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Module pédagogique et professionnel 4

Les politistes et les médias, les politistes dans les médias. Quelles modalités d’intervention dans l’espace public médiatique ?
Political scientists and the media, political scientists in the media. What kinds of intervention in the media space?

Responsables

Jérôme HEURTAUX (Université Paris Dauphine / IRISSO) jheurtaux@yahoo.fr
Nicolas KACIAF (UVSQ / VIP – CERAPS) kaciaf@yahoo.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Qu’ils soient invités à analyser « à chaud » une campagne électorale, éclairer une crise internationale ou décrypter une situation confuse dans un pays lointain, les politistes forment l'une des communautés scientifiques les plus sollicitées par les médias d'information, écrits et audiovisuels. Élargissant considérablement l’audience de leurs travaux, modifiant le profil de leurs publics, ces interventions dans l’espace médiatique soulèvent d’importants enjeux scientifiques et professionnels.

Répondant souvent à une demande formulée ab abrupto, les universitaires interviewés contrôlent en effet difficilement le format et le contenu de leurs commentaires. S’ils sont soumis aux mêmes contraintes que les autres chercheurs en sciences sociales (imposition de problématique, simplification des propos rapportés, etc.)[1], les politistes (tout comme les économistes d’ailleurs) doivent régulièrement faire face à une exigence supplémentaire, à laquelle ils se soumettent de manière variable : l’exigence de prédiction. « Les électeurs de Marine Le Pen vont-ils reporter leur voix sur Nicolas Sarkozy au second tour de l'élection présidentielle ? », « Bachar el-Assad va-t-il se soumettre aux pressions internationales ? », « Barack Obama sera-t-il réélu ? » De nombreux journalistes imputent en effet aux chercheurs en science politique une capacité de prévision de l’avenir qui serait au fondement de leur légitimité à commenter la vie politique nationale et internationale. En outre, les politistes sont parfois sollicités pour produire des affirmations tranchées et juger le comportement des acteurs politiques : ils servent ainsi à alimenter les papiers de considérations normatives (souvent réduites à de courtes citations) que les rédacteurs ne peuvent eux-mêmes énoncer en raison des impératifs de « distanciation », d’« objectivité » ou de « neutralité » qui encadrent le travail journalistique dans de nombreux supports médiatiques [Lemieux, 2000 ; Neveu, 2009 ; Tavernier, 2004, 2010]. Pour le politiste soucieux de rendre accessibles ses recherches au plus grand nombre, il apparaît souvent délicat de se soustraire à ces attentes qui révèlent les représentations journalistiques du rôle et de la « valeur ajoutée » des savants dans l’espace public.

Or, paradoxalement, ce que les politistes considèrent comme le fondement de leur autorité professionnelle (l’apport empirique, la construction de l’objet et de la problématique, la réflexivité sur les outils mobilisés, la mise en perspective historique et comparée, etc.) peut difficilement être exposé dans les formats d’expression généralement réservés aux commentaires universitaires. Dans ces conditions, comment les politistes peuvent-ils alimenter les médias de leurs analyses ? Comment peuvent-ils intéresser un public élargi sans sacrifier les exigences de leur métier ? L'ambition de ce module est d'inviter à une réflexion collective sur nos pratiques médiatiques [Lemieux et al., 2010 ; Goulet, Ponet, 2009].

Deux dimensions doivent nourrir cette réflexion. Il s'agit d'une part d’analyser les modalités d'interventions de politistes dans les médias (sollicitations ponctuelles à l'occasion d'un événement, collaborations récurrentes à une émission télévisée, rédaction spontanée ou sollicitée de tribunes écrites, etc.), à travers une approche comparative (entre disciplines et entre contextes nationaux), soucieuse de discuter d’initiatives récentes qui sont autant d'innovations possibles en matière de communication médiatique : édition participative dans un média en ligne (blog SPEL dans Médiapart lors de la campagne électorale de 2012), blog de « sociologie publique » sur le site d'un journal de référence (Cyril Lemieux dans Le Monde en 2007)[2], etc. Quels sont les bénéfices de ce type de collaboration et quelles en sont les limites ? Peut-on inventer des formes d'intervention fructueuses, qui puisse contenter simultanément journalistes et chercheurs ? Comment ces derniers peuvent-ils prendre l'initiative et garder une certaine maîtrise dans leurs relations aux acteurs médiatiques ? Faut-il imposer systématiquement une relecture des propos cités ou un visionnage préalable des extraits retenus au montage ? Les politistes ne devraient-ils pas finalement eux aussi se soumettre au mediatraining pour mieux maîtriser leurs déclarations ?

