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Section Thématique 33

Les acteurs politiques face à la crise : entre « volontarisme » et « contraintes » dans les politiques publiques
Political actors facing the crisis: between "voluntarism" and "constraints" in public policies

Responsables

Patrick HASENTEUFEL (Université Versailles Saint-Quentin-Printemps) patrick.hassenteufel@uvsq.fr
Philippe ZITTOUN (Université de Lyon-ENTPE) pzittoun@gmail.com

Présentation scientifiqueDates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Alors que la crise financière et économique qui frappe les Etats depuis 2008 est l’une des plus importantes depuis un demi-siècle, que la question d’ « Etats en faillite » s’est posé à plusieurs reprises et que les contraintes budgétaires et financières qui pèsent sur les politiques publiques ne semblent jamais avoir été aussi fortes (Bezes et Siné, 2011), quelle place reste-t-il aux acteurs politiques pour conduire et orienter les politiques publiques ?
 
Cette question des marges d’autonomie des acteurs n’est en soi pas nouvelle. Elle est présente dès les premiers travaux sur les politiques publiques lorsque Lasswell (1943) propose de mettre en place des policy sciences pour permettre aux acteurs politiques de retrouver des marges de manœuvre. On retrouve cette question dans les travaux de Lindblom (1959) ou de Wildavsky (1964) ainsi que dans les premiers travaux français qui se sont intéressés à la marge de liberté dont disposent les acteurs face à un système politique centralisé contraignant (Crozier, Thoenig, 1975).
 
Si la mise en évidence du poids des contraintes, que ce soient celles liées au passé (path dependency), à l’existence de verrous institutionnels (veto-points), à la présence de groupes d’intérêts (veto players), à la consolidation de systèmes de croyances, à l’environnement international, aux facteurs économiques, à l’intégration européenne etc., a été de plus en plus présente dans les travaux des décennies suivantes, la question du rôle des acteurs a trouvé un nouveau souffle ces dernières années dans le cadre de différentes approches contemporaines. C’est le cas du néo-institutionnalisme avec, notamment, les travaux de Mahoney/Thelen (2010) ou de Beland/Waddan (2012) qui mettent en évidence les stratégies des acteurs pour contourner ces contraintes, des approches discursives insistant sur l’importance des stratégies argumentatives mettant les contraintes à distance (Zittoun, 2013) ou bien encore des travaux sur le leadership politique (Helms 2012 ; Irondelle, 2011 ; de Maillard/Surel, 2012) ou la sociologie des élites (Genieys/Hassenteufel, 2012) mettant au jour les formes de pouvoir que rendent possible les politiques publiques.
 
Pour autant, ce regain d’intérêt pour le « volontarisme » des acteurs politique se trouve aujourd’hui confronté à un triple défi :
-un défi théorique et épistémologique afin de dépasser et de repenser la distinction acteurs/contraintes qui conduit à une impasse ;
-un défi méthodologique lié au  fait que l'échelle temporelle d'observation choisie modifie l’analyse: inscrite dans la longue durée, elle tend à faire ressortir les contraintes, limitée à une temporalité plus courte elle conduit à accentuer l’action volontariste ;
-un défi empirique lié au contexte actuel qui tend à faire ressortir la prépondérance des contraintes dans la plupart des pays et l’homogénéisation des politiques publiques qu’elle provoque, comme le soulignent notamment les travaux récents portant sur la mise en place de politiques d’austérité en réponse à la crise (Bermeo/Pontusson, 2012 ; Blyth, 2013 ; Streeck/Schäffer 2013).
 
L’enjeu de cette section thématique n’est pas seulement de faire le point sur le rapport complexe qu’entretiennent l’autonomie des acteurs et les contraintes qui pèsent sur eux dans la fabrique des politiques publiques, mais de mobiliser des travaux en cours portant sur la période actuelle pour réinterroger, sous un nouvel angle, la place du « volontarisme » (politique). C’est en effet dans les périodes les plus contraintes que l’étude du « volontarisme » est la plus pertinente et peut devenir la plus innovante. Sans prétendre épuiser toutes les pistes d’un renouvellement de ce questionnement, nous proposons ici trois angles d’attaques susceptibles d’ouvrir de nouvelles perspectives.
 
Le premier questionnement porte sur la manière d’appréhender les « contraintes ». Plutôt que de chercher à les objectiver à partir de l’observation des comportements des acteurs ou des dynamiques des politiques publiques, nous proposons de mettre l’accent sur la façon dont les acteurs les définissent, cherchent à les réifier et les propager dans les arènes de politiques publiques. Une telle perspective conduit à s’intéresser à la façon dont des acteurs tentent d’infléchir des politiques publiques ou de s’opposer à des propositions en élaborant des discours de la contrainte, en développant des argumentations de la faisabilité pour les consolider et disqualifier des propositions alternatives, en trouvant les espaces nécessaires et les interlocuteurs pour les déployer, en obtenant de nouvelles positions, en persuadant et en enrôlant d’autres acteurs pour former de nouvelles coalitions...
 
Le deuxième questionnement porte sur le leadership politique. Dans un environnement fortement contraint, quelle place reste-t-il aux leaders politiques ? Leur rôle se retreint-il à des joutes rhétoriques dans le forum de la communication politique et à des luttes pour la conquête des positions dominantes comme le mettent en avant de nombreux travaux de sociologie politique ou le leadership n’est-il pas également lié à des capacités d’orientation et de conduite de l’action publique ? L’enjeu est ici de dépasser la division (scientifique) des tâches entre la sociologie politique et l’analyse des politiques publiques pour proposer un questionnement portant sur la construction du leadership, en prenant en compte le rapport aux politiques publiques. Il suppose de réinterroger la distinction entre les arènes des politiques publiques et le forum de la communication politique à travers l’étude renouvelée du travail politique en articulant, d’un côté, l’analyse de la production de discours, de la construction d’alliances politiques et de la légitimation de l’action politique, avec, de l’autre côté, celle de la production de l’expertise de politiques publiques (rôle des entourages et des think tanks notamment), de la construction de coalitions d’action publique et de l’intervention dans les processus décisionnels.
 
