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Section Thématique 2

« Saisir l’État » à travers ses écrits ordinaires. Enjeux, méthodes, objets
“Seizing the State” by its ordinary writings. Issues, methods, objects

Responsables

Jean-Michel EYMERI-DOUZANS (IEP de Toulouse – LaSSP) jean-michel.eymeri-douzans@sciencespo-toulouse.fr
Gildas TANGUY (IEP de Toulouse – LaSSP) gildas.tanguy@sciencespo-toulouse.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Cette section thématique souhaite engager la discussion sur l’une des activités les plus routinières de la « vie de l’État » : les pratiques d’écriture ordinaire. Certes, l’anthropologie (goody, 1979, 2007 ; fabre, 1993, 1997 ; fraenkel, 1992, 1995 ; weber, 1995), l’histoire (artieres, 1998 ; chartier, 1999 ; karila-cohen, 2000, 2005, 2008 ; noiriel, 2007 ; gardey, 2008 ; about, denis, 2010 ; coton, proteau, 2012 ;) et la sociologie (Lahire, 1993, 2008 ;  Borzeix, 2001 ; lae, 2008) se sont emparées de cet objet. La science politique n’est évidemment pas totalement « oublieuse » de ce centre d’intérêt. Si la Public Administration anglophone s’est très peu interrogée sur la matérialité de l’État, certains travaux hexagonaux récents (beliard, biland, 2008 ; laurens, 2008 ; siblot, 2006 et les co-auteurs du présent projet de ST) ont abordé, à leur façon, ces formes discrètes et peu interrogées de la bureaucratie du quotidien. Si cette section entend revenir sur les apports heuristiques d’une telle démarche, elle voudrait surtout s’interroger sur la place et le rôle de cet objet, le quotidien scriptural, au sein de cette institution-en-Majesté, de cette « institution des institutions » (belle formule de Maurice Hauriou) qu’est l’État. En effet, ce que Pierre Legendre appelle à juste titre la « paperasserie administrative » n’est que trop rarement interrogée comme modalité d’actualisation de l’État à l’état de culture, entendue ici, au sens anthropologique du terme, comme une logique propre à l’institution État existant à l’état de de système incorporé de pratiques (à la fois façons de dire et façons de faire) commun aux corps administratifs, ces « corporations d’état » d’aujourd’hui qui sont les « Gardiens de l’Etat ». Cette section voudrait ainsi jeter les bases d’une anthropologie de l’écriture administrative comme moyen de saisir l’État en action et au concret, c’est-à-dire à l’état de « culture en action ». Deux questionnements complémentaires seront ainsi travaillés :
-       Le premier axe explorera la nature et le rôle de l’écrit ordinaire comme pratique d’État et plus largement comme dispositif d’institution. Il s’agira en premier lieu de proposer une définition sociologique et une cartographie aussi précise que possible de l’objet « écrit ordinaire de l’État » : lettres et réclamations des usagers, cahiers de liaisons et de doléances, notes de service, brouillons, graphiques et tableaux de bord, dossiers, courriers électroniques etc. Qu’entend t-on par écrit ordinaire ? A-t-il vocation à demeurer confidentiel ? Est-il toujours dissimulé ? En second lieu, l’on s’interrogera sur le statut bureaucratique et juridique de l’écrit ordinaire. Quel rôle joue-t-il dans le processus de décision ? Que nous dit-il des pratiques administratives ? Qu’est-ce que l’ordinaire administratif de l’État ? Quelle place juridique occupe-t-il ?
-       Le second axe privilégiera une réflexion sur les enjeux, les difficultés et les méthodes d’une sociologie de l’État à travers ses écrits ordinaires. Si les historiens et les sociologues de l’État se sont encore peu penchés sur ces « écritures mineures » (au sens de Jean-François Laé), c’est parce qu’elles relevaient a priori d’une pratique codée et surplombée par le point de vue de l’État, une pratique en marge et peu lisible. Se saisir des plis de la routine administrative, c’est d’une certaine manière entreprendre une lecture anthropologique de l’État à partir des traces éphémères et non stabilisées produites par l’institution. Au-delà des enjeux, cet axe essaiera d’identifier les difficultés possibles et probables pour sortir les écrits de leur indexicalité et de leur oubli – notamment à l’ère du numérique – à travers toute une série d’interrogations sur l’accès, l’archivage, la conservation des données ; l’on se penchera aussi sur les méthodes efficientes pour déchiffrer et faire parler ces écrits souvent inintelligibles sans un cadrage exogène et contextuel des documents.
 
La ST comportera deux sessions : la première, autour de terrains historiques, sera discutée par Pierre Karila-Cohen ; la seconde, aux objets plus contemporains, sera discutée par Bernard Lahire.  

