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Congrès organisé en partenariat avec

Section Thématique 20

Vers une sociologie politique des sciences ?
Towards a Political Sociology of Science?

Responsables

Yann BÉRARD (CRPLC/UAG) yberard@martinique.univ-ag.fr
Antoine ROGER (Centre Émile Durkheim/Sciences Po Bordeaux) a.roger@sciencespobordeaux.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Cette section thématique se propose de renouveler la réflexion sur les relations entre sciences et pouvoir, en mobilisant les outils de la sociologie politique comparative. La question : « What’s political about science ? » (Frickel & Moore, 2006, p. 3) invite à considérer l’ancrage des recherches scientifiques et techniques dans des systèmes de relations structurés et hiérarchisés. Tout en s’accompagnant d’une multiplication de dispositifs qui visent à favoriser les interactions entre chercheurs, citoyens, pouvoirs publics et industries, la production et l’utilisation de connaissances scientifiques font l’objet de fortes régulations et entretiennent des échanges asymétriques. Le choix d’études de cas intensives (portant le plus souvent sur des laboratoires ou des individus) pour étudier et rendre compte des phénomènes de traduction ou de « coproduction » a fortement marqué la sociologie des sciences au cours de ces vingt à trente dernières années (Chateauraynaud, 1991 ; Latour & Woolgar, 1979 ; Martin, 2005). Aujourd’hui prédominants dans le paysage des science studies, les travaux qui mobilisent la théorie de l’« acteur-réseau » et ses dérivés tendent à se concentrer sur la description de certains processus d’innovation (Vinck, 2007). Ce faisant, ces travaux ne rendent pas vraiment compte des évolutions et inégalités structurelles qui caractérisent l’influence et la distribution sociale des savoirs dans la société.
 
La possibilité même de rendre compte de la « géométrie mouvante » des interactions qui caractérisent la régulation des activités scientifiques et techniques contemporaines, impliquant la saisie empirique d’agencements multiples (entre laboratoires, États, administrations, individus et entreprises), a été pointée du doigt comme une difficulté majeure de la sociologie pragmatique des sciences (Dodier, 2001, p. 306). Une autre limite de ces approches, d’ordre à la fois méthodologique et épistémologique, provient du déséquilibre observé entre la multiplication des études monographiques et la relative absence de travaux comparatifs – qu’il s’agisse de comparaisons dans le temps, entre les « succès » et les « échecs » d’une même entreprise scientifique, ou de comparaisons dans l’espace, entre les logiques qui président à la hiérarchisation des constructions savantes, les configurations des groupes impliqués dans la recherche, les mécanismes de circulation ou de transfert, etc. Or, le raisonnement comparatif reste indispensable pour arriver à des généralisations contrôlées et consolider les explications livrées sur la construction et la distribution des savoirs dans la société (Frickel & Moore, 2006, p. 13). En l’absence d’une telle démarche, le risque encouru est d’extrapoler à partir de micro-études reliées entre elles par un vocabulaire à visée avant tout descriptive, en versant dans un « contingentisme ahistorique » (Bonneuil & Thomas, 2009, p. 14).
 
Cette section thématique vise à organiser un échange critique autour des approches dominantes dans la sociologie des sciences et à amorcer un redéploiement des recherches vers de nouveaux objets. Le projet d’une sociologie politique des sciences ouvre en effet le débat en direction d’une grande variété de terrains d’investigation et de questionnements : concernant aussi bien les régimes de production des savoirs que la recomposition des légitimités académiques et professionnelles, les modèles d’anticipation du risque ou les conceptions du bien commun. Plus largement, les pistes de réflexion ouvertes en direction d’une sociologie politique des sciences appellent à conduire des recherches qui croisent les apports de la sociologie du droit et de l’action publique, des mouvements sociaux, des marchés et des organisations – dans le but non seulement de mettre au jour les dynamiques institutionnelles et les réseaux qui donnent forme au(x) pouvoir(s), mais aussi de rendre compte des dynamiques de résistance et d’adaptation qui en sont indissociables. Pour traiter de ces questions et enjeux, deux sessions sont proposées :
 
1) Étudier les usages des sciences de la vie et de la nature dans la définition des normes d’action publique. Dans les sciences sociales, l’exigence de réflexivité est régulièrement posée : qu’il s’agisse de leur positionnement face aux médias, aux pouvoirs publics ou aux entreprises privées, les chercheurs ont pris pour habitude de s’interroger sur l’onction scientifique donnée à des catégories de sens commun (Bourdieu, 2001). Qu’en est-il de cette posture dans les sciences de la vie et de la nature ? La session se propose à la fois de déplacer et d’étendre le regard réflexif que portent les sciences sociales sur leurs propres pratiques et usages sociaux en direction des sciences dites « dures ». Dans cette perspective, il conviendra de s’interroger sur la consolidation de certaines catégories d’action et de pensée par l’autorité de la science, la définition implicite de modes de vie et de formes économiques légitimes qui en procède, ou encore leur instrumentalisation par des « entrepreneurs de cause » (Epstein, 1996 et 2007 ; Gaudillière, 2002 ; Löwy, 2005). L’objectif de cette session sera de prendre en compte plusieurs sciences (médecine, biologie, physique, agronomie…) pour comprendre leur structuration différentielle et leurs rapports avec la définition de normes d’action publique et la prise de décision politique.
 
