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Section Thématique 27

Relations interinstitutionnelles et ordre politique
Interinstitutional Relations and the Political Order

Responsables

Delphine Dulong (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/CESSP) delphine.dulong@gmail.com
Bernard Voutat (Université de Lausanne/CRAPUL) bernard.voutat@unil.ch

Présentation scientifiqueDates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Partant du constat que les institutions politiques sont le plus souvent appréhendées de manière isolée, cette session thématique vise à réunir des analyses empiriquement fondées portant sur les relations entre les institutions politiques, judiciaires et administratives des Etats de démocratie libérale au plan horizontal ; et sur un plan vertical, entre le "niveau" national (ou fédéral) et infranational (région, canton, etc.) ou encore supranational. L’ambition est ici de contribuer à la production d’un savoir proprement politiste sur le fonctionnement des régimes politiques, éloigné de toute vision formelle ou fonctionnelle, en considérant que les institutions qui les composent (Parlement, Gouvernement, Cours suprêmes, etc.) sont des univers à la fois différenciés, interdépendants et poreux dont les échanges contribuent à façonner et objectiver l’ordre politique.
 
Deux niveaux d’analyse sont ici retenus pour l’analyse des relations interinstitutionnelles :
 
1/ Le premier niveau est celui de leur scénarisation. Que ce soit au moment de leur codification juridique ou à l’occasion de certains rituels, les rapports entre les institutions sont régulièrement mis en scène selon des modalités (séances des questions au gouvernement, messages présidentiels, etc.) qui tout à la fois les mettent en relation les unes avec les autres et réinstaurent les frontières internes à l’ordre politique. Dans ce type d’échanges publics ordinaires où la façade institutionnelle est enjeu, et peut-être plus encore dans des conjonctures de crise institutionnelle où se manifestent notamment des conflits de compétence, les institutions se donnent à voir comme des univers différenciés, dotés d’une fonctionnalité propre, autonomes par les intérêts qui s’y expriment et les conduites attendues qui s’y manifestent. Ce premier niveau d’analyse conçoit  ainsi l’ordre institutionnel en actes comme espace de relations, au travers du jeu des acteurs qui l’incarnent, mais aussi de ceux qui le mettent en forme ou le commentent (journalistes, juristes, politologues). Il permet notamment de saisir les routines ordinaires de consolidation des relations entre institutions, mais aussi les conjonctures critiques au cours desquelles les frontières sont remises  en question, se fragilisent et peuvent se déplacer. On pourra ici revenir sur la question du droit, de la codification et des usages du répertoire juridique dans les processus de mise en forme, de stabilisation et de juridicisation des pratiques et représentations relevant des échanges interinstitutionnels. Mais on pourra également s’interroger sur les spécificités du travail de communication s’agissant des institutions politiques.
 
2/ Les frontières entre les institutions politiques sont cependant bien plus poreuses que ce qu’en donnent à voir ce premier niveau d’analyse. D’une part, les institutions politiques s’inscrivent dans des chaînes d’interdépendance qui limitent leur autonomie et les obligent à coopérer quotidiennement entre elles. La question des échanges interinstitutionnels peut donc aussi être abordée à partir d’acteurs et d’arènes moins visibles, parce que souvent situés aux marges des institutions ou à l’intersection de différents univers institutionnels dont ils ont pour fonction de coordonner l’action (administrateurs des assemblées, directeurs de cabinet, experts et consultants, légistes d’Etat, Secrétariat général du gouvernement, procédures dites de « navettes », commissions extraparlementaires, etc.). On pourra ainsi s’interroger aussi bien sur leurs pratiques que sur leurs caractéristiques – les ressources mobilisées, savoir-faire et savoir-être que ce type de position suppose – et sur ce qui se joue dans ces espaces de transactions entre  institutions politiques, soit sur un plan horizontal (relations entre les chambres, entre les ministères ou départements, entre le gouvernement et le parlement, etc.), soit sur un plan vertical (relations avec les institutions infra ou supraétatiques). Cette dimension moins immédiatement visible des relations interinstitutionnelles peut d’autre part être abordée sous l’angle de la circulation des hommes et des idées en raison du cursus honorum des carrières politiques ou encore de la forte proportion d’élus cumulant plusieurs mandats. Il s’agira alors de tester l’hypothèse selon laquelle les acteurs qui passent régulièrement d’un univers à un autre, successivement ou simultanément, peuvent procéder à des transferts de pratiques, de catégories d’action et autres manières de faire, qui contribuent à la fois à fluidifier les relations interinstitutionnelles au sein de l’ordre politique et à en renforcer l’autonomie.