Le troisième questionnement porte sur la prise en compte des échelles d’intervention pour analyser les rapports leadership/contraintes. Si la crise a renforcé l’articulation des politiques nationales avec les niveaux européens, avec la mise en place de règles plus contraignantes (semestre européen, traité budgétaire…), et internationaux (rôle du G8-G20 et du FMI dans la gestion de la crise) a-t-elle pour autant réduit la capacité d’orientation et de conduite des politiques publiques ? On peut notamment mettre en avant la négociation avec des institutions supra-nationales et les pays partenaires, ou la mobilisation de la contrainte pour réorienter les politiques publiques nationales, à l’appui notamment de discours du type « c'est l'Europe qui veut cela » ou « il n’y a pas d’alternative ». On peut donc se demander dans quelle mesure le leadership se construit de plus en plus dans la capacité stratégique d’articulation de différentes échelles d’action publique.
 
La section thématique se déroulera autour de deux axes. Le premier porte sur les modalités de construction politique de la contrainte par des acteurs, le plus souvent dans le cadre de lutte pour la définition de l’orientation légitime de l’action publique dans un domaine donné. Un accent particulier sera mis sur la capacité d’acteurs politiques à transformer une contrainte (supra-nationale) en opportunité pour l’action publique et politique. Le deuxième axe porte sur la façon dont les différents acteurs des politiques publiques, notamment les acteurs politiques, agissent en contexte contraint tant au niveau de la décision publique au niveau national qu’au niveau de la mise en œuvre et de l’évaluation de l’action publique. Une focale spécifique sera mise sur la façon dont les collectivités territoriales font face à la contrainte budgétaire renforcée découlant de la crise économique et financière actuelle. 

The aim of this panel is to analyse the way policy actors cope with constraints, especially in the context of the financial crisis affecting most of the world’s political economies since 2008. The analytical framework underlying the panel is actor-centred. This perspective has been recently developed in policy analysis, especially by neo-institutionnalist, discursive, political leadership or elite sociology studies.
 
Three main questions are raised in the panel. The first one concerns the way to analyse constraints in public policy. Constraints have to be taken into account not only as measurable facts but also as the result of a political construction process, based on the elaboration of new discourses and argumentations related to the occupation of institutional positions and on coalition building, all targeting the opening of new windows of opportunities for political action. The second one is focused on the role of political leadership in public policy in order to try to bridge the gap between the analysis of policies and the analysis of politics. The third is about the level of analysis. The crisis seems to have strengthened the role of supranational institutions at the European level and beyond. But does it necessarily mean that national and local actors have lost all even more autonomy? The multilevel nature of contemporary public policies has also given new strategic tools for policy actors able to play multilevel games.
 
The panel is organised around tow axes. The first one focuses on the political process of the construction of “constraints” by policy actors trying to limit the actions’ capacity of other policy actors. The analysis of this political construction process takes especially into account the conflicts on the definition of what these constraints are and the way some actors use them as opportunities for policy change.
The second axe sheds the light on how policy actors (political leaders, specialized policy elites, street level bureaucrats …) act and react in a constraining context, especially when they face the budgetary constraints due to the financial crisis at the national and local level.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 1 : lundi 22 juin 9h00 – 12h00
Session 2 : lundi 22 juin 14h45 – 17h45

Lieu : voir le planning des sessions


Programme

Axe 1 / La construction politique de la contrainte

Président de séance : Philippe Zittoun  

Thème 1 : Le rôle des acteurs dans la construction de la contrainte

Discutant : Pierre Muller (CEE, Sciences Po Paris)

Thème 2 : La contrainte supranationale comme ressource ?

Discutant : Eve Fouilleux (CEPEL-CNRS, CIRAD-MOISA)

Axe 2 / Les stratégies politiques face à la crise 

Président de séance : Patrick Hassenteufel

Thème 3 : Les acteurs des politiques publiques en contexte contraint 

Discutant : Philippe Zittoun
 
Thème 4 : Les collectivités territoriales face à la contrainte budgétaire

Discutant : Patrick Hassenteufel


Résumés des contributions

Eve Fouilleux (CEPEL-CNRS, CIRAD-MOISA), Bruno Jobert (PACTE, Sciences Po Grenoble)
 
Pour une approche agonistique des débats et controverses de politiques publiques
 
Le débat de politique publique n’a rien à voir avec un malentendu qu’une délibération apaisée entre citoyens raisonnables permettrait de lever, ni avec la construction d’un consensus sur un bien commun introuvable. Il est le lieu d’expression de conflits entre des acteurs occupant des positions asymétriques et défendant des valeurs peu conciliables. Il s’insère dans une sphère publique marquée par la coexistence durable de représentations contraires de la société. Cet article propose un cadre d’analyse des débats de politiques publiques visant à rendre compte de ces confrontations entre interprétations rivales et des processus d’ouverture et de réduction de l’éventail des possibles impliqués.
Loin des analyses centrées sur les seules coalitions dominantes qui ignorent que les discours dominants ne peuvent s’interpréter sans référence aux positions des acteurs subalternes, nous décrirons ce phénomène dans la phase de construction des dissonances cognitives des politiques publiques. Le passage de la reconnaissance de ces dissonances à de nouvelles politiques exige une reconstruction des termes du débat dans les différents forums des politiques publiques, conduisant à des formes d’entreprises intellectuelles où sont combinés des langages et des représentations hétérogènes. Nous explorerons enfin les conditions dans lesquelles les nouvelles problématisation générées s’insèrent dans les arènes du politique et influent sur les relations de pouvoir orientant les politiques en action.
 
