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Section du Groupe de recherche Politiques de l’environnement
Responsables scientifiques :
Doris Buu-Sao (Université de Lille – CERAPS) doris.buusao@univ-lille.fr
Clémence Guimont (Université Paris 1 – CESSP) clemence.guimont@univ-paris1.fr
Renaud Hourcade (CNRS – Centre Émile Durkheim) renaud.hourcade@cnrs.fr
Frédéric Nicolas (Université Paul Valéry, Montpellier – ART-DEV) frederic.nicolas@univ-montp3.fr
Leny Patinaux (Université de Limoges – GEOLAB) leny.patinaux@unilim.fr
La construction des publics et la sociologie de la réception de l’action publique font l’objet d’une attention croissante en science politique ces dernières années (Dubois, 2008 ; Spire, 2007 ; Siblot, 2006 ; Revillard, 2018 ; Gourgues, Mazeaud, 2018). Ces travaux permettent d’éclairer les rapports de pouvoir et de domination exercés par les acteurs publics et certains groupes sociaux sur d’autres. Peu de travaux sur l’environnement ont pour l’instant été proposés dans ces champs de recherche. Étudier les publics des politiques environnementales permettrait pourtant d’éclairer sous un nouveau jour les cadrages institutionnels de l’écologie, les effets de ces politiques sur les publics visés et leurs conséquences en termes de justice et d’inégalités environnementales.
Cette SG ne se cantonne pas à l’étude des politiques environnementales sectorielles, considérant que toutes les politiques publiques ont des effets sur l’environnement (comme par exemple l’agriculture, l’énergie, les transports, l’industrie etc.) pour embrasser plus largement la gestion des problèmes environnementaux par l’action publique et leur réception. Par ailleurs, dans la continuité de la table-ronde organisée par le groupe thématique aux Rencontres de la science politique de l’AFSP en juillet 2023, notre définition des publics de l’environnement n’est pas anthropocentrée et elle intègre aussi les êtres vivants non-humains et l’ensemble des entités naturelles qui sont visés par les politiques publiques. Cette section privilégie les présentations de travaux empiriques ; les cas d’études peuvent concerner aussi bien des espaces locaux, nationaux ou internationaux et différentes échelles de pouvoir.
Le premier axe de cette SG s’intéresse aux processus de construction des publics par l’action publique pour comprendre plus finement les cadrages produits par les pouvoirs publics, les solutions proposées et leurs conséquences en termes d’inégalités environnementales et de rapports de domination. Les problèmes environnementaux et les politiques publiques qui leur sont liées participent à des prises de position socialement situées (Comby et Grossetête, 2013) et à la production de nouvelles alliances politiques (Balaud et Chopot, 2021), dans des logiques de résistance ou d’adhésion aux solutions proposées. Ces problèmes environnementaux et ces politiques peuvent engendrer des inégalités environnementales, qu’elles soient liées à la classe, au genre ou à la race (Ferdinand, 2019) et que les territoires concernés soient la métropole (mobilisation des Gilets jaunes, du Front de mères), les territoires d’Outre-Mer (Thiann-Bo Morel, 2019) ou d’autres espaces post-coloniaux (Blanc, 2020). De même, les processus de construction sociale des espèces animales et végétales et de patrimonialisation produisent des effets sur les choix et les hiérarchies effectuées en matière de protection de la nature (Rémy, Beck, 2008). De ce point de vue, l’impératif délibératif (Blondiaux et Sintomer, 2002) qui s’impose aux problèmes environnementaux comme à d’autres problèmes publics, ne vient qu’imparfaitement remettre en question les hiérarchies entre les publics de l’action publique (Mazeaud, 2021).
Le second axe s’intéresse à la réception de ces politiques, notamment aux processus d’appropriation ou de rejet des écologies proposées par l’action publique et les processus de construction, de politisation et de dépolitisation des inégalités environnementales. Ces études permettront d’actualiser les travaux sur la compétence politique à partir de l’étude des fondements sociaux de la légitimité à parler d’environnement et d’écologie, en interrogeant notamment les conditions d’émergence et d’existence dans l’espace public de discours subalternes (Martinez-Alier, 2014 ; Flipo, 2021 ; Gaillard, 2021) ou socialement illégitimes (Comby, Malier, 2021 ; Raison du Cleuziou, 2008) et les capacités différenciées de ces publics à faire reconnaitre par les acteurs publics la légitimité de certains usages sociaux de la nature (Mischi, 2008). Cet axe permettra aussi d’interroger comment certaines entités non-humaines (ré)agissent face aux dispositifs politiques qui visent à les réguler ou à les contraindre (Mathevet, Bondon, 2022) et d’interroger leurs capacités à créer des alliances inter-espèces (Balaud et Chopot, 2021).
