Né au Havre en 1875, André Siegfried grandit dans le milieu de la haute bourgeoisie protestante engagée dans l’œuvre de la IIIème République, à la géographie politique de laquelle il consacre plusieurs ouvrages majeurs. Le plus célèbre – Le Tableau politique de la France de l’Ouest sous la III^ème République – paru chez A. Colin en 1913, est considéré a posteriori comme l’acte de naissance de la sociologie électorale en France. Son père, Jules Siegfried, sera maire du Havre, député et sénateur de Seine-Inférieure, brièvement ministre du Commerce, de l’Industrie et des Colonies (1892-1893). Lui-même tentera à plusieurs reprises en vain de devenir député (candidatures en 1902 et 1903 dans les Basses-Alpes à Castellane, en 1906 et 1910 en Seine-Inférieure au Havre). Ces échecs répétés expliquent, pour partie, sa volonté de percer « le secret » de la géographie électorale de l’Ouest de la France (1913) ; projet qu’il entend étendre à l’ensemble du pays pour mieux dresser « la topographie des partis, les liens intimes qui les attachent (…) à certains sols ». Si ce projet reste inachevé, il donne naissance, l’année de la création de l’AFSP, à un « Cahier de la FNSP » (n°9) consacré à la Géographie électorale de l’Ardèche sous la III^ème République (A. Colin, 1949) et nourrit largement ses enseignements magistraux. Son œuvre comprend également tout une série d’ouvrages consacrés aux grandes puissances anglo-saxonnes (Les Etats-Unis d’aujourd’hui, A. Colin, 1ère édition 1927 ; La Crise britannique, A. Colin, 1ère édition 1931 ; Le Canada : puissance internationale, A. Colin, 1947) dont les succès éditoriaux contribuèrent à asseoir sa notoriété notamment comme chroniqueur au Temps et au Figaro.

Après une scolarité au Lycée Condorcet à Paris, il poursuit ses études à l’Ecole Libre des Sciences Politiques où il enseigne à partir de 1910. En 1933, il obtient la chaire de « géographie économique et politique » du Collège de France. Élu en octobre 1944 à l’Académie Française (fauteuil n°29), il devient le premier Président de la FNSP en 1945 et est le premier Président de l’Association Française de Science Politique de 1949 à sa mort en 1959. En 1951, il contribue fortement au lancement de la Revue Française de Science Politique dont il présidera, jusqu’à sa mort, le « Comité de direction ». La revue lui rend hommage sous la plume de François Goguel en juin 1959 [9(2), p. 333-339].

Notice biographique rédigée par Yves Déloye

→  Sources archivistiques : Fonds André Siegfried déposé dans les Archives d’histoire contemporaine du Centre d’Histoire de Sciences Po.

→  Références bibliographiques :

• Pierre Birnbaum, « André Siegfried, la géographie des races », in « La France aux Français ». Histoire des haines nationalistes, Paris, Seuil, 1993, p. 145-186.
• Loïc Blondiaux & Philippe Veitl, « La carrière symbolique d’un père fondateur. André Siegfried et la science politique française après 1945 », Genèses, 37, décembre 1999, p. 4-26.
• Philippe Claret, « André Siegfried et la psychologie politique. Contribution à la relecture d’une œuvre scientifique », Cahier de sociologie économique et culturelle (ethnopsychologie), 23, 1995.
• Yves Déloye, Les voix de Dieu. Pour une autre histoire du suffrage électoral : le clergé catholique et le vote (XIX^e-XX^e siècle), Paris, Fayard, Coll. « L’espace du politique », 2006, p. 180-189.
• Pierre Favre, Naissances de la science politique en France, 1870-1914, Paris, Fayard, Coll. « L’espace du politique », 1989.
• Pierre Favre, « André Siegfried », in J.-F. Sirinelli (ed.), Dictionnaire historique de la vie politique française, Paris, PUF, 1995, p. 978-979.
• Alain Garrigou, « L’initiation d’un initiateur : André Siegfried et le Tableau politique de la France de l’Ouest », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 106-107, mars 1995, p. 27-41.
• André Siegfried, Mes souvenirs de la Troisième République. Mon père et son temps : Jules Siegfried (1836-1922), Paris, PUF, 1952 (1^ère édition 1946).
• André Siegfried, « Note sur mes campagnes électorales dans les Basses-Alpes », reproduite dans J. Gastinel, « Histoires anecdotiques des élections dans l’arrondissement de Castellane de 1898 à 1905 », Bulletin de la Société scientifique et littéraire des Alpes-de-Haute-Provence, 274, juillet-décembre 1974, p. 71-74.
• Philippe Veitl, « Territoires du politique. Lectures du Tableau politique d’André Siegfried », Politix, 29, 1er trimestre 1995, p. 103-122.

→  Manifestation scientifique : Colloque sur « l’œuvre scientifique d’André Siegfried » (Paris, Collège de France, 15 mars 1971) organisé à l’initiative du Comité pour le centenaire d’André Siegfried présidé par Edouard Bonnefous. Ce colloque sera suivi de la publication quelques années plus tard d’un ouvrage collectif : L’œuvre d’André Siegfried, Paris, Presses de la FNSP, 1977, 128 p.