For an agonistic approach of public policy debates
 
Public policy debates are not appeased deliberation processes among reasonable citizens, nor are they consensus building process around an evasive common good. Rather, they represent a space/process where actors with asymmetric positions and diverging values engage in conflict. A public policy debate is embedded in a public sphere characterized by a durable coexistence of rival representations of society. This paper proposes an analytical framework of these debates that can capture the confrontation of competing interpretations and explain the related processes of opening and closing the scope forpossible alternatives.
Most of the approaches that explain policy change by focusing on the role of hegemonic coalitions overlook the fact that the discourses of these coalitions cannot be analyzed without taking into account the positions and arguments of subaltern actors. This is particularly obvious in the phases of negative policy feedbacks, i.e. cognitive dissonance related to the policy (discourse versus practice). Transforming this dissonance into policy change is not possible without an extensive reconstruction of the terms of debates in the different policy forums. It implies intellectual enterprise, which combines heterogeneous languages and representations. Finally, we explore the conditions under which new problem framings ease their way into political arenas and influence the power balances that shape policies ‘in action’.

 
Lucile Béraud-Sudreau (Université Paris 2, DGA)
 
La politique française d'exportation d'armement face à une industrie de défense en crise : une servitude volontaire ?
 
La politique française d’exportation d’armement est ancrée dans un discours de contrainte : la politique de défense française nécessitant l’acquisition indépendante d’équipements militaires, ceci requiert une base industrielle autonome performante, les ventes d’armes sont alors nécessaires pour assurer la survie d’entreprises de défense. Cette logique justifie un fort soutien politique aux industries de défense sur les marchés export. Or, la baisse des budgets de défense suite à la crise de 2008 a accentué la pression économique sur les industries de défense dans toute l’Europe. Toutefois, le discours français sur les ventes d’armes, axé sur l’absence d’alternative, n’est pas nourri par des éléments supranationaux, mais est légitimé par l’enjeu domestique d’une industrie de défense autonome. Les ventes d’armes sont elles alors une contrainte acceptée, d’une « servitude volontaire » aux besoins des industries de défense ? Grâce à la comparaison avec le cas suédois, où les budgets de défense ont été aussi réduits mais où des alternatives à l’exportation sont débattues, cette communication vise à démontrer qu’un discours de contrainte s’impose aux acteurs en cas d’absence de discours d’opposition en interne. « Il n’y a pas d’alternative » en France en matière de ventes d’armes, car aucune alternative n’est portée par des acteurs et des discours concurrents. En Suède, cette alternative existe, car deux discours sont portés par différents acteurs et confrontés l’un à l’autre.
 
The French arms export policy and the crisis of the defence industry: a voluntary burden?
 
The French arms export policy is anchored in a discourse of constraint: the French defence policy requires independent procurement of military equipment, which in turn necessitates an autonomous and efficient industrial base, therefore arms sales are necessary to ensure the survival of defence firms. This argumentation justifies a strong political support to the defence industry on foreign markets. However, the decrease of defence budgets following the 2008 crisis economically pressured defence companies in Europe. However, the French discourse on arms sales, centred on the absence of alternative, is not fuelled by supranational events, but its legitimized by the domestic issue of an autonomous defence industry. Arms exports are they then an accepted constraint, a “voluntary servitude” to the needs of the defence industry? Through a comparison with the Swedish case, where defence budgets were also cut but where alternatives to arms sales are discussed, this presentation aims at showing that a constraint discourse imposes itself on decision-makers when there is no opposing domestic discourse. “There is no alternative” in France in the arms export policy, because no alternative is offered by competing actors and discourses. In Sweden, this alternative exists, because two discourses are offered by competing actors in the arms export policy field.

 
Ulrike Lepont (Université Versailles Saint-Quentin, CEPEL)
 
La crise de 2008 a-t-elle été l’occasion de l’activation d’un nouveau cadre de politiques publiques aux USA ? Le cas de la réforme Obama de protection maladie
 
Signée en mars 2010 par le président Obama, la loi visant à étendre la couverture maladie aux Etats-Unis (ACA) symbolisa la volonté politique de la nouvelle administration de conduire une politique sociale redistributive dans un contexte de crise économique mondiale et face à une opposition républicaine particulièrement virulente. Ainsi, de manière quelque peu surprenante vue d’Europe, la crise fut, aux Etats-Unis, considérée par nombres d’observateurs comme un facteur favorable à la mise sur agenda d’investissements publics dans le secteur social. L’ACA aurait-elle signé une forme contemporaine de réactivation du New Deal ? La crise de 2008 aurait-elle été l’occasion de rebattre les cartes, de dépasser des contraintes politiques jusque-là indépassables et d’introduire de nouvelles options dans les politiques publiques américaines ? Cette communication montre au contraire que jamais les alternatives débattues ne furent aussi homogènes et aussi resserrées sur le cadre libéral de la protection sociale (Esping Andersen) qu’en 2008. Si le poids des groupes d’intérêt est souvent mis en avant pour comprendre cette réduction des alternatives, nous montrerons qu’elle tient également aux conditions de production de l’expertise publique disponible auprès des décideurs américains, marquées par la structuration et l’institutionnalisation d’un espace de l’expertise qui, depuis les années 1990, est parvenu à définir les limites du « faisable » et à marginaliser les options s’écartant de ce cadre.
 
Was the 2008 Economic Crisis the Occasion for a New Framework for Public Policy in the US? The Case of the Obama Health Care Reform
 
The Affordable Care Act (ACA), signed in March 2010 by the President Obama in order to extend healthcare coverage in the US, symbolized the political will of the new administration to carry out a redistributive social policy in a context of economic crisis and of virulent opposition by the Republican Party. Surprisingly to European eyes, the 2008 crisis was considered in the US as a favorable factor for setting public social investments on the policy agenda. Can we accordingly say that the ACA was a type of contemporary reactivation of New Deal politics? Would the 2008 crisis have lead to overcoming the political constraints considered insurmountable by then as and introducing new policy options in US politics? This paper shows that, on the contrary, health policy alternatives considered in 2008 were especially homogeneous and consistent with the liberal model of the welfare state (Esping Anderson). While the influence of the interest groups is often pointed to as an explanation for this policy trend, I show that it also results from the conditions of production of the public expertise available to the American decision-makers. These are characterized by the structuring and the institutionalization of a space of expertise that, since the 1990s, has defined the limits of what is “politically feasible” and has marginalized all attempts to move away from this frame.