2) Étudier les inégalités d’influence et la distribution sociale des savoirs dans la définition des expertises légitimes. Depuis plusieurs années, on retrouve dans de nombreux travaux de sociologie des sciences (ou inspirés par elle) le postulat d’une participation de plus en plus large des citoyens, qui neutraliserait certains des enjeux relevés plus haut, en permettant à chacun de « maîtriser » les découpages introduits par la science – ou de les orienter à tout le moins (Callon, 1998 ; Collins & Evans, 2007 ; Lezaun & Soneryd, 2007). Or, ces orientations ne sont pas exemptes de logiques de pouvoir et d’effets performatifs, qui peuvent contribuer à gommer la production de certains groupes mobilisés ou à délégitimer certaines actions, voire à masquer la persistance de formes d’encadrement plus traditionnelles et à favoriser la production de consensus au détriment de la pluralité des savoirs (Blondiaux, 2008 ; Chilvers, 2008 ; Visvanathan, 2005). Pour mieux rendre compte de tels mécanismes, la seconde session insistera sur les inégalités d’influence et la distribution des savoirs à l’œuvre entre groupes sociaux (experts, hauts fonctionnaires, entreprises, militants, groupes d’intérêt…) lorsque la science est mobilisée. Un autre objectif sera de croiser les réflexions sur les dispositifs d’« évaluation interactive » des recherches scientifiques (Interactive Technology Assessment) avec celles qui portent sur la « démocratie participative » (Pestre, 2011).
 
Compte tenu des enjeux méthodologiques relevés plus haut, l’exploration de ces thématiques devra faire une large place aux démarches comparatives, orientées dans deux directions : comparaisons dans le temps – seront particulièrement appréciés les travaux qui proposent une sociologie historique de la structuration des sciences (Auger, 2004) et de l’évolution des régimes de production des savoirs (Bonneuil & Thomas, 2009 ; Le Marec, 2010 ; Pestre, 2003 ; Shinn, 2000) ; comparaisons transnationales – les communications poseront la question de savoir ce que change la structuration de réseaux de recherche internationaux, souvent contrôlés par une puissance dominante, et préciseront dans quelle mesure l’utilisation d’une organisation transnationale peut servir à imposer certaines catégories savantes, contre des formes de savoirs légitimées à d’autres échelles d’action et de gouvernement (Moore, Kleinman, Hess & Frickel, 2011) – que ce soit à travers le relais d’ONG (Dalgallarondo, 2004), l’appui de la Commission européenne (Felt & Wynne, 2007), ou par le prisme des relations entre « centres » et « périphéries » scientifiques (Losego & Arvanitis, 2008 ; Shinn, Vellard & Waast, 2010). Les deux formes de comparaison pourront être croisées, à l’image de ce qui a été proposé dans des travaux sur la construction et la circulation d’autres formes de savoirs (Payre, 2011).
 
This thematic section proposes to renew the reflection on the relationship between science and power through recourse to the tools of comparative sociology. The question: “What’s political about science ?” (Frickel & Moore, 2006, p. 3) invites to consider the anchoring of scientific and technical research in structured and hierarchical relational systems. Prevalent today in the field of science studies, works having recourse to the “actor-network” theory and its offshoots tend to concentrate on the description of certain innovative processes (Vinck, 2007). Thus they do not really account for the structural evolutions and inequalities which characterize the social influence and the distribution of knowledge in society. Another limit of these approaches, both of a methodological and epistemological nature, stems from the inbalance observed between the multiplication of monographic studies and the relative absence of comparative ones. In the absence of such an approach, the risk incurred is to extrapolate on the basis of micro-studies sharing a predominantly descriptive vocabulary and to veer towards a “contingentisme ahistorique” (Bonneuil & Thomas, 2009, p. 14).
 
This thematic section aims at organizing a critical exchange around the dominant approaches in the sociology of science and at initiating a redeployment of research towards new objects. In order to do so, two sessions are proposed:
 
1) Uses of the sciences of life and nature in the definition of the norms of public action. The aim of this session is to take into account several sciences (medicine, biology, physics, agronomy…) to understand their specific structuring and their links with the definition of norms and with political decision taking. In this perspective, it will be necessary to question the consolidation of certain categories of thought and action by the authority of science, the implicit definition of lifestyles and the ensuing legitimate economic forces, and perhaps also their being exploited by “entrepreneurs of a cause” (Epstein, 1996 and 2007 ; Gaudillière, 2002 ; Löwy, 2005).
 
2) Inequalities of influence and social distribution of knowledge in the definition of legitimate expertises. In order to account better for such mechanisms, the second session will insist on the inequalities of influence and the social distribution of knowledge that occur between social groups (experts, high-ranking civil servants, businesses, militants, lobbies…) when science is mobilized. Another objective will be to confront reflections on the “interactive evaluation” procedures in scientific research (Interactive Technology Assessment) with the ones on “participatory democracy” (Pestre, 2011).
 
Considering the above mentioned methodological issues, the exploration of these themes will have to make a large space for comparative approaches oriented in two directions: comparisons in time – studies proposing a historic sociology of the structuring of sciences (Auger, 2004) and of the evolution of the production regimes of knowledge (Bonneuil & Thomas, 2009 ; Le Marec, 2010 ; Pestre, 2003 ; Shinn, 2000) will be particularly welcome ; transnational comparisons – papers will explore the question of what the structuring of international research networks, often controlled by a dominant power, changes, and will specify to what degree the recourse to a transnational organization may help to impose certain savant categories, against forms of knowledge that are legitimated at other levels of action and government (Moore, Kleinman, Hess & Frickel, 2011) – whether it be via recourse to NGOs (Dalgallarondo, 2004), the support of the European Commission (Felt & Wynne, 2007), or through the spectrum of relations between scientific “centers” and “peripheries” (Losego & Arvanitis, 2008 ; Shinn, Vellard & Waast, 2010).


