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Section Thématique 60

Les usages de l’histoire des idées politiques en relations internationales
What the History of Political Thought Can Teach Us About International Relations

Responsables

Benjamin 
BRICE
 (EHESS / Sciences Po Lyon)
 benjamin.brice@gmail.com
Jean‐Vincent 
HOLEINDRE
 (Université 
Paris
 2)
 jvholeindre@gmail.com

Présentation scientifiqueDates des sessions Programme Résumés Participants

 

Présentation scientifique

Les Relations internationales et l’histoire des idées politiques constituent deux champs de la science politique que l’on ne rapproche pas spontanément. L’internationaliste se concentre généralement sur les développements politiques les plus contemporains ; il vise à donner sens à une vie internationale d’une extrême complexité, ce qui lui laisse généralement peu de loisir pour envisager les propositions théoriques dans la longue durée. L’historien des idées, au contraire, analyse en détail le contexte et la portée des représentations et des pratiques du passé, mais il ne cherche que rarement à en questionner la pertinence pour penser la situation internationale contemporaine. C’est pourquoi l’historien britannique David Armitage regrettait il y a dix ans que ces deux mondes ne cherchent pas plus à entrer en communication l’un avec l’autre (Armitage 2004).
Ce constat demande cependant à être nuancé, car il existe de multiples interactions entre les deux champs (Thibault 1998). D’abord, l’histoire des idées politiques n’a jamais été absente de la recherche en Relations internationales. Une bonne partie des internationalistes « classiques » ont cherché à dialoguer, plus ou moins profondément, avec les penseurs politiques du passé (Battistella 2012 : 49-79) : Raymond Aron, par exemple, a commenté des auteurs comme Thucydide, Montesquieu, David Hume ou Auguste Comte sur les problèmes liés à la guerre et aux relations entre acteurs internationaux (Aron 1959 ; Aron 1961 : 111-147 ; Aron 1962). En outre, plusieurs chercheurs en Relations internationales ont également tenté, au cours des quinze dernières années, à mettre en valeur une riche tradition de pensée politique autour des questions internationales (Boucher 1998 ; Pangle and Ahrensdorf 1999 ; Brown, Nardin and Rengger 2002 ; Ramel 2002 ; Ramel 2006 ; Lebow 2008).
Ensuite, de manière symétrique, on aperçoit un regain d’intérêt pour les relations internationales de la part des historiens des idées politiques, notamment chez ceux qui s’inscrivent en histoire intellectuelle dans le sillage de l’École de Cambridge (Tuck 1999 ; Hont 2005 ; Bell 2008 ; Armitage 2013). Se créent ainsi des passerelles entre l’étude de la pensée politique d’auteurs considérés comme « classiques » et des préoccupations internationales plus contemporaines ; c’est notamment ce qu’indique un numéro récent de la Revue Montesquieu, intitulé « Montesquieu et l’empire », dont la toile de fond est un questionnement sur la diffusion du régime libéral et l’intervention américaine en Irak (Spector 2008).
Enfin, le contexte international joue largement en faveur de tels rapprochement. Après la domination du réalisme (et du néoréalisme) pendant la guerre froide, après le regain libéral (ou néolibéral) au moment de la disparition de l’URSS, la vie internationale semble désormais marquée par une grande incertitude favorable à de nouveaux questionnements (Ramel 2012 : 28-33). Un certain impérialisme libéral américain (Hoffmann 2006 ; Doyle 2008), la menace de nouvelles guerres (Battistella 2006 ; Holeindre et Ramel, 2010), le retour sur le devant de la scène des affects symboliques (Lindemann et Saada 2012) et des passions belliqueuses (Hassner 2005), le déclin de la domination occidentale (Badie 2011), l’ambiguïté des processus de mondialisation (Sassen 2009), etc. En un mot, les bouleversements des deux dernières décennies sont l’occasion d’un élargissement des problématiques traditionnelles en Relations internationales, ce qui explique en partie l’usage de penseurs contemporains appartenant à d’autres champs disciplinaires comme Schmitt, Rawls, Habermas dans le domaine de la théorie philosophique, ou Elias et Bourdieu en théorie sociale (Devin 1995 ; Doyle 2006 ; Mérand et Pouliot 2008 ; Ramel 2012).
Il existe donc de multiples connexions entre Relations internationales et histoire des idées politiques. Cependant, ces connexions ne sont pas toujours explicitées et sont rarement étudiées en tant que telles. Cette section thématique vise à combler ce manque par une interrogation sur les différents usages de l’histoire des idées politiques en Relations internationales.

1) La possibilité d’un décentrement dans l’étude des phénomènes internationaux
Le recours à l’histoire des idées politiques peut avoir des effets heuristiques féconds et permettre d’ouvrir de nouvelles pistes de recherche en relations internationales. Ainsi, c’est grâce à une certaine interprétation de Kant que le programme scientifique autour de la notion de « paix libérale » ou « paix démocratique » a pu voir le jour (Doyle 1986 ; Oneal and Russett 1999), et le développement d’une problématique de recherche liée à la question de la reconnaissance doit beaucoup à la lecture de Hegel (Lindemann 2010 ; Honneth 2012). Contre les routines institutionnelles, l’usage de l’histoire des idées politiques offre peut-être un certain décentrement théorique et une sorte de « dépaysement » historique (Braudel 1969 : 59) qui permettent de dépasser les frontières traditionnelles, et donc de porter un nouveau regard sur les objets des Relations internationales.