This section covers both horizontal relations between political, judicial and administrative institutions of the state, and vertical relations between the national (or federal), infranational (regional, cantonal, etc.) and supranational "level". Unlike the often dominant formal or functional conceptions employed in the study of political regimes, here it is a matter of viewing institutions as simultaneously distinct, interdependent and porous worlds whose interchanges contribute to shaping and objectivizing the political order.
 
Two levels of analysis are examined here:
 
1/The first is that of the setting of institutional relations. At the time of their legal codification or during certain rituals, relationships between institutions are defined according to the modalities which both place them in relation to each other and determine the internal limits of the political order. On ordinary occasions, as well as in crisis situations when the very existence of the institutional facade is in question, at this first level, it is a matter of perceiving the institutional order as a field of relations between actors who embody it or comment on it (journalists, jurists, political scientists, actors involved in political communication). Thus, the goal is to analyse ordinary routines of consolidation of relations between institutions, as well as critical situations in the course of which borders are called into question, become fragile and may shift. Here we will return to the question of law, codification and usages of the legal repertory in the processes of the shaping, stabilization and judicialization of practices and representations arising from interinstitutional exchanges.
 
2/ Since political institutions belong to chains of interdependence, their boundaries are more porous and their autonomy more limited than we usually think. At this second level, it is a matter of analyzing interinstitutional exchanges, starting with the actors and arenas situated on the margins of institutions or at their intersection. We will be particularly interested in the coordination practices (of legislative administrators, chiefs of staff, consultants and experts, including state legal experts, so-called parliamentary "back and forth" procedures, extraparliamentary committees, etc.) and in the characteristics that this type of position involves. To understand what is at play in these areas of transactions between institutions, we also intend to study this from the perspective of the circulation of individuals and ideas (cursus honorum of political careers). In moving from one sphere to another, in succession or simultaneously, certain actors favour the transfer of practices and categories which define the political order and improve relations between its component institutions.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 3 : mardi 23 juin 9h00 – 12h00
Session 4 : mercredi 24 juin 14h00 – 17h00

Lieu : voir le planning des sessions


Programme

Axe 1 / Echanges interinstitutionnels et consolidation de l'ordre politique

Axe 2 / Logiques institutionnelles et déstabilisation de l'ordre politique

Conclusions : Olivier Nay (Université Paris 1- CESSP)


Résumés des contributions

Mailys Mangin (Université de Lille, CERAPS)

Logiques interinstitutionnelles et usages politiques du droit international : l’institutionnalisation du système de garanties de l’AIEA
 
A contrecourant d’une représentation fonctionnelle de l’application du système des garanties de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA), cette recherche vise à mieux expliquer les investissements renouvelés des acteurs sociaux dans le droit international et la transformation de ces usages depuis les années 1990. La valorisation de l’expertise technique et de la légitimité juridique de l’Agence ne s’accompagne pas d’un recours systématique à ses offices, ni d’une conformité à ses recommandations. Quant aux cibles politiques des mises en forme juridique, elles ne sont pas nécessairement celles à qui elles s’appliquent (e.g. les Etats en « infraction ») mais aussi les acteurs qui concurrencent la capacité à qualifier et à interpréter une situation. Le droit international sera donc regardé moins comme un produit de l’activité de l’Agence que comme le choix renouvelé d’acteurs en faveur d’un répertoire d’action ou de légitimation, selon leur position au sein d’une configuration de pouvoir. En détournant l’observation des seules arènes politiques officielles au profit d’interactions plus informelles et interinstitutionnelles –telles que les rencontres de face à face entre représentants des Etats membres et fonctionnaires internationaux ou les « missions pédagogiques » des fonctionnaires internationaux auprès des représentants d’Etats récalcitrants– il est possible d’éclairer le mode sur lequel les représentants d’Etats ont recours aux « compétences » de l’Agence.
 