This ST wishes to open the discussion on one of the routines of the State life: the practices of ordinary writing. After anthropology, history and sociology, political science is gaining interest for this topic. Some recent French researches are approaching these discreet forms of daily bureaucracy. We would like to question the role and importance of the ordinary writings within the State, this institution-in-Majesty, this “institution of institutions” (to quote the great French jurist Maurice Hauriou). As a matter of fact, what Pierre Legendre calls “administrative paperasserie” (red tape) is too rarely studied as a putting-into-practices of the institutional culture of the State, defined in anthropologic terms as the rationale of the institution existing as an incorporated system of practices (combining ways of saying and means of doing) shared by the members of the administrative corpses, those “Stateguards”. This ST intends to give a contribution to the anthropology of administrative writing as a way to approach the State as a “culture in action”. Two perspectives are proposed:
-      An exploration of the nature and role of the ordinary State papers, which implies a precise cartography of these documents: letters from and to the users, notebooks, draft documents, files, graphs and tables of indicators, administrative memos, e-mails, etc. What are the legal value and the bureaucratic status of these ordinary writings? What is their role in decision-making? What do they reveal about administrative practices?
-      A reflection on the issues, difficulties and methods of a sociology of the State explored through its ordinary writings and documents. Such an undertaking consists in an ethnographic approach of the State by the ephemeral and non-stabilised traces produced daily by the institution. The difficulties related to the indexicality of these forgotten writings and the limited intelligibility of these documents without a proper contextual/historical framing will be discussed.


Bibliographie/References

About (Ilsen), Denis (Vincent), Histoire de l’identification des personnes, Paris, La Découverte, coll. « Repères », 2010.
Artières (Philippe), Clinique de l’écriture. Une histoire du regard médical sur l’écriture, Paris, Éditions Synthélabo, coll. « Des empêcheurs de tourner en rond », 1998.
Béliard (Aude), Biland (Émilie), « Enquêter à partir des dossiers personnels. Une ethnographie des relations entre institutions et individus », Genèses, n° 70, 2008, pp. 106-119.
Borzeix (Anni), Fraenkel (Béatrice) (dir.), Langage et travail. Communication, cognition, action, Paris, CNRS Éditions, 2001.
Chartier (Roger), « Les pratiques de l’écrit », in Ariès (Philippe), Duby (Georges) (dir.), Histoire de la vie privée, vol. 3 : De la Renaissance aux Lumières, Paris, Le Seuil, 1999, pp. 109-157.
Coton (Christel), Proteau (Laurence) (dir.), Les paradoxes de l’écriture. Sociologie des écrits professionnels dans les institutions d’encadrement, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. Le sens social, 2012.
Eymeri-Douzans (Jean-Michel), « Frontière ou marches ? De la contribution de la haute administration à la production du politique », in Lagroye (Jacques) (dir.), La politisation, Paris, Belin, 2003, pp. 47-77.
Eymeri-Douzans (Jean-Michel), « L’Etat au quotidien. Eléments d’observation ethnographique du travail des énarques en administration centrale » in Eymeri-Douzans (Jean-Michel), Bouckaert (Geert) (dir.), La France et ses administrations. Un état des savoirs, Bruxelles, Bruylant, 2013.
Fabre (Daniel) (dir.), Écritures ordinaires, Paris, Éditions P.O.L/Centre Georges Pompidou, 1993.
Fabre (Daniel) (dir.), Par écrit. Ethnologie des écritures ordinaires, Paris, Éditions de la MSH, 2007.
Fraenkel (Béatrice), « La traçabilité, une fonction caractéristiques des écrits au travail », Connexions, n° 1, 1995, pp. 63-75.
Fraenkel (Béatrice), La signature. Genèse d’un signe, Paris, Gallimard, 1992.
Gardey (Delphine), Écrire, calculer, classer. Comment une révolution de papier a transformé les sociétés contemporaines (1800-1940), Paris, La Découverte, 2008.
Goody (Jack), La raison graphique. La domestication de la pensée sauvage, Paris, Les Éditions de Minuit, 1979.
Goody (Jack), Pouvoirs et savoirs de l’écrit, Paris, La Dispute, 2007.
Karila-Cohen (Pierre), « Le Christ s’est arrêté à Origny : le temps, l’enquête et l’administrateur », in Demartini (Anne-Emmanuelle) et Kalifa (Dominique) (dir.), Imaginaire et sensibilités au XIXe siècle. Études pour Alain Corbin, Paris, Créaphis, 2005, p. 101-114.
Karila-Cohen (Pierre), « Le rapport administratif : du support à l’objet », in Hincker (Louis) (dir.), Réflexions sur les sources écrites de la « biographie politique ». Le cas du XIXe siècle, Paris, CNRS, 2000, p. 15-20.
Karila-Cohen (Pierre), L’État des esprits. L’invention de l’enquête politique en France (1814-1848), Rennes, PUR, 2008.
Laé (Jean-François), Les nuits de la main courante. Les écritures au travail, Paris, Stock, 2008.
Lahire (Bernard), La Raison des plus faibles. Rapport au travail, écritures domestiques et lectures en milieux populaires, Lille, PUL, 1993.
Lahire (Bernard), La Raison scolaire. École et pratiques d’écriture, entre savoir et pouvoir, Rennes, PUR, 2008.
Laurens (Sylvain), « Les agents de l’État face à leur propre pouvoir. Éléments pour une micro-analyse des mots griffonnés en marge des décisions officielles », Genèses, n° 72, 2008, pp. 26-41.
Noiriel (Gérard), (dir.), L’identification des personnes. Genèse d’un travail d’État, Paris, Belin, 2007.
Siblot (Yasmine), Faire valoir ses droits au quotidien. Les services publics dans les quartiers populaires, Paris, Presses de Sciences Po, 2006.
Swidler (Ann, « Culture in action : Symbols and Strategies », American Sociological Review, vol. 51, no 2, pp. 273-286.
Weber (Florence), « La lettre et les lettres : codes graphiques, compétences sociales. Des outils pour l’analyse des écritures ordinaires », Genèses, n° 18, 1995, pp. 152-165.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h
Voir planning général...