 
Alexandre Faure (EHESS-CRH)

Le volontarisme comme contrainte : l'improbable retour du leadership de l’État en Île-de-France

Il est habituel de considérer le volontarisme en politique à partir du point de vue de l'acteur qui met en place une politique ambitieuse dans tel ou tel domaine. Cependant, le volontarisme, en tant que choix politique, produit des contraintes sur les acteurs qui subissent l'action publique. Ce schéma émerge nettement lors de notre étude sur le Grand Paris. Le gouvernement et l'Etat engage a partir de 2008, une politique volontariste en matière de transport et de réforme des institutions de la région parisienne. Dans un double processus de métropolisation, à la fois par le biais du Grand Paris Express et par celui de la Métropole du Grand Paris, l'Etat reprend la main là ou on ne l'attendait plus. Le Conseil Régional, la mairie de Paris, le Syndicat Paris Métropole se retrouve pris de cours par les annonces gouvernementales et les tractations. Rapidement, le projet de transport ne fait plus débat et les élus locaux se concentrent alors sur les institutions métropolitaines.
Ce nouveau leadership étatique va à l'encontre des analyses produites par la Science Politique ces dernières années. Après avoir enterré l’État, il s'agit de le redécouvrir et d'analyser sa place dans les négociations des politiques territoriales franciliennes. Ce retour en force en Île-de-France marque la recomposition des élites étatiques et sa façon de dialoguer avec les collectivités territoriales.

Voluntarism as an obligation: the unthinkable comeback of the State in the region of Paris

It is tradition to take in consideration that political voluntarism from the point of view of the actor who produces public policy. But, voluntarism is a choice and this choice give obligation to other actors. This scheme is clear when we studie the Grand Paris' case. Government and State begin in 2008, a negociation about the construction of a new public subway around Paris and an other debate about the territorial institution law reform. We can see two process of metropolisation visible in the transport field and the political institution. This two process significate a State's come back where we didn't expect it. The assembly of the Region Île-de-France, the Paris' municipality and the Syndicat Paris Métropole which regroup lot of local elected politicians, are unprepared to handle the situation.
The new leadership of the State was not anticipated by the Political Sciences. After having buried it, we must rediscoverd the State and analysed it influence in the negociations of the public policy in Île-de-France. This come back reveal to us, the new composition of the elite's State and it way of debate with the local level government.


Maïmouna Ndong-Etroit (PACTE, Sciences Po Grenoble)
 
La construction métropolitaine des politiques de transport : une analyse à travers les « luttes définitionnelles »
 
Plusieurs observateurs ont relaté l’accélérateur de réformes que constitue la crise économique que traversent les Etats (De Maillard, Surel, 2012). En France, parmi les réformes récentes, l’émergence des Métropoles institutionnelles, sont un exemple particulièrement intéressant pour analyser les jeux d’acteurs à l’œuvre. Dans un contexte où l'Etat et les collectivités locales font face à des contraintes de plus en plus importantes, la création des Métropoles a pour objectif de renforcer le pouvoir d'agir de la puissance publique. En effet les acteurs servent une rhétorique depuis de nombreuses années sur la nécessité d’agir notamment sur les politiques de transports, qui font l’objet d’une véritable « lutte définitionnelle » (Zittoun, 2013). A partir de ce contexte, notre problématique consiste à comprendre comment on passe d’un discours d’urgence à agir, à l’institution porteuse d’actions. Pour répondre à cette question, nous étudierons dans un premier temps, ce que ce « travail définitionnel», nous révèle dans la capacité de ces acteurs à politiser, créer des alliances, légitimer une action publique et l’institution qui la porte. Il s’agira dans une seconde partie d’analyser le processus de mise en place d’une politique de transport dans un contexte de mutation institutionnelle et la relation entre la légitimité des acteurs, ceux des actions qu’ils portent et des institutions auxquels ils sont associés. Ce travail repose sur une enquête empirique développée à partir d'entretiens d'acteurs publics et privés à Lyon et à Marseille.

Transport policy making in the metropolization of Lyon and Marseille: an analysis through the “definitional struggles”

According to several observers, the current economic crisis constitutes an accelerator for State reforms and rescaling (De Maillard & Surel, 2012). In France, in particular the emergence of the new “Metropolis” is an excellent example to study the power relations and the interactions between the local stakeholders. In a context where the State and the local authorities deal with increasing constraints to implement public policies, the creation of the Metropolis is supposed to improve the power of urban governments. Indeed, policymakers serve rhetoric on the necessity of acting on transport policies which are the object of important “definitional struggle” (Zittoun, on 2013). The question we are raising is how the urgency to act is transformed to an institutionalization and the creation of the political Metropolis. To answer this question, we will analyze at first this definitional work, to understand the capacity of policymakers to create alliances, to legitimize their public actions and the related institutions. Secondly, we will question specifically the implementation of transport policies in a context of institutional transformation in Lyon and Marseille. This work is based on empirical data collected through a survey conducted with policymakers and public and private actors in the Metropolis of Lyon and Marseille.