Inter-institutional logics and the uses of international law: the institutionalisation of IAEA’s nuclear safeguards system
 
Against the tide of a functional representation of the implementation of the International Atomic Energy Agency (IAEA)’s nuclear safeguards, this research aims to better explain the renewed investment of actors in international law and the transformation of these uses since the 1990s. Despite the valorisation of the technical expertise and the legal legitimacy of the Agency, to rely on it or to comply with its recommendations is far from systematic. As for the political targets of legal framing, they are not necessarily those to whom it applies (e.g. states in “non-compliance”) but also the actors who are competing on the ability to describe and interpret a situation. Thus international law will be viewed less as an output of the activity of the Agency than as a renewed choice made by actors in favour of a repertoire of contention or legitimation, in accordance with a position in a power configuration. By looking beyond the official political arenas in order to look closer at informal and inter-institutional interactions –such as face to face meetings between representatives of Member States and Agency’s Civil Servants or their “pedagogical mission" towards representatives of recalcitrant states– it is possible to enlighten the mode on which State Officials have used the "competences" of the Agency.

 
Stefan Waizer (Sciences Po Aix/ Cherpa et Université Libre de Bruxelles)

L’irrésistible ascension des diplomates du Service européen pour l’action extérieure dans le gouvernement de la politique de sécurité commune: Le cas du dossiernucléaire iranien
 
Lorsque les décideurs politiques européens parlent des succès de la politique extérieure et de sécurité commune (PESC), l’engagement de l’UE dans les négociations sur le programme nucléaire iranien figure parmi les dossiers de référence. Effectivement, alors que le Haut représentant pour la PESC (HR) est associé à une initiative des trois grands Etats- membres de l’UE en 2004, à partir de 2006, il est mandaté à coordonner et à présider un groupe de contact élargi à la Chine, les Etats-Unis et la Russie, dit E3+3. Dans cette fonction, le HR et sont équipe sont reconnus en tant que partie prenante d’un jeu diplomatique dans lequel la réactivité, la confidentialité ainsi que la fermeté (notamment des puissances occidentales) face à l’Iran sont clés. En même temps, au sein de l’UE, le HR et son équipe ont pour tâche de faciliter l’élaboration d’une approche commune conforme à celle adoptée par les E3+3. La cooptation de l’UE dans le jeu aux règles rigides de la diplomatie nucléaire a de quoi surprendre, la politique étrangère commune étant connue pour son inertie, la multitude d’acteurs impliqués et la fragilité de ses positions. En cherchant à identifier les dynamiques politiques qui ont rendu possible cette articulation entre le niveau de la diplomatie des grandes puissances et le niveau des institutions européennes, cette communication entend éclaircir le fonctionnement du gouvernement de la politique étrangère commune.
 
The Irresistible Rise of the Diplomats of the European External Action Service in the Common Security Policy Government: The Case of the Iranian Nuclear Dossier
 
When European decision-makers talk about the achievements of the Common Foreign and Security Policy (CFSP), the EU’s engagement in the negotiations about the Iranian nuclear program is quoted amongst its showpieces. Indeed, the High Representative of the CFSP (HR) was associated with an initiative of the three big EU Member States in 2004. Two year later, in 2006, the HR was appointed to coordinate and to chair an enlarged contact group, called E3+3, also comprising China, Russia, and the United States. In this function, the HR and his team are recognised as participants in a diplomatic game in which reactivity, confidentiality as well as determination (notably amongst Western powers) towards Iran are key. At the same time, within the EU, the HR and his team are responsible for facilitating the elaboration of a common approach in accordance with the policy adopted by the E3+3. The co-optation of the EU to the highly codified game of nuclear diplomacy is astonishing, giventhat the common foreign policy is known for its bureaucratic procedure, the plenitude of stakeholders involved and the fragility of its positions. Retracing the political dynamics that made the linkage between the level of great power diplomacy and the level of European institutions possible, this paper attempts to illustrate the functioning of the common foreign policy government.