Bibliographie

AUGER Jean-François (2004), « Le régime de recherche utilitaire du professeur-consultant de chimie industrielle au cours de la Seconde Révolution Industrielle », Annals of Science, 61 (3), p.351-374.
BLONDIAUX Loïc (2008), Le nouvel esprit de la démocratie. Actualité de la démocratie participative, Paris, Seuil.
BONNEUIL Christophe, THOMAS Frédéric (2009), Gènes, pouvoirs et profits. Recherche publique et régimes de production des savoirs de Mendel aux OGM, Paris, Éditions Quae.
BOURDIEU Pierre (2001), Science de la science et réflexivité, Paris, Raisons d’agir.
CALLON Michel (1998), « Différentes formes de démocratie technique », Annales des Mines, p. 63-73.
CHATEAURAYNAUD Francis (1991), « Forces et faiblesses de la nouvelle anthropologie des sciences », Critique, 529-530, p. 459-478.
CHILVERS Jason (2008), “Deliberating Competence: Theoretical and Practitioner Perspectives on Effective Participatory Appraisal Practice”, Science, Technology and Human Values, 33 (2).
COLLINS Harry, EVANS Robert (2007), Rethinking Expertise, Chicago, University of Chicago Press.
DALGALLARONDO Sébastien (2004), Sida. La course aux molécules, Paris, Éditions de l’EHESS.
DODIER Nicolas (2001), « La nouvelle donne "technique" de la sociologie du travail », POUCHET Amélie (dir.), Sociologies du travail : 40 ans après, Paris, Elsevier, p. 295-307.
EPSTEIN Steven (2007), Inclusion: The Politics of Difference in Medical Research, Chicago, University of Chicago Press.
EPSTEIN Steven (1996), Impure Science: Aids, Activism and the Politics of Knowledge, Berkeley, University of California Press.
FELT Ulrike, WYNNE Brian (2007), Taking European Knowledge Society Seriously, Rapport pour la Commission européenne.
FRICKEL Scott, MOORE Kelly (eds.) (2006), The New Political Sociology of Science: Institutions, Networks, and Power, Madison, University of Wisconsin Press.
GAUDILLIÈRE Jean-Paul (2002), « Mettre les savoirs en débat ? Expertise biomédicale et mobilisations associatives aux États-Unis et en France », Politix, 15 (57), p. 103-123.
LATOUR Bruno, WOOLGAR Steve (1979), Laboratory Life: the Social Construction of Scientific Facts, Beverly Hills, Sage Publications.
LE MAREC Joëlle (dir.) (2010), Les études de sciences : pour une réflexivité institutionnelle, Paris, Éditions des archives contemporaines.
LEZAUN Javier, SONERYD Linda, “Consulting Citizens: Technologies of Elicitation and the Mobility of Publics”, Public Understanding of Science, 16 (3), 2007, p. 279-297.
LOSEGO Philippe, ARVANITIS Rigas (dir.) (2008), « La science dans les pays non hégémoniques », Revue d’anthropologie des connaissances, 2 (3).
LÖWY Ilana, « Le féminisme a-t-il changé la recherche biomédicale ? Le women health movement et les transformations de la médecine aux États-Unis », Travail, genre et sociétés, 14, 2005, p. 89-108.
MARTIN Olivier, Sociologie des sciences, Paris, Armand Colin, 2005.
MOORE Kelly, KLEINMAN Daniel Lee, HESS David, FRICKEL Scott (2011), “Science and Neoliberal Globalization: a Political Sociological Approach”, Theory and Society , 40 (5), p. 505-532.
PAYRE Renaud (2011), « L’espace des circulations. La fabrique transnationale des sciences administratives (années 1910-années 1950) », LABORIER Pascale et al. (dir.), Les sciences camérales. Activités pratiques et histoire des dispositifs publics, Paris, PUF, p. 283-306.
PESTRE Dominique (2011), « Des sciences, des techniques et de l’ordre démocratique et participatif », Participations, 1, p. 210-238.
PESTRE Dominique (2003), “Regime of Knowledge Production in Society: Towards a more Political and Social Reading”, Minerva, 41 (3), p. 245-261.
SHINN Terry (2000), « Axes thématiques et marchés de diffusion. La science en France, 1975- 1999 », Sociologie et société, 32 (1), p. 43-69.
SHINN Terry, VELLARD Dominique, WAAST Roland (dir.) (2010), « La division internationale du travail scientifique », Cahiers de la recherche sur l’éducation et les savoirs, 9.
VINCK Dominique (2007), Sciences et société. Sociologie du travail scientifique, Paris, Armand Colin.
VISVANATHAN Shiv (2005), “Knowledge, Justice and Democracy”, LEACH Melissa, SCOONES Ian, WYNNE Brian (eds.), Science and Citizens: Globalization and the Challenge of Engagement, London, Zed Books.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45
Session 3 : 11 juillet 2013 15h15-18h

Voir planning général...