Lieu : Batiment A (27 rue Saint-Guillaume), salle A12 


Programme

Introduction générale : Gildas Tanguy & Jean-Michel Eymeri-Douzans (IEP de Toulouse – LaSSP)

Axe 1 / L'écrit ordinaire comme pratique d'Etat

Président : Gildas Tanguy
Discutant : Pierre Karila-Cohen (Université de Rennes 2 – CERHIO – UMR 6258 – IUF)

Axe 2 / Entreprendre une sociologie de l'Etat à travers les écrits ordinaires. Enjeux et méthodes

Président : Jean-Michel Eymeri-Douzans
Discutant : Bernard Lahire (ENS de Lyon – Centre Max Weber – UMR 5283)


Résumés des contributions

Dora d’Errico (ENS de Lyon – Triangle – UMR 5206)
 
Les écrits politiques et administratifs du Palais Communal de Florence durant les guerres d’Italie : l’État au quotidien
 
Cette étude porte sur les aspects linguistiques, historiques et anthropologiques des « pratiques de l’État » qui s’élaborent dans la Florence des guerres d’Italie chez une série d’acteurs souvent tenus aux marges de l’historiographie politique : fonctionnaires officiels de la Chancellerie (ufficiali), experts mandatés par la Signoria et conseillers (savi) réunis en Pratica. Leurs écrits manifestent en effet la vie quotidienne d’un Etat pré-moderne, dans des temps de crises exceptionnelles, et permettent ainsi de saisir de manière originale l’articulation du trivial et du décisif qui fait peut-être le fond de l’action publique.
 
Political and administrative writings from the Palazzo comunale in Florence during the italian wars : a day to day State life

This study is concerned with the « State practices », in Renaissance Florence,  of a class of political protagonists usually forgotten by the common political historiography : we think of  civil servants, government officials (ufficiali), experts commissioned by the Signoria or councillors (savi) gathered in Pratica ... Theirs writings, regarded from an historical and linguistical point of view, may indeed show us the mundane life of a pre-modern State, at its most dreadfull hours, and then may help us understand the weaving of trivial and exceptional concerns that could be the essence of public action.


Sylvain André (Université d’Aix-Marseille – CAER)
 
La décision au fil des plumes : la Junta de Gobierno de Philippe II (1586-1598)
 
Les dernières années du règne de Philippe II furent le théâtre d’un renouveau du système gouvernemental de la Monarchie hispanique. L’apparition en 1586 de la Junta de Gobierno provoqua en effet une série de réajustements dans l’ordre conciliaire alors en vigueur. Autour de la remise en question de l’hégémonie des grands Conseils se pose en filigrane celle de la légitimité d’un nouvel organe dont la principale mission fut de dynamiser l’appareil institutionnel tout en échappant à ses lois. Comment donc, depuis cette dimension infra-institutionnelle la Junta de Gobierno parvint-elle à définir un nouveau modus operandi conduisant à la décision politique ? Et comment d’extraordinaires ses écrits, en devenant rapidement ordinaires, permirent de faire émerger la parole d’un État en gestation ?
 
The political decision through its writings : the Junta de Gobierno of Philip II (1586-1598)

The last years of the reign of Philip II were marked by the revival of the governmental system of the Hispanic monarchy. Indeed, the appearance of the Junta de Gobierno in 1586 provoked a series of adjustments in the system that was, at this time, based on Councils. Thus, not only the hegemony of the Great Councils was called into question but also was the legitimacy of this new organism, the main function of which was to make evolve the institutional system while being beyond its laws. How did the Junta de Gobierno, from its special position, succeed in defining a new modus operandi, thus leading to a political decision? And how did its extraordinary works quickly become ordinary and participated to give a voice to the nascent Spanish State ?


Marc Aymes (CETOBAC – UMR 8032 – EHESS – Collège de France)
 
Faux et usages de faux : l’ordinaire de l’État ?
 
