidentielle française de 2012, à partir de questions spécifiques tirées d’un sondage post-électoral.

Assessing incumbents’ performance. The retrospective evaluation of Sarkozy’s performance by French voters

The retrospective evaluation of governments’ activities by voters has long been part of the theory of representative democracy and the study of voting behavior. Retrospective evaluation has however been considered as a general assessment of governments’ performance, based on either objective data (i.e. macroeconomic indicators) or subjective data (i.e. opinion data).
We propose to go one step further in the understanding of the subjective evaluation of governments’ performance. We focus on voters’ judgments on specific public policies of an incumbent candidate. We have a marked interest in voters’ ability to have opinions on specific public policies (question of competence) and in the effects of this judgment on vote choice. The empirical part of the paper is based on data coming from a post-electoral survey, conducted after the second round of the French presidential election of 2012, which includes several items on this topic.


Marième N’Diaye (Sciences Po Bordeaux)
 
La politique d’accès à la justice de la famille et ses effets sur  l’émergence du « citoyen-justiciable ». Analyse comparée des cas marocain et sénégalais.
 
Au Maroc et au Sénégal, le droit de la famille se fonde sur le principe du respect de l’égalité entre les sexes et vient concurrencer les ordres normatifs traditionnels, ce qui explique les difficultés qui se posent quant à la réception de la loi. C’est pourquoi ces deux Etats ont mis en place une politique visant à rapprocher la justice de la famille des populations – en particulier des femmes - et partant, à faire des individus de véritables justiciables prêts à se saisir de leurs droits et à se conformer à la norme étatique. La politique du droit de la famille est ainsi censée participer à la construction du citoyen dans des pays marqués par un fort pluralisme juridique et normatif. Un bilan de ces politiques récentes (2004) qui ont vocation à s’inscrire dans la durée montre que les effets sont réels bien que limités. Les femmes se saisissent progressivement de leurs droits, obligeant les hommes à intégrer à leur tour la norme étatique. Si elle ne devient pas la norme exclusive, la norme étatique est désormais incontournable, participant à l’émergence d’un citoyen justiciable et au renforcement de la légitimité de l’Etat. La comparaison des stratégies et des moyens investis par les deux Etats permet cependant de mieux comprendre les obstacles qui persistent dans la construction de la figure du citoyen justiciable.
 
The policy of access to Family Courts and its impacts on the emergence of the "litigant citizen". A comparative analysis between Morocco and Senegal.
 
In both Morocco and Senegal, Family Law is based on the principle of the respect of sex equality. It is in competition with the traditional normative orders, which thus explains that law enforcement remains difficult.
In such a context, policymaking in both States intends to bring closer Family Courts to the population (and to women in particular), in order to help people to become true litigants, able to use their rights and to comply with state norms. Family Law policy is thus supposed to be part of the making of citizens in countries characterized by a strong legal and normative pluralism.
An assessment of these recent policies (2004), which are meant to be continued in the long run, shows that they do have real but limited effects. Women are progressively using their rights, which obliges men also to take into account state norms. If these norms have not become exclusive yet, they are now unavoidable, in such a way that they contribute to the emergence of "litigant citizens" and to the strengthening of state legitimacy. The comparison of the strategies and means invested by both States helps to understand the obstacles that remain in the making of the figure of "litigant citizens".


Virginie Guiraudon (CEE, Sciences Po), Clémence Ledoux (Université de Nantes)
 
Les policy feedbacks à la loop : associer publics-cible et réponses aux changements de politiques publiques à partir du cas des services à domicile
 