2) L’approfondissement des questionnements et des paradigmes interprétatifs
Contre les généalogies « mythiques » légitimant différents paradigmes par l’évocation d’une lignée de « grands » penseurs, une réflexion sur la pensée internationale des auteurs mobilisés pourrait rendre leur souplesse aux différentes positions, mettre en valeur leurs subtilités et leurs ambiguïtés, et enfin déconstruire la « naturalité » conférée de manière routinière aux diverses traditions (Schmidt 1994 : 351-353 ; Bell 2001 ; Lebow 2008 : 2-3). En outre, ces études permettraient sans doute de ne pas se contenter des lieux communs habituels réduisant Machiavel au machiavélisme, Hobbes à la guerre de tous contre tous, Montesquieu au doux commerce ou Kant à la paix perpétuelle ; l’histoire des idées politiques donne l’opportunité d’approfondir les questionnements, et peut-être de proposer des analyses plus nuancées de la situation contemporaine.

3) L’apport réflexif de l’histoire des idées politiques
Puisque le regard du chercheur en Relations internationales ne se pose jamais directement sur la « réalité » empirique, puisqu’il passe toujours par la médiation d’idées et de théories, il semble fécond de pouvoir connaître et juger ces dernières (Wendt 1999 : 370-376). Les internationalistes pourraient donc faire un usage réflexif de ce type d’analyses afin d’envisager les présupposées sur lesquels se fondent les différentes postures de recherche. En définitive, le travail de contextualisation, si important dans le champ de l’histoire des idées, donnerait peut-être la possibilité à l’enquêteur de prendre lui-même du recul sur son propre contexte intellectuel, historique et politique (Liliti 2012 : 80-82). L’histoire contextuelle, telle qu’elle a été développée par l’école de Cambridge (Skinner 2002), ou l’histoire sociale des idées politiques, telle qu’elle se développe récemment en France (Van Damme 2013), peuvent contribuer à cet objectif, en incitant à une meilleure historicisation des concepts couramment traités par les internationalistes (État, puissance, intérêt national, normes, etc.).

4) Les conditions de possibilité du dialogue et l’apprentissage de nouvelles méthodes
Comme en Relations internationales, il existe une grande diversité d’approches et de paradigmes en histoire des idées politiques (cette dénomination même fait l’objet de contestations (Matonti, 2012)) ; la question des méthodes est donc plurielle. Il reste que l’étude de textes nécessite des savoir-faire et des aptitudes que l’internationaliste n’a pas toujours l’habitude de développer : attention à l’établissement des textes, connaissance des langues, contextualisation des différents énoncés, étude des conditions historiques et sociales de production et de réception des textes, reconstitution de la cohérence d’un ensemble de propositions théoriques, etc. Sans une réflexion sur les attendus de ces nouvelles approches, peut-être l’internationaliste risquerait-il toujours de demeurer dans un rapport trop superficiel aux textes, et finalement de commettre des erreurs d’interprétation (anachronisme, contresens, naturalisation, faux sentiment de familiarité, etc.).


International Relations (IR) and History of Political Thought are two fields of political science which may seem to have little to do with one another. IR scholars focus mainly on contemporary events and try to make sense of the extreme complexity of international politics; hence they often have very little time left to think about theoretical propositions in the long term. On the other hand, scholars in History of Political Thought analyze in detail the context and the scope of past ideas and practices, but they seldom try to determine their relevance for understanding the contemporary international situation. For this reason the British historian David Armitage deplored, ten years ago, the lack of communication between the two fields (Armitage 2004).
Armitage’s protest needs to be qualified, because there are in fact several points of contact between IR and History of Political Thought (Thibault 1998). First, History of Political Thought has never been totally absent from IR scholarship. A fair number of “classical” IR scholars have tried to engage in dialog, more or less profoundly, with past thinkers (Battistella 2012: 49-79): Raymond Aron, for instance, commented at length on what classic authors such as Thucydides, Montesquieu, David Hume and Auguste Comte had to say about questions of war and international diplomacy (Aron 1959; Aron 1961: 111-147; Aron 1962). Moreover, several IR scholars have tried, during the past fifteen years, to emphasize the richness of the tradition in international political thought (Boucher 1998; Pangle and Ahrensdorf 1999; Brown, Nardin and Rengger 2002; Ramel 2002; Ramel 2006; Lebow 2008)
Second, in a symmetrical fashion, one notices a new interest for international relations among History of Political Thought scholars, especially those influenced by the Cambridge School of intellectual history (Tuck 1999; Hont 2005; Bell 2008; Armitage 2013). These authors try to link the study of “classical” authors’ political thought with contemporary international concerns. A good example of this is a recent issue of the Revue Montesquieu entitled “Montesquieu et l’empire”, which tried to use Montesquieu’s thought to understand liberal expansionism and the American intervention in Iraq (Spector 2008).
Finally, the current state of international politics has lent itself to this sort of interdisciplinary study. If, for evident political reasons, the academic study of international relations was dominated by realism (and neorealism) during the Cold War, and by the rebirth of liberalism (and neoliberalism) from the 1980s onward, the disorder of contemporary international politics has unsettled IR and opened the basic assumptions of the discipline to questioning (Ramel 2012: 28-33). It has proven difficult to address the grave and varied problems of the contemporary world – the rise of a new kind of liberal imperialism in the United States (Hoffmann 2006; Doyle 2008); the threat of new kinds of wars (Battistella 2006; Holeindre et Ramel, 2010); the recurrence of emotions (Lindemann et Saada 2012) and warlike passions (Hassner 2005); the decline of Western hegemony (Badie 2011); the ambiguities of the processes of globalization (Sassen 2009) – with the intellectual tools of traditional IR. The upheavals of the past few decades have forced IR to focus on fundamental issues. That is why so many thinkers from outside the field of IR have become central to the contemporary scholarship, from political philosophers such as Schmitt, Rawls and Habermas, to social theorists like Elias and Bourdieu (Devin 1995; Doyle 2006; Mérand et Pouliot 2008; Ramel 2012).
So, various connections exist between IR and History of Political Thought. However, these connections are seldom studied or even made explicit. Our thematic section, which will be explicitly devoted to the different ways in which IR scholars make use of History of Political Thought, aims to fill this gap.

