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L’activité politique au prisme des séries

Une journée d’études sur le thème « L’activité politique au prisme des séries » sera organisée à l’Université de Lille le 16 octobre 2018 par deux partenaires institutionnels de l’AFSP, les laboratoires CERAPS (Lille) et Triangle (Lyon), L’occasion de visiter sous un autre angle la professionnalisation politique, les mécanismes du leadership, l’apprentissage des rôles comme des savoir faire et des savoir être dont ils sont constitutifs, ainsi que le poids des relations interpersonnelles et des émotions. 

Cette journée est organisée sous la responsabilité scientifique de Remi Lefebvre, professeur de science politique à Université de Lille, et d’Emmanuel Taïeb, professeur de science politique à Sciences Po Lyon.

La diffusion récente sur Canal + de la série française Baron Noir a confirmé tout le potentiel dramaturgique de l’activité politique lorsqu’elle est saisie par la fiction (on pensera ainsi à A la Maison Blanche, Borgen, Game of Thrones, Les Hommes de l’ombre, House of Cards, Show Me a Hero, The Wire). Les moments de haute intensité partisane, l’excitation des campagnes électorales, le suspens des résultats, l’organisation d’un congrès et ses coulisses, ou encore la préparation d’un débat télévisé jugé décisif, qui sont des événements récurrents de la vie politique, acquièrent une résonance particulière quand ils sont l’objet d’un récit. Se manifeste là la capacité des séries à dépeindre et magnifier l’activité politique, et en particulier les tactiques des professionnels de la politique avec ou contre les règles du jeu politique. Les séries contribuent à l’évidence à rendre sensibles, peut-être mieux que la science politique ou en tout cas différemment, les ressorts et enjeux du métier politique.

Nombre de ces séries, dont l’intrigue se déroule dans le champ politique central, ont en commun de s’intéresser à la professionnalisation politique, aux mécanismes du leadership, à l’apprentissage des rôles et aux savoir faire et aux savoir être dont ils sont constitutifs, sans négliger le poids des relations interpersonnelles et des émotions. Et tous ces univers politiques sont familiers pour les politistes. Surtout comme quand, dans Baron Noir, récits et personnages sont « à clef », se superposent à la réalité, et autorisent le déploiement d’une analyse de science politique pour évoquer la fiction.

Les séries dites politiques s’imposent donc comme un nouveau terrain de recherche qui permet à la fois d’appliquer au monde fictionnel les concepts et notions forgés pour l’activité politique réelle, mais aussi de mettre à l’épreuve analyses et résultats, car la fiction est dans l’écart avec les faits connus (et donc documentés par la science politique), et les interroge en retour. Les feuilletons proposent des mondes plausibles mais décalés, justement « fictionnels », voire s’offrent comme des laboratoires pour de nouvelles idées politiques et sociales. Quelle vision du monde politique les séries accréditent-elles ? Comment analyser l’hubris des personnages politiques souvent mis en scène ? L’univers politique des séries est-il dans la vraisemblance ou dans l’utopie ? Comment la tension entre intérêt général et intérêts personnels et professionnels est-elle explorée ? Quelle vision du champ politique diffusent  les séries ? Comment émerge la figure du stratège omniscient et omnipotent, à l’image de Rickwaert ou Underwood ? Comment l’entrée dans le rôle politique est-elle montrée ? Comment les idées et les idéologies politiques se donnent-elles à voir ou se dérobent dans la fiction ? Finalement, les séries sont-elles bien un miroir du monde social ? Avec quels outils la science politique peut-elle s’en emparer ? Faudrait-il forger des outils propres à la fiction, ou réévaluer ceux qui existent, pour prendre en compte ce qui appartient en propre au filmique, avec ses codes, ses genres, et la place prise par la mise en scène ? En retour, les séries peuvent-elles stimuler l’imaginaire sociologique des universitaires ?

 

9h30-12h30. Les séries comme « mode d’emploi »

Antoine FAURE (intervention en vidéo), Centro de Investigación y Documentación – CIDOC Universidad Finis Terrae (Santiago de Chile), « L’urgence permanente. (Dé)Légitimations de l’activité politique par ses temporalités dans Les hommes de l’ombre et Baron Noir »

Arthur DELAPORTE, agrégé en sciences sociales, doctorant à l’université Paris 1, CESSP, « Baron Noir et le Parti socialiste : de la réflexivité aux rétro-actions »

Patrick LEHINGUE, professeur de science politique à l’université d’Amiens, CURAPP, « Les exégèses intéressées : Les leçons politiques de Game of Thrones par Pablo Iglesias et le collectif Podemos »

Sébastien LEROUX & Pierre-Olivier GARCIA, CNRS, Science Po Grenoble, PACTE, « La transgression politique expliquée aux enfants. Le cas de Avatar, le dernier maître de l’air »

Florence IHADDADENE, post-doctorante en sociologie à l’IDHES, Université Paris Nanterre, Corinne DANIELLOT, traductrice de littérature jeunesse anglo-saxonne, « Mouvements féministes et mobilisations improbables dans The handmaid’s tale »

  

14h-17h30. Comment les séries reflètent et transforment la politique

Rémi LEFEBVRE, professeur de science politique, Université de Lille, « Rendre sensible le concept d’illusio. Philippe Rickwaert dans Baron Noir »

Emmanuel TAÏEB, professeur de science politique, Sciences Po Lyon, « Ce que la fiction fait à la politique : le cas de House of Cards »

Emmanuel CHERRIER, maître de conférences en science politique à l’université de Valenciennes, « Quand Mr Smith est à Oslo et devient (presque) Machiavel : la série Occupied »

Clémentine FAUCONNIER, post-doctorante au CESSP (EHESS), « De Kaamelott à Veep, la dérision comme point de vue :
ce que les anti-héros au pouvoir nous disent des activités politiques »

Sandrine LEVEQUE, Professeure de science politique à l’Université Lumière Lyon-2, TRIANGLE, Frédérique MATONTI, professeur de science politique, université Paris 1, CESSP, « Brigitte Nyborg ou l’impossible réussite des femmes en politique. Ce que la série Borgen – et ses usages politiques – nous disent du genre en politique »

Julien FRETEL, professeur de science politique, université Paris 1, CESSP, « Borgen : prendre parti dans une série »