L’ordinaire de l’État, tout agencé qu’il soit par la positivité de la mise en ordre, est autant (sinon davantage) informé par la négativité d’un manquement : chaque fois qu’un incident vient gripper le cours prévu des choses et troubler la répartition réglée des places. Étudier les techniques scripturales dont l’action publique est constituée suppose par conséquent de s’intéresser de près aux modalités de leur prise en défaut. Parmi les acteurs de celle-ci figurent en particulier ceux que la loi a coutume d’appeler des faussaires. Avec pour terrain d’étude les circuits documentaires de l’administration ottomane aux xixe et xxe siècles, nous tenterons d’observer quelques faussaires à l’œuvre. Tâche difficile, car à l’instar du traducteur rêvé par certains écrivains, le bon faussaire est celui qui sait se faire oublier. Force sera toujours de s’en remettre à la perspicacité des autorités qui tenaient les archives, au hasard d’une inadvertance ou au scrupule d’un recoupement. S’il est habile, le contrefait passera inaperçu, et l’on n’en saura rien. S’il est pris, la loi et l’ordre feront tout pour reprendre leurs droits. En somme, une double mise au secret fonde l’ordinaire de la documentation d’État : soit le faux se dérobe, échappe à la saisie, et ses responsabilités restent intraçables ; soit il est appréhendé, et aussitôt le voici démis de ses fonctions. Passé le bref temps de la répression et de l’annulation, l’agir du faussaire s’efface à nouveau. Le faux dont nous pouvons tenter de rendre compte sort donc a priori de l’ordinaire : c’est le faux mis au supplice. Est-ce à dire qu’il doive être tenu pour extraordinaire ? L’hypothèse envisagée ici est au contraire qu’il existe une relation symbiotique entre les formalisations de la perspicacité légitime (papiers d’identité, tabulations d’experts, agences d’évaluation, etc.) et leur parasitage par la falsification (cf. Grafton 1993). Ici tandis que les savoirs historiques tendront à concevoir la documentation suivant des régimes d’empreinte, une sociologie pragmatique s’attachera à l’expérience d’un jugement situé, permis par un engagement des corps : dans l’ordinaire du faire, du refaire, du faire à nouveau et du faire encore, l’usage du faux opère l’actualisation des « jeux entre les corps et les qualifications, entre les engagements physiques et les énoncés » (Bessy et Chateauraynaud 1995 : 244). En l’espèce, nous pourrions dire : le faux fait l’ordinaire de l’État.
 
Uttering forgery : the ordinary course of the state’s affairs

The ordinary course of the state’s affairs is, as a matter of necessity, shaped by the positive imposition of order. Yet equally it is shaped at least as much by the negativity of a lack – whenever an incident causes the planned course of events to be thrown off kilter and disturbs the allotted placement of each. Studying the various writing techniques which structure public performance thus involves close examination of the ways in which they may be found wanting. Forgers, as the law usually calls them, may be considered key protagonists in such critical situations. While perusing the documentary wheelwork of Ottoman administration in the 19th and 20th centuries, one may set out to observe some forgers at work. This is no easy matter for, just like the dream translator hoped for by certain writers, the good forger knows how to go unnoticed. We will have to rely on the perspicacity of the authorities in charge of the archives, on fortuitous inadvertence or scrupulous cross-checking. The clever forgery goes unnoticed, and we will know nothing of it. And when law and order manage to pin it down, right away they strive to re-establish their right of dominion, and eliminate imposture now re-categorised as mere rubbish. The only fake that remains for us to account for is therefore not an ordinary one: it is the fake that has been put on the rack. Still one ought not consider it extraordinary. Quite to the contrary, the working hypothesis put forth here is that there could exist a symbiotic relationship between the formatted evidence of legitimate acumen (a state’s identity papers, an expert’s table, an agency’s rating) and its parasitic counterfeit (cf. Grafton 1990). In this regard the works of historians would tend to conceive of documentation as an imprinted matter; meanwhile a pragmatic sociologist would rather look out for experiences of how judgment is being enacted, i.e. committed to bodies in a perpetual making and remaking. The fake’s progress thus testifies to “interplaying bodies and skills, physical prowess and utterance” (Bessy and Chateauraynaud 1995: 244). At any rate, one may suggest that the forger’s deeds are state-making at its most ordinary.


Chloé Gaboriaux (Sciences Po Paris – Centre de recherches politiques de Sciences Po)
 
La reconnaissance d’utilité publique au fil de la plume : mentions marginales, ratures et ajouts manuscrits dans les documents échangés entre le Ministère de l’Intérieur et le Conseil d’État (1901-1914)
 
Après la libéralisation des syndicats professionnels et des sociétés de secours mutuels, la loi 1901 relative au contrat d’association confirme l’infléchissement de la culture républicaine française, qui semble alors admettre l’existence de corps intermédiaires entre l’Etat et les individus. L’évolution est pourtant limitée : la définition de l’intérêt général reste une prérogative de l’Etat, qui peut en confier la réalisation à des associations choisies et soumises à sa surveillance. Tel est le sens de l’article 10 de la loi, qui conditionne l’attribution de la personnalité morale à la reconnaissance d’utilité publique par décret en Conseil d’Etat. Ni la loi ni le décret d’application n’indiquent cependant les critères de cette reconnaissance, que nous analyserons donc ici à travers les pratiques administratives. Au cours de la période envisagée, le Conseil d’Etat a examiné plus de 500 demandes, qui ont donné lieu à de nombreux échanges entre les représentants des associations concernées, les ministères de l’Intérieur et de l’Instruction publique et les conseillers d’Etat. Les archives en ont gardé la trace : projets de décret raturés et annotés, lettres, notes et brouillons. Ces écrits font voler en éclats l’image d’un Etat monolithique, imposant d’en haut un intérêt général défini a priori : la décision y apparaît comme le résultat de négociations parfois conflictuelles entre des acteurs d’horizons différents. Elle émerge de rapports de force étroitement imbriqués à des conceptions divergentes de l’utilité publique, tantôt rattachée à la continuité de l’Etat, tantôt articulée aux exigences politiques du moment.
 