Bibliographie

Armitage David, « The Fifty Years’ Rift: Intellectual History and International Relations », Modern Intellectual History, no. 1, 2004, p. 97-109.
Armitage David, Foundations of Modern International Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 2013.
Aron Raymond, La société industrielle et la guerre, Paris, Plon, 1959.
Aron Raymond, Dimensions de la conscience historique, Paris, Plon, 1961.
Aron Raymond, Paix et guerre entre les nations (1962), Paris, Calmann-Lévy, 2004.
Badie Bertrand, La diplomatie de connivence : Les dérives oligarchiques du système international, Paris, La Découverte, 2011.
Battistella Dario, Retour de l’état de guerre, Paris, Armand Colin, 2006.
Battistella Dario, Théorie des relations internationales, 4ème édition mise à jour et augmentée, Paris, Presses de Sciences Po, 2012.
Bell Duncan, « International relations: the dawn of a historiographical turn? », British Journal of Politics and International Relations, vol. 3, no. 1, April 2001, p. 115-26.
Bell Duncan (ed.), Political Thought and International Relations: Variations on a Realist Theme, Oxford, Oxford University Press, 2008.
Boucher David, Political Theories of International Relations: From Thucydides to the Present, Oxford, Oxford University Press, 1998.
Braudel Fernand, Écrits sur l’histoire, Paris, Flammarion, 1966.
Brown Chris, Terry Nardin and Nicholas Rengger (eds.), International Relations in Political Thought: Texts from the Ancient Greeks to the First World War, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
Devin Guillaume, « Norbert Elias et l’analyse des relations internationales », Revue française de science politique, vol. 45, no. 2, 1995, p. 305-327.
Doyle Michael W., « Liberalism and World Politics », The American Political Science Review, vol. 80, no. 4, Dec. 1986, p. 1151-69.
Doyle Michael W., « One World, Many Peoples: International Justice in John Rawls’s the Law of Peoples », Perspectives on Politics, vol. 4, no. 1, March 2006, p. 109-120.
Doyle Michael W., Striking First: Preemption and Prevention in International Conflict, ed. Stephen Macedo, Princeton (NJ), Princeton University Press, 2008.
Hassner Pierre, « La revanche des passions », Commentaire, vol. 28, no. 110, été 2005, p. 299-312.
Hoffmann Stanley, Chaos and Violence: What Globalization, Failed States, and Terrorism Mean for U.S. Foreign Policy, Lanham (MD), Rowman & Littlefield Publishers, 2006.
Honneth Axel, « La reconnaissance entre États : L’arrière-plan moral des relations interétatiques », tr. fr., Cultures & Conflits, no. 87, automne 2012, p. 27-36.
Hont István, Jealousy of Trade: International Competition and the Nation-State in Historical Perspective, Cambridge (MA), Harvard University Press, 2005.
Lebow Richard, A Cultural Theory of International Relations, Cambridge, Cambridge University Press, 2008.
Lilti Antoine, « Rabelais est-il notre contemporain ? Histoire intellectuelle et herméneutique critique », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2012, no. 59, p. 65-84.
Lindemann Thomas, Sauver la face, sauver la paix, Sociologie constructiviste des crises internationales, Paris, L’Harmattan, 2010.
Lindemann Thomas et Julie Saada, « Théorie de la reconnaissance dans les relations internationales : Enjeux symboliques et limites du paradigme de l’intérêt », Cultures & Conflits, no. 87, automne 2012, p. 7-25.
Matonti Frédérique, « Plaidoyer pour une histoire sociale des idées politiques », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2012/5, no59, p. 85-104.
Mérand Frédéric et Vincent Pouliot, « Le monde de Pierre Bourdieu : Éléments pour une théorie sociale des Relations internationales », Canadian Journal of Political Science / Revue canadienne de science politique, vol. 41, no. 3, septembre 2008, p. 603-25.
Oneal John R. and Bruce M. Russett, « The Kantian Peace: The Pacific Benefits of Democracy, Interdependence, and International Organizations, 1885-1992 », World Politics, Vol. 52, No. 1, 1999, p. 1-37.
Pangle Thomas and Peter Ahrensdorf, Justice Among Nations: On the Moral Basis of Power and Peace, Lawrence, University Press of Kansas, 1999.
Ramel Frédéric (avec Cumin David), Philosophie des relations internationales, Paris, Presses de Sciences Po, 2002.
Ramel Frédéric, Les Fondateurs oubliés : Durkheim, Simmel, Weber, Mauss et les relations internationales, Paris, PUF, 2006.
Ramel Frédéric, L’attraction mondiale, Paris, Presses de Sciences Po, 2012.
Ramel Frédéric et Jean-Vincent Holeindre (dir.), La fin des guerres majeures ?, Paris, Economica, 2010.
Sassen Saskia, La globalisation : Une sociologie, trad. Pierre Guglielmina, Paris, Gallimard, 2009.
Schmidt Brian C., « The Historiography of Academic International Relations », Review of International Studies, vol. 20, no. 4, Oct. 1994, p. 349-67.
Skinner Quentin, Visions of politics. Vol 1. Regarding Methods, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
Spector Céline, « Montesquieu et l’empire », Revue Montesquieu, no. 8, 2005-2006, p. 5-15.
Thibault Jean-François, « Histoires de la pensée et relations internationales », Études internationales, vol. 29, no. 4, décembre 1998, p. 965-983.
Tuck Richard, The Rights of War and Peace: Political Thoughts and the International Order from Grotius to Kant, Oxford, Oxford University Press, 1999.
Van Damme, Stéphane, A toutes voiles vers la vérité. Une autre histoire de la philosophie à l’époque des Lumières, Paris, Seuil, 2013.
Wendt Alexander, Social theory of International Politics, Cambridge, Cambridge University, Press, 1999.