 
Antonin Cohen (Université de Rennes 1, CRAPE)


Les conseils des ministres européens supranationaux. Interdépendances institutionnelles et synchronisation des rythmes gouvernementaux en Europe (années 1950 – années 1970)
 
Envisagées comme des organisations intergouvernementales séparées les unes des autres, les organisations européennes paraissent répondre à des logiques autonomes. Au contraire, cette communication entend montrer les vertus d’une approche en termes de champ. Dans le cadre d’une recherche en cours sur l’institutionnalisation du champ du pouvoir européen, cette communication se propose ainsi d’analyser les interdépendances entre les conseils des ministres du Conseil de l’Europe, de l’Union de l’Europe occidentale, des Communautés européennes et de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. Dès les années 1950, les conseils des ministres siègent en effet de manière « synchronisée » suivant des dates convenues pour que ces différents conseils se suivent. De cette manière, les décisions prises au sein de chacun de ces conseils peuvent être négociées de manière transversale, et en particulier les nominations au sein des autres institutions européennes peuvent faire l’objet de négociations inter-organisationnelles. La communication se propose d’explorer de manière inédite différent aspect de ce « conseil des ministres européen » à géométrie variable, en reconstituant ses majorités politiques, en analysant les cumuls de positions, en restituant les rythmes de réunion des conseils, et en tentant de cerner les éventuels « effets » de ces interdépendances, sur une période allant des années 1950 aux années 1970.
 
European Supranational Councils of Ministers: Institutional Interdependencies and the synchronization of governmental rhythms in Europe (1950s-1970s)
 
When viewed as intergovernmental organizations separated from each other, European organizations seem to respond to autonomous logics. On the contrary, this communication intends to show the virtues of a field approach. In the framework of an ongoing research on the institutionalization of the European field of power, this communication aims at analyzing the interdependencies between the councils of ministers of the Council of Europe, the Western European Union, the European Communities and the North Atlantic Treaty Organization. As early as the 1950s, councils of ministers were indeed convened “synchronically” so that the councils could sit in a row. That way, decisions taken in each of these councils could be negotiated transversally, and in particular the appointments to all other European institutions could be negotiated inter-organizationally. This communication aims at exploring in a novel way various aspects of this swing-wing “European council of ministers”, by reconstructing and analyzing political majorities, plurality of positions,  rhythms of sessions, and trying to find the potential “effects” of these interdependencies, in a period going from the 1950s to the 1970s.


Richat Sabitov (University of South-East Europe- Lumina)

Les échanges interinstitutionnels dans un Etat fédéral. Le passage des fonctionnaires entre les organes fédéraux et régionaux du pouvoir en Russie : le cas du Tatarstan
 
Le caractère fédéral du système du pouvoir en Russie suppose que chaque niveau de pouvoir – fédéral et régional organise de manière autonome leurs autorités publics. Les principes fédératifs sont appliqués aux branches du pouvoir exécutif et législatif. Le pouvoir judiciaire relève des compétences du Centre. La structure du pouvoir exécutif fédéral consiste de l’appareil central (à Moscou) et des organes territoriaux du pouvoir exécutif (dans les régions). La fonction publique de chaque niveau de pouvoir fonctionne selon ses propres règles. Or les échanges entre fonctionnaires fédéraux et régionaux sont souvent pratiqués. Il est intéressant d’étudier les particularités de ces échanges dans une région prétendant dans les années 1990 avoir plus d’autonomie politique et étant relativement réticente à la présence fédérale sur son territoire. Notre exposé s’intéresse donc aux passages des fonctionnaires du Tatarstan régionaux aux organes fédéraux depuis 2000. On étudie les transferts des employés du pouvoir régional premièrement dans l’appareil central fédéral, deuxièmement aux postes des chefs des directions territoriales des autorités fédérales dans la république. On se penche ensuite sur les caractéristiques des passages des fonctionnaires fédéraux dans les organes républicains.
 