Lieu : Batiment J (13 rue de l'Université), salle J 211


Programme

Axe 1 / Usages des sciences de la vie et de la nature dans la définition des normes d’action publique

Discutants : Didier Torny (INRA RiTME), Virginie Tournay (PACTE/Sciences Po Grenoble)

Axe 2 / Inégalités d’influence et distribution sociale des savoirs dans la définition des expertises légitimes

Discutants : Ève Seguin (UQAM/Département de science politique), Sezin Topçu (CEMS/EHESS)


Résumés des contributions

Lydie Cabane (CSO/Sciences Po Paris), Sandrine Revet (CERI/Sciences Po Paris)

La cause des catastrophes. Concurrences scientifiques et mise à l’agenda politique dans un monde transnational
 
Les catastrophes dites « naturelles » (séismes, ouragans, tsunamis, éruptions volcaniques, inondations…) ont été pendant longtemps et sont encore aujourd’hui, pour la plupart, analysées par les sciences dites « dures », sciences de la terre et sciences de l’ingénieur. Au cours du XXe siècle, elles sont également devenues un objet de recherche pour les sciences sociales, déplaçant par la même occasion l’objet d’investigation et d’intervention sur les catastrophes, en les rendant moins « naturelles » et plus « sociales ». La communication propose de montrer comment la concurrence des savoirs, entre sciences de la terre et sciences sociales, a accompagné la mise à l’agenda politique international de ces catastrophes depuis les années 1970. En s’intéressant à ces différents types de savoirs souvent séparés, on cherchera à montrer comment la distribution sociale des disciplines est indissociable de reconfigurations politiques qui promeuvent, adoptent ou rejettent certaines approches au détriment d’autres. En comparant la structuration du champ des sciences sociales des catastrophes en Afrique du Sud et en Amérique latine, la communication montrera l’importance des relations entre sciences sociales et réorientation des politiques. Il s’agira donc, à travers une comparaison dans le temps à l’échelle transnationale, de montrer les différences de structuration de champs disciplinaires et leurs effets sur les politiques des catastrophes ; et à travers une comparaison inter-régionale, de saisir les particularités des liens entre sciences et politiques dans les contextes évoqués.

Advocating for disasters: Scientific rivalries and disaster policies in a transnational world

So-called ‘natural’ disasters (earthquakes, hurricanes, tsunamis, volcanic eruption, floods, etc.) have long been the domain of natural and engineering sciences. However, throughout the 20th century, disasters also became an object of investigation for social sciences. This new field of “disaster studies” transformed in turn the understanding of disasters, rendering them less ‘natural’ and more ‘social’. The paper proposes to study how the competition between natural and social sciences accompanied an increasing political interest for disasters from the 1970s, both in global arenas and at states level. By looking at the competitions between different types of sciences – too often analyzed separately –, the aim is to show how the social distribution of scientific disciplines cannot be dissociated from political configurations that promote, adopt or reject some knowledge over others. In particular, through a comparative study of the emergence of disaster sciences in different contexts (South Africa and Latin America), the paper will establish the importance of social sciences in the re-orientation of disaster policies in the 1990s. The comparison between different periods and at a transnational scale is especially useful to demonstrate the existence of different disciplinary configurations and their impacts on disaster policies. Also, the comparison between different regions enables to specify how these configurations vary according to political and scientific contexts, as well as to identify the inter-relations between these contexts and global transformations.


Marie Hrabanski (ART-Dev/CIRAD)

De l’échec du Global Biodiversity Assessment (1993‐1995) au succès du Millennium Ecosystem Assessment (2001‐2005). Analyse comparée de deux évaluations internationales de la biodiversité
 
La communication propose une comparaison dans le temps entre deux évaluations internationales de la biodiversité : le Global Biodiversity Assessment-GBA (1993-1995) et le Millenium Ecosystem Assessment-MA (2001-2005). La première évaluation est qualifiée d’échec par ses promoteurs (Cash & Clark, 2001), la seconde comme un succès dans la mesure où le MA a médiatisé la notion de « service éco-systémique ». Celle-ci est devenue très rapidement, après la publication du rapport du MA en 2005, une référence dans les politiques publiques internationale et nationale dans de nombreux secteurs (biodiversité, agriculture, eau, sécurité alimentaire…) (Méral, 2012) et a même donné son nom à la plate-forme intergouvernementale de la biodiversité et des services éco-systémiques, l’IPBES. Le MA est ainsi un succès, la notion de SE va ouvrir la voie à l’évaluation économique des services éco-systémiques, et même à leur évaluation monétaire. La communication analysera le contexte d’émergence de ces deux entreprises scientifiques, les réseaux scientifiques mobilisés (disciplines, sous-disciplines…), les coalitions d’acteurs scientifiques et non-scientifiques (Haas, 1992), les réseaux de recrutement, et les résultats produits par ces deux évaluations internationales. La communication accordera une attention particulière aux logiques nationales qui traversent ces évaluations internationales, en soulignant l’ancrage des experts internationaux dans des champs politico-scientifiques nationaux (Dezalay & Garth, 2002 ; Pesche, Méral, Hrabanski, & Bonnin, 2012).
 
From the GBA failure (1993-1995) to the MA success (2001-2005): Comparative analysis of two international assessments of biodiversity
 
The paper proposes a comparison between two international assessments of biodiversity: The Global Biodiversity Assessment-GBA (1993-1995) and the Millennium Ecosystem Assessment-MA (2001-2005). The first assessment is qualified of failure by its promoters (Cash & Clark, 2001), the second as a success because the MA has brought into policies the concept of “Ecosystem services”. This concept became, very soon after the publication of the MA in 2005, a reference in international and national public policies in many areas (biodiversity, agriculture, water, food security...) (Meral, 2012). Ecosystem service notion even gave his name to the intergovernmental platform on biodiversity and ecosystem services, IPBES. The MA is successful and its results will be relayed across multiple networks and the concept of ecosystem services will pave the way for the economic valuation of ecosystem services, and even their monetary valuation. The paper will analyze the context of the emergence of these two scientific enterprises, the scientific networks mobilized (disciplines, sub-disciplines...), scientific and non-scientific advocacy coalitions (Haas, 1992), recruitment networks, and the results produced by these two international assessments. The paper will pay a particular attention to national logic through these international assessments stressing national anchorage of international experts (Dezalay & Garth, 2002; Pesche et al., 2012).