De plus en plus de politiques publiques visent à inciter des nouveaux comportements plutôt qu’à les contraindre. La question des effets de ces politiques incitatives mérite d’être posée en s’inspirant de la littérature existante sur les policy feedbacks qui porte surtout sur les Etats-Unis et les politiques sociales. Notre humble ambition est d’enrichir notre compréhension des réponses des publics concernés à ces instruments incitatifs en associant les caractéristiques des groupes cibles (publics) avec un type de réponse (policy response) et un type de changement de la politique initiale (policy feedback). En effet, certaines politiques publiques ciblent des individus (citoyens ou non), d’autres des acteurs du marché ou du secteur non marchand. C’est le cas des dispositifs socio-fiscaux pour encourager le recours aux services à domicile. Ces politiques, très coûteuses, nous permettent de prendre en compte les ressources, cadrages et stratégies de mobilisation aussi bien des policy lovers que des policy haters. Il s’agit in fine à partir de ce cas de proposer un modèle analytique qui associe type de public (individus, entreprises, secteur associatif) et type de réponses et de réformes. Le rôle des courtiers ne sera pas laissé de côté qu’ils s’agissent des élus politiques, des acteurs syndicaux ou des associations professionnelles du secteur. Nous nous appuierons donc sur le cas des politiques socio-fiscales incitant au recours aux services à domicile, qui se sont largement répandues en Europe (Suède, Allemagne, Belgique, etc.). Nous nous appuierons cependant sur une étude approfondie du cas français depuis les années 1970 pour montrer l’intérêt d’une approche de process tracing qui permet d’étudier sur le moyen terme les réponses des différents acteurs concernés par ces politiques.
 
Bringing policy feedbacks back. Target publics and policy change using public aid to promote household services as a case study
 
Public policies increasingly seek to incite rather than to coerce behavior. The effects of incentive-based policies are worth exploring in light of the literature on policy feedbacks, which has so far mostly focused on the US welfare state. We seek to apprehend incentive-based policies by correlating target publics characteristics with the types of policy responses and policy feedbacks. Indeed, certain policies target individuals, others market actors or non-profit associations. Such is the case of the socio-fiscal policies encouraging household services. These policies are very costly and can help us to take into account the resources, frames and mobilizing strategies of policy lovers and policy haters. Our paper proposes an analytical model that matches the type of targets concerned (individuals, firms, non-profit sector) with types of policy responses and reforms, taking political intermediaries seriously (trade unions, sectoral lobbies, elected officials). Socio-fiscal policies encouraging people to use household services have spread in Europe (e. g. Sweden, Germany, Belgium). For this paper we focus on the French case. This allows us to show that process-tracing over a significant time period is a fruitful approach to observe and analyze policy loops.


Catherine Spieser (CEE / Sciences Po Paris)


Politiques et institutions du marché du travail et attentes des citoyens en Pologne et France. Comment les politiques publiques refabriquent la question sociale à travers leurs « effets retours »

Comment expliquer qu’au sein même de l’ensemble européen, que l’on dit pourtant caractérisé par un « modèle social européen », les attentes des citoyens par rapport à l’Etat et aux politiques publiques varient considérablement ? Les « policy feedbacks » contribuent à des constructions différenciées de la question sociale dans les espaces politiques nationaux.
En s’intéressant à un champ d’observation privilégiée des « policy feedbacks », celui des politiques sociales et de l’emploi, cette communication s’appuie sur des observations croisées sur deux terrains fortement contrastés : la Pologne, où les attentes des citoyens par rapport à l’Etat sont traditionnellement basses, et la France où elles sont traditionnellement élevées. Elle cherche à cartographier trois types d’effets feedbacks potentiels (effets ressources, effets cognitifs et effets de représentation) dans un ou plusieurs domaines d’action publique : politiques de l’emploi, système de retraite et droit du travail. Dans un second temps, on cherchera à relier ces effets aux données attitudinales comparables disponibles pour les deux pays. L’objectif est d’évaluer (1) l’apport de la comparaison entre des pays où les politiques publiques divergent pour la compréhension des « effets feedbacks », et (2) l’apport de la confrontation des données qualitatives sur les politiques publiques nationales avec des données statistiques issues des grandes enquêtes internationales sur les attitudes (ISSP, EVS, WVS), utilisées de manière exploratoire.
 
Labour market policies and institutions and citizens’ expectations in Poland and in France. How public policies remake the social question through « feedback effects »

How can we explain that, despite the existence of a disctinctively European social model, citizens’ expectations toward the state and public policies vary considerably across Europe ? Policy feedbacks contribute to different constructions of the social question within national political spaces. Looking at a privileged field of observation of policy feedbacks, that of social and labour market policies, this paper is based on observations in two contrasted cases : Poland, where expectations towards the state have become relatively low, and France, where they are traditonally high. The paper seeks to map three kinds of potential feedback effects (resource effects, cognitive effects and representaion effects) in one or several sectors of public policy : labour market policy, retirement system, labour law. It then attemps to link these effects to comparable attitudinal data available for both countries. The objective is to assess (1) the usefulness of comparisons across countries in which public policy diverge for the study of feedback effects and (2) the kind of findings one can produce when confronting qualitative data on national public policy with an exploration of statistical data provided by large international surveys.