 
Élodie Bordat-Chauvin (CHERPA, Sciences Po Aix-en-Provence)
 
Entre contraintes supranationales et conflits politiques : la réforme de la politique mexicaine du cinéma dans les années 1990
 
Jusqu’à la fin des années 1980, l’État mexicain intervient dans le cinéma en finançant la formation, la production, la distribution et l’exploitation. Ce système intégral de soutien à une industrie culturelle, uniquement comparable à celui de l’URSS, commence à être démantelé au début des années 1990. La quasi-totalité des studios est vendue, tout comme la compagnie nationale de production et l’entreprise publique gérant 3 000 salles, enfin le quota de 50 % de temps d’écran pour les productions nationales est supprimé et le prix de vente des places est libéralisé. Ce retrait de l’État a pour principale conséquence la chute du nombre de productions nationales et l’augmentation du nombre de films nord-américains diffusés dans les salles, la fermeture de nombreux cinémas de quartier et la baisse de fréquentation des salles de cinéma, notamment par les secteurs populaires (Rosas Matecón, 2004). Comment expliquer ce changement ? Est-il dû aux crises économiques des années 1980 et 1990 ? Aux négociations pour la création de l’Accord de Libre-Échange Nord-Américain (ALENA) ? Ou s’insère-t-il plutôt dans le cadre du conflit opposant l’exécutif et les syndicats depuis le début des années 1990 ?
En nous inspirant des travaux sur l’influence de l’Union européenne (Jacquot 2013, Hassenteufel, 2013 ; Alcaud, 2004) et des accords de libre échange nord et sud-américains (Galperin, 1998) sur les réformes de secteurs publics, on se demandera dans quelle mesure la transformation des politiques mexicaines du cinéma est le résultat de « contraintes » de l’ALENA et d’acteurs transnationaux ou de la mobilisation du discours de la contrainte par des acteurs politiques désirant affaiblir les syndicats du secteur. Nous montrerons que l’ampleur de cette réforme ne peut se comprendre qu’en prenant en compte à la fois les pressions et contraintes extérieures pour la libéralisation (Bresser, Maravall, Przeworski, 1998), l’intervention croissante d’acteurs transnationaux (comme la Motion Picture Association) et les luttes politiques opposant décideurs et syndicats (Bizberg, 1998). À travers l’exemple de la politique mexicaine du cinéma, nous tenterons donc de répondre à la question suivante : dans quelle mesure les acteurs politiques instrumentalisent et construisent les contraintes supranationales dans la mise en œuvre de réforme sectorielle ?
Cette proposition mobilisera un matériau composé de sources orales (entretiens semi-directifs avec des acteurs politico-administratifs de la politique culturelle mexicaine dans les années 1990 et des membres de groupes d’intérêt du cinéma) et des sources écrites (rapports parlementaires et gouvernementaux, expertises produites par des groupes d’intérêt, publications de presse du secteur cinématographique, textes règlementaires – au niveau national et supranational – etc.).
 
Between supranational constraints and political conflicts: Mexican cinema policy reform in the 1990s.
 
Until the end of the 1980s, the Mexican State intervened in the cinema sector financing training, production, distribution and diffusion. This system of support to a cultural industry, only comparable with the case of the URSS, began being dismantled at the beginning of the 1990s. Almost all the cinema studios were sold, along with the national production company and the public firm that managed 3000 cinema halls. The 50% quota of screen-time for national production is suppressed and the price of movie tickets liberalised. The main consequence of the retreat of the State, is the drop in the number of national productions and the increase of the north-American movies broadcasted in theatres, in particular among the working class (Rosas Matecón, 2004). How can we explain this change? Is it due to the economical crisis, to the negotiation of NAFTA, or to the dispute between the Executive and the trade unions?
By drawing on works on the influence of the European Union (Jacquot 2013, Hassenteufel, 2013, Alcaud, 2004), NAFTA and MERCOSUR (Galperín, 1998) on the reforms of the public sector, we will evaluate the extent to which the transformation of Mexican cinema policies are the result of external ‘constraints’ (such as NAFTA and transnational actors) or the mobilisation of the discourse on constraints by political actors who seek to weaken the sector’s trade union. We will demonstrate that this reform’s reach may only be understood by taking into account the exterior constraints in favour of liberalisation (Bresse, Maravall, Przeworski, 1998), the increasing intervention of transnational actors (such as the Motion Picture Association) and the political struggles between decision-makers and trade unions (Bizberg, 1998). Through the case of Mexican cinema policy, we will see how political actors instrumentalise and construct supranational constraints in the implementation of sectorial reforms.
This proposition draws on oral sources (semi-structured interviews with political and administrative actors of Mexican cultural policy in the 1990s, and members of cinema interest groups) as well as written sources (parliamentary and governmental reports, interest group reports, press publications from the cinema sector, national and supranational legal texts, etc.).

 
Alice Baillat (CERI, Sciences Po Paris)
 
Transformer la contrainte en ressource : la « fabrique » du migrant climatique au Bangladesh
 
Encore méconnu et faiblement intégré au système économique mondial, le Bangladesh a récemment gagné en visibilité sur la scène internationale, s’imposant comme l’un des principaux porte-paroles des pays vulnérables au changement climatique. Confronté à de multiples maux qui freinent son développement, il dispose a priori de peu de ressources pour peser dans les négociations internationales sur le climat. Et pourtant, grâce à la mobilisation de certains acteurs, notamment une petite élite intellectuelle particulièrement influente, ce pays a mis sur pied une stratégie diplomatique efficace reposant sur la mise en discours de sa vulnérabilité, faisant de la contrainte climatique une ressource politique. La figure du migrant climatique émerge dans ce contexte comme une image de la vulnérabilité du Bangladesh, « fabriquée » et brandie pour mieux convaincre à l’extérieur des risques politiques et sociaux auxquels ce pays est confronté. La posture théorique adoptée dans cette communication se situe au carrefour de la sociologie de l’action publique et de l’étude de la politique étrangère (Hassenteufel, 2008 ; Kessler, 1999 ; Petiteville et Lentner, 2006). Elle mobilise notamment certains concepts issus des approches discursives des politiques publiques comme ceux d’ « énoncés de politique publique » (Zittoun, 2007, 2013), de « discours de communication/discours de coordination » (Schmidt, 2006, 2008) et de « coalition discursive » (Hajer, 2005).
 
