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Section Thématique 5

Ce que le genre fait à l'Etat : une ethnographie du contrôle des déviances
How gender affects the State: An ethnography of deviance control

Responsables

Mathilde DARLEY (CNRS-Centre Marc Bloch Berlin) mathilde.darley@cmb.hu-berlin.de
Gwénaëlle MAINSANT (IRIS-EHESS) gwenaelle.mainsant@ens.fr

Présentation scientifique Dates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Cette section thématique s’intéresse à la régulation étatique des déviances envisagée au prisme du genre. Elle s’inscrit au carrefour de trois champs de recherche particulièrement féconds dans la science politique française mais dont les avancées n’ont que rarement été mises en perspective : le contrôle des déviances, l’ethnographie de l’Etat et de ses agents et l’action publique appréhendée dans sa dimension genrée. Plus précisément, cette section doit permettre, à partir d’observations ethnographiques, d’éclairer la manière dont le genre travaille les interactions entre les street level bureaucrats et leurs publics, interactions appréhendées ici comme le lieu de la mise en œuvre du contrôle et de l’opérationnalisation du droit (Lascoumes, 1990). L’analyse du large spectre des médiations qui s'opèrent entre agents dépositaires de la puissance publique et populations cibles (du service à la coercition en passant par la discipline) renseigne en effet les pratiques d’ordonnancement et de qualification des populations contrôlées (voir par exemple Lipsky, 1980 ; Dubois, 1999 ; Weller, 1999 ; Spire, 2008 ; Serre, 2009) et, en particulier, les mécanismes par lesquels certaines personnes ou groupes de personnes en viennent à être qualifiés (ou se qualifier) de « déviants » (Darley et al., 2010).
Si elle s’inscrit dans la lignée des travaux cherchant à appréhender « par le bas » la fabrique étatique de l’ordre social, cette section thématique invite à penser la relative gender blindness des analyses portant sur le contrôle des déviances. La perspective de genre est certes venue ces dernières années enrichir nombre de travaux francophones sur l’action publique. Elle s’est cependant principalement déclinée sur le terrain des politiques publiques directement conçues pour produire des effets sur les rapports sociaux de sexe, par exemple en matière de parité homme/femme (Lépinard, 2007 ; Bereni, Revillard, 2007 ; Bereni, 2009), de lutte contre les violences faites aux femmes (Coderre, Parent, 2005 ; Lieber, 2008), ou encore de conditions de travail et d’accès au marché de l'emploi (Laufer et al., 2003). Ces travaux, s’ils renseignent le rôle du genre dans le processus de construction du sens des politiques étatiques, n’éclairent qu’à la marge les éventuels infléchissements, transformations ou résistances que rencontre leur mise en œuvre locale par les agents subalternes de l’Etat. Surtout, cette sociologie de l’action publique porte sur des faits sociaux intrinsèquement marqués par le genre : elle pose ainsi la question de ce que l’Etat fait au genre, mais laisse généralement dans l’ombre la réflexion sur ce que le genre fait à l’Etat.
Dans le champ particulier des recherches sur les déviances (et leur régulation), différents auteurs ont toutefois abordé la dimension genrée du contrôle, mettant notamment au jour le traitement différencié des déviances féminines (Parent, 1998 ; Cardi, 2007 ; Cardi, Pruvost, 2011). En dépit des avancées permises par ces travaux, la part d’ombre reste importante dans le champ des études sur le caractère sexué des pratiques de contrôle. Ainsi, le fait que le travail policier consiste en un « contrôle des hommes par les hommes » demeure toujours un impensé de la sociologie de la police. Nous veillerons donc, dans cette section thématique, à élargir la focale d’analyse à la dimension genrée non seulement de la déviance elle-même, mais aussi des acteurs de son contrôle (voir Malochet, 2007 ; Mainsant, 2008), afin de dégager ainsi les modalités sexuées du contrôle des déviances.
Les communications retenues s’attacheront, à partir d’observations ethnographiques des interactions entre agents institutionnels et populations cibles conduites dans différents contextes nationaux, à questionner ce que le genre fait aux représentations et aux formes d’exercice et/ou de contournement du contrôle. Elles s’articuleront autour de deux sessions de travail portant respectivement sur le genre de l’Etat et sur le genre des « contrôlés » et dont les discussions contribueront plus largement à instruire la question suivante : dans quelle mesure le genre détermine-t-il des manières sexuées de faire le droit, de s’en servir et de le dire ?