The construction of the publics of public policies and the sociology of their reception have received increasing attention in political science in recent years (Dubois, 2008; Spire, 2007; Siblot, 2006; Revillard, 2018; Gourgues, Mazeaud, 2018). These works highlight power relationships and the domination exercised by state actors and certain social groups over others. Few works on the environment have yet been proposed in these fields of research. Studying the public of environmental policies would provide new insights into the institutional framing of ecology, the effects of these policies on the targeted publics, and their consequences in terms of environmental justice and inequalities.
This panel goes beyond the study of sectorial environmental policies, considering that all public policies have an impact on the environment (e.g. agriculture, energy, transport, industry, etc.), to embrace more generally the management of environmental problems by the state and their reception. Furthermore, in continuation of the round-table discussion organized by the thematic group at the AFSP’s political science meetings in July 2023, our definition of environmental public is not anthropocentric and incorporates non-human living beings and all natural entities that are targeted by public policies. The panel will focus on the presentation of empirical work; case studies may concern local, national or international spaces, and different scales of power.
The first axis of this panel focuses on the processes by which public policy constructs publics, in order to better understand the framing produced by state authorities, the proposed solutions and their consequences in terms of environmental inequalities and relations of domination. Environmental problems and the public policies linked to them are involved in socially situated stances (Comby and Grossetête, 2013) and in the production of new political alliances (Balaud and Chopot, 2021), in logics of resistance or adherence to the proposed solutions. These environmental problems and policies can generate environmental inequalities, whether linked to class, gender, or race (Ferdinand, 2019) and regardless of that the territories concerned are metropolitan (mobilization of the Yellow Jackets, Front de mères), overseas territories (Thiann-Bo Morel, 2019) or other post-colonial spaces (Blanc, 2020). Similarly, the processes of social construction of animal and plant species and their recognition as a part of a natural heritage (“patrimonialisation”) produce effects on the choices and hierarchies made in terms of nature protection (Rémy, Beck, 2008). From this point of view, the deliberative imperative (Blondiaux and Sintomer, 2002), which is imposed on environmental problems as on other public issues, only imperfectly challenges the hierarchies between the publics of State action (Mazeaud, 2021).
The second axis focuses on the reception of these policies, in particular the processes of appropriation or rejection of the ecologies proposed by the public action and the processes of construction, politicization and depoliticization of environmental inequalities. These studies will update works on political skills based on the study of the social basis of the legitimacy to talk about the environment and ecology, in particular by questioning the conditions of emergence and existence in the public space of subaltern discourses (Martinez-Alier, 2014 ; Flipo, 2021; Gaillard, 2021) or socially illegitimate discourses (Comby, Malier, 2021; Raison du Cleuziou, 2008) and the differentiated capacities of these publics to have the legitimacy of certain social uses of nature recognized by public actors (Mischi, 2008). This line of research will also examine how certain non-human entities (re)act in the face of political mechanisms designed to regulate or constrain them (Mathevet, Bondon, 2022), and their ability to create inter-species alliances (Balaud and Chopot, 2021).
REFERENCES
Balaud Léna et Chopot Antoine, 2021, Nous ne sommes pas seuls, Paris, Le Seuil.
Blanc Guillaume, 2020, L’invention du colonialisme vert. Pour en finir avec le mythe de l’Eden africain, Paris, Flammarion.
Blondiaux Loïc et Sintomer Yves, 2002, « L’impératif délibératif », Politix, vol. 1, n° 57, p. 17-35.
Comby Jean-Baptiste, Malier Hadrien, 2021, « Les classes populaires et l’enjeu écologique. Un rapport réaliste travaillé par des dynamiques statutaires diverses », Sociétés contemporaines, vol. 4, n° 124, p. 37-66.
Dubois Vincent, 2008 ; La vie au guichet. Relation administrative et traitement de la misère, Paris, Économica.
Ferdinand Malcom, 2019, Une écologie décoloniale. Penser l’écologie depuis le monde caribéen, Paris, Le Seuil.
Flipo Fabrice, 2021, « Gilets jaunes et écologie : vers un écologisme des pauvres ? », Écologie & politique, vol. 1, n° 62, p. 13-24.
Gaillard Édith, 2021, « Les femmes Gilets jaunes : un écologisme des pauvres ? », Écologie & politique, vol. 1, n° 62 p. 83-96.
