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Section Thématique 50

La circulation des procédures judiciaires et des outils du « post-conflit » dans la construction des causes victimaires : une perspective comparée

Responsables

Sophie DAVIAUD (Sciences Po Aix-en-Provence) sophie.daviaud@sciencespo-aix.fr
Sélim SMAOUI (Sciences Po Paris) selims86@hotmail.com

Présentation scientifiqueDates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

En l’espace de trois décennies,  la « victime » a connu une véritable consécration sociale. Elle se trouve associée aux politiques destinées à gérer les legs des passés violents, à travers des dispositifs judiciaires et des instances ad hoc comme les Commission Vérité et Réconciliation. Cette section thématique se propose de penser ensemble la construction des causes victimaires et la question des usages des référents du post-conflit et/ou des outils juridiques dans la mise en forme des revendications par les groupes contestataires. Trois aires géographiques seront privilégiées : l’Espagne, l’Amérique Latine et le monde arabe. Les travaux sur les aires africaines, européennes et asiatiques pourront également nourrir ces réflexions comparatives.
  
 Il s’agit de resserrer la focale sur des dynamiques embryonnaires de mise en forme des collectifs de victimes, situées en amont des transactions institutionnelles dans lesquelles les groupes sont saisis par la suite. Si l'on assume l'hypothèse sociologique selon laquelle la « Justice Transitionnelle » est avant tout une catégorie experte désignant un ensemble diversifié d'outils de « sortie de conflit », il est plausible d'en analyser les usages en marge des politiques publiques et de la considérer comme un ensemble d'instruments qui modifie les pratiques et les attentes militantes. En l'espèce, en Amérique latine, où les Commissions Vérité et Réconciliation ont entériné au départ l'amnistie des tortionnaires, les collectifs de victimes ont ré-aligné leur cause sur les besoins de la lutte contre l'impunité. En Espagne, bien que mobilisées en marge des arènes judiciaires nationales, certaines associations de victimes du franquisme se sont réappropriées lors des années 2000 les standards d'enquêtes sur les violations des droits de l'homme. Le contexte de changements de régimes traversé par le « monde arabe » depuis les révoltes de l'année 2011, est une opportunité pour saisir ces dynamiques sur le vif.
 Afin d’explorer ces  pistes de recherche, les propositions de communications sont invitées à s’inscrire dans un ou plusieurs des axes proposés :
Analyse comparée de la construction des causes victimaires
Circulation des référents, des outils et des procédures judiciaires ménageant une nouvelle place aux victimes de la violence politique

Analyse comparée  de la construction de causes victimaires :
 
 Cet axe cherchera à comprendre comment prend sur le plan collectif une prétention à faire entendre une histoire non écrite et à se faire qualifier de victime. Il analysera les supports et instruments de mobilisation ainsi que les phénomènes de circulation internationale des cadres d’action militants, des modes de protestation et des références cognitives. Il prêtera une attention particulière aux nouvelles manières d'objectiver psychiquement et médicalement la violence éprouvée par les corps. Enfin, des propositions analysant les trajectoires et les carrières des individus mobilisés seront les bienvenues. Elles permettraient d'envisager les manières dont des expériences à l'épreuve desquels les acteurs incorporent des référents et des conceptions de la justice expérimentées par ailleurs, redéfinissent le sens de la violence subie, et se traduisent par des engagement militants et/ou par des recours judiciaires.
 
Procédures judiciaires conférant une nouvelle place aux victimes
 
 En faisant usage des outils standardisés du droit et de la pacification, les collectifs de victimes sont conduits à s'appuyer sur des secteurs professionnels spécialisés.  En quoi les rapports tissés reconfigurent les légitimités domestiques des groupes mobilisés et favorisent des dynamiques d'internationalisation des liens militants? En Espagne, les revendications victimaires ne s’accompagnent pas de procès mettant en accusation de hauts responsables franquistes. Les plaintes des associations se déplacent sur le terrain argentin, à travers des experts jouant les rôles d’intermédiaires. Dans certains pays d’Amérique Latine au contraire, comme l’Argentine et le Chili, les victimes se retrouvent au coeur de l’espace judiciaire et contribuent, à travers leurs récits, à une réécriture par les juges des épisodes les plus sombres des dictatures. Les pays arabes post-2011, où la question du jugement des représentants de l’ancien régime après les épisodes révolutionnaires reste ouverte, peuvent également constituer des terrains rendant compte de ces dynamiques.
 