Gabrielle Bouleau (IRSTEA Bordeaux)

Le bon état écologique des eaux : sociologie politique de l’hydrobiologie française
 
Cette communication retrace la sociologie politique de l’hydrobiologie française entre 1960 et 2000, qui a influencé des normes remises aujourd’hui en cause par l’harmonisation européenne de la qualification écologique des rivières. Trois étapes de co-production de science et d’ordre social sont distinguées : le choix du grain de description, l’interprétation des tendances, la compensation permise par les équivalences. Ces investissements de forme créent des effets d’abondance et de rareté qui s’articulent à un récit politique plus ou moins compatible avec la norme européenne.
 
The good ecological status of water: Political sociology of French freshwater ecology
 
This talk analyses the political sociology of French freshwater ecologists and water managers jointly engaged in standard-setting between 1960 and 2000. It sheds new light on the European harmonization of river monitoring. In particular, it distinguishes three steps of co-production of science and social order: choosing the relevant descriptive grain, interpreting trends, compensating through equivalences. It argues that such investments of form translate rivers into abundant and scarce clusters of ecological elements. This representation is articulated to a political discourse, not always compatible with the European norm.


Jérôme Lamy (LISST-CAS/Université Toulouse 2-Le Mirail), Arnaud Saint-Martin (Printemps/USVQ)

L’élaboration de la politique spatiale européenne. Faire politique du Copernicus-Global Monitoring for Environment and Security (GMES)
 
Dans cette communication, nous présentons les premiers résultats d’une enquête en cours portant sur l’élaboration de la politique spatiale européenne. Nous nous baserons principalement sur l’étude d’un « système de systèmes d’observation » de la Terre, le Global Monitoring for Environment and Security (GMES). Ce programme combine des instruments d’observation satellitaires et in situ. Il est entré dans sa phase opérationnelle en 2011 et condense les dispositions politiques européennes en matière de surveillance de l’environnement et de la sécurité. Nous proposerons un cadre d’analyse en rupture avec les modes conceptuelles dominant les science studies. Nous faisons converger une approche écologique des activités spatiales et la sociologie « transversaliste » des sciences et techniques, afin de restituer la dynamique de structuration d’une « écologie du spatial européen ». La circulation de l’analyse dans et entre les différents espaces de l’écologie nous permettra de saisir comment les acteurs s’évaluent les uns les autres, anticipent et se positionnent sur le problème de l’« implémentation » du GMES. Nous montrerons ainsi comment le GMES met en jeu une division sciences/politique asymétrique et conflictuelle. In fine, nous ferons émerger la problématique de la construction politique d’un « marché des services GMES » voulue pour la Commission européenne, en phase avec la conception d’un ordre marchand des sciences et techniques.
 
The constitution of a European space policy: doing politics with Copernicus-GMES
 
In this talk, we present the first results of an ongoing investigation on the development of the European Space Policy. We will focus mainly on the conception of the “Copernicus” program (Global Monitoring for Environment and Security), a system of Earth observation systems. The program combines satellite infrastructures, in situ observation systems, and ground segments infrastructures. It entered in its operational phase in 2011 and aims at “implementing” the EU policies concerning environment monitoring and security. Our analysis of these technical, organizational, and political processes breaks with the dominant conceptual trends within the science studies. We articulate an ecological approach to space activities and a “transversalist” sociology of science and technology in order to restore the dynamic structuring of an “ecology of space” in Europe. As we circulate ethnographically in the different areas of this ecology, it allows us to understand better how the many actors involved (EU institutions, national space agencies, ministers, the space industry, stakeholders…) interact, anticipate and conceive the problem of the “implementation” of Copernicus/GMES. We will show how GMES institutes a sharp, asymmetric, and tense division between science and politics. Ultimately, we will examine the political construction of a “GMES services market” hoped by the European Commission (in charge of GMES since 2007), which is in line with a market-driven conception of science and technology.


Fabien Carrié (GAP/Université Paris X Nanterre)

Le savant, le cobaye et l’antivivisectionniste : circulation et réception des innovations expérimentales dans les sciences du vivant (France et Angleterre, 1870-1910)
 
On se propose d’interroger dans le cadre de cette communication les modalités d’appropriation et de réception des savoirs et méthodes de la physiologie expérimentale et de la microbiologie en France et en Angleterre entre les années 1870 et le début du XXe siècle, et plus particulièrement les débats engagés autour des pratiques de vivisection inhérentes à ces deux disciplines. Enjeux de luttes multiples au sein de chaque configuration nationale pour des groupes d’agents inscrits dans les champs politique, scientifique et intellectuel (militants antivivisectionnistes, savants favorables ou hostiles aux théories microbiennes, médecins cliniciens opposés à l’introduction des méthodes expérimentales à l’hôpital), la question de la légitimité de ces pratiques cristallise les oppositions entre les tenants d’une définition autonome de la science et ceux réclamant la subordination des scientifiques et de leurs modes d’investigation à des règles et normes morales et politiques définies à l’extérieur de cet espace. Envisagée à l’aune de l’autonomisation différenciée des champs de production nationaux, l’analyse sociale des modes de diffusion et de réception de ces savoirs permettra de montrer en quoi l’acceptation et la pénétration des connaissances et découvertes scientifiques renvoient à des processus autres qu’exclusivement internes à leur fabrication au sein des laboratoires : ici, aux résistances par des groupes variés d’agents sociaux face à la « scientifisation » croissante du vivant et de la « nature », au refus encore des modes de gestion des risques sanitaires et sociaux qu’implique le développement des sciences expérimentales du vivant.
 