Gourgues Guillaume et Mazeaud Alice (dir.), 2018, L’action publique saisie par ses “publics”. Gouvernement et (dés)ordre politique, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion.
Martinez-Alier Joan, 2014, L’écologisme des pauvres. Une étude des conflits environnemen-taux dans le monde, Paris, Les petits matins.
Mathevet Raphaël, Bondon Roméo, 2022, Sangliers, géographies d’un animal politique, Arles, Actes Sud.
Mazeaud Alice, 2021, « Gouverner la transition écologique plutôt que renforcer la démocratie environnementale : une institutionnalisation en trompe-l’oeil de la participation citoyenne », Revue française d’administration publique, vol. 3, n° 179, p. 621-637.
Mischi Julian, 2008, « Les militants ouvriers de la chasse. Éléments sur le rapport à la politique des classes populaires », Politix, vol. 3, n° 83, p. 105-131.
Raison du Cleuziou Yann, 2008, « De la résistance à la subversion. Les chasseurs de la baie de somme et le développement durable », Études rurales, vol. 1, n° 181, p. 133-148.
Rémy Élisabeth, Beck Corinne, 2008, « Allochtone, autochtone, invasif : catégorisations animales et perception d’autrui », Politix, vol. 2, n° 82, p. 193-209.
Revillard Anne, 2018, « Saisir les conséquences d’une politique à partir de ses ressortissants. La réception de l’action publique », Revue française de science politique, vol. 3, n°68, p. 469-491.
Siblot Yasmine, 2006, Faire valoir ses droits au quotidien. Les services publics dans les quartiers populaires, Paris, Presses de Sciences Po.
Spire Alexis, 2007, « L’asile au guichet. La dépolitisation du droit des étrangers par le travail bureaucratique », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 4, n° 169, p. 4-21.
Thiann-Bo Morel Marie, 2019, Tensions entre justice environnementale et justicesociale en société postcoloniale : le cas du risque requin, VertigO, vol. 1, n° 19.
Session 1 / Environnement et classes populaires
Discutante : Alice Mazeaud (LIENSs, Université de La Rochelle)
Hadrien Malier (IRIS – EHESS), « Stop aux jets d’ordures par les fenêtres ! » Classe, race et genre dans la gestion des problèmes liés aux déchets en résidences HLM
Océane Sipan (IRIS & CEMS – EHESS), Zéro Déchet à Roubaix ? Deux politiques municipales des déchets et trois publics plus ou moins explicitement visés
Loup Ducol (LAAP – UCLouvain), Les invisibilisé·es de l’écologisation de la ville néolibérale. Quelle place pour les classes populaires dans la production politique de la nature urbaine à Bruxelles ?
Héloïse Ferber (IRIS – EHESS), Les (re)cadrages de l’écologie populaire à travers l’alimentation. Étude des intermédiaires entre politiques publiques et publics populaires : les associations alimentaires
Session 2 / Mondes ruraux et politiques énergétiques
Discutant : Renaud Bécot (Pacte, Sciences Po Grenoble)
Philippe Hamman (SAGE -Université de Strasbourg), Aude Dziebowski (SAGE – Université de Strasbourg), La méthanisation agricole à l’épreuve de ses publics : une approche configurationnelle en région Grand Est
Violeta Ramirez (EDYTEM – Université Savoie Mont Blanc), « Si l’Etat veut » : le rapport des secteurs populaires ruraux aux décisions publiques à travers le cas du projet d’extraction minière dans le Massif Central
Stéphanie Dechézelles (TREE – Université de Pau et des Pays de l’Adour), Conscience énergétique, habitants critiques : la politique de l’éolien à l’épreuve de ses contestataires
BUU-SAO Doris doris.buusao@univ-lille.fr
BÉCOT Renaud renaud.becot@iepg.fr
DECHÉZELLES Stéphanie stephanie.dechezelles@univ-pau.fr
DUCOL Loup loup.ducol@uclouvain.be
DZIEBOWSKI Aude adziebowski@unistra.fr
FERBER Héloïse heloise.ferber@ehess.fr
GUIMONT Clémence clemence.guimont@univ-paris1.fr
HAMMAN Philippe phamman@unistra.fr
HOURCADE Renaud renaud.hourcade@cnrs.fr
MALIER Hadrien hadrien.malier@gmail.com
MAZEAUD Alice alice.mazeaud01@univ-lr.fr
NICOLAS Frédéric frederic.nicolas@univ-montp3.fr
PATINAUX Leny leny.patinaux@unilim.fr
RAMIREZ Violeta paravioleta@gmail.com
SIPAN Océane oceane.sipan@ehess.fr