In the last thirty years, « victim » has experienced a real social consecration. It is associated with politics which aim at solving violent pasts, using judicial mechanisms and bodies like Truth Commissions. This conference panel aims at analyzing together the making of causes of the victims and the use of post-conflict and legal tools. Three geographical areas will be preferred: Spain, Latin America and Arab world. The panel will focus on two main questions:
- Comparative analysis of the making of causes of the victims
- The circulation of the referents, tools and legal proceedings which give a new place to the victims of political violence.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 3 : mardi 23 juin 9h00 – 12h00
Session 4 : mercredi 24 juin 14h00 – 17h00

Lieu : voir le planning des sessions


Programme

Résumés des contributions

Juan E. Serrano-Moreno (Université de Murcie)

La justice pénale face à la mémoire historique dans « l´affaire Garzón ». La contestation de la transition à la démocratie espagnole à travers la mobilisation du droit par les parents des victimes de la Guerre Civile

L´« affaire Garzón » représente un des plus grands scandales politiques et judicaires vécus par la démocratie espagnole. L´ouverture de l´enquête pénale sur les disparus de la guerre civile espagnole en 2008 par le juge Baltasar Garzón, son expulsion de la magistrature et les postérieures décisions de la justice internationale représentent un objet d´étude privilégié pour enquêter les conflits autour des mémoires de la guerre civile, le franquisme et la transition présents dans l´espace public espagnol. Cette communication analyse l´usage protestataire de la justice pénale et internationale déployé à la fois à l´échelle locale, nationale et internationale dans lequel se trouvent mêlés des registres à la fois historiques et mémoriaux, juridiques et politiques, qui participent à la contestation de la « réconciliation » conclue pendant la transition et, de cette manière, au processus de délégitimation de la monarchie parlementaire. Les sources exploitées sont composées par des matériaux secondaires tels que des débats parlementaires, normes juridiques, jurisprudence, rapports administratifs, articles de presse et la littérature grise produite par les associations des victimes.

Criminal law and historical memory in the “Garzón´s affair”. The contestation of the Spanish transition to democracy by the relatives of the civil war victims mobilization of law.

The “Garzón´s affair” represents one of the greatest political and judicial scandals experienced by the Spanish democracy. The opening of the criminal investigation concerning the “desaparecidos” of the Spanish Civil War in 2008 by Judge Baltasar Garzón, his expulsion from the judiciary and the subsequent decisions of international justice brings the opportunity to investigate the conflicts over memories of the Civil War, the Franco regime and the transition present in the Spanish public sphere. This paper analyzes the protesting use of criminal and international law and justice deployed in the local, national and international levels, in which are mixed historical and memorials, legal and political, registers. These conflicts contest the "reconciliation" concluded during the transition, and in this way contributes to the delegitimization of the current parliamentary monarchy. The sources exploited are composed by secondary materials such as parliamentary debates, legal, law, business reports, press articles and gray literature produced by the associations of victims.