Sessions

Les travaux de la Section Thématique se dérouleront sur les sessions suivantes :
Session 1 : lundi 22 juin 9h00 – 12h00
Session 2 : lundi 22 juin 14h45 – 17h45

Lieu : voir le planning des sessions


Programme

Axe 1 / What classical writers can teach us? [Session en anglais.]

Discutant : Duncan Bell (Cambridge University)

Axe 2 / Les usages des notions de l’histoire des idées [Session en français.]

Discutants : Philippe Raynaud (Paris 2) et Thomas Lindemann (Université Versailles Saint-Quentin)


Résumés des contributions

Caroline Tixier (Université Panthéon-Assas)  
 
La doctrine solidariste : transposition du cosmopolitisme stoïcien au projet mutualiste international
 
Equilibre politique circonstanciel entre résistances au libéralisme et revendications collectivistes, la doctrine solidariste de Léon Bourgeois est érigée par Ferdinand Buisson, dès 1901, comme « l’esprit ultime du parti radical et radical-socialiste ». Dans le cadre d’une acception spécifique de la République, Léon Bourgeois a le projet de promouvoir un idéal de solidarité qui a vocation à s’appliquer, non pas seulement à l’échelon national, mais également aux relations internationales. Cette communication entend analyser, par une analogie avec le cosmopolitisme stoïcien, les différentes phases d’élaboration et d’institutionnalisation du principe d’une solidarité mutuelle internationale. La doctrine solidariste, initialement expérimentée sur le plan national,  préfigure les approches fédéralistes et fonctionnalistes. En s’inspirant du modèle stoïcien des cercles concentriques, Léon Bourgeois et d’autres radicaux-socialistes amplifient leur démarche solidariste afin qu’elle puisse devenir une nouvelle théorie des obligations et des sanctions pré-consenties entre les différents Etat-nations. En tant qu’éthique à la fois individuelle et universelle, le cosmopolitisme stoïcien considère l’intérêt général comme fondamentalement déterminé par le primat de la revendication individuelle. Aussi, par un décalque des grandes notions propres au cosmopolitisme stoïcien, la doctrine solidariste s’efforce d’être l’expression, tout d’abord nationale puis internationale, d’un modèle assurantiel. Le solidarisme, en refusant toute substantialisation de l’Etat, demeure une contribution décisive au mutualisme international. En transposant le cosmopolitisme stoïcien, le mutualisme international inaugure la mise en œuvre d’une conception de droit naturel dans l’éthique des relations interétatiques. Ces dernières promeuvent et garantissent ainsi une continuation des relations individuelles par d’autres moyens.
 
The solidarist doctrine : a transposition of the stoic cosmopolitism to an international mutualist project.
 