Recognition of public utility through the Council of State archives : marginal notes, deletions and hand-written addenda in documents exchanged between Councillors of State and Cabinet Ministers, France 1901-1914

The 1901 law on associations confirmed the evolution of the French Republic toward the acceptance of intermediary bodies between the State and citizens. However, the evolution was limited in scope: defining the general interest remained a prerogative of the State, which entrusted some associations to pursue the common good under its control. It is the reason why the article 10 of the law granted legal personality only to associations recognised as being of “public utility” by a decree of the Council of State. But neither the 1901 law nor the application decree made the criteria of this recognition explicit. Therefore, this paper will analyse these criteria through administrative practices. In the considered period, the Council of State examined more than 500 applications, which led delegates of associations, Cabinet Ministers and Councillors of State to exchange numerous documents: annotated, crossed-out drafts of decrees, letters and notes. Such writings destroy the view of the State as a monolith, imposing a top-down, a priori defined general interest: on the contrary, decisions resulted from disputed negotiations between different actors. They rose from power relations closely related to diverging conceptions of “public utility”, either connected to State continuity or to political considerations.


Harold Mazoyer (IRICE – UMR 8138)
 
L’Ingénieur-économiste comme écrivain public. Le processus de légitimation de l’ « étude économique » comme pratique administrative au ministère des Transports (1958-1970)
 
Nous proposons dans cette communication de faire la lumière sur une séquence clef du processus de légitimation de la production d’« études économiques » dans une administration singulière : le ministère des Transports. Au cours des premières années de la Vème République on assiste à la constitution d’une puissante bureaucratie de l’expertise économique en son sein, notamment à travers le recrutement de nombreux « économistes ». Saisir les processus qui concourent à l’institutionnalisation de l’« étude économique » comme une pratique légitime conduit à envisager la manière dont le projet d’un gouvernement de l’action publique par le savoir économique est retravaillé par la « culture locale », et les rapports de force internes, de ce  département ministériel considéré. Il importe également de comprendre, plus spécifiquement, comment se solidifient des normes (formelles et informelles) qui règlent le choix des auteurs et des sujets, la place de ces écrits dans les séquences décisionnelles, la sélection et de la labellisation des catégories d’action publique légitimes et les autres conventions et codes narratifs attachés à cet exercice. Nous verrons que plupart des processus qui participent à légitimer l’« étude économique » comme écrit ordinaire de l’Etat au sein de ce ministère s’éclairent si on les appréhende à partir d’une sociologie des rôles institutionnels. Cette communication s’appuiera sur un matériau archivistique ainsi que sur des entretiens semi-directifs auprès, notamment, d’anciens économistes de cette administration.
 
The Engineer-economist as a scribe. The process of legitimation of “economic study” as administrative practice in the French ministry of transport (1958-1970)
 
This paper deals with a key period of the process of legitimation of “economic study” in the French ministry of transport. During the first years of the French Fifth Republic, resorting to economists and their knowledge gradually became common within this Ministry. Understanding the institutionalization process of economics study involves analyzing how a project of a government led by economical knowledge is transformed by power relations within public administration. We also have to understand how the selection of authors and subject was made, the implication of these economic studies on public decisions, the categorization process of public action recipients and the other narrative codes of these documents. The sociology of institutions will help us to enlighten the process of legitimation of “economic studies” in this Ministry. This work is based on archives and interviews with former economists.


Sylvain Laurens (CRIA – EHESS) & Delphine Serre (Université de Paris 1 – CESSP – CSE – EHESS)
 
Le travail des agents de l’État comme moyen d’interroger ses soubassements sociaux. Réflexions sur l’enrôlement administratif de dispositions issues de socialisations antérieures
 