This section deals with state regulation of deviance analysed from a gender perspective. It combines three research fields that are particularly prolific in the French political sciences but that have rarely been confronted: deviance control, state ethnography and public policies analysed from a gender perspective. More precisely, this section should allow, based on ethnographic observations, to shed light on the way gender operates in the interactions taking place between street level bureaucrats and their clients. We assume that observing these interactions enable to understand how controlled groups are classified and qualified by state agents, and especially to reveal the logics according to which some persons or groups of persons are seen (or see themselves) as deviant.
In this regard, this section constitutes an invitation to think about the relative gender blindness of analyses dealing with deviance control. Indeed, the gender perspective in French political sciences has primarily been developed in the field of public policies directly designed for having an impact on gender equality (such as those promoting gender parity in the political sphere or equal access to the labour market as well as programmes combatting violence against women, etc.). These research works, by dealing with social facts that are intrinsically gender-loaded, do ask how the State affects gender, but generally do not address the question how gender affects the State.
In the particular research field on deviance and its regulation, several authors have questioned the gender dimension of control and especially shown the differentiated treatment of feminine deviance. However, many aspects remain unexplored in the study of gendered control practices. For instance, the fact that police work consists in a “control of men by men” has not been reflected in police sociology. This section should therefore contribute to extend the analysis to the gender dimension not only of deviance itself but also of the actors in charge of its control.


Bibliographie indicative

Bereni L., « Quand la mise à l'agenda ravive les mobilisations féministes. L’espace de la cause des femmes et la parité politique (1997-2000) », Revue française de science politique, vol. 59, n°2, 2009, p. 301-323.
Bereni L., Revillard A., « Des quotas à la parité : La cause de la représentation politique des femmes dans l’Etat (1974-2007) », Genèses, n°67, 2007, p. 5-23.
Cardi C., « Le contrôle social réservé aux femmes : entre prison, justice et travail social », Déviance et société, vol. 31, n°1, 2007, p. 3-23.
Cardi C., Pruvost G. (dir.), 2011, « Le contrôle social des femmes violentes », Champ Pénal/Penal Field, VIII, revue en ligne: http://champpenal.revues.org <http://champpenal.revues.org/> .
Darley M., Gauthier J., Hartmann E., Mainsant G. (dir.), « L’Etat au prisme du contrôle des déviances : plaidoyer pour une approche ethnographique », Déviance et société, vol. 34, n°2, 2010.
Dubois V., La vie au guichet. Relation administrative et traitement de la misère, Paris, Economica, 1999.
Lascoumes P., « Normes juridiques et mise en œuvre des politiques publiques », L’Année sociologique, vol. 40, 1990, p. 43-71.
Laufer J., Maruani M., Marry C., Le travail du genre. Les sciences sociales à l’épreuve des différences de sexes, Paris, La Découverte, 2003.
Lépinard E., L'égalité introuvable, la parité, les féministes et la République, Paris, Presses de Sciences po, Paris, 2007.
Lieber M., Genre, violence et espaces publics. La vulnérabilité des femmes en question, Paris, Presses de sciences Po, 2008.
Lipsky M., Street-Level Bureaucracy. Dilemmas of the Individual in Public Services, New York, Russell Sage Foundation, 1980.
Mainsant G., « L’Etat en action : classements et hiérarchies dans les investigations policières en matière de proxénétisme », Sociétés contemporaines, vol. 4, n°72, 2008, p. 37-57.
Malochet, G., « Des femmes dans la "maison des hommes". L’exemple des surveillantes de prison », Travail, Genre et Sociétés, n°17, 2007, p. 105-121.
Parent C., « Au delà du silence : les productions féministes sur la criminalité et la criminalisation des femmes », Déviance et société, vol. 16, n°3, 1992, p. 297-328.
Serre D., Les coulisses de l’Etat social. Enquête sur les signalements d’enfant en danger, Paris, Raisons d’Agir, 2009.
Spire A., Accueillir ou reconduire. Enquête sur les guichets de l’immigration, Paris, Raisons d’Agir, 2008.
Weller J.-M., L’Etat au guichet. Sociologie cognitive du travail et modernisation administrative des services publics, Paris, Desclée de Brouwer, 1999.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 1 : 9 juillet 2013 14h-16h45
Session 2 : 10 juillet 2013 14h-16h45

Voir planning général...