The scientist, the guinea pig and the antivivisectionist: Circulation and reception of experimental innovations in the natural sciences (France, England, 1870-1910)
 
This paper questions the appropriation and reception of experimental physiology and microbiology’s knowledge and methods in France and England between the 1870’s and the beginning of the 20th century. More precisely, it concentrates on the debates about vivisection, inherent in those two scientific disciplines. The legitimacy of those practices then was at stake in each national configuration, for a multiplicity of social agents in the political, scientific and intellectual fields (antivivisectionists, scholars favorable or hostile towards microbial theories, physicians opposed to the introduction of experimental methods in the hospital), who were basically divided into two groups regarding this subject: the defenders of the autonomy of science and those who demand the subordination of scientists and scientific methods to moral and political rules defined outside the scientific field. In respect of the stage of autonomy of each national scientific field, the sociological analysis of the diffusion and reception of knowledge would allow to demonstrate that the acceptance of scientific truths and discoveries does not depend exclusively on their construction’ process inside the laboratory: here, it is linked with the fight of certain groups against the growing ‘scientification’ of nature, also with the refusal of the forms of management of social and sanitary risks implied by the development of experimental methods in the medical and natural sciences.

 
Renaud Debailly (GEMASS/Université Paris IV Sorbonne)

De l’obligation morale des scientifiques à la critique radicale de la science
 
Le développement de mouvements de critique des sciences aux États-Unis et en Europe dans la seconde moitié du XXe siècle a été analysé comme un déplacement de la frontière entre science et politique (Moore, 1996, 2008), ou encore comme une réaction à l’avènement d’une ‘Big Science (Nowotny & Rose, 1979). Depuis les années 1960, la formation de collectifs de chercheurs capables de produire des contre-expertises a été interprétée comme la traduction d’une « obligation morale » des scientifiques à servir le bien commun, à un moment où l’on dénonçait le rôle de la science dans les complexes militaro-industriels. Cette communication analyse les mouvements de critique des sciences en France, en retraçant leur développement et en resituant les critiques portées par des chercheurs et des enseignants. Dans cette optique, nous montrons que la politisation de la science repose sur un processus de démarcation différent du cas américain. Bien que des formes de contre-expertise aient aussi émergé, les mouvements en France insistent davantage sur l’autorité culturelle de la science et tendent plus largement à redéfinir la place de la science dans la société.
 
From moral obligation of scientists to radical criticism of science
 
The development of critical science movements in the United States and Europe in the second half of the 20th century has been analyzed as a shift of boundary between science and politics (Moore, 1996, 2008), or as a reaction to the advent of a ‘Big Science’ (Nowotny & Rose, 1979). Since the 1960s, the formation of collectives of researchers capable of producing counter-expertise has been interpreted as the translation of a “moral obligation” of scientists to serve the common good, at a time when they denounced the role of science in the military-industrial complex. This paper analyzes critical movements of science in France. By tracing their development and resituating criticisms by researchers and teachers, this paper shows that the politicization of science rests upon a type of boundary-work which diverges from the American case. Although forms of counter-expertise have emerged, the French movement emphasis particularly on the cultural authority of science and tend to redefine the role of science in society
.

 
Jean-Baptiste Paranthoën (CESAER-GAP/Université Paris X Nanterre)

Définir les  « circuits courts » par et pour la science. Comparaison de trois dispositifs du groupe de travail Barnier
 
Le rôle de la science est aujourd’hui admis dans l’élaboration et la légitimation de l’action publique. Mais les modalités différenciées de sa production et de sa réception, ainsi que les processus de négociations et de confrontations aux autres formes de savoir, sont encore peu connus. En offrant un point d’entrée pour comprendre les enjeux liés aux luttes symboliques, les commissions constituent un terrain privilégié d’observation. Cette communication propose de présenter les résultats d’une étude en cours sur le « groupe de travail Barnier ». Constitué en 2009 à l’initiative du ministère de l’Agriculture et de la Pêche, ses conclusions ont conduit à faire des « circuits courts alimentaires » une catégorie d’action publique utilisée dans la conduite de nombreuses politiques agricoles (plan régional pour l’offre alimentaire, lois d’orientation agricole…). L’enquête comparative menée à l’aide d’entretiens, d’archives du ministère et d’archives personnelles de participants au regard de trois dispositifs spécifiques (le travail de préparation de la commission, les réunions du groupe et celles relatives à son suivi) vise à répondre à une série de questions : quelles sciences sont mobilisées dans la construction des politiques agricoles ? Comment sont-elles mises en concurrence avec des savoirs issus de groupes professionnels historiquement omniscients ? Dans quelle mesure de tels dispositifs ne permettent-ils pas de rendre paradoxalement légitimes des rapports de force déjà existants ?
 
Define “circuits courts” by and for science? Comparison of three working group Barnier apparatus
 
Science role is today commonly accepted in conception and legitimization of public policies. However, differentiated modalities of its production and reception as well as negotiations and interacting processes with others knowledge’s are still little-known. By offering an entry point to understand issues relating to symbolic struggles, committees represent a rich field of observation. This paper aims to present results of an ongoing study about working group ‘Barnier’. Created in 2009 by the Ministry of agriculture and fishing, its findings have helped the “circuits courts alimentaires” to be considered as a public action class used in agricultural policies (regional plan for the food supply, agricultural laws…).Comparative approach by interviews, ministry archives and committee members archives through three apparatus (the preparation work of the committee, group meetings, those related to its application) offers to answer a series of questions: What sciences are used to develop an agricultural policy? How are they played off against knowledge from historically advantaged professional groups? How do those apparatus allow to an attempt to, surprisingly, legitimize existing relationships structuration?


Caitriona Carter (IRSTEA Bordeaux)

La construction sociale de l’usage des savoirs dans la régulation publique et privée : la connaissance de qui et pourquoi?
 