Political and circumstancial balance between resistances against liberalism and collectivist demands, Léon Bourgeois’ solidarist doctrine was proclaimed by Ferdinand Buisson in 1901, as the “genuine mind of the radical and radical-socialist party”. From a specific meaning of the Republic, Léon Bourgeois aims at promoting an ideal of solidarity that is supposed not just to govern the national scale, but the international relations as well.
The purpose of this presentation is to analyse the different steps of the making and the institutionalization of the principle of a mutual and international solidarity, through an analogy with stoic cosmopolitism. First experimented on the national level, the solidarist doctrine prefigures the federalist and functionalist approaches. Inspired by the stoic model of concentric circles, Léon Bourgeois and other members of the radical-socialist party increase their promotion of the solidarist doctrine. They do so in order to inaugurate this doctrine as a new theory of pre-agreed obligations and sanctions between different nation states. Both as individual and universal ethics, stoic cosmopolitism believes that the general interest is fundamentally determined by the primacy of individual inclinations. More precisely, the solidarist doctrine endeavours to formulate an insurance-related model that has to be first applied on the national level, then on the international one. To this end, the solidarist doctrine transfers the main concepts of stoic cosmopolitism. Expressing a refusal of the substantialization of the state, solidarism remains a decisive contribution of the idea of international mutualism. As a result of this transposition of stoic cosmopolitism, international mutualism achieves a conception of natural law applied to relations between national states. These international relations promote and ensure the furtherance of individual relations by other means.

 
Evgeny Roshchin (University of Jyväskylä), Félix Blanc (Université de Nice-Sophia-Antipolis / EHESS-CESPRA)

Conceptualiser l'auto-organisation collective en Relations internationales (RI)
 
Dans cette communication, nous proposons une nouvelle manière d'analyser l'histoire de la diplomatie et des organisations internationales en étudiant le langage et les concepts mobilisés lors de la négociation des traités de paix impliquant la création d'organisations internationales – entendues comme systèmes de régulation collective des conflits. Pour ce faire, nous examinons en détails plusieurs concepts qui ont structuré notre manière de penser l'histoire des relations internationales. En s'appuyant sur des entreprises similaires dans la discipline des relations internationales, notre projet vise à retracer sur la longue durée la formation des organisations internationales instituées au vingtième-siècle en montrant la spécificité que représente leur solution au problème général de la régulation des conflits. Nous procéderons en deux temps : d'abord, présenter un aperçu général des innovations conceptuelles qui eurent lieu au moment des conférences de paix qui précédèrent la Conférence de Paris en 1919, en particulier celles d'Osnabrück et de Münster (1648), Paris (1763) et Vienne (1815). Ensuite, nous analyserons brièvement les changements qui émaillèrent les conférences de la Hague et de Paris au début du XXe siècle. Plus spécifiquement, nous porterons notre attention aux changements que connurent les concepts de « concert » ou de « balance » des puissances, d' « amitié », de « société » ou de « communauté » dans la mesure où ils ont participé à la constitution d'un ordre international traversé par des formes institutionnalisées d'auto-organisation collective.
 
Concepts of collective self-identification in International Relations (IR)
 
In our joint paper we suggest a novel way of analyzing the history of diplomacy and international organization by shifting the focus to language and concepts which framed attempts to conceive of international order and create collective regulatory actor systems. We examine several concepts that inform our reading of the history of international relations. By drawing on research of other conceptual historians in IR, our project will look at the establishment of international organization as the twentieth century solution to the problem of war from the perspective of its alternative conceptions. Thus, our paper will have two main part: firstly, it will present a general overview of the conceptual innovations that occurred in the wake of several major peace conferences prior to the Paris Peace conference (1919), particularly conferences held at Osnabrück and Münster (1648), Paris (1763), and Vienna (1815). Secondly, we shall briefly survey the changes brought about by the Hague conferences and the Paris Peace conference. More specifically, the paper shall look at the changes in the use of the terms “concert”, “balance of power”, “friendship”, “society” and “community” as reflecting and framing the international turn towards greater institutionalized formes of collective self-identification.

 
Emmanuel Vianes (Institut des Hautes Etudes Internationales et de Développement, Genève)
 
La pensée voltairienne des relations internationales : un réalisme pragmatique nuancé par l’influence philosophique anglaise.
 
Au sein de la philosophie des relations internationales, l’étude de la pensée voltairienne est relativement rare, dans la mesure où son essence est éparse, puisque son contenu est diffusé par bribes au sein de l’ensemble des écrits de François-Marie Arouet. Cependant, cela n’empêche nullement Voltaire de chercher à comprendre le monde tel qu’il est, et non pas tel qu’il devrait être, surtout en ce qui concerne la manière de penser les relations entre les unités politiques. Afin de montrer les failles de l’humanité à l’échelle internationale, où la naissance de l’étude des relations internationales modernes (au sens de relations étatiques) est liée à la modernité politique faisant suite à l’époque médiévale caractérisée par la fin des guerres privées et l’affirmation de la souveraineté étatique, la pensée voltairienne est orientée par un fort pragmatisme proche de la tradition réaliste des relations internationales (différenciation des sphères interne et externe, place de l’histoire diplomatique, notion d’équilibre des puissances ou critique de l’idée d’une paix perpétuelle). Nonobstant cette orientation majeure, Voltaire nuance cette perspective en raison de l’influence de philosophes britanniques ; c’est ce qui transparaît au regard d’une réflexion sur la société européenne d’Etats ou encore sur la tolérance conjuguée à son combat contre le fanatisme.
 