Lieu : Batiment J (13 rue de l'Université), salle J 101


Programme

Axe 1 / Genre et contrôle étatique des déviances

Discutante : Coline Cardi (Université Paris 8)

Axe 2 / Ce que le genre fait aux politiques de l’intime

Discutant : Sébastien Roux (CNRS-CSE)


Résumés des contributions

Arthur Vuattoux (IRIS - Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (EHESS - UP13 - INSERM – CNRS), Université Paris 13 – Sorbonne Paris Cité)
 
Le traitement différentiel des dossiers pénaux dans la justice des mineur·e·s : reconduction des normes de genre et institution de la différence des sexes au tribunal pour enfants.

Cette contribution entend mettre en lumière les biais de genre qui instituent un traitement judiciaire différentiel des dossiers d'adolescent·e·s au prise avec la justice des mineur·e·s.
En partant de l'analyse de 200 dossiers de mineur-e-s entré-e-s dans le système judiciaire, ma thèse, en cours, se donne pour objectif d'éclairer la sous-représentation des adolescentes dans les procédures pénales. En effet, il s'agit de comprendre, au cœur des pratiques du juge pour enfants et des acteurs périphériques (éducateurs, experts, avocats, etc.), comment s'établit un traitement différentiel des délits et des profils des mineur·e·s dans l'institution.
Les données comprises dans les dossiers comme dans les interactions observées dans les cabinets des juges ou lors de procès permettent notamment de comprendre la part importante des représentations de la délinquance et des attentes de genre. Cet ordre des représentations, qui instaure un traitement social genré de la justice des mineur·e·s, est très fortement lié à l'ordre des discours (comment, par exemple, l'expertise psychiatrique des mineur·e·s fait plus volontiers référence à la sexualité et aux blessures intimes dans les dossiers de filles), mais également à l'ordre des pratiques (doubles dossiers, choix de lieux de placement plus volontiers médicalisés pour les filles que pour les garçons). Derrière ces représentations, ces discours et ces pratiques, on voit de quelle façon les normes de genre peuvent présider à des choix judiciaires et produire une forte asymétrie des parcours de prise en charge selon le sexe.

The differential treatment of criminal records in the juvenile justice system : renewal of gender norms and establishment of sex differences in the juvenile court.
 
In this contribution I wish to highlight the gender bias which constructs a differential treatment of criminal cases of juveniles engaged with the juvenile justice system.
Through the analysis of 200 criminal records of these teenagers, my ongoing thesis aims to understand the underrepresentation of girls in the criminal proceedings. Indeed, my purpose is to understand how a differential treatment of offenses and profiles is established in the juvenile court, within the practice of the juvenile court judges and other partners (educators,experts, lawyers, etc.)
The data contained in both the records and the interactions observered in the judge's chambers and in the courtroom allow to understand the central issue of representations of offenses and gender expectations. A gender order implies a gender-based social treatment, closely linked to a discursive order (for instance with references to intimacy in the girls' records), but also to an order of practices (for instance by opening a civil proceeding in addition to a criminal proceeding or with the choice of health institutions for girls). Behind these representations, discourses and practices, we can see how gender norms can have an influence on judicial options and can therefore produce a gender gap in the institutional support for juveniles.



Camille Lancelevée (Institut de Recherche Interdisciplinaire sur les Enjeux Sociaux (IRIS, EHESS, Paris) et Centre Marc Bloch, Berlin)

 
La « gestion » des troubles mentaux en prison : variations féminines
 
Les discours portant sur l’augmentation du nombre de personnes détenues présentant des troubles mentaux sont toujours implicitement déclinés au masculin et renvoient, selon le locuteur, à la dangerosité psychiatrique supposée ou à la souffrance mentale des hommes détenus, qu’il s’agit respectivement de neutraliser ou de soigner. Les femmes représentent en effet une minorité invisible dans les univers carcéraux français et allemands, sans doute, comme l’ont montré de nombreux auteurs, parce que leur « déviance » est plutôt prise en charge par d’autres institutions, dont l’hôpital psychiatrique. Pourtant, la question de la gestion des « troubles mentaux » se pose également dans les prisons pour femmes françaises et allemandes dans lesquelles nous avons conduit des observations non participantes – dans le cadre de notre travail de thèse portant sur les usages sociaux de la psychiatrie en milieu carcéral. Dans cette communication, nous étudierons la façon dont se déclinent les pratiques et discours locaux autour des troubles mentaux dans des prisons pour femmes. Nous monterons que l’on peut parler d’un traitement différentiel de la déviance que constitue le trouble mental, marqué notamment par une moindre utilisation de la contrainte physique, et nous distinguerons les origines possibles de ces variations « au féminin » : résultent-elles d’un effet de structure indépendant du genre? D’un encadrement marqué par des normes de genre? De représentations différentes de la déviance féminine?
 