Cette communication compare deux cas où des acteurs faibles ont réussi à se représenter comme « porteurs de savoirs » pour accéder à des arènes de décision dont ils avaient été exclus. Les cas démontrent un changement dans l’égalité de l’usage des savoirs afin de protéger l’environnement, dans les secteurs de la pêche sauvage et de la pisciculture en Écosse : premièrement, les pêcheurs se sont mobilisés comme porteurs de savoir-faire pour contester les instruments basés sur des modèles scientifiques des stocks ; deuxièmement, les ONG se sont présentés comme des experts de l’évaluation de la pêche durable pour encourager les grandes surfaces à mettre en place des politiques d’approvisionnement « responsables ». La réussite, dans les deux cas, peut laisser entendre que les acteurs dominants ont admis les savoirs de ces « nouveaux » acteurs. Mais, dès lors qu’ils participaient aux arènes de décision, l’influence des pêcheurs et des ONG a été variable. L’acceptation de leurs argumentations pour le changement ne correspondait plus avec l’usage de leurs savoirs. Pour expliquer ce décalage, cette communication réexamine la construction sociale des intérêts en faveur des savoirs dits « alternatifs », en mobilisant trois concepts de l’institutionnalisme interprétatif : dilemme, tradition, institution. Ceci révèle que l’acceptation de la notion d’usage des savoirs « alternatifs » n’équivaut pas forcément à une refonte des relations récursives entre science et politique.
 
The social construction of knowledge-use in public and private regulation: Whose knowledge and why?

This paper compares two cases where traditionally weak actors in regulation successfully represented as ‘holders of knowledge’ to legitimize access to policy-making from which they had been excluded. The cases appear to show change towards a greater equality in knowledge use in environmental protection in European/Scottish fisheries and aquaculture: first, fishes mobilized as holders of everyday knowledge to contest the content of instruments setting catch limitations, based on scientific modeling of stocks; second, e-NGOs self-represented as experts on assessments of sustainable fisheries production to persuade supermarkets to develop sustainable seafood sourcing policies. Both groups were successful, thus giving the impression that dominant actors, too, valued their knowledge. However, once members of decisional arenas, the influence of fishers and e-NGOs over instrument setting has been inconsistent. Rather, the acceptance of their arguments for change appears out of sync with the way in which their knowledge has subsequently been used. To explain this incongruence, this paper re-examines the social construction of interests leading to the acceptance of alternate knowledge forms, using concepts from interpretivist institutionalist analysis – dilemma, tradition and institution. This reveals that accepting the ‘idea’ of alternate knowledge use does not automatically mean accepting recursive understandings of science’s relation to politics.


Claire Danjoie (LaSSP/Sciences Po Toulouse)

Les usages sociaux des sciences dans les politiques environnementales (ours-déchets ménagers) en France, en Allemagne et en Espagne : une inégale influence des savoirs dans les processus locaux de gouvernement

Cette communication se propose de questionner l’inégale influence des savoirs scientifiques dans deux domaines d’intervention publique des politiques environnementales des années 1980 à nos jours et trois configurations nationales (France-Allemagne-Espagne) : les politiques de préservation de l’ours brun dans les Pyrénées (France-Espagne) et les politiques de gestion des déchets ménagers (France-Allemagne). On peut caractériser deux usages sociaux des sciences dans le cas des deux domaines environnementaux étudiés, sur chaque configuration nationale. Un premier usage social des sciences de la vie et de la terre et des sciences de l’ingénieur est caractérisé par une forme de réappropriation idéologique de la catégorie d’intervention publique du développement durable par une coalition de cause dominante, dans le cadre d’une technocratisation des politiques environnementales. Dans les dispositifs d’action publique de gouvernement des conduites des populations locales, cet usage a pour effet de créer des effets de violence symbolique envers les populations, en réajustant selon des impératifs écologiques et économiques les comportements des groupes sociaux. Un deuxième usage social des savoirs scientifiques, comme les sciences agronomiques et la médecine, caractérise une forme de réappropriation contestataire de la catégorie d’intervention publique du développement durable sur les territoires locaux. L’analyse comparative entre trois configurations nationales distinctes nous permet de mettre au jour les logiques inégales d’utilisation des sciences en fonction des logiques sociales mais également des logiques géographiques et des logiques sectorielles. Si les ONG environnementales mobilisent les sciences comme ressources politiques, l’inégal recours aux savoirs conduit à des politisations distinctes des problèmes publics environnementaux dans chacune des configurations locales étudiées.
 
The social uses of sciences in the environmental policies (bears-waste) in France, in Spain and in Germany: The unequal influence of science in the local government process
 
This communication proposes to ask the unequal influence of scientific knowledge in two environmental sectors from 1980 to nowadays in France, Spain and Germany: the bear policy (France-Spain) and the waste policy (France-Germany). We can identify two social uses of science in the two environmental cases considered. A first social use is characterized by an ideological appropriation of sustainable development by a governmental coalition, composed by specific figures in the frame of “technocratization” of environmental policies. Regarding the government of populations and life, this use of science creates an effect of symbolic violence about the local populations, readjusting the behaviors of social groups according to ecological and economical purposes. A second use of scientific knowledge, like agronomy and medicine, characterizes an anti-establishment appropriation of sustainable development in the local territories. The comparative analysis shows that there is unequal use of science according to social, but also geographical and sectoral appropriations. If the environmental NGOs use the scientific knowledge as political resource, this unequal use allows different processes of politicization in the local configurations observed.