The Voltaire’s Thought of International Relations: a Pragmatic Realism Tempered by the English Philosophical Influence
 
In the philosophy of international relations, the study of Voltaire thought is relatively rare, insofar as its essence is scattered/disparate, since its content is spread through snippets in all François-Marie Arouet’s writings. However, this does not prevent Voltaire to try to understand the world as it is and not as it would be, especially with regard to the way of thinking the relation between political units. In order to show the weaknesses of humanity at the international level, where the birth of the modern study of international relations (in the State relations sense) is related to political modernity following the medieval era characterized by the end of private wars and the assertion of State sovereignty, Voltairian thought is guided by a strong pragmatism close to the realist tradition of international relations (differentiation of internal and external spheres, impact of diplomatic history, concept of balance of powers or criticism of the perpetual peace idea). Notwithstanding this major orientation, Voltaire nuances this perspective considering the British philosophers’ influence, this is what is shown through with regard to a reflection on the origin of the European society of States or the notion of tolerance combined with his fight against fanaticism.


Elie Baranets (Université de Bordeaux)
 
Le label « grand penseur ». Le marketing de la recherche en Relations internationales
 
Les grands penseurs sont visibles au sein de la discipline des Relations internationales. Mais cela ne traduit pas pour autant l’existence d’une grande considération à l’égard de l’histoire des idées politiques. Par cette contribution, nous tenterons de montrer que c’est moins la pensée produite par ces auteurs classiques qui est utilisée qu’un label. La pratique qui consiste à isoler certains éléments de leur œuvre, et à la mettre en avant, est courante. Intellectuellement, l’intérêt de se référer de la sorte à ces auteurs est limité, tant ce n’est pas par ces traits qu’ils sont remarquables. La logique inhérente à l’utilisation de ces auteurs classiques, dénuée de toute contextualisation, relève en fait du marketing. Il ne s’agit pas simplement de « name-dropping », et les effets de cette pratique sont loin d’être anodins. Le nom de ces grands auteurs est devenu étroitement associé à la description réductrice qui a été faite de leur œuvre. C’est ainsi que, par exemple, l’adjectif « hobbesien » renvoie mécaniquement à l’état de guerre, ou encore que celui de « kantien » évoque celui de relations amicales. Désormais, ces termes font partie des codes de la discipline, et, en tant que tels, ne peuvent être ignorés.
 
Labeled « Great Thinker »: The Marketing of IR
 
Great thinkers are visible in the discipline of International Relations. But this does not mean that history of political thought is taken seriously. I argue that the label associated with the name of classical thinkers is more useful than the thought they produced. It has become a common practice to isolate and highlight only a few elements of their work. Intellectually speaking, using these authors this way is of limited value, since these attributes are not the reason why these authors have become distinguished ones. The underlying logic of such a practice, devoid of any contextualization, is a marketing one. It is more than mere “name-dropping”, and the effects of this practice are not at all insignificant. These great authors’ names have become closely associated with the simplistic description that has been made of their work. For example, this is how the adjective “Hobbesian” automatically refers to the state of war, or the adjective “Kantian” evokes friendly relations. These terms are now an integral part of the codes of the discipline and, as such, cannot be ignored.

 
David Cumin (Université Lyon 3) et Thomas Meszaros (Université Lyon 3)
 
L’histoire des idées politiques et la question de la paix et de la guerre

La présente proposition s’inscrit dans la continuité de l'essor de l'histoire des idées politiques dans la discipline Relations internationales (RI). Elle entend apporter un regard spécifique sur deux objets fondamentaux des relations internationales: la paix et la guerre. La réflexion générale sur la paix et la guerre aborde principalement ces objets au travers de quatre axes : la distinction guerre/violence (1), l’ambivalence de l’Etat vis-à-vis de la violence (2), trois alternatives : guerre ou paix, guerre juste ou injuste, guerre limitée ou totale (3) et sur l’explication de la guerre (4). Notre contribution entend approfondir les quatre points évoqués au travers de l’histoire des idées politiques. Comment l’histoire des idées politiques aborde-t-elle la question de la paix et de la guerre ? Quelle place occupe la paix et la guerre dans l’histoire des idées politiques ? Notre interrogation, qui porte finalement sur les apports de l’histoire des idées politiques pour penser la paix et la guerre, s’inscrit dans une logique transversale, de décentrement théorique et historique des phénomènes guerriers, d’approfondissement et de recontextualisation de ces notions. Elle se fixe pour objectif de favoriser le développement d’une réflexion renouvelée sur la paix et la guerre, à partir de la perspective de l’histoire des idées politiques internationales, qui viendrait enrichir la recherche aussi bien en Relations internationales qu’en polémologie.
 