“Management” of mental disorders in prison: female variations

Discourses on the growing number of inmates with mental disorders always implicitly refer to men and oscillate between a psychiatric dangerousness that needs to be neutralised and a mental suffering that should be treated. As shown by many authors, women represent a minority in the French and German prison systems, due to their “deviance” being more likely to be managed by other institutions, amongst which, the psychiatric hospital. However, the question of the management of “mental disorders” also arises in the French and German women's prisons in which we conducted non-participant observations - as part of our PhD on the social uses of psychiatry in prison. In this paper, we study the local practices and discourses on mental disorders in these women’s prisons. We identify a different treatment of the “deviance” constituted by mental disorders, characterised in particular by a limited use of physical restraint, and we point out the possible origins of these “feminine” variations: do they result from the institutional context of smaller women’s prisons? From a management affected by gender norms? From particular representations of female deviance?

Jonathan Miaz (IEPI/CRAPUL-Université de Lausanne / GSPE/PRISME-Université de Strasbourg)
 
Ce que le genre fait au contrôle des requérant-e-s d’asile : Ethnographie des pratiques administratives de traitement des demandes d’asile en Suisse
 
A partir d’une enquête de terrain de type ethnographique effectuée au sein de l’Office fédéral des migrations (ODM) et dans un service d’aide juridique aux migrant-e-s en Suisse, cette communication pose la question de ce que le genre fait au contrôle des demandes d’asile. Différents travaux se sont intéressés aux processus d’étiquetage [Darley, 2010] et de catégorisation [Jubany, 2011] des étrangers par les agent-e-s de l’administration, ainsi qu’aux interactions de guichet où s’actualisent les catégories administratives et juridiques [Spire 2007, 2008]. Dans la continuité des travaux portant sur les relations entre « street-level bureaucrats » et populations-cibles, cette communication visera à saisir la dimension genrée du contrôle des demandes d’asile à travers (a) les implications du genre sur l’idée que l’agent-e se fait du « cas » et (b) la manière dont l’Etat prend en compte le genre dans sa définition des persécutions donnant droit à l’asile. Interroger ce que le genre fait à l’Etat en s’intéressant à la fois aux pratiques et aux perceptions des fonctionnaires et aux catégories administratives et juridiques (édifiées à l’interne de l’administration) impose – comme le souligne Coline Cardi [2007] à propos de la prison – de penser l’asile en lien avec l’ordre social et, conjointement, avec l’ordre sexué et les normes qui y sont liées.
 
How does gender affect the control of asylum seekers: Ethnography of administrative practices in the processing of requests for asylum in Switzerland
 
Starting from ethnographic fieldwork on the asylum procedure in the Federal Office for Migration (FOM) and in an office of legal assistance for migrants in Switzerland, this communication questions how gender affects the control of requests for asylum. Different authors studied the labeling [Darley, 2010] and categorization [Jubany, 2011] processes of  foreigners by civil servants, and Alexis Spire [2007, 2008] showed the administrative and legal categories created in the interactions between migrants and these agents. Following these studies on the relationships between “street-level bureaucrats” and migrants, this communication aims to understand the gendered dimension of the control of asylum seekers through: (a) the effects of  gender on the perception that the agent has of the “case”, (b) the way in which the State takes into account gender in its definition of the persecutions giving the right to asylum. To question how gender affects the State, by interesting oneself both in practices and perceptions of civil servants and in the administrative and legal categories (constructed within the administration) renders it necessary – as underlined by Coline Cardi [2007] on the subject of prison – to consider asylum in relation to the social order and, at the same time, with the sexual order and the norms related to the latter.