Soline Laplanche-Servigne (Centre Maurice Halbwachs – ENS/EHESS) et Liliane Umubyeyi (Institut des Sciences Sociales du Politique – ENS Cachan)

Recomposition des identités victimaires post-apartheid par le recours aux tribunaux sud-africains et américains
 
Cette communication analysera les contestations judiciaires des politiques de réparation des injustices de l’apartheid, qui ont notamment pour effet de remettre en question les catégories de victimes établies lors de la transition démocratique dans les années 1990. Depuis les années 2000, des professionnels du droit et des personnes revendiquant le statut de victimes ont en effet investi les arènes judiciaires pour s’opposer à la définition des victimes de l’apartheid comme étant uniquement les personnes ayant subi des violences portant atteinte à leur intégrité physique.
A partir de deux enquêtes de terrain relatives à des procès en Afrique du Sud (procès pour discrimination liées aux instruments d’affirmative action) et aux Etats-Unis (procès demandant des réparations financières à des multinationales accusées d’assistance au régime de l’apartheid), nous analyserons la façon dont des professionnels du droit et des acteurs associatifs (associations de victimes et syndicats) mobilisent le « procès » comme forme d’action politique pour contester le récit des injustices de l’apartheid. Ces deux études de cas permettent ainsi de voir comment, même dans des contextes où les identités de « victimes » ont été verrouillées, des leviers juridiques nationaux et internationaux sont saisissables pour déconstruire le récit des injustices de l’apartheid dans l’espace judiciaire.

Petition to become a post-apartheid victim : Using South african and American courts as a space to reconfigure political identities

This paper studies litigation in South African and American Courts against reparation policies concerning apartheid injustices and the ways in which it challenges victims’ identity categories as established during the transition to democracy in the 1990s. Since the 2000s legal professionals and individuals claiming victim status have used judicial arenas to oppose the definition of the apartheid victim status, which has been limited to those who have suffered violence affecting only physical integrity. Based on two different fieldworks concerning litigation in South African courts (Anti-discrimination lawsuits targeting /based on affirmative action instruments) and in American courts (litigation seeking financial compensation from multinational companies accused of having assisted the apartheid regime), this paper analyses the ways in which lawsuits are invested as forms of political action to challenge the narrative of the apartheid injustices. Thus, these cases allow to understand how even in contexts where "victims" identities have been locked in national narratives, litigation remains a weapon.


Yves Mirman (CHERPA/Sciences po Aix-IFPO)
 
“On a plus de chance en justice” : le cas de la cause des disparus au Liban
 
Cette communication se propose de décrire comment des associations de familles de disparus du Liban, de la guerre civile (1975-1990) et des occupations du pays (Israël, 2000, Syrie, 2005), convergent vers plusieurs processus judiciaires. Durant leurs premières mobilisations, ces mêmes groupes n’avaient pas forcément recours à des dispositifs judiciaires nationaux pour traiter de cette question politique sensible héritée de la guerre. La rencontre progressive avec des acteurs internationaux des droits de l’Homme et de la justice transitionnelle après 2005, comme la ré-appropriation d’expériences judiciaires à la marge, réactivent leurs espoirs et leurs intérêts dans les tribunaux.
Face à une panne des réformes judiciaires d’après-guerre et un lexique de l’injustice sur-investie dans l’espace politique libanais, lui-même dominés par d’anciens chefs de guerre amnistiés, le choix de la judiciarisation conforte leur statut de « victimes de la guerre », en potentielle victimes d’(in)justice. Converger « en » justice peut ainsi constituer un instrument de mobilisations, faisant valoir la cause et ses différentes attentes. Cela permet ainsi à ces acteurs de redéfinir pour partie la cause en celle « de la » justice, en fonction de cette arène judiciaire : « victimes de la guerre» en droit, ou « victime de la justice » à défaut d’être « sortie du conflit ».

'We have more chance in court': the cause of the missing in Lebanon as a case study
 
This paper describes how associations gathering families of the missing persons in Lebanon, who disappeared during the civil war (1975-1990) and during occupations of the country (Israel, 2000 and Syria, 2005), converge toward several judicial processes. During their former mobilizations indeed, these groups did not necessarily use the national judicial mechanisms to deal with this sensitive political issue inherited from the war. After 2005, their progressive meetings with international Human Right actors and those of the transitional justice, and the reappropriation of marginal judicial experiences, have reactivated their hopes and interests before the courts.
Facing a breakdown of judicial reforms after the war and an overinvestment of the lexic of “injustice” in Lebanese politics, still dominated by amnestied former warlords, the choice of judicialization reinforces their status as “victims of war” into potential victims of (in)justice. Converging in court can be here an instrument of mobilization, as it asserts the cause and displays their various expectations. These actors could indeed redefine partly the cause as a cause of injustice according to decisions in the judicial arena: “victims of war” by the law, or “victims of justice” failing to “exit the conflict”.