Mais ces réflexions sur les modalités d’intervention médiatique pertinentes ne peuvent se réduire à une discussion purement technique. Elles doivent, d’autre part, être rattachées à un ensemble d’interrogations morales et juridiques, constitutives du métier de savant, de ses prérogatives et de son statut dans l’espace social [3]. Les politistes doivent-ils s’exprimer librement et en leur nom propre ou bien doivent-ils être mandatés par les institutions qui les emploient et les équipes auxquelles ils se rattachent ? Dans quelle mesure les laboratoires de recherche doivent-ils apporter une protection juridique lorsque certains propos sont incriminés devant la justice (« affaire Buisson – Garrigou », affaire « France Rebelle – Ligue savoisienne ») ? Comment promouvoir des approches critiques et faire valoir le principe de controverse scientifique, à rebours des attentes journalistiques d’affirmations tranchées ou de propos « politiquement corrects » ?

Telles sont certaines des questions que nous souhaitons voir évoquer lors de ce module professionnel et pédagogique qui réunira chercheurs et journalistes ayant une expérience dans ce domaine.


 
Political scientists are one of the scientific communities most often requested by the news media. Broadening the audience of their work, their interventions in the media raise important scientific and professional issues.

Answering to urgent requests, academics encounter difficulties to control the format and the content of their comments. Subject to the same constraints as other researchers (predefined problems, simplified discourses), political scientists often face an additional requirement: prediction. Many journalists believe that the ability of political scientists to predict the future is the main source of their legitimacy to comment national and international politics. Similarly, political scientists are sometimes asked to judge the behavior of political actors: they are used to provide normative statements that the journalists can’t express, because they have to respect the norms of “detachment”, “objectivity” or “neutrality”.

Paradoxically, what political scientists consider as the source of their professional authority (the empirical details, the construction of the object, the reflection on investigative tools, the historical or compared perspective, etc.) can hardly be exposed in journalistic formats. Under these conditions, how can political scientists feed the media of their analysis? How can they appeal to a wider audience without sacrificing the requirements of their job?

This reflection on our media practices must be conducted along two dimensions. The objective is firstly to analyze the different types of interventions in the media, through a comparative approach (between disciplines and national contexts). Can we invent successful forms of intervention, which could satisfy simultaneously journalists and researchers? How can political scientists maintain the initiative in their relations with media? On the other hand, these reflections must be related to a set of moral and legal issues, which constitute the profession of scientist, its prerogatives and its status in the social space. How can we preserve the principle of freedom of expression? To what extent research laboratories have to provide some legal protection when comments are incriminated in court? How to promote critical approaches or assert the principle of scientific controversy, given the journalistic expectations for definitive assertions or “politically correct” statements?

 
 
Bibliographie
 
Bourdieu Pierre [1996], « Analyse d’un passage à l’antenne », Le Monde diplomatique, avril, p. 25 (http://www.monde-diplomatique.fr/1996/04/BOURDIEU/2633).
Goulet Vincent, Ponet Philippe [2009], « Journalistes et sociologues. Retour sur des luttes pour "écrire le social" », Questions de communication, n°16, pp. 7-26.
Laurens Sylvain et Neyrat Frédéric (dir) [2010], Enquêter, de quel droit ? Menaces sur l'enquête en sciences sociales, Bellecombe-en-Bauges, Le Croquant.
Lemieux Cyril [2000], Mauvaise Presse. Une sociologie compréhensive du travail journalistique et de ses critiques, Paris, Métailié.
Lemieux Cyril [2010], Un président élu par les médias ? Regard sociologique sur la présidentielle de 2007, Paris, Presses de l’École des Mines, 2010.
Lemieux Cyril , Mucchielli Laurent, Neveu Érik [2010], « Le sociologue dans le champ médiatique : diffuser et déformer ? Débat  animé par Cécile Van de Velde », Sociologie, vol. 1, n°2 (http://sociologie.revues.org/351).
Neveu Erik, Sociologie du journalisme, Paris, La Découverte, 2009.
Schneidermann Daniel [1996], « Réponse à Pierre Bourdieu », Le Monde diplomatique, mai, p. 21 (http://www.monde-diplomatique.fr/1996/05/SCHNEIDERMANN/2778).
Tavernier Aurélie [2004], Paroles d’experts. Rhétoriques journalistiques de recours aux paroles extérieures dans Le Monde, Libération et Le Figaro. Journaliste et sociologue, la construction d’un référentiel, thèse pour le doctorat en sciences de l’information et de la communication, Université Lille 3.
Tavernier Aurélie [2009], « Rhétoriques journalistiques de médiatisation : la co-construction de l'expertise », Questions de Communication, n°16.
 
 
Webographie

http://blogs.mediapart.fr/blog/collectif-spel
 

[1] Voir sur ce point, la controverse entre Pierre Bourdieu et Daniel Schneidermann [Bourdieu, 1996 ; Schneidermann, 1996].

[2] Lemieux, 2010.

[3] Notre initiative s'inscrit dans une série de démarches visant à se saisir des droits et des devoirs des chercheurs en sciences sociales [Laurens, Neyrat, 2010]. Récemment, l'Association française de science politique a, également, élaboré une charte d'éthique (http://www.congresafsp2009.fr/divers/charte010610projet.pdf).



Sessions

Les travaux du MPP se dérouleront le :
11 juillet 2013 8h30-10h
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Lieu : Batiment A (27 rue Saint-Guillaume), amphi Chapsal


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12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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