Dans leur travail classique sur les agents du système administratif (1972), Alain Darbel et Dominique Schnapper cherchaient à montrer comment différents ethos administratifs prenaient appui sur les valeurs de différents groupes sociaux. Aux fonctionnaires originaires des classes moyennes engageant « dans la pratique quotidienne du travail administratif un système de valeurs fait de rigueur professionnelle et de formalisme juridique », les deux chercheurs opposaient les hauts fonctionnaires issus des classes supérieures conservant « vis-à-vis de leur rôle social, une distance qu’ignorent les autres groupes sociaux » et ayant «  la conscience claire qu’il s’agit d’un rôle ». Cette idée d’un Etat puisant dans des groupes sociaux différents et tirant profit, dans le travail administratif, de dispositions sociales incorporées au travers des socialisations primaires et secondaires semble aujourd’hui disqualifiée d’emblée tant elle laisse de côté les niveaux d’intermédiation qui existent entre la pratique administrative et les dispositions des agents : contrainte des rôles administratifs (Lagroye 1997), plasticité limitée du droit, poids de la formation par les grandes écoles (Eymeri 2001), distorsions provoquées par le marché de la haute fonction publique (Gally 2012) et le filtre complexe des concours administratifs (Biland-Curinier 2012). Notre intervention se propose cependant de revenir sur cette question classique de sociologie de l’Etat et quelque peu délaissée à partir de l’angle concret de l’écriture administrative. Nous défendrons dans cette communication l’hypothèse qu’il n’y a pas d’un côté des groupes sociaux porteurs de valeurs et de l’autre un Etat qui puiserait dans des groupes d’agents portant des valeurs. Ce qu’il convient de saisir c’est la façon dont le travail administratif favorise l’actualisation de dispositions acquises antérieurement et l’expression d’un certain rapport à l’écriture. Nous défendrons l’hypothèse – commune en sociologie du travail mais peu appliquée lorsqu’il s’agit d’analyser le travail des fonctionnaires – que l’entrée dans le métier (de bureaucrate) va de pair avec l’exposition à un processus continu de socialisation qui valorise ou disqualifie certaines façons d’écrire acquises antérieurement. Pour ce faire, nous prendrons pour point de départ de notre réflexion, la comparaison des pratiques d’écriture de deux types d’agents de l’Etat très différents : des hommes, hauts fonctionnaires, de la fonction publique d’Etat, situés du côté de la conception des politiques publiques ; et des femmes, assistantes sociales de la fonction publique territoriale (catégorie B), en position de mettre en œuvre les politiques décidées en haut. La structure et le contenu de leurs écrits tant officiels que cachés se comprennent pour partie en lien avec le système de contraintes et de règles auxquels ils sont soumis. Mais leurs écrits mobilisent aussi, comme nous souhaitons le démontrer, des dispositions ou des systèmes de croyances personnelles qui ont été constitués au fil de trajectoires singulières. A partir de cet enjeu spécifique de l’écriture, nous élargirons ensuite le propos en nous appuyant sur une revue de littérature plus vaste, pour analyser comment l’Etat gère au fil d’une socialisation professionnelle les dispositions que ses agents ont acquises en dehors du travail : il peut en effet les enrôler, les exclure ou chercher à les transformer.
 
Civil servant’s work as a key to examine social basements of the State. On the use of predispositions from earlier socialization into bureaucratic tasks

In their classic study on french civil servants (1972), Alain Darbel and Dominique Schnapper  wanted to show how administrative ethos were determined by the values ​​of different social groups. The two searchers were opposing on one hand the back office civil servants from middle class which "daily practice regarding administrative tasks” was caracterized by “professional rigor and legal formalism," with, on the other hand, high ranking civil servants from upper classes and maintaining “social distance” from their role, having a “clear conscience that it was a role”.  This idea of ​​a State drawing into different social groups and requiring predispositions incorporated through primary and secondary socialization could seem today an old-fashioned hypothesis as it ignores the levels of intermediation between administrative practice and earlier socialization of agents. It could make us forget the role played by institutionalization of administrative roles (Lagroye 1997), limited plasticity of administrative rules that have to be applied, the role played by Grandes Ecoles in high ranking civil servants selection and recruitment (Eymeri 2001, Gally 2012, Biland-Curinier 2012). We suggest yet in this contribution to deal with this classic question of Sociology but focusing on daily practices and administrative writings. In this communication we will defend the hypothesis that we should not consider on one hand social groups carrying values ​​and on the other hand a State hiring into groups of agents carrying homogeneous values. We will defend the assumption - common in sociology of work but not applied when one comes to analyze work of civil servants -that the entry into the profession (of bureaucrat) is associated with a continuous process of socialization that promotes or disqualifies certain dispositions, and for instance certain ways of writing previously acquired. To do this, we will take as a starting point of our demonstration, the comparison of writing practices of two types of agents. Firstly, men, high ranking civil servants, shaping public policies and secondly women social workers of the territorial civil service (category B) who have to implement policies decided at the top. The structure and content of their official or hidden writings can of course be understood partly considering the system of constraints and rules in which they are involved. But we will also mobilize their writings, to demonstrate that these professional writing are shaped by personal predispositions and belief systems that have been developed through singular trajectories. From this issue of administrative writing, then we will analyze how State manages over of professional socialization these predispositions that agents have acquired outside work : enlisting, excluding or valorizing them.


Olivier Quéré (IEP de Lyon – Triangle – UMR 5206)
 
La formation aux écrits ordinaires de l’État. Étude des définitions et des usages de l’écriture administrative dans les IRA
 
Il est possible de saisir ce que sont les écrits ordinaires de l’Etat à travers la manière dont ils sont définis et investis durant la période de formation initiale des fonctionnaires. En prenant appui sur le cas des attachés formés dans les IRA, il s’agit d’interroger à la fois le contenu des modules de formation portant sur les différentes « techniques d’écriture administrative », et la manière dont ils sont enseignés. L’objectif est de comprendre les principes qui président à la définition de ces « techniques » d’écriture à travers le temps et ce que cela dit sur le fonctionnement de l’Etat et de son administration. De ce point de vue, la formation des fonctionnaires à l’écriture administrative, dans un cadre plus vaste d’apprentissage de la « culture administrative » jugée constitutive du « bon fonctionnaire », est un bon observatoire pour comprendre les définitions données aux activités scripturales de l’Etat. Mais ces écrits doivent également être analysés à l’aune de ses usages différenciés. A la fois symbole de rigidité administrative et support pour les tentatives d’« ouverture » de la relation de l’administration avec les administrés, les écrits de l’Etat, même les plus ordinaires, sont investis de mouvements complexes et contradictoires. Saisir ces écrits à travers les usages différenciés dont ils font l’objet en période de formation est une manière de mieux saisir les appropriations différenciées des reconfigurations contemporaines de l’Etat.
 