 
Mathilde Allain (Centre Emile Durkheim de l’IEP de Bordeaux /CRAPE de Rennes 1)  

Entre la victime idéale et le refus de la victimisation : deux processus de construction des causes victimaires par les organisations paysannes colombiennes
 
Face à la complexité du conflit colombien, les organisations sociales se préparent à la paix dans un contexte de forte polarisation politique où chaque groupe tente de se définir comme la victime et de définir par là même sa vision du conflit. Comment les organisations locales de base construisent-elles une vision des violences subies, et comment se perçoivent-elles en tant que victimes ? Quelles incidences ces constructions ont-elles sur leur vision du post-conflit au niveau national ? Et comment sensibilisent elles sur leur cause à l’international ? Nous nous sommes penchés sur le rôle de deux organisations paysannes colombiennes dans la construction de la cause victimaire pour comprendre comment la diversité des victimes reflète les différentes perceptions locales du conflit. Ces deux organisations partagent les mêmes visions d’une paix qui ne se résume pas à l’abandon des armes mais utilisent différents cadrages pour positionner leurs revendications : entre le refus de la victimisation et l’usage du statut de victime pour obtenir une réparation. Ainsi, les différentes perceptions qu'ont ces acteurs locaux de la cause victimaire rendent compte de la diversité des cadres d'action collective mobilisés aux différentes échelles de mobilisation : locale, nationale et internationale. En construisant leur cause victimaire, les organisations paysannes cherchent alors à positionner leur vision politique et sociale d'une Colombie post-conflit.

Between the ideal victim and the denial of victimization: two victimary causes construction process by Colombian peasant organization
 
Facing the complexity of Colombian conflict, social organizations prepare themself to peace in a strong political polarization context in which every group intend to define itself as the victim and so to define its vision of the conflict. How local based organizations built a vision of suffered violences, and how do they perceive themself as victims? What impacts these constructions has on their post-conflict vision at the national level? And how do they raise awareness to their cause at the international level? We focused on two peasants organizations role in building victimary causes to understand how the diversity of victims reflects different local perception of conflict. This two organizations share the same vision of a peace that does not restrict to weapons withdrawal but they use different frame to put in place their claims: denial of victimization in one case, and the use of victim status to obtain reparation in an other. In this way, local actors different perceptions on victimary cause reveals the diversity of collective action framing mobilized at different mobilization scale: local, national and international. By building victimary cause, peasant organizations seek to put in place their political and social views of a post-conflict Colombia.

 
Emmanuelle Comtat (Université de Grenoble Alpes)
 
Les disparus civils européens de la guerre d’Algérie. Processus de construction d’une cause victimaire militante
 
Après une longue période d’amnésie collective permettant à la concorde civile de se rétablir, la question coloniale est revenue en force dans le débat public et a été au cœur de vives polémiques. La présente communication vise à étudier comment des collectifs pro-Algérie française interagissent dans l’espace public pour la reconnaissance d’une cause victimaire : celle des disparus civils européens de la guerre d’Algérie. Nous observerons la trajectoire de cette cause depuis la guerre d’Algérie, ce qui permettra de voir comment elle s’est construite, de quelle manière elle a été prise en charge par des collectifs mémoriels et comment les revendications de ces groupes partisans se sont « articulées » avec les demandes de familles de disparus. Nous examinerons comment la reconnaissance de la figure de la victime et sa réappropriation par des groupes mémoriels visent, dans notre cas, à une réhabilitation de l’Algérie française et s’inscrit dans un contexte de guerres de mémoires plutôt que dans un processus de réconciliation. Comment des collectifs pro-Algérie française procèdent-ils pour que leurs revendications à propos des disparus soient mises à l’agenda ? Quels sont les moyens d’actions, les formes de mobilisations et le référentiel utilisés ? Pourquoi décident-ils de recourir au politique plutôt que de faire appel à l’appareil judiciaire ou de rechercher l’appui de l’opinion publique et des médias ? Des comparaisons seront faites avec les cas des disparus de la guerre civile espagnole et du Chili de la dictature de Pinochet.
 