The inter-institutional exchanges in a federal state. The passage of officials between federal and regional bodies of power in Russia: the case of Tatarstan
 
The federal nature of the power system in Russia assumes that every level of government - federal and regional organizes independently its own institutions. The principles of federalism are applied to the executive and legislative branches of power. The judiciary falls within the competence of the Centre. The structure of the federal executive branch consists of the central apparatus (in Moscow) and territorial bodies of executive power (in the regions). Each level of government operates its public service according to its proper rules. However the exchanges between federal and regional officials are often practiced. It is interesting to study the characteristics of these exchanges in a region that in the 1990s was claiming to have more political autonomy and was relatively reluctant to federal presence on its territory. Our presentation is thus interested in transfers of officials between Tatarstani regional and federal institutions since 2000. We study the transfer of regional employees firstly from regional level to the central federal structures, secondly, to the posts of heads of federal territorial divisions in the republic. We then look at the characteristics of the passages of federal officials to the republican government bodies.

 
Claire Guichet (Université Paris 2, CERSA)

Les Conseils économiques et sociaux, des institutions conditionnées par les ordres politiques
 
La majorité des Conseils économiques et sociaux font l’objet de remises en cause récurrentes liées à leur utilité, ce qui implique que la faiblesse de leur influence serait une raison suffisante pour appeler à leur suppression. Pourtant, l’influence est une relation, qui intègre tant les CES que les ordres politiques. En s’appuyant sur trois CES évoluant dans des systèmes politiques très différents (le CESE français, le SER néerlandais et le CES européen), cette communication montre que l’influence des CES dépend, plus que de la qualité de leurs travaux ou de leurs stratégies internes, des relations qu’ils entretiennent avec les institutions de leurs environnements, et particulièrement les exécutifs et les parlements. Ces relations peuvent être considérées comme des relations transactionnelles d’expertise et de légitimité. Ainsi, l’influence des CES dépend majoritairement de l’intérêt qu’ont les exécutifs et les parlements à suivre leurs recommandations et donc de leurs propres lacunes en termes d’expertise et de légitimité. Les CES étant rendus responsables de la faiblesse de leur influence par les commentateurs politiques, ne pas les prendre en considération n’a pas de coût politique, contrairement à des groupes d’intérêt clairement identifiés. On assiste ainsi à un phénomène de cercle vicieux où l’organe consultatif dépend, pour sa survie, des relations interinstitutionnelles qu’il entretient avec ceux qu’il est justement censé influencer.
 
Economic and social councils : institutions conditioned by political orders
 
A majority of Economic and Social Councils are subjet to regular questionings concerning their usefulness, implying that the weakness of their influence would be  reason enough to call for their suppression. Yet, influence is a relationship, integrating both ESCs and political orders. Focusing on three ESCs performing in very different political systems (the French EESC, the Dutch SER and the European ESC), this communication shows that the influence of ESCs depends less on the quality of their work or their internal strategies than on the relationships they enjoy with the institutions of their environments, particularly executive and legislative bodies. These relationships can be considered as transactions of expertise and legitimacy. Therefore, the ESCs’ influence depends for the most part on the interest these institutions take in following their advice, meaning their own shortcomings in terms of expertise and legitimacy. Since ESCs are being considered responsible for the weakness of their influence by political observers, taking them into no consideration has no political cost, unlike well identified interest groups. We therefore witness a vicious circle into which the consultative organ, to ensure its own survival, depends on the interinstitutional relationships it enjoys with those exactly it is supposed to influence.

 
Thomas Procureur (IEP de Rennes, CRAPE)

La suppression du conseil général, totem ou tabou du débat politique français ? Analyse comparée de deux processus réformateurs (2009-2010, 2014-....)
 
Le conseil général et son élu semblent des figures incontournables du paysage politique local français. Pourtant, leur longévité et l'ancienneté - récemment ébranlée - du mode de scrutin cantonal ne les préservent pas contre les menaces de disparition ou d'« évaporation » (pour emprunter la formule d'Édouard Balladur).
En effet, les conseils généraux sont régulièrement décriés pour leur manque de pertinence et leur obsolescence aussi bien à la lumière des enjeux de l'aménagement du territoire ou comme échelle d'action publique. Ces critiques résultent souvent de l'absence de volonté de remettre en question les autres collectivités territoriales, soit parce qu'elles sont historiquement ancrées (dans le cas des communes) ou, au contraire, parce qu'elles incarnent l'avenir (régions et autres formes de coopération intercommunale). Et pourtant, même ainsi offert en victime expiatoire, le Département résiste encore et toujours...
En analysant les discours suscités par les lois portant réforme des collectivités territoriales (2009-2010) et nouvelle organisation territoriale de la République (2014-....), cette communication s'intéresse à la prégnance départementale dans le fonctionnement des institutions françaises. À travers le cumul des mandats et le rôle que joue le conseil général auprès des communes, c'est à la fois la relation d'interdépendance entre État (Gouvernement et Parlement) et départements et la porosité entre ces institutions qui sont placées sous microscope.
 