 
Yohan Selponi ( CADIS-EHESS, LaSSP)

 
La prévention des addictions en milieu scolaire, une contribution à la reproduction d’un ordre institutionnel genré
 
Comment l’application d’une politique publique, la prévention des « addictions » à l’école, contribue-t-elle au maintien et à la production de l’ordre institutionnel dans lequel elle s’inscrit ? Dans l’analyse de trois actions préventives, « l’institution scolaire » en général et les établissements scolaires en particulier seront abordés « sous l’angle d’une rencontre dynamique entre l’objectivé et les investissements dont il est l’objet » (Lagroye, Offerlé, 2011).
Dans un premier temps, nous mettrons en évidence que les campagnes de prévention des addictions reposent sur une division genrée du contrôle des populations dites « à risques » entre d’un coté la prévention, l’écoute et le soin (féminin); et d’un autre, la répression, la discipline et le travail (masculin). Dans les différents espaces d’appartenance des intervenants en milieu scolaire (champ artistique, champ médical, champ pénal), la prévention à l’école représente une tâche symboliquement dévaluée. Elle est rémunératrice dans un autre espace, l’institution scolaire. Ils y font exister leur(s) position(s) et la rendent sensible aux autres agents institutionnels.
Dans un second temps, nous montrerons que par une réappropriation de l’espace scolaire, la mise en scène des corps des élèves, la valorisation des participations ou l’utilisation d’un « parler vrai », les intervenants tentent de se démarquer de la représentation qu’ils pensent que les élèves ont d’eux même et du fonctionnement scolaire. La combinaison de ces tentatives de distinction et de la nécessité de « tenir » les élèves participe au renforcement des prises de paroles masculines.

Prevention of addictions at school, production and reproduction of gendered institutional order

How the implementation of a public policy as the prevention of addictions at school, contributes to the institutional order it is inscribed in? Through the analysis of three preventive actions, we will study the mutual influence between agent’s commitments in educational institution, and its working process.
On one hand, prevention of addictions is based on a gendered division of the ways populations called “at risk” are controlled: on one side, activities socially drawn as feminine (prevention, listening and care); on the other side “masculine” ones (repression, discipline and work). Agents who intervene at school belong to different spaces (artistic field, medical field and penal field) in which prevention is symbolically devalued. On the contrary, at school, they can enhance their position.
On the other hand, by their reappropiations of school space, the staging of students’ bodies and their use of a “real talk”, agents of prevention try to distinguish themselves from the way they think students perceive them and the school system. The combination of these attempts of distinction and the need to "hold" students, make easier boys’ involvements during these interventions.


Mickaële Lantin Mallet (IRIS-EHESS)
 
Des hommes et femmes au service de la justice de proximité : médiatrices pénales et conciliateurs de justice en Martinique
 
Les interférences entre genre et État seront interrogées à partir du matériau ethnographique issu d'une recherche dans la juridiction de Fort-de-France (Martinique) qui s'est déroulée entre 2001 et 2005. Cette recherche portait sur deux types d'acteurs de l'institution judiciaire : les conciliateurs de justice et les médiateurs pénaux. Ces acteurs interviennent dans le cadre de la politique de la justice de proximité mise en place dans les années 90. Cette « troisième voie pénale » constitue une forme de justice dite douce ou négociée. Les objectifs de cette politique concernaient la réduction des incivilités et du sentiment d’insécurité, la maîtrise de l'accroissement du contentieux civil et pénal ou le réinvestissement de zones dites de non-droit. L'amélioration de l'accès au(x) droit(s) étant l'enjeu majeur. A l'époque de ma recherche, la répartition des agents de la justice de proximité était intrigante à l’égard du genre : les conciliateurs (civil) étaient très majoritairement des hommes tandis que les médiateurs (pénal) étaient exclusivement des femmes.
Comment et pourquoi s’est opérée, localement, une telle distribution genrée des fonctions judiciaires ? Cette communication explore l'hypothèse d'une volonté d’État en reconstituant les mécanismes et critères de recrutement de ces agents ainsi que les conceptions attachées aux fonctions de ces deux acteurs du droit et de la justice. Les justifications mobilisées par les acteurs pour élucider leurs parcours et choix professionnels sont aussi examinés. Enfin, sera examinée la question des effets pratiques des profils sociologiques de ces agents sur les   pratiques de résolution des conflits et des litiges.
 
Gender & Alternative Dispute Resolution: the case of paralegal professions in Martinique
 
This research focused on two types of actors of the policy framework of alternative dispute resolution (ADR) : the conciliators and criminal mediators of the jurisdiction of Fort-de-France (Martinique). At the time of my research, 2001-2005, the situation of officers of restorative justice was intriguing in respect of gender repartition: the conciliators (civil law) were overwhelmingly men while mediators (criminal law) were exclusively women.
How and why is operated locally, such a gendered distribution of judicial functions? This paper explores two assumptions about this situation: that of a commitment of the Public State and that of the actor's choice. Career path, professional skills, job specification, status of these agents were examined as well as the conceptions attached to the functions of restorative justice. Finally, the issue will be discussed practical effects sociological profiles of these agents on the practices of alternative disute resolution.