After a long period of collective amnesia and of “silence” following decolonization of Algeria, colonial past is back on French political arena. This contribution proposes to analyze how repatriates activists fight for a memory cause: the recognition of the French civilians reported missing or abducted at the end of the Algerian war. We observe the trajectory of this cause since the end of the Algerian war. Through the topic of the missing people, we examine how the recognition of this cause takes place in a memory war context which aims to rehabilitate French Algeria and the period of colonization. We observe how repatriates associations fight for the registration of this question in the political agenda of the French government and how they mobilize to obtain the support and agreement of certain politicians. We analyze why they would rather solve this issue politically without a legal intervention and without public awareness. Comparisons will be made with the cases of the missing persons of the Spanish civil war and of the Pinochet’s dictature in Chile.
 
David Copello (Sciences Po – Cevipof)
 
Repenser la genèse d’une construction victimaire: à propos de l’opposition “victime innocente” / “victime militante” en Argentine
 
La figure de la « victime innocente », détachée de tout engagement politique, aurait dominé les imaginaires de la post-dictature argentine jusqu’à ce qu’un discours de la « victime militante », où l’appartenance à une génération révolutionnaire n’est plus masquée, ne gagne en prééminence à partir du milieu des années 1990. Cette chronologie, consensuelle, a toutefois contribué à bloquer une historicisation des pratiques et des discours militants des années 1980 sur les violations des droits de l’Homme commises dans la décennie précédente. Dans quelle mesure la construction d’une figure de la « victime militante » est-elle déjà enclenchée en Argentine dès la fin de la dictature et quelles formes prend-t-elle ? On partira d’une cartographie du réseau militant des Madres de Plaza de Mayo, qui dépasse le simple « mouvement pour les droits de l’Homme » dont elles représentent le fer de lance le plus radical, pour montrer que s’y constitue, dès 1984, une nébuleuse politico-intellectuelle, au carrefour des organisations partisanes et des associations de victimes, qui va contribuer à modeler les manières de (se) dire « victime militante ». L’analyse de ces collectifs politiques à travers leurs publications périodiques permettra d’approcher les dispositifs de cadrage symbolique du militantisme pour les droits de l’Homme et les dispositifs de sensibilisation mis en place dans une volonté de confrontation avec une Histoire « officielle », dépolitisée et culpabilisant les victimes.

Rethinking the genesis of a victim construction: on the “innocent victim” / “militant victim” opposition in Argentina
 
The figure of the apolitical « innocent victim » is supposed to dominate the Argentine post-dictatorship imagination until the powerful outbreak of a « militant victim » discourse in the middle of the 1990s. From then on, the revolutionary affiliation of the majority of victims would assume greater value. I claim that this consensual chronology contributed to obstructing the historical study of the 1980s militant practices and discourses on Human rights violations in the 1970s. To which extent had the construction of a “militant victim” discourse already begun by the end of the dictatorship?  How was it shaped? We will start by depicting the militant web of the most radical symbol of the “Human rights movement” in Argentina, the Madres de Plaza de Mayo. As soon as 1984, at the crossroads of political parties and victims associations, a loose politico-intellectual conglomeration emerges within that web: it will quickly contribute to the shaping of the “militant victim” as a discourse on recent socio-historical experience. The analysis of these political groups through their periodical publications will enable us to draw conclusions on the symbolic framing package developed by Human rights militants, as well as the processes of sensitization built up against an “official” History considered as too depoliticized and incriminating for the victims.

