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Dans le cadre des activités de ce nouveau groupe de recherche, nous proposons de poursuivre les réflexions engagées par le groupe de recherche AFSP 2023-2025 NATER (non-accès au terrain) sur les problématiques d’accès au terrain, en interrogeant l’ensemble des contraintes susceptibles de le limiter, voire de l’interdire. Dans ce cadre, la mise à jour des mécanismes qui entravent la recherche est au cœur de nos réflexions qui s’articulent autour de trois axes. Le premier consistera à objectiver les risques encourus par le/la chercheur.e. en évaluant la fermeture – et l’ouverture – des terrains de recherche ces dernières années et la nature des incidents de sécurité. Le second visera à identifier les obstacles qui découlent, en amont, d’une perception des risques, souvent évalués par l’administration à partir de normes établies pour les voyages touristiques, et les demandes bureaucratiques qui encadrent la conduite du terrain. Un troisième axe permettra d’étudier les stratégies d’adaptation mises en œuvre par les chercheur·es confrontés à la fermeture de leur terrain. Face aux risques et à la bureaucratisation croissante de la recherche, ce groupe a vocation à proposer des pistes de mobilisations collectives pour défendre l’autonomie de la recherche en sciences sociales.
Co-responsables (et coordinateurs *) du groupe :
Contacts :
Sarah Daoud sarah.daoud@sciencespo.fr
Gilles Dorronsoro gilles.dorronsoro@gmail.com
Victor Violier victor.violier@irsem.fr
Dans le cadre des activités de ce nouveau groupe de recherche, nous proposons de poursuivre les réflexions engagées par le groupe de recherche AFSP 2023-2025 NATER (non-accès au terrain) sur les problématiques d’accès au terrain, en interrogeant l’ensemble des contraintes susceptibles de le limiter, voire de l’interdire. Dans ce cadre, la mise à jour des mécanismes qui entravent la recherche est au cœur de nos réflexions qui s’articulent autour de trois axes. Le premier consistera à objectiver les risques encourus par le/la chercheur.e. en évaluant la fermeture – et l’ouverture – des terrains de recherche ces dernières années et la nature des incidents de sécurité. Le second visera à identifier les obstacles qui découlent, en amont, d’une perception des risques, souvent évalués par l’administration à partir de normes établies pour les voyages touristiques, et les demandes bureaucratiques qui encadrent la conduite du terrain. Un troisième axe permettra d’étudier les stratégies d’adaptation mises en œuvre par les chercheur·es confrontés à la fermeture de leur terrain. Face aux risques et à la bureaucratisation croissante de la recherche, ce groupe a vocation à proposer des pistes de mobilisations collectives pour défendre l’autonomie de la recherche en sciences sociales.
1- Objectiver les risques du terrain
Les risques auxquels les chercheur.e.s peuvent être confronté.e.s lors de leurs enquêtes sont nombreux et loin d’être limités aux zones de conflit. L’objectivation de ceux-ci se heurte parfois à l’autocensure des chercheur.e.s qui témoignent peu sur ces difficultés, souvent par peur de compromettre leur accès à leur terrain. L’objectif de cet axe est de préciser (et quantifier si possible) les risques en recensant les incidents de sécurité dans la continuité de l’enquête conduite par l’INALCO « Recherche, formation et expertise sur des terrains ‘empêchés’ ou ‘entravés’ – Pratiques, méthodes et nouvelles ressources ». Le spectre des risques s’étend du harcèlement moral et de la menace, au décès en passant par le refus de visa, l’interdiction du territoire, les arrestations ou encore la prise d’otage. À cela s’ajoutent les cas de violences sexistes et sexuelles, largement sous-déclarées par les chercheur.e.s qui en sont victimes.
2- Décrire les contraintes bureaucratiques et pratiques administratives
Dans un second temps, nous interrogerons le rôle des institutions – tutelles, comités éthiques, contrats de recherche, etc. -, qui fournissent d’indispensables moyens à la recherche, mais peuvent aussi imposer des limites arbitraires lors des enquêtes. En effet, les rapports avec les institutions encadrant la recherche influent sur la définition et les négociations des pratiques de terrain. On peut, à titre d’exemple, évoquer la nécessité pour le/la chercheur.e de faire valider son protocole d’enquête par des institutions parfois éloignées des réalités de la recherche ou celle de faire signer des formulaires de consentement calqués sur ceux utilisés pour le recueil de données médicales. Ces exigences bureaucratiques, qui constituent une forme indirecte et peu débattue d’encadrement de la recherche, affectent la relation d’enquête et font parfois courir des risques supplémentaires au/à la chercheur.e. Dans un autre registre, les interférences du fonctionnaire sécurité défense (FSD) dans les activités du/de la chercheur.e ne sont pas sans conséquences ; l’objectif de cet axe est aussi de quantifier les cas d’interdiction et, plus largement, de recueillir les expériences des chercheur.e.s dans ce domaine. Ainsi, les contraintes n’émanent pas seulement du terrain et apparaissent quel que soit le contexte. Dans le moment néolibéral global, la managérialisation de l’ESR conduit à une perte d’autonomie des chercheur.e.s et l’orientation des financements à la disqualification de certains champs d’étude, objets ou même terrains de recherche.
3- Interroger les stratégies adaptatives des chercheur.e.s
Cet axe porte davantage sur la posture du/de la chercheur.e dans ses aspects méthodologiques, épistémologiques et éthiques face aux risques et aux contraintes analysés dans les axes 1 et 2. Il recouvre non seulement la réalisation de l’enquête, mais inclut également les enjeux liés à la publication et aux effets d’une diffusion des résultats d’une enquête (mise en danger des personnes associées à la recherche, interdiction d’accès etc.). Ces risques et ces contraintes impliquent inévitablement des ajustements qui obligent souvent à s’éloigner des canons de la méthode. Cet axe de recherche vise notamment à identifier et à objectiver les stratégies de recherche que le/la chercheur.e peut mettre en place quand il n’a pas accès au terrain avec les biais méthodologiques et les questions éthiques que ces pratiques entraînent. Parmi les stratégies qui seront l’objet de nos réflexions figurent le recours aux terrains dits numériques, les méthodes d’enquête digitales et autres outils de type OSINT. Le ou la chercheur.e peut aussi changer de terrain ou sous-traiter tout ou partie de la réalisation d’une enquête, ce qui suppose le recrutement plus ou moins formel d’intermédiaires (informateurs, assistants de recherche, etc.) dont le statut est parfois ambigu, alors que les risques sont souvent plus importants pour cette catégorie d’acteurs.