Erasing General Councils : French Political Debate Totem and Taboo ?Comparing Two Reform Processes (2009-2010, 2014-....)
 
General council and its representatives seem to be key figures in French political landscape. Yet their durability and the long-lasting cantonal election system - recently questioned - do not prevent them from vanishment or “evaporation” threats (as former Prime Minister Édouard Balladur liked to express it).
Actually departmental councils are frequently criticized for lacking of relevance and for being obsolete as a scale of public action and for territorial planning. Most often these criticisms reflect a deficient will to question the other local authorities. Some are considered as historically grounded (the communes i.e. villages and cities) and others are expected to shape the future (the regions and all the kinds of communes gatherings). Despite the fact that the general council appears as an expiatory victim, this category of local authorities still remains.
Thanks to an analysis of two sets of parliamentary debates (2009-2010 and 2014-....), this presentation aims to tackle the issue of the departmental influence in the way French institutions work. To achieve this goal it considers multimandating and the relationship which ties the département and the communes as means to get access to the interdependency between State (Government and Parliament) and departments.

 
Fabien Thétaz (Institut d’Etudes politiques et internationales, UNIL)

Commissions d’enquête parlementaires et relations interinstitutionnelles : quelques pistes d’analyse à partir du « scandale des fiches »
 
Au début des années 1990, dans un contexte de crise alimentée par le « scandale des fiches » et d’autres affaires remettant en cause l’État fédéral, le Parlement suisse instaure successivement deux commissions d’enquête parlementaires. Mesure exceptionnelle qui n’avait été mobilisée qu’une seule fois dans les années 1960, l’usage de la commission d’enquête parlementaire a un effet stabilisateur sur l’ordre politique autant qu’il participe à la modification partielle des relations interinstitutionnelles. Cette communication vise à examiner le rôle de ces commissions dans un contexte de crise mettant en jeu les rapports entre Parlement et Gouvernement.
Les commissions d’enquête parlementaires peuvent être considérées comme des ripostes qui permettent aux acteurs institutionnels de resectoriser la controverse dans une arène restreinte du champ politique. Elles sont également le lieu de critiques (autorisées) envers l’action gouvernementale et de demandes de réformes où se jouent non seulement le désamorçage de la crise mais aussi la réputation de l’institution parlementaire et son potentiel d’influence sur le Conseil fédéral. Le Parlement se saisit ainsi du contexte de « conjoncture fluide », situation propice à la redistribution (partielle) des ressources, pour renforcer ses prérogatives de contrôle sur l’exécutif. L’analyse de la mobilisation des commissions permet de saisir les relations ambivalentes entre Parlement et Conseil fédéral, relations à inscrire dans le processus général d’institutionnalisation du Parlement suisse et en particulier de ses droits d’enquête.
 
Parliamentary committees of inquiry and interinstitutional relations: lines of analysis based on the « secret files scandal »
 
In the early 1990s, in a context of crisis fueled by the "secret files scandals" and other affairs challenging the federal State, the Swiss Parliament establishes successively two parliamentary committees of inquiry. As an exceptional measure that had been mobilized only once in the 1960s, the use of the parliamentary commission of inquiry has a stabilizing effect on the political order as well as it participates in partial modifications of interinstitutional relations. This communication aims at exploring the role of these commissions in a context of crisis putting the relationships between Parliament and Government at stake.
The parliamentary committees of inquiry can be regarded as a response that allows institutional actors to confine the controversy into a restricted arena of the political field. They are also the place of (authorized) criticism toward the Government action and demands for reforms where not only the defusing of the crisis is at stake but also the reputation of the parliamentary institution and its potential of influence on the Federal Council. The Parliament seized this context of "fluid situation", which is conducive to a (partial) redistribution of resources, to strengthen its oversight powers over the executive. The analysis of the mobilization of the commissions captures the ambivalent relationship between the Parliament and the Federal Council, relations to be placed within the general process of institutionalization of the Swiss Parliament and in particular its investigative duties.