Émilie Biland (Département de science politique, Université Laval ), Gabrielle Schütz (Laboratoire Printemps, Université Versailles Saint-Quentin en Yvelines)

 
Parents et enfants sous le regard des professionnel-les du droit. Une ethnographie de la justice familiale au Québec
 
Par contraste avec la vision idéalisée de séparations conjugales pacifiées et « gérées » par les conjoints eux-mêmes, l’observation ethnographique des tribunaux chargés des litiges familiaux montre que ces institutions participent au contrôle social des familles. Dans le contexte québécois, la contribution de la justice familiale à l’étiquetage des déviances ordinaires se trouve exacerbée par le processus de déjudiciarisation largement engagé en matière de litiges conjugaux. Alors que plusieurs dispositifs poussent les ex-conjoints à se passer du juge pour régler leur séparation, ceux qui se présentent tout de même devant la Cour présentent des profils sociaux contrastés : aux côtés des (rares) conjoints fortunés, figurent, en plus grand nombre, des familles, souvent de classes populaires, dans lesquelles la capacité des parents, voire les caractéristiques des enfants, sont discutés. Dans ces affaires, c’est bien dans la qualification d’une déviance que les juges, avocat-e-s, voire travailleurs sociaux et psychologues, sont impliqués. Parce que les attentes institutionnelles à l’égard des hommes et femmes diffèrent encore notablement, cette communication interrogera les incidences de la structuration genrée des professions juridiques (dans un pays où seulement une minorité de juges sont des femmes) sur les modalités de la surveillance judiciaire des familles.
 
Parents and children under the eyes of Courts. An ethnography of family litigation in Quebec

Family Justice promotes the resolution of matrimonial conflicts by the parties and is more and more reluctant to assign the "fault" to one of the ex-spouses. However relations of domination between law professional and parties can be observed in Courts. A social control is exerted over families, which is largely structured by the gender and the social class of protagonists. Women are more targeted than men, lower classes more than middle or upper classes. Situations in which custody is contested reveal most directly this dimension of family justice. When "parenting ability" is at stake, judges, attorneys or even social workers and psychologists are involved in the characterization of deviance. This paper analyses the treatment by the courts of parental and child deviances. It is based on ethnographic observation of several tribunal hearings in Quebec, the study of judicial files and interviews of judges. Comparison between Quebec and France highlights the role of justice organization and of the gendered structure of law professions.

 
Ana Perrin-Heredia (Centre de Sociologie des Organisations / CNRS-IEP Paris)
 

Les conseillères en économie sociale et familiale : un contrôle institutionnel genré des économies domestiques ?
 
Cette communication propose une contribution à l’analyse des politiques publiques à partir d’une enquête ethnographique réalisée au sein d’un quartier populaire d’une ville moyenne française. L’étude des observations et entretiens menés auprès, entre autres, de conseillères en économie sociale et familiale (ESF) permet de saisir comment l’action publique de lutte contre le surendettement est mise en œuvre au niveau territorial. Plus encore, elle vise ici à interroger la dimension genrée du contrôle public de ces déviances économiques dans la mesure où, dans les structures publiques enquêtées, toutes les conseillères en ESF rencontrées étaient des femmes tandis que les usagers qui les sollicitent sont, en majorité, des usagères.
L’économie domestique, objet des attentions de cette politique publique, apparaît ainsi, encore aujourd’hui, comme une affaire de femmes, qui se règle entre femmes : cette féminité partagée semble constituer l’un des ressorts de l’encadrement et de la normalisation des pratiques économiques domestiques. Cette communication devrait permettre non seulement de mettre en évidence l’ensemble des mécanismes de domination bureaucratique rapprochée (de classe et de genre) à l’œuvre mais aussi d’envisager ce que l’on pourrait appeler le « maternalisme » comme idéologie centrale du contrôle des déviances en matière d’économie domestique.
 
Advisers in social and familial economics: a gender-oriented institutional control of household economics?

Based on ethnographic fieldwork done within an « low income urban area » in a French middle-sized city, this communication proposes a prism through which to analyze public policies. Observations and interviews among, in particular, advisers in social and familial economics (SFE), allow us to understand how the implementation of public action for the prevention of over-indebtedness is organized at a local level. Moreover, it aims to assess the gender-based aspect of economic deviancy public control insofar as, in public structures investigated, all of interviewed SFE advisers were women, while users, in the majority, were also women.
Household economics, the object of attentions from these public policies, still appear as a strictly feminin activity: this shared femininity seems to constitute one of the workings of the control and the normalization of household economic practices. This communication underlines not only all the mechanisms of close bureaucratic domination (of class and gender) at work, but also what we can name “maternalism”, as the main ideology of economic deviancy public control.