Klervi Fustec (ART-Dev/Université Paul Valéry Montpellier 3)

Développement et coopération dans les secteurs de l’eau et du changement climatique en territoires palestiniens occupés. Circulation des savoirs et recomposition des relations de pouvoir
 
Les territoires palestiniens occupés sont le lieu de rencontre d’une multitude d’acteurs du développement et de la coopération. Ils sont historiquement très actifs dans le secteur de l’eau, la question changement climatique constituant quant à elle une préoccupation plus récente. À travers les projets de recherche et les projets de développement, ces acteurs participent à la circulation de nombreux savoirs et savoir-faire. Certains acteurs palestiniens peuvent ainsi être considérés comme des « passeurs » ou des relais permettant la diffusion des savoirs. La mise en place de coalitions d’intérêts autorise la promotion et l’adoption de ces savoirs au détriment d’autres savoirs, généralement détenus par des acteurs dotés de plus faibles ressources (financières, culturelles, sociales). Ces disparités peuvent concerner, par exemple, des paysans vis-à-vis des ONG ou des chercheurs palestiniens insérés dans des projets internationaux. Cette communication étudiera les coalitions d’acteurs qui se sont formées dans le contexte socio-politique spécifique que représentent les territoires palestiniens et les savoirs qui y sont mobilisés. Elle prêtera une attention particulière aux acteurs palestiniens insérés dans des réseaux internationaux et aux recompositions de pouvoir à l’œuvre sur la scène palestinienne.
 
Development and cooperation in the water and climate change sectors in occupied Palestinian territories: Circulation of knowledge and re-composition of power relations

Many actors in cooperation and development are involved in occupied Palestinian territories. The water sector is one of the most important whereas the climate change sector is newly invested by those actors. Through research projects and development projects, they are part of the dynamic of knowledge circulation. Some Palestinian actors are intermediaries in this process of diffusion. These interest coalitions promote some knowledge to the detriment of other knowledge, usually held by actors with fewer resources (financial, cultural, social). For example, some farmers compared with NGO members or some Palestinian researchers involved in international networks. This communication analyses the interest coalitions developed in these contexts and the knowledge that is mobilized. It will pay particular attention to Palestinian actors and to the re-composition of power relations at work in the Palestinian arena.

Julien Weisbein (LaSSP/Sciences Po Toulouse)

Sciences sociales, sciences biologiques, savoirs situés. Les militants fédéralistes et les surfeurs comme « experts »
 
Cette communication entend mener une comparaison entre deux groupes militants constitués autour de causes différentes – la promotion d’une Constitution fédérale de l’Union européenne pour les mouvements fédéralistes et la protection du littoral pour l’association de surfeurs, Surfrider Foundation Europe – mais tout autant confrontés à la question des savoirs. Ces groupes mobilisent des savoirs disciplinaires différents et endossent des postures contrastées d’experts en fonction des configurations politico-administratives où ils évoluent, marquées par des attentes de science différentes : la science politique et le droit communautaire pour les premiers, selon un registre essentiellement académique s’énonçant dans des arènes feutrées, avec un appel aux « citoyens européens » médiatisés par quelques dispositifs ; un mélange entre savoirs d’usages liés à la pratique du surf, bactériologie, éco-toxicologie, droit de l’aménagement et santé publique pour les seconds, sur des scènes multiples allant de la contestation à l’enrôlement dans des dispositifs d’action publique. Pour rendre comparables ces deux terrains hétérogènes et mieux cerner cette question de l’asymétrie des savoirs dans des univers sociaux plus ou moins ouverts, cette communication interrogera le travail des frontières auxquels se livrent les militants fédéralistes et les surfeurs, lorsqu’ils mobilisent des connaissances scientifiques pour exister sur une scène publique.
 
Social sciences, biological sciences, situated knowledge: Federalist activists and surfers as “experts”
 
This communication aims to compare two activist groups, federalist activists and surfers, which mobilize towards different ‘causes’ – promoting a federal constitutional frame for the European Union, and defending, saving, emphasizing and managing on a sustainable way the ocean with specific issues such as coastline, waves, etc. – but are concerned with expertise just as much. They indeed mobilize different scientific disciplines but also assume different positions as “experts”, depending on the social configurations where they stand and the different needs of science they face: political science and European law for federalist activists; a mix of bacteriology, eco-toxicology, public health and coastal planning for surfers, with an attempt to “humanize” these expertise by appealing to situated knowledge. But in order to make the comparison fruitful and to understand the asymmetries in the social distribution of science between these two groups, it is necessary to analyze the boundary-work through which they try to open scientific modes of justification to other forms of rationality.


Participants

BÉRARD Yann yberard@martinique.univ-ag.fr
BOULEAU Gabrielle Gabrielle.bouleau@irstea.fr
CABANE Lydie lydie.cabane@sciences-po.org
CARRIÉ Fabien fabien.carrie@hotmail.fr
CARTER Caitriona cait.carter@hotmail.com
DANJOIE Claire claire.danjoie@laposte.net
DEBAILLY Renaud renauddebailly@gmail.com
FUSTEC Klervi klervi.fustec@gmail.com
HRABANSKI Marie marie.hrabanski@cirad.fr
LAMY Jérôme jerome.lamy@laposte.net
PARANTHOËN Jean-Baptiste jb.parant@yahoo.fr
REVET Sandrine revet@ceri-sciences-po.org
ROGER Antoine a.roger@sciencespobordeaux.fr
SAINT-MARTIN Arnaud arnaud.saint-martin@uvsq.fr
SEGUIN Ève eseguin22@yahoo.com
TOPCU Sezin sezin.topcu@damesme.cnrs.fr
TORNY Didier didier.torny@ivry.inra.fr
TOURNAY Virginie virginietournay@yahoo.com
WEISBEIN Julien julien.weisbein@univ-tlse1.fr

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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