 
Hervé Rayner (UNIL, CRAPUL)

Reconfiguration des rapports interinstitutionnels et (dés)ordre politique, l’analyse d’un cas limite : l’opération « Mains propres » en Italie
 
Cette communication porte sur les rapports interinstitutionnels en train de se (dé)faire durant l’opération « Mains propres » en Italie. Entre 1992 et 1994, une brusque reconfiguration des interdépendances entre politiciens, managers, magistrats, avocats et journalistes bouleverse les règles, hiérarchies et agendas des institutions principalement dans et entre les champs politique, judiciaire, médiatique et économique. Ce processus peut être qualifié de non-linéaire car il repose sur des réajustements en miroir, des boucles de rétroactions produisant de l’auto-amplification, de la disproportion (12 mille personnes poursuivies dont 338 députés et 100 sénateurs). Ignorant la dimension émergente de cette torsion des rapports intra- et interinstitutionnels, les interprétations en termes de judiciarisation ou de juridicisation peinent à élucider la centralité inopinée des magistrats instructeurs et son rapide reflux au moment où un retournement (« Deuxième République ») recombine ces relations et sonne très vite comme un retour à l’ordre politique, un ordre cependant profondément renouvelé. Dans une perspective relationnelle, prendre en compte l’ouverture des institutions à la désobjectivation (une réversibilité occultée par les discours d’institution), leur dépendance aux relations changeantes dont elles sont faites, éclaire aussi ce qui fait leur force en temps ordinaire, leur capacité à plus ou moins orienter et stabiliser ces relations.
 
Reconfiguration of interinstitutional relations and political (dis)order, the analysis of a  borderline case : the « Clean hands » operation in Italy
 
This communication refers to the interinstitutional relations in the making (and the breaking) during the « Clean hands » operation in Italy. Between 1992 and 1994, a sudden reconfiguration of the interdependences between politicians, managers, judges, lawyers and journalists upsets rules, hierarchies and agendas of institutions mainly in and between the political, judicial, media and economical fields. This process can be qualified as nonlinear because it rets on adjustments in mirror, feedback loops producing self-amplification, disproportion (12 thousand pursued people among whom 338 deputies ans 100 senators). Ignoring the emergent dimension of this twisting of the intra- and interinstitutional relations, the interpretations in terms of judicialization or of juridicisation have difficulty in clarifying the unexpected centrality of magistrate instructors and its rapid ebb as a reversal (« the Second Republic ») recombines these relations and seems a return to the political order, an order however profundly renewed. In a relational perspective, take into account the opening of institutions to de-objectivation (a reversibility hidden by the speeches of institution), their dependence in the changeable relations with which they are made, also enlights what makes their strength under normal circumstances, their capacity to channel and stabilize more or less these relations.

 
Miguel Herrera (Université Paris1, CESSP)

Justice et politique en Equateur 1978-2013. Réforme institutionnelle et stratégies de légitimation partisanes
 
Depuis les années 1980, la réforme du système judiciaire a été un thème récurrent dans les débats politiques en Equateur. La réforme vise à « renforcer l’indépendance et l’institutionalité » d’une justice qualifiée de « corrompue » et d’« inefficace ». Or, dans la pratique elle a davantage permis la redéfinition des relations interinstitutionnelles politico-judiciaires à la faveur du pouvoir politique en place. A partir d’un travail d’archives et d’entretiens, nous montrons comment lors des conjonctures critiques les partis politiques ont cherché à se réapproprier l’autorité judiciaire par la redéfinition des mécanismes de désignation des hauts magistrats, et par la mise en place de nouveaux instruments judiciaires permettant le contrôle juridique de l’activité politique. L’autorité légale que les institutions judiciaires sont capables d’apporter constitue une ressource valorisée au sein d’un espace politique décrit dans la littérature académique comme hautement fragmenté, instable et conflictuel. Dans un espace politique où les partis se caractérisent historiquement par leur faiblesse institutionnelle et l’incapacité de se maintenir au pouvoir, la réforme judiciaire joue un rôle de légitimation dans la mesure où elle met en place un système « effectif » de résolution de conflits, malgré son possible éloignement avec l’idéal d’un Etat de droit.
 