Anne-Sophie Vozari (IRIS-EHESS)

 
Sages-femmes, puéricultrices : une police féminine ? Le care comme modalité du contrôle des déviances maternelles
 
A partir d’une enquête ethnographique en Protection Maternelle et Infantile et au sein d’un service de maternité, cette communication entend examiner les manières dont le genre structure les pratiques des professionnelles encadrant le devenir parent. Si l’on sait aujourd’hui combien les politiques publiques et dispositifs institutionnels de « soutien à la parentalité » participent à la normalisation des conduites parentales -et particulièrement maternelles-, les modalités de ce contrôle en périnatalité restent à étudier. Autour de la naissance, le gouvernement des conduites maternelles est en grande partie dévolu aux sages-femmes et puéricultrices, professionnelles du soin pour qui le care est érigé en véritable norme professionnelle. De manière à appréhender ce que le genre fait à la régulation publique des déviances maternelles, nous examinerons les modalités du contrôle effectué par ces professionnelles. En définitive, cette communication analysera le caractère à la fois sexué et genré du gouvernement des familles, dans cet univers éminemment féminin qu’est la périnatalité.
 
Midwives, infant nurses: a female police? Care as a means of maternal deviance control
 
From an ethnographic fieldwork in Maternal and Child Health centers and in a maternity hospital, this paper intends to examine the ways in which gender frames professional practices around parenting. Although we now know how public policies and public institutions in charge of supporting parents participate in the normalization of parenting conducts -especially maternal ones-, during perinatal period the terms of this control remain to be studied. Around birth, the government of maternal behavior is largely devolved to midwives and nursery nurses, health professionals for whom caring stands as a professional standard. In order to understand how gender affects the ​​public regulation of maternal deviance, this paper studies the modalities of these professionals’ control practices. Ultimately, this communication intends to analyze how, in perinatal care services (an eminently feminized universe), the control of familial intimacy is both sexed and gendered.


Viviane Albenga (Laboratoire Triangle - ENS Lyon), Marie-Carmen Garcia (Université Lumière Lyon 2)

 
Le contrôle des conduites entre élèves liées à l’amour et la sexualité : la normalisation d’un ordre hétérosexuel pacifié, par la responsabilisation des jeunes filles

L'étude des violences liées au genre entre élèves dans l’enseignement secondaire offre une entrée privilégiée pour saisir la normalisation institutionnelle de l’ordre hétérosexuel et la construction corollaire de « déviances » dans les conduites entre pairs. En prenant appui sur une enquête ethnographique par observations menées pendant un an dans 4 établissements, 39 entretiens et une enquête sur la prévention du sexisme dans les collèges, on s’intéressera à l’encadrement des relations amoureuses des élèves comme opérateur de normes et de déviances sexuées. Cet encadrement prend plusieurs formes : définition des limites dans l’exposition de la séduction et de la sexualité ; contrôle de la tenue vestimentaire ; dispositifs de prévention. On soulignera les points de divergence entre les différents acteurs institutionnels dans la définition des conduites « déviantes » ou « violentes », selon les appartenances socio-sexuées des élèves. Puis on portera la focale sur le contrôle différencié des filles et des garçons par rapport à la gestion de la violence et de la sexualisation des relations, qui tend à faire porter la responsabilité de relations pacifiées sur les jeunes filles selon une idéologie de « l'égalité dans la différence ». Enfin, on mettra en évidence la normalisation de la conjugalité dans les dispositifs d’encadrement des élèves.
 
Control of students' behaviour regarding love and sexuality : normalization of a pacified heterosexual order, based  on young girls being given a sense of responsibility
 
The study of acts of violence linked to gender in secondary schools allows to understand the way institutions assert heterosexuality as a norm and, as a result, define deviant behaviours between peers.
An ethnographic investigation based upon observations led for a year in four different schools, 39 interviews and an investigation about the prevention of sexism in secondary schools, provide the material to understand how the supervision of love relationships between students can be  a way to define norm and  sexual deviance as well. This supervision takes various forms: limits given to the expression of seduction and sexuality, control over clothes, prevention measures. We will underline how the definition of deviant or violent behaviours diverges among institutional actors, depending on which social-sexual groups the students belong to. Then, we will focus on the differences in the way the control is exerted on girls and boys regarding the handling  of violence and the sexualisation of relationships, which tends to make young girls reponsible for the peacefulness of the relationships, according to an ideology of « equality in difference ». Finally, we will  highlight how « marriage»  becomes a norm  in the measures taken to supervise the students.