The training on the ordinary administrative writing : definitions and uses of administrative writing in the IRA
 
One can understand what the usual documents issued by State administration are by studying how they are defined and used during the first training period of the civil servants. By focusing of the case of the French civil servants “attachés” trained in the IRA, our purpose is to consider the content of the training components which cover the different “techniques” for administrative writing, but also the way they are taught. Thus, we want to understand the principles that govern those writing « techniques » over time and what it tells us about the State’s way of functioning. From this perspective, the civil servants' training to administrative writing is a part of a broader training: the one of the « administrative culture », which is considered as a need to make a « good civil servant ». Therefore, studying this training is a relevant way to understand the way administrative activities are organized and defined. But those writings activities must also be analyzed on the light of their different uses. Administrative writings, even the most common ones, are in the meantime symbols of the bureaucratic rigidity and a mean for the State to achieve the attempts of « opening » to the citizens. Thus, those writings are characterized by complex and contradictory trends. Analyzing those writings through the differentiated uses that occur during the “attachés” training period is a way to better understand how the State changes – especially as these changes can be seen as a non-explicit, gradual and institutional NPM framing.

 
Anne-Julie Auvert (Université de Paris 8 – CRESPPA – GTM – UMR 8217) & Axel Pohn-Weidinger (IEP de Strasbourg – Université de Paris 8 – CRESPPA – GTM – UMR 8217)
 
Saisir l’État à travers les écritures des administrés : éléments pour une sociologie du dossier
 
Comment les administrés contribuent-ils à la production quotidienne de l’ordre bureaucratique ? Tandis que nous disposons d’une riche littérature sur les agents administratifs, du haut fonctionnaire au street-level bureaucrate, nous manquons d’études qui permettraient de comprendre la place qu’occupent les administrés dans la production de l’action publique. A partir d’une étude de dossiers litigieux adressés au Haut Commissariat aux Solidarités Actives entre 2007 et 2008, notre communication développera les bases d’une sociologie de l’administré à travers sa « paperasse ». Il s’agira de rendre compte des manières dont les individus composent avec les logiques administrativo-juridiques des dispositifs institutionnels tout en cherchant à faire valoir leur « bon droit », à travers la lente et laborieuse constitution de leur dossier administratif personnel. L’ordre bureaucratique peut ainsi être analysé à l’échelon le plus bas de sa production, à travers les pratiques mises en œuvre par les administrés pour en assurer le fonctionnement, dès lors qu’un problème de leur vie quotidienne les y oblige.
 
Understanding the writings of public service users : towards a sociology of the file
 
How do ordinary citizens contribute to the everyday production of bureaucratic order? Whereas abundant literature exists on the work of civil servants and on street-level bureaucrats, the specific contribution of the ordinary public service users to the stability of bureaucratic order has yet to be explored.  Drawing on the study of a set of files sent to the High Commissioner of Active Solidarity between 2007 and 2008, our paper outlines a sociology of the public service user, based upon an analysis of the “paperwork” that has to be accomplished in order to establish legal eligibility. The body of paper gives an account on the multiple ways how individuals come to terms with the different rules, procedures and professionals they are dealing with when they compile the file they will ultimately submit. The practices and competences the public services users apply and develop while defending their case leads us to highlighting their crucial role for the maintenance of bureaucratic order on an everyday level.


Bastien Amiel (Université Paris Ouest Nanterre – GAP), Paul Lehner (Université Paris Ouest Nanterre - ISP), Gauthier Fradois (Université Paris Ouest Nanterre - ISP)
 
Dans les sous-sols de l’État. Saisir l’État au travers des archives judiciaires : les trajectoires de trois populations de mineurs délinquants passés par le tribunal pour enfants de Nanterre (1996, 2001, 2006)
 
L'accumulation d'un capital informationnel mobilisable dans la gestion publique des populations passe par la production d'écrits ordinaires d'Etats, ainsi que par leur conservation comme archives constituant la mémoire des institutions bureaucratiques. L'analyse statistique de près d’un milliers de dossiers judiciaires des 192 mineurs entrés au Tribunal pour enfants de Nanterre en 2006 à l'âge de 15 ans pour des faits de délinquance  permet de rendre compte des logiques d'écriture mises en œuvre dans la production des dossiers judiciaires et par ce biais, de la construction d'«identités de papier» [Noiriel] par les professionnels de la justice. En effet, ces agencements de traces scripturales, mêlant des modes d'écriture et des orientations professionnelles dissemblables, constituent le support matériel auquel se réfèrent les magistrats au moment des audiences et des décisions. Le recueil des informations présentes dans les dossiers relatives aux situations professionnelles et sociales, aux « accidents » biographiques, à la structure des familles et aux types d'autorité qui s'y exercent, aux conditions matérielles d'existence dans le logement, ou encore à la scolarité, rapportée aux décisions judiciaires, permet de mettre en lumière l'impact sur ces dernières de la plus ou moins grande distance par rapport aux normes sociales dominantes, qu’elles soient familiales, scolaires, professionnelles, sanitaires, etc. Il est ainsi possible de saisir concrètement l'exercice de la violence symbolique de l'Etat à travers les écrits ordinaires que constituent les archives judiciaires.
 