From constraint to opportunity: The framing of “climate migration” in Bangladesh
 
Bangladesh is a relatively unknown and poorly integrated country to the global economic system. It has recently gained more international visibility as one of the leading voices among most vulnerable countries to climate change. Exposed to a range of political, social and environmental ills, Bangladesh has limited resources to influence international climate negotiations. However, small intellectual elite has been particularly active in Bangladesh to help the government raising its voice outside, through in particular the discursive promotion of its vulnerability. In other words, climate constraint is transformed into a political opportunity. In this context, climate migrant is framed and used as an illustration of its vulnerability, in order to convince about potential political and social troubles that Bangladesh can face with climate change. From a theoretical perspective, this paper mobilises both public policy analysis and foreign policy analysis (Hassenteufel, 2008; Kessler, 1999; Petiteville et Lentner, 2006). It uses concepts drawn from discursive approaches of public policy, such as “policy statement” (Zittoun, 2007, 2013), “coordinative discourse/communicative discourse” (Schmidt, 2006, 2008) and “discursive coalition” (Hajer, 2005).

 
William Genieys (CEPEL-CNRS), Jean Joana (Université Montpellier 1, CEPEL)
 
Les nouveaux gardiens de l'Etat face à la crise : une comparaison France-États-Unis

Sous les effets de la crise financière de 2008 et la généralisation des politiques d’austérité, les élites d’Etat sont souvent présentées comme une espèce politique en voie de dissolution. L’examen des réformes des politiques de santé et de défense en France et aux Etats-Unis au cours des années 1990-2000 montre que l’on assiste plutôt à une reconfiguration du pouvoir de ces élites autour de la défense de politiques sectorielles. A l’instar des « custodians of policy » chers à P. Selznick, de petits groupes d’élites qualifiées de « new custodians of the State », se spécialisent dans certains stratégiques d’action publique et du contrôle des couts de l’action publique leur cheval de bataille dans le but de préserver le rôle central de la puissance publique.
 
The New Custodians of the State dealing with the Financial crisis : a Comparison between France and the USA
 
Following the 2008 global economic crisis and rolling out of austerity measures (Blyth, 2013), elites of the state seem to have become a 'political species' of their own, now under threat of extinction. The study of the health and defense policies reforms in France and the US during the 1990’s and 2000’s shows that far from disappearing, the influence of state elites is being strategically reconfigured to defend some sector-specific policies.  Similarly to those ‘custodians of policy’ dear to P. Selznick, small groups of elites are gaining expertise  within certain strategic sectors of public policy; they are also making the need to control the cost of public spending their royal battle, in order to safeguard what they see as the crucial role of the public good.
 
 
Dario Rodriguez (CERI, Sciences Po Paris)
 
Quelle place pour les leaderships politiques ? La politique de nationalisation des hydrocarbures en Argentine et en Bolivie
 
Dans un contexte historique où les mutations des formes représentatives des démocraties contemporaines ont révélé la nouvelle centralité du leadership, ce travail se propose d’analyser son action dans le processus d’élaboration et établissement de différentes politiques publiques.
On a décidé de sélectionner, comme scénario d’observation, deux démocraties latino-américaines : la deuxième présidence de Cristina Fernández de Kirchner en Argentine (2011-2015) et la première présidence d’Evo Morales en Bolivie (2005-2009). Dans ce contexte, on se focalisera sur l’étude comparative d’une politique qui a marqué les deux administrations : la politique de nationalisation des hydrocarbures établie par le gouvernement bolivien en 2006 et par le gouvernement argentin en 2012. Plus spécifiquement, on s’interrogera sur la place des leaderships dans ces deux processus à partir de l’analyse de différentes dimensions : a) le contexte socio-historique ; b) l’articulation d’appuis politiques ; c) les ressources d’expertise. Sur la base d’une approche qui pense le leadership politique à partir de la notion de la représentation politique et qui considère les dimensions contextuelles et symboliques déterminant le processus de légitimation de l’autorité présidentielle, on compte apporter de nouveaux outils d’interprétation et de compréhension des politiques publiques.    
 
What role for political leaderships? The nationalisation policies of hydrocarbons in Argentina and Bolivia
 
In a historical context where the changing forms of representation in contemporary democracies have brought forward the new central role of leadership, we propose to analyse the action of the leaders in the process of elaborating and implementing different public policies. This analysis focuses on two Latin-American democracies: the second presidency of Cristina Fernández de Kirchner in Argentina (2011-2015) and the first presidential term of Evo Morales in Bolivia (2005-2009). In this regards, the comparison concentrates one policy which has marked significantly the two administrations: the nationalisation of hydrocarbons decided in 2006 by the Bolivian government and in 2012 by the Argentinean one. More specifically, we will look at the role of leadership in the nationalisation processes from different angles: a) the socio-historical context; b) its articulation with political support c) the resources of technical skills.
Considering political leadership as a notion of political representation and taking into account contextual and symbolic aspects that determine the legitimation process of the presidential authority, this articles strives to provide new interpretation tools and a new insights to understand public policies.


Nadia Okbani  (Centre Émile Durkheim, Sciences Po Bordeaux)

Influencer les politiques en institutionnalisant l'évaluation au sein d'une CAF: le travail institutionnel d'élites volontaristes face au discours de la contrainte
 
Les organismes de sécurité sociale (OSS) et leurs agents de direction (ADOSS) disposent d'une certaine marge de manœuvre dans le déploiement local des politiques nationales de protection sociale. La majeure partie des ADOSS tendent à se replier sur un discours basé sur la contrainte financière et se situer dans une approche gestionnaire de leur mission, centrée sur la mise en œuvre des dispositifs réglementaires. Certains ADOSS cherchent, pour autant, à s'inscrire dans une vision plus politique de leur métier qui aurait vocation à contribuer à l'élaboration et à l'évaluation des politiques, du fait de leur "connaissance de terrain". En partant du cas de la CAF de la Gironde et plus largement du réseau des CAF, cette communication interroge en quoi les stratégies d'institutionnalisation de l'évaluation de politique au sein d'OSS et notamment l'élaboration d'un Schéma Directeur de l'Evaluation, sont révélateurs d'un positionnement volontariste de certains ADOSS qui cherchent à se structurer en élites programmatiques pour influencer les politiques au niveau local et national. Elle analyse le chemin parcouru par ces acteurs et leur travail institutionnel pour se créer des marges de manœuvre par le biais de l'évaluation, légitimer leur position et trouver des alliances, non seulement au sein de leur organisation, mais également auprès des partenaires locaux, du réseau des CAF et des ADOSS.
 