Justice and Politics in Ecuador 1978-2013. Institutional Reform and Parties’ Legitimation Strategies
 
Since the 1980s, judicial reform has been a recurrent topic in political debates in Ecuador. The reform aims at “strengthening the independence and the institutionality” of a justice system perceived as “corrupt” and “ineffective”. In practice, however it has allowed to redefine the institutional relationships between the political and the judiciary to the advantage of the political power in place. Based on archive materials and interviews, this paper demonstrates how political parties have tried in times of crisis to take over the judicial power by redefining magistrate designation mechanisms, and by implementing new judicial instruments that allow greater judicial control over political activities. The legal authority that judicial institutions offer, constitute a highly-valued resource in a political space that is described in academic literature as a highly fragmented, instable and hostile one. In Ecuador, political parties have been historically weak and unable to hold on to power. In such a context, the judicial reform plays a legimating role as it puts in place an efficient system of conflict resolution, however short it may come to the ideal of rule of law.

 
Willy Beauvallet (Université Lyon2- Triangle), Audrey Célestine (Université Lille 3, ISP Nanterre), Aurélie Roger (Université des Antilles, CRPLC)

L’Etat outre-mer. Entre reconfiguration institutionnelle et stratégies de pouvoir

Cette communication propose d’appréhender la catégorie outre-mer comme point d’entrée dans l’analyse des relations interinstitutionnelles d’un double point de vue. Il s’agira, tout d’abord, de cartographier le réseau dense et composite des acteurs institutionnels en charge de l’outre-mer en France aujourd’hui, tant au niveau national qu’au niveau transnational. On analysera, du point de vue des relations qui se mettent en place entre ces acteurs, le foisonnement qui a caractérisé ce paysage institutionnel au cours des dernières années, en particulier suite aux mobilisations sociales de 2009 en outre-mer. On s’attachera, ensuite, à comprendre comment ces (re)constructions institutionnelles se jouent également autour de stratégies politiques et sociales concurrentes, liées à la construction de leaderships politiques indissociablement nationaux et territoriaux, qui seront appréhendés en particulier autour du cas des Antilles. L’Etat outre-mer, à cheval entre des institutions tout à la fois nationales, locales, mais aussi transnationales, renvoie à une configuration soumise à diverses tensions politiques. Celles-ci participent de logiques de structuration et d’institutionnalisation que la communication se propose ainsi d’éclairer.

The State overseas. Institutional reorganization and power strategies
 
In this article, the category « overseas » (as in « French overseas territories ») is a starting point for analyzing inter-institutional relations. First, the authors seek to map the various actors in charge of overseas territories at the national and transnational levels, in a context of proliferation of institutions, in the wake of the 2009 social movements in these territories. Then, it is important to analyze the ways in which these institutional arrangements are also informed by competing political and social strategies of leaders who have both local and national careers, especially in the French Antilles. In the overseas territories, the state is based on agencies operating at the national, local and transnational levels. The layout of the state in overseas territories is thus subject to political tensions that contribute to both structure and institutionalize it.


Participants

Beauvallet Willy Willy.Beauvallet@univ-lyon2.fr
Célestine Audrey audrey.celestine@univ-lille3.fr
Cohen Antonin antonin.cohen@univ-rennes1.fr
Dulong Delphine delphine.dulong@gmail.com
Guichet Claire claire.guichet@gmail.com
Herrera Miguel Miguel.Herrera-Rios@univ-paris1.fr
Mangin Mailys mailysmangin@yahoo.fr
Nay Olivier o.nay@free.fr
Procureur Thomas thomas.procureur@sciencespo-rennes.fr
Rayner Hervé herve.rayner@unil.ch
Roger Aurélie aurelie.roger@martinique.univ-ag.fr
Sabitov Richat richat.sabitov@lumina.org   
Thétaz Fabien fabien.thetaz@unil.ch
Voutat Bernard bernard.voutat@unil.ch
Waizer Stéphan s.waizer84@gmail.com

 

13ème Congrès de l’AFSP à Aix-en-Provence du 22 au 24 juin 2015 à Sciences Po Aix

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