History of Political Ideas and the Peace and War issue
 
This proposal fits in with the development of history of political ideas in International Relations discipline (IR). Its purpose is to provide a specific look at two fundamental objects of international relations: peace and war. Mainstream research on peace and war discusses mainly these objects through four approaches: the distinction between war / violence (1), the ambivalence vis-à-vis state violence (2), three alternatives: war or peace, just or unjust war limited or total war (3) and the explanation of war (4). Our contribution intends to explore more deeply these four points mentioned through history of political ideas. How history of political ideas tackles the peace and war issue? What is the situation of peace and war in history of political ideas? Our interrogation, which finally focuses on history of political ideas contributions to consider peace and war, concerns a transversal logic, a de-centered theoretical and historical perspective of war phenomenon, a deepening and re-contextualization of these concepts. Its goal is to promote, from the history of international political ideas perspective, the development of a renewed reflection on peace and war that would enrich the research in International Relations as well as in War Studies.
 

Thomas Lindemann (Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines)
 
Des anarchies pacifiques et des ordres belliqueux. Relire Weber pour comprendre les violences internationales
 
La conceptualisation de la violence internationale repose souvent dans la littérature scientifique sur le contraste entre un ordre interne pacifié et une anarchie où la guerre est virtuellement possible. En nous appuyant sur Weber, nous mettons en question cette dichotomie en montrant un lien entre pouvoirs centralisés et violence (« violence légitime ») et anarchie (absence d'arbitre suprême) et pacification.  Deux études de cas illustreront notre propos: l’anarchie pacifique à certaines époques du Moyen-Âge et l’ordre violent de l’Empire romain. Nous démontrerons d'abord comment la violence a pu être canalisée durant certaines périodes du Moyen Age par une régulation sociale reposant sur la sacralisation des « personnes » malgré l'absence d'une autorité suprême. Nous discuterons ensuite deux types de domination dans l'Empire romain et leurs liens avec la violence: la domination charismatique et la domination légale-rationnelle. La première comporte le risque d’une banalisation surtout si elle est fondée sur le récit du « héros-protecteur ». Ceux qui revendiquent ce type de domination risquent de ne pas être reconnus par d’autres ou d’être confrontés à la routinisation. En revanche, le type de domination légale-rationnelle peut sous certaines formes provoquer une réification des « autres »” par exemple via la catégorisation dépréciative voire l'élimination des groupes sociaux.
 
Peaceful anarchies, war-prone orders. Rethinking IR with Max Weber
 
IR scholars often oppose domestic pacified orders to the anarchy of a violent international system where war is always possible. Borrowing on Webers' work on legtimacy, I will question this dichotomy in establishing possible links between centralized powers and violence (“legitimate violence”) and anarchy and peace based on shared legitimacy principles. Two case studies will illustrate my proposal: the pacific anarchy during some periodes of the Middle Age and the regular use of violence for the considation of the the Roman Empire order.

 
Inanna Hamati-Ataya (Aberystwyth University)  


De l’histoire des idées à la sociologie de la connaissance: Pour une histoire socio-culturelle de la pensée internationaliste

Cette contribution propose de s’interroger sur le type d’histoire des idées qu’une posture proprement “réflexive” requiert en Relations Internationales (RI), et vise à reconstituer le lien entre d’une part la sociologie de la connaissance dans ses variantes allemande et française, et d’autre part la notion de “crise” qui semble envahir la réflexion sur la politique internationale dans ses aspects économiques, sociaux, politiques et culturels. Notre point de départ est le principe qu’une pensée en crise ne peut penser un monde en crise, à moins de se donner les moyens de se repenser elle-même comme objet ordinaire mais actif de ce monde. Dans un premier temps, nous dresserons une esquisse socio-épistemologique et socio-ontologique de la “réflexivité” pour montrer qu’une histoire socio-culturelle des idées est une composante nécessaire pour préserver la cohérence et la valeur des RI, surtout après l’effondrement du paradigme positiviste-objectiviste, mais aussi pour établir les paramètres d’utilité et de responsabilité sociales de la discipline et de ses membres. Dans un second temps, nous appliquerons l’histoire socio-culturelle des idées à la conscience réflexive elle-même, pour (dé)montrer le lien entre réflexivité et crise historique. Pour ce faire, nous porterons notre attention sur le développement des premières réflexions associées explicitement au projet d’une “sociologie de la connaissance” (en France) et d’une “Wissenssoziologie” (en Allemagne) en plaçant ce développement dans le cours de l’histoire sociale des sociétés dans lesquelles cette pensée réflexive a vu le jour. Cela nous permettra de poser, dans un troisième temps, la nécessité pour les RI de développer leur propre sociologie de la connaissance internationaliste. Ce projet vise, d’une part, à faire la synthèse des critiques multiples (féministes, post-structuralistes, marxistes, postcoloniales, constructivistes) qui ont réussi à historiser et politiser la pensée internationaliste en montrant ses origines sociales, culturelles et politiques, et surtout ce qu’elle doit aux structures globales d’oppression et de domination; d’autre part, de définir un programme de recherche qui puisse pousser cette synthèse au-delà de ces critiques partielles, pour produire une comprehension plus systématique des processus qui sous-tendent la production et la diffusion de la pensée internationaliste.