Influencing policies through evaluation's institutionalization within a CAF: the voluntarist elites' institutional work against the constraint discourse
 
Social Security Organizations (SSO) and their managers (SSOM) have a margin of flexibility in local implementation of national social welfare policies. A majority of them tends to withdraw on a financial constraint discourse and have a managerial approach of their mission, focused on regulatory schemes implementation. However, some SSOM claim their "knowledge in the field", to try to reframe their job in a more political perspective and therefore increase their authority to contribute to policies' elaboration and evaluation. This communication addresses the case of a French social security local office (CAF of the Gironde) and more widely the national network of the CAF. It questions how the strategies of policy evaluation's institutionalization within SSO reveal voluntarist positions of certain SSOM, by studying the elaboration of evaluation's Master plan. It shows how they attempt to form programmatic elites to influence local and national policies. It analyzes the path achieved by these actors and their institutional work to build up flexibility margins through policy evaluation, to legitimize their position and find alliances, not only within their organization, but also with the locals and national networks.


Jean-Marie Pillon (CEE)
 
Gérer le chômage dans la crise : une approche mésosociologique de l'action publique à partie des gestionnaires de Pôle Emploi
 
La crise financière survenue en 2008 est concomitante d’une vaste réforme du service public de l'emploi français, créant un guichet unique : Pôle emploi. Élaborée avant la chute de Lehmann-Brother, cette réforme devait accompagner le retour à la croissance. Le chômage augmente en fait de 30 % dès la première année d’existence de l’organisme réunissant ASSEDIC et ANPE. Malgré ce contexte, les objectifs de performance relatifs à la politique de fusion sont maintenus. Pour faire face, les agents  inventent des façons de gérer le flux et de tromper le système d’information qui permettent de préserver l’illusion d’une réforme qui se déploie tant bien que mal. Durant toute cette période, le réel de l’activité se « désarrime » de sa représentation dans les tableaux de bord de la direction générale. L’encadrement intermédiaire élabore des modalités d’organisation qui optimisent les ressources en réorganisant le travail, en marge des obligations légales jugées trop chronophages. En 2011, un nouveau directeur général publie une feuille de route qui, présentée comme une rupture, consiste en fait à reconnaître les arrangements locaux que les cadres intermédiaires et les agents avaient trouvés pour combattre l’augmentation de la charge de travail.  En nous appuyant sur une enquête de terrain, nous montrerons dans notre communication comment les contraintes propres à la crise du marché du travail ont progressivement conduit l’ensemble des acteurs à adopter une lecture commune du réel, une lecture gestionnaire.
 
Open During Construction? How French Public Employment Services Coped With Economic Recession And Massive Unemployment
 
When the 2008 economic crisis break through, the French public employment service was experiencing a major change, as a complete one stop shop was created. However such a reform was designed to support a strong GDP growth, the unemployment rate raised by 30 % the next year. Nevertheless, in the steering process, the government kept up with the same performance targets. Street level bureaucrats thus invented new work procedures to cope with the pressure at the gate and to con the information system. In Top management Scoreboards, the reform seemed to be in progress. Hardly but firmly. To put it in a nutshell, everyday life in job centers got decoupled from its representation in the information system. The middle management elaborated new organization frames so as to optimize the human resources, far from the legal procedures which were seen as too time-consuming. In 2011, a new-appointed CEO delivered a road map, intended as a major switch. This new strategy actually consisted in institutionalizing organizational tricks which, till then, remained hidden. Based on a fieldwork, this presentation will explain how, as the labour market crisis spread, a whole 50 000 workers administration became a quasi-homogeneous group of intendants. During those days, everybody went optimizing.

 
Lisa Passavant (CEPEL, Université Montpellier 1)
 
Une diffusion « fabriquée » des discours de légitimation de la contrainte budgétaire dans les institutions régionales : Limousin, Nord Pas de Calais et Alsace
 
Les collectivités territoriales sont confrontées depuis plusieurs années à une diminution brutale de leurs ressources et de leurs capacités d’action. Cette contribution se propose de comprendre comment les discours de contrainte budgétaire ont progressivement été construits et véhiculés au sein des institutions régionales. A travers une analyse comparative basée sur des observations budgétaires (compte-administratifs) et sur des éléments de discours (analyse des débats en séance plénière, entretiens semi-directifs) l’objectif de ce propos est d’identifier quels sont les acteurs qui « diffusent » la nécessité des coupes budgétaires, leur rôle dans les processus décisionnels et les résistances qui s’expriment face à ces nouveaux choix.
Il s’agit alors d’analyser la manière dont certains acteurs, dotés de caractéristiques spécifiques, vont fabriquer et véhiculer des discours de diminution des dépenses en faisant apparaitre cette dernière comme l’unique solution pour faire face à la raréfaction des ressources. Dès lors que ces stratégies argumentatives vont trouver un écho majoritairement favorable, il s’agira alors d’analyser la manière dont s’opèrent les choix de réduction des dépenses. Enfin, malgré l’acceptation progressive de la contrainte, les changements dans les processus de construction budgétaire auxquels conduit la propagation de ces discours engendrent des transformations dans les alliances politiques et politico-administratives au sein des institutions régionales.
 
An « orchestrated » spreading of budget constraint legitimization discourses within regional institutions : Examples of french areas : Limousin, Nord Pas de Calais and Alsace

Territorial authorities have been facing for many years a drastic decrease of their ressources and operational capacity. This paper will analyze the way budgetary constraints discourses have been gradually built and conveyed throughout regional institutions. Through a comparative analysis based on budget observations (administrative accounts) and on discourses’ elements (plenary discussions analysis, semi-structured interviews), the purpose of this writing is to identify who are the stakeholders who spread the need for budget cuts, the role they play in decision-making processes and the resistance to these new choices.
We will analyze how certain stakeholders with specific characteristics will build and spread cutbacks expenditures discourses, making it the only solution to face declining resources. Since these argumentative strategies are generally well received, we will study the way these budget cuts choices are made. Lastly, despite the constraint’s progressive acceptance, changes in budget settings led by these discourses spreading give birth to transformations in political and political-administrative alliances within regional institutions.