Inside the State’s basement. Seizing the State through its judicial records : the career of a juvenile delinquents’ population turned before the juvenile court of Nanterre (2006)
 
The accumulation of a
capital of information that can be mobilized for the public management of populations required the production of State’s ordinary papers and their conservation as judicial records – the memory of the bureaucratic institution. Statistical processing of a thousand of judicial files from 192 underaged persons turned before the juvenile court of Nanterre for acts of delinquency  allows to show up the writing logic in the files’ production and construction of « papers’ identities » by the professionals of the judicial system. Indeed, this scrap of papers’ layout, mixing dissimilar ways of writing with a multiplicity of professional orientations, constitutes the material support on which the judges make their decisions. Informations collected in the files - about social and professionnal situations, biographic « mishaps »,  families’ structures and forms of autority, conditions of accommodation, and schooling – show, when related to the verdict, the impact of the distance from dominant social norms on the judges’ decisions. Through the ordinary papers of judicial records this analysis will demonstrate in concrete terms the symbolic violence of the State.

 
Pauline Beunardeau (Université Denis Diderot Paris 7 – CSPRP)
 
Écrire l’indiscipline. Au cœur de dossiers administratifs de collégiens
 
Au cœur des procédures de régulation des désordres scolaires, la consignation écrite compose cette routine professionnelle qui enregistre les faits d’indiscipline, oriente les modes de gestions des conflits et organise leur interprétation. Une recherche ethnographique a été menée durant trois ans dans un collège classé « sensible », situé dans le 14e arrondissement de Paris, visant à appréhender l'expression ordinaire de la conflictualité en milieu scolaire. L'étude, centrée sur l’observation des interactions quotidiennes entre le personnel et les collégiens, a mené à considérer l’importance des traces scripturales dans la régulation routinière des tensions. C’est pourquoi nous en sommes venus à explorer les dossiers administratifs des élèves, l’enregistrement des griefs (courriers et rapports des enseignants et des assistants d’éducation, commentaires du chef d’établissement, échanges de mails…) et les comptes rendus des sanctions (jours d’exclusion temporaire ou définitive, avertissements, blâmes, commissions de mise en garde, conseils de discipline, prises en charge par des organismes relais…). De l’analyse de ces écritures professionnelles, découlent trois axes de réflexion : en amont, nous examinerons les effets de ces pratiques d’écriture sur les modes de régulation de la discipline ; en aval, nous interrogerons leur rôle dans la fabrication des évènements scolaires ; enfin, nous questionnerons la place des familles dans un dispositif disciplinaire organisé autour de l'écrit.
 
Administrative writing and school indiscipline
 
We would like to question the role of writing in regulation of school disorders. Writing is a part of professional routines that record unruly behaviors, determinate the way to deal with conflicts and influence interpretations of them. We have been making ethnographic researches for 3 years in Paris, in order to understand ordinary expression of conflicts in a secondary school. It led to take an interest in written traces produced by institutional actors. In this way, we came to explore students' administrative files, event reports (administrative papers, letters, e-mails...) and sanctions archives. From this analysis, three perspectives will be explored: the effects of these writing practices on the discipline regulation, its role in events production and decision-making, and finally, the position of families in relation to theses writing procedures.


Participants
 
AMIEL Bastien bastien.amiel@u-paris10.fr
ANDRÉ Sylvain sylvain.andre@univ-amu.fr
AUVERT Anne-Julie annejulie.auvert@free.fr
AYMES Marc marc.aymes@gmail.com
BEUNARDEAU Pauline paulinebeaunardeau@gmail.com
D’ERRICO Dora dora.d-errico@ens-lyon.fr
EYMERI-DOUZANS Jean-Michel jean-michel.eymeri-douzans@sciencespo-toulouse.fr
FRADOIS Gauthier gauthier.fradois@gmail.com
GABORIAUX Chloé chloe.gaboriaux@sciences-po.org
KARILA-COHEN Pierre pierre.karila-cohen@wanadoo.fr
LAHIRE Bernard Bernard.lahire@ens-lyon.fr
LAURENS Sylvain sylvainlaurens@free.fr
LEHNER Paul paul.lehner@u-paris10.fr
MAZOYER Harold Harold.Mazoyer@gmail.com
POHN-WEIDINGER Axel axel.pohn-weidinger@gmx.at
QUÉRÉ Olivier olivier.quere@sciencespo-lyon.fr
SERRE Delphine Delphine.Serre@ens.fr
TANGUY Gildas gildas.tanguy@sciencespo-toulouse.fr


 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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