From the history of ideas to the sociology of knowledge: For a socio-cultural history of international thought

This contribution delineates the kind of history of ideas that a properly “reflexive” posture requires in International Relations, and aims to reconstitute the link between the sociology of knowledge in its German and French variants, and the notion of “crisis” that seems to have invaded international thought in its economic, social, political, and cultural dimensions. The starting-point of the paper is the principle that a thought in crisis cannot think a world in crisis, unless it is capable of rethinking itself as an ordinary, but active, object that world. I first draw a socio-epistemological and socio-ontological sketch of “reflexivity” in order to show that a socio-cultural history of ideas is necessary to preserve the coherence and value of International Relations as a discipline after the collapse of the positivist-objectivist paradigm, but also to establish the discipline’s parameters for social utility and social responsibility. I then apply a socio-cultural history of ideas to reflexive consciousness itself, in order to demonstrate the link between reflexivity and historical crisis. To do so, I focus especially on the development of the earliest reflections that were explicitly associated with the project of a sociologie de la connaissance (in France) and a Wissenssoziologie (in Germany), by locating this development in the course of the social history of the societies wherein this reflexive thought emerged. I finally argue that it is necessary for IR to develop its own sociology of international knowledge. This project would aim, on the one hand, to draw a synthesis of the diverse critiques (feminist, post-structuralist, Marxist, postcolonial, constructivist) that have succeeded in historicising and politicising international thought by showing its social, cultural, and political origins as well as what it owes to the global structures of oppression and domination; on the other hand, to define a research programme that could push this synthesis beyond these partial critiques, in order to produce a more systematic understanding of the processes that underscore the production and diffusion of international thought.

 
Joëlle Hecker (CERI-SciencesPo)
 

La transposition du concept de reconnaissance aux RI. L'exemple des réparations allemandes à Israël et à la Claims Conference

Le concept de reconnaissance, remis au goût du jour par Axel Honneth (1992), intéresse depuis quelques années les spécialistes de l'international (Lindemann et Ringmar, 2012). Certes, la transposition d'un concept éthique aux RI pose de nombreux problèmes, notamment méthodologiques. Mais ce procédé permet d'approfondir notre compréhension de certains phénomènes internationaux. Je m'appuierai pour le prouver sur un cas empirique, celui des réparations allemandes à Israël et à la Claims Conference, entre 1950 et 1990. À l'aide de cet exemple, je m'efforcerai d'abord de cerner dans quelle mesure le concept de reconnaissance peut être appliqué à des relations bilatérales, avant de souligner l'apport spécifique de cette lecture. Ainsi, si le déni de reconnaissance peuvent déclencher une guerre, comme l'a bien montré Lindemann (2010), les réponses apportées aux attentes de reconnaissance peuvent quant à elles contribuer à résoudre un conflit et mener à la paix. Finalement, le concept de reconnaissance est une grille de lecture qui permet de décrire un grand nombre de relations entre collectifs, en éclairant les dynamiques tantôt négatives, tantôt positives qui s'enclenchent après une injustice.

Applying the concept of recognition to IR.- The example of the German reparations to Israel and to the Claims Conference
 
The concept of recognition, reactualized by Axel Honneth (1992), has recently raised the interest of IR specialists (Lindemann & Ringmar, 2012). Of course, applying an ethical concept to IR poses numerous problems, for instance methodological ones. However, doing it also enables us to deepen our understanding of international phenomena. To illustrate this, I will draw on the case study of the German reparations to Israel and to the Claims Conference between 1950 and 1990. With the help of this example, I will first explain to what extent at all the concept of recognition can be applied to bilateral relations, and then will extrapolate how IR may benefit from this approach. Since, if a denial of recognition can lead to war, as Lindemann (2010) showed, affirmative answers given to recognition claims can on the contrary contribute to resolve conflicts and lead to peace. Eventually, the concept of recognition is a framework which helps us to understand a great number of relations between collectives, insofar as it may explain the negative and also the positive dynamics that are liable to occur in the aftermath of injustices.


Participants

Baranets Elie elie.baranets@gmail.com
Bell Duncan dsab2@cam.ac.uk
Blanc Félix fb.blanc@gmail.com
Brice Benjamin
 benjamin.brice@gmail.com 


Cumin David david.cumin@univ-lyon3.fr
Hamati-Ataya Inanna inh3@aber.ac.uk
Hecker Joëlle joelle.hecker@web.de
Holeindre Jean‐Vincent jvholeindre@gmail.com
Lindemann Thomas lindemannt21@gmail.com
Meszaros Thomas thomas.meszaros@univ-lyon3.fr
Roshchin Evgeny evgeny.roshchin@jyu.fi
Tixier Caroline carolinetixier@yahoo.fr
Vianès Emmanuel emmanuel.vianes@graduateinstitute.ch

 

13ème Congrès de l’AFSP à Aix-en-Provence du 22 au 24 juin 2015 à Sciences Po Aix

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