Pierre Bonnevalle (CERAPS, Université Lille 2)
 
La crise pour s'imposer ? La rhétorique de bonne gestion de l'institution départementale des hauts fonctionnaires territoriaux comme accentuation du pouvoir technocratique
 
Cette communication étudie comment la crise économique, les restrictions budgétaires, contribuent à la construction d'un discours sur la rationalisation, qui coïncide avec le renforcement du pouvoir de toute une série d'acteurs au sein des collectivités territoriales. En prenant appuie sur le Conseil général du Nord, nous interrogeons les frontières entre politique et technocratie, entre élus et hauts fonctionnaires. Nous cherchons ici à étudier comment la rhétorique de bonne gestion, comment les instruments issus du New Public Management, tendent à favoriser le champ bureaucratique, et notamment les néo-entrants, issus de l'INET, qui voient dans les restrictions budgétaires un moyen d'accentuer leur emprise, de mordre sur le champ politique, d'implémenter le management. Il s'agit ici d'analyser la manière dont ceux-ci s'imposent à la fois dans l'institution et aux élus, la manière dont la crise renforce le pouvoir technocratique et, in fine, limite le poids des élus.
 
The triumphant economic crisis ? Departemental senior officials good management rhetoric as a way to reinforce technocratic power
 
This communication studies how economic crisis and financial restrictions are contributing to the making of rationalisation discourse, which match with power reinforcement of a line of local authorities actors. Based on the « Conseil général du Nord », we interrogate boundaries betwen politic and technocraty, between elected and senior officials. We seek to study how good management rhetoric, how tools of governement from New Public Management vulgate, tend to favorise bureaucratic field, in particular new entrants, from the INET institution, which see in financial restrictions a way to increase their hold, to bite on political field, to implement management. It is a question of analyse how they succeed to impose themselves in the institution and to the elected, how economic crisis reinforce technocratic power, and, in fine, restrain elected weight.

 
Éléanor Breton (LISE, CNAM)
 
Contractualiser les subventions attribuées aux collectivités locales de son territoire : un instrument de légitimité politique en situation de contrainte financière ?
 
Le contexte de crise des finances publiques mais aussi de réforme territoriale incertaine, visant à la suppression ou l’effacement de certains échelons de collectivités, bouscule l'espace des concurrences institutionnelles et façonne des processus de revendication de légitimité politique. Notre réflexion aura pour point d’ancrage empirique un dispositif de contractualisation des subventions attribuées par un Conseil général aux collectivités infra-départementales de son territoire (communes et EPCI), mis en place en 2004. Ce dispositif consiste à globaliser et flécher les subventions dans une enveloppe financière pluriannuelle attribuée par EPCI en fonction de priorités que le Conseil général aura défini au niveau départemental, comme les équipements sportifs ou le logement social. En s’intéressant à la fabrication par le Conseil général de ce dispositif de financement aussi bien qu'à ses usages et à son itinéraire plus ou moins maîtrisé, il s’agit de voir comment l'économie de la contractualisation a pour effet de suspendre partiellement les coûts politiques de la contrainte financière, se traduisant par la baisse du volume de subventions. La production de ressources politiques autres que financières telle que l'expertise ou la « proximité territoriale » outille ainsi la prise de rôle institutionnel du Conseil général en « accompagnateur éclairé de territoires », et tend à convertir en partie la contrainte financière en volontarisme politique.

Contractualizing subsidies allocated to local authorities : a tool of political legitimacy in a context of financial constraint ?
 
Local governments undergo both a public finance crisis and the uncertainty of a territorial reform aiming at eliminating or toning down the scope of competences covered by certain levels of local authorities. This context tends to disrupt institutional competition orders and shapes processes of political legitimacy claim. This analysis focuses on a case study of a device set up in 2004 by a Conseil général (the local authority of the french Département) that contractualize the public subsidies allocated to its constituent local authorities of a lower level. This contractual tool involves the agregation and the earmarking of subsidies within a multi-annual allocation given to each district (comprised of several communes), according to the Conseil général's political priorities (sport facilities or social housing, for instance). Analyzing the design, uses, and the more or less contained development of this device enables to show how contractualizing financial relations eases partly the political costs of cutback management that the drop of the amount of subsidies induces for the Conseil général. The shaping of other political resources such as expertise or « territorial proximity » thus empoweres the Conseil général to play the role of the « well-advised guide » for the lower levels of local authorities, and tends to partly convert the financial constraint into political voluntarism.


Participants

Baillat Alice alice.baillat@gmail.com
Béraud-Sudreau Lucie lucie.beraudsudreau@gmail.com  
Bonnevalle Pierre pierre.bonnevalle@gmail.com
Bordat-Chauvin Elodie bordat.elodie@gmail.com
Breton Eléanor eleanor.breton@cnam.fr
Faure Alexandre Alexandre.faure.ribiere@gmail.com
Fouilleux Eve eve.fouilleux@cirad.fr
Genieys William william.genieys@univ-montp1.fr
Hassenteufel Patrick patrick.hassenteufel@uvsq.fr
Jobert Bruno brunolucienjobert@gmail.com
Joana Jean joana.jean@numericable.fr
Lepont Ulrike ulrike.lepont@gmail.com
Muller Pierre pierre.muller50@orange.fr
Ndong-Etroit Maïmouna maimouna.etroit@entpe.fr
Okbani Nadia nadiaokbani@yahoo.fr
Passavant Lisa passavantlisa@gmail.com
Pillon Jean-Marie jeanmariepillon@gmail.com
Rodriguez Dario dario.rodriguez@sciencespo.fr
Zittoun Philippe pzittoun@gmail.com

 

13ème Congrès de l’AFSP à Aix-en-Provence du 22 au 24 juin 2015 à Sciences Po Aix

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