Adrien Mazières-Vaysse, Nadia Okbani (Centre Emile Durkheim / IEP de Bordeaux)

Du référentiel de l’activation de la protection sociale à l’identité de RSAste. Analyse d’un transfert de catégories des politiques sociales

Si le lancement d’une politique vise à produire des effets spécifiques, sa mise en œuvre aboutie concrètement à d’autres effets dont la nature diverge des attendus initiaux. En prenant le cas du Revenu de Solidarité Active (RSA) en France, cette recherche sur les policy feedbacks interroge la diversité des effets produit par une politique. Elle analyse le décalage entre les effets par les ressources attendus par les promoteurs du RSA, et les effets interprétatifs liés à la réception des catégories sociales du RSA (identifications et images sociales) dans les appartenances individuelles des ressortissants. Elle révèle que le référentiel du RSA est porteur de représentations spécifiques du monde social et du public qu’il cible et produit des catégories d’assignation identitaire visant à l’activation des bénéficiaires des minima sociaux. L’important non-recours au RSA deux ans après sa mise en œuvre interroge la manière dont le dispositif, et la catégorie de RSAste qu’il produit, sont reçus par le public cible (réactions, modes de construction identitaire, non-réception de l’offre publique). Par une approche des mécanismes de mise en exergue, de problématisation et de politisation de ces policy feedback, ce travail montre en quoi les mouvements sociaux et les évaluations (de l’expérimentation du RSA et du RSA généralisé) peuvent constituer des boucles de rétroaction, pouvant révéler, sous certaines conditions, les policy feedbacks aux pouvoirs publics, en particulier des formes de non-recours volontaires ou des identités marquées par un stigmate.
 
From the activation of social protection “referential” to the identity of “RSAste”. An analysis of a social policy categories transfer
 
The implementation of a policy aims to produce specific effects, but it may lead in concrete terms to other effects whose nature differs from the expected ones. This research focuses on the Revenu de Solidarité Active (RSA) case, a French new Minimum Income Scheme (MIS), and examines the diversity of effects produced by a policy. In this paper, we analyze the gap between the resource effects expected by the initiators of the RSA, and how the RSA social categories are received by the beneficiaries in their self-understanding (interpretive effects). We highlight that the RSA framework (referential) brings specific representations of the social world and the beneficiaries. It produces identification categories that aim to activate people who receive a MIS. Two years after the implementation of the plan, the important RSA non-take-up questions the way that social protection’s “activation” and the RSA category it produces are received by the beneficiaries (reactions, identity making types, non-take-up of the public offer). By examining how these policy feedbacks are emphasized, problematized and politicized, this paper shows that social movements and policy evaluations (of the RSA experimentation and the generalized RSA) can build up feedback loops. The latter may reveal, under certain conditions, the policy feedbacks to the government, especially forms of voluntary non-take-up or stigmatized identities.

 
Table ronde avec Pierre Muller, Sophie Duchesne, Céline Belot et Charlotte Halpern
« Qu’a-t-on appris sur les policy feedbacks et comment les étudier ? »


Participants

BERJAUD Clémentine clementine.berjaud@wanadoo.fr
DUCHESNE Sophie sophie.duchesne.guilluy@gmail.com
DUPUY Claire claire.dupuy@uclouvain.be
FALKENHAGEN Frédéric frederic.falkenhagen@uni-oldenburg.de
GROSSMAN Emiliano emiliano.grossman@sciences-po.fr
GUIRAUDON Virginie virginie.guiraudon@sciences-po.fr
JARDIN Antoine antoine.jardin@sciences-po.org
LEDOUX Clémence clemence.ledoux@univ-nantes.fr
MAZIÈRES-VAYSSE Adrien adrien.mv@gmail.com
MERCENIER Heidi mercenier@fusl.ac.be
MULLER Pierre pierre.muller@sciences-po.fr
N’DIAYE Marième m-ndiaye@hotmail.fr
OKBANI Nadia nadiaokbani@yahoo.fr
RÖSENER Andreas andreas.roesener@uni-oldenburg.de
SAUGER Nicolas nicolas.sauger@sciences-po.fr
SPIESER Catherine catherine.spieser@sciences-po.fr
VAN INGELGOM Virginie virginie.vaningelgom@uclouvain.be

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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