Marie Mathieu (CSU-CRESPPA/IREF-UQAM), Lucile Ruault (CERAPS – Université Lille 2)

 
Le rôle des profesionnel.le.s de santé dans le contrôle étatique du corps des femmes : gestion des fertilités et stigmatisation des avortées
 
Les lois Neuwirth (1967) et Veil (1975) précisent l’encadrement étatique du contrôle des naissances – dans son aspect anticipatif (contraception) comme différé (procédés abortifs). L’emprise de l’État sur les corps de femmes s’accomplit alors par l’intermédiaire de certain.e.s professionnel.le.s de santé – infirmières, aides-soignantes, gynécologues médicales et médecins généralistes, conseillers/ères conjugaux/les – dépositaires de la puissance publique dans le champ de ladite « libération sexuelle », et exerçant au sein d’institutions habilitées à pratiquer des avortements sous certaines conditions.
Cette communication s’appuie sur l’analyse d’un terrain combinant observation ethnographique dans différents espaces – cabinets d’un service hospitalier de gynécologie et plannings familiaux – et entretiens menés tant auprès de professionnel.le.s de santé que de femmes ayant fait une IVG en France métropolitaine. Il s’agit de montrer comment ces praticien.ne.s, entrepreneur.e.s de morale, participent de l’étiquetage des femmes avortant. Cette stigmatisation s’articule avec une recherche de domestication des comportements des « déviantes », alors enjointes à adhérer aux normes contraceptives. Nous mobilisons dans l’étude de ce gouvernement des corps une grille de lecture permettant d’appréhender les rapports sociaux de sexe et de classe omniprésents entre et au sein des deux groupes : agent.e.s subalternes de l’action étatique et usagères.
 
The role of health care providers in the State control of women’s bodies: management of fertilities and stigmatization of aborted women

The Neuwirth (1967) and the Veil (1975) laws specify the State government of birth control – in its anticipatory dimensions (contraception) and in its postponed dimensions (abortion processes). The State’s hold on women’s bodies is carried out through the work of some health care providers – nurses, auxiliary nurses, gynecologists and general practitioners, Family counselors – who are repository of public authority concerning the so-called “sexual liberation”, and who work within institutions which are authorized to perform abortions under certain conditions.
This presentation is based on the analysis of fieldwork that combines ethnographic observations in various spaces – the gynecology department of a hospital, Family Planning clinics – and interviews with both healthcare providers and women who terminated their pregnancies in Metropolitan France. We intend to highlight the way these practitioners, namely moral entrepreneurs, participate in the social process of labeling aborting women. This stigma is related to their attempt to “domesticate” the behaviour of these “
deviant” women, who are then urged to adopt contraception norms. This study of body regulation uses an analytical perspective allowing to understand race and gender relations, as relations between State health care workers and service users are framed by them.


Participants

ALBENGA Viviane viviane.albenga@ens-lyon.fr
BILAND Emilie emilie.biland@pol.ulaval.ca
CARDI Coline cardi.coline@gmail.com
DARLEY Mathilde mathilde.darley@cmb.hu-berlin.de
GARCIA Marie-Carmen marie-carmen.garcia@univ-lyon2.fr
LANCELEVÉE Camille camille.lancelevée@gmail.com
LANTIN Mallet Mickaële mickaellantin@gmail.com
MAINSANT Gwénaëlle gwenaelle.mainsant@ens.fr
MATHIEU Marie marie.juliette.mathieu@gmail.com
MIAZ Jonathan jonathan.miaz@unil.ch
PERRIN-HEREDIA Ana aperrinheredia@gmail.com
ROUX Sébastien sebastien.roux@cse.cnrs.fr
RUAULT Lucile lucile.ruault@yahoo.fr
SCHÜTZ Gabrielle gabrielle.schutz@gmail.com
SELPONI Yohan yohan.selponi@ehess.fr
VOZARI Anne-Sophie annesophie.vozari@gmail.com
VUATTOUX Arthur arthur.vuattoux@gmail.com

 

12ème Congrès de l’AFSP à Paris du 9 au 11 juillet 2013 à Sciences Po

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