 
Milena Jakšić (Institut des sciences sociales du politique / ISP, ENS Cachan)

Le statut pénal des enfants soldats dans le procès de Thomas Lubanga Dyilo
 
A partir d’une réflexion autour de la catégorie « d’enfants soldats », la présente contribution s’attache à mettre au jour la puissance mobilisatrice de la catégorie de victime dans le cadre des procédures judiciaires pour crimes de guerre. Elle s’appuie sur une enquête consacrée au procès de Thomas Lubanga Dyilo, condamné à quatorze ans de prison par la Cour pénale internationale (CPI) pour les faits de recrutement et d’enrôlement d’enfants soldats en République démocratique du Congo. On se propose ici de réfléchir sur ce que fait l’objet « enfant soldats » à la catégorie de « victime » telle qu’elle a jusqu’alors été pensée par la sociologie. Sur le plan méthodologique, cette enquête, qui est à un stade exploratoire pour le moment, s’appuie sur l’analyse d’un ensemble de documents produits par la CPI dans le cadre du procès Lubanga : audience et décision de confirmation des charges, audiences des enfants (victimes-témoins au procès), ainsi que sur l’examen de nombreux rapports produits par la Cour et les experts internationaux.
La catégorie d’enfants soldats pointe en effet vers une contradiction majeure : considérés en premier lieu comme victimes du fait de leur jeune âge, ces enfants sont aussi auteurs de crimes jugés parfois d’une grande cruauté. Comment cette tension que recouvre la catégorie de victime-coupable est-elle aménagée par les entrepreneurs de la cause et les professionnels du droit ? Plus précisément, quel statut la Cour confère-t-elle aux crimes commis par ces enfants ? Comment leur responsabilité dans les actes de violence est-elle qualifiée, discutée et problématisée ?
 
The penal status of child soldiers in Thomas Lubanga Dyilo’s trial
 
Taking the close look at the category of “child soldiers”, the present contribution explores the potential for mobilization held by the category of victim in legal proceedings for war crimes. It is based on the survey dedicated to Thomas Lubanga Dyila’s trial. Lubanga was sentenced to a total period of 14 years of imprisonment by the International Criminal Court (ICC) for the war crimes of “conscripting and enlisting children under the age of fifteen years and using them to participate actively in hostilities”. Here, I try to reflect on what the object “child soldier” is doing to the category of “victim”, understood as moral and legal category. Methodologically, the present survey, which is at an exploratory stage, is based on the analyses of the documents produced by the ICC : hearings and confirmation decisions, hearings of children (witnesses during the trial), and analyses of numerous reports produced by the court and the international experts.
“Child soldiers” is in effect a very controversial category. It encompasses people who, on the one hand, because of their young age, are considered as victims, but who, on the other side, committed terrible crimes. Thus, the questions I try to address are the following ones: how this tension embodied by the category of “child soldiers” is managed by the entrepreneurs of the cause and law professionals? More precisely, what status the Court confers to the crimes committed by those children? And in what terms is their responsibility in those crimes qualified, discussed and problematized?


Participants

AllainMathilde Mathilde.allain27@gmail.com
Comtat Emmanuelle emmanuelle.comtat@wanadoo.fr
Copello David  david.copello@gmail.com
Daviaud Sophie sophie.daviaud@sciencespo-aix.fr
Jaksic Milena milenajaksic@gmail.com
Laplanche-Servigne Soline solinels@hotmail.com
Mirman Yves Yves.mirman@gmail.com
Serrano Juan E.  juan-enrique.serrano-Moreno@malix-univ-paris1.fr
Smaoui Sélim selims86@hotmail.com 
Umubyeyi Liliane umubyeyi.liliane@gmail.com  

 

13ème Congrès de l’AFSP à Aix-en-Provence du 22 au 24 juin 2015 à Sciences Po Aix

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