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Responsables scientifiques
Marc Smyrl (Université de Montpellier, CEPEL) marcsmyrl@yahoo.com
Marie Moncada (Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, PRINTEMPS) marie.moncada@ens.uvsq.fr
Comment comprendre la sélection des instruments politiques visant à contrôler les dépenses de santé dans l’Union européenne (UE) ? Les facteurs impactant sur ces dépenses sont-ils les mêmes que ceux relatifs aux politiques sociales ? (WILENSKY et al. 1985, MORAN 2000, CLARK et McELDOWNEY 2000, BLAKE et ADOLINO 2001)
Face à l’augmentation des dépenses de santé et à la récession économique dans l’UE, différentes stratégies ont été mises en place depuis 2008. La modulation du prix des soins pour les patients a constitué un premier type d’instrument. La facture hospitalière a ainsi augmenté dans certains Etats (République Tchèque, Estonie, France, Irlande et Roumanie) au même titre que celle des soins ambulatoires (Grèce, Italie et Roumanie). Pourtant, d’autres pays ont diminué le coût des médicaments pour les personnes à faible revenu (Autriche, France, Irlande et Italie) et rendu gratuits certains soins (Italie et Hongrie) (MLADOVSKY et al. 2012). Afin d’enrayer le coût des soins urgents, le maintien des couvertures de santé a été un second instrument. Parmi les soins non remboursés se sont ajoutés les soins dentaires (Estonie, Irlande, Slovénie) et les soins dispensés hors de l’UE (Pays-Bas). L’Irlande et, dans une moindre mesure, la République Tchèque, ont été les seuls Etats à exclure certains bénéficiaires des couvertures de santé. L’organisation de l’offre de soin représente un troisième instrument préventif. Les hôpitaux ont ainsi été fermés ou ont fusionné (Danemark, Grèce, Lettonie, Portugal, Slovénie). D’autres Etats ont développé l’e-Santé (Lettonie) ainsi qu’un nouveau système d’ordonnances électroniques (Croatie) (MLADOVSKY et al. 2012). Enfin, le paiement des professionnels de santé est un dernier instrument permettant, par des mesures incitatives, de contrôler l’efficacité des soins. Des politiques de mesure de la performance ont ainsi été mises en place avant la crise en République Tchèque (2000), en Estonie (1998), en Irlande (2001), en Lituanie (1998), en Norvège (1996) et au Royaume-Uni (1998) (SHAW 2005).
D’après la littérature, la fabrique des politiques françaises seraient le fruit des élites (GENIEYS et HASSENTEUFEL 2001), des conflits entre administrations (PIERRU 2011) ou entre stratégies individuelles (HASSENTEUFEL 1997; PALIER et BONOLI 1999). D’autres travaux insistent sur l’impact des coopérations entre associations de patients, professionnels de santé, groupes pharmaceutiques et assurances de santé au Royaume-Uni (BAGGOTT et JONES 2014; MARSH et RHODES 1992), en Finlande (TOIVIAINEN, VUORENKOSKI et HEMMINKI 2010), aux Pays-Bas (VAN DE BOVENKAMP, TRAPPENBURG et GRIT 2010), en Autriche (FORSTER, BRAUNEGGER-KALLINGER et KRAJIC 2011), en Allemagne (GEISSLER 2011), en Norvège et au Danemark (OPEDAL, ROMMETVEDT et VRANGBAEK 2012). Certaines études mettent également en avant le rôle des idées au niveau européen (RUSSELL 2014). En ce sens, peu de travaux comparent l’influence de ces paramètres entre eux au niveau des deux premiers cycles du processus de l’action publique (JONES 1970), soit l’identification du problème et le développement du programme.
Or, comment comprendre la sélection de ces instruments dans l’UE ? Des « trois i » (PALIER et SUREL 2005), devrions-nous passer aux « cinq i » (PETERS et VAN NISPEN 1998) ? A la « poubelle » (COHEN, MARCH et OLSEN 1972) ou à la « logique accidentelle » (TUOHY 1999), devrions-nous préférer le « choix rationnel institutionnel » (KISER et OSTROM 2000) ou l’analyse séquentielle (SCHNEIDER et INGRAM 2005) ? La littérature comparatiste doit-elle libérer ces modèles des carcans nationaux (DEZALAY 2004) ? Notamment, quelle importance accorder à l’hybridation des systèmes de santé (SCHMID et al. 2010) ? Observe-t-on un phénomène de convergence ou de divergence des instruments européens (BENNETT 1991; CLAVIER et al. 2011; HEICHEL, PAPE et SOMMERER 2005; HOLZINGER et KNILL 2005) ?
Parmi les rares travaux comparant ces paramètres en matière de santé dans l’UE, les travaux de Mike DENT (2003), Ellen IMMERGUT (1992), Johan MACKENBACH et Martin McKEE (2013) doivent être cités. Le premier auteur établit une comparaison binaire par chapitre : Pays-Bas/Suède, Royaume-Uni/France, Allemagne/Italie et Pologne/Grèce. Par exemple, en abordant la question du contrôle-qualité des soins au Pays-Bas et en Suède, Mike DENT constate que l’absence de mesure contraignante dans ce domaine est davantage la résultante des conditions de vie aisées et d’une grande espérance de vie en Suède, allégeant ainsi la demande pour ce contrôle et s’opposant par la même au cas néerlandais. De même, en Pologne et en Grèce, le clientélisme et le familialisme dominent en raison, notamment, d’une industrialisation tardive et du faible salaire des médecins et des infirmières. Ellen M. IMMERGUT compare, en 1992, différents paramètres dont les institutions, les intérêts, l’économie, la technologie et l’idéologie en Suède, en France et en Suisse. Selon elle, la structure institutionnelle et les « points » de véto semblent être finalement les variables les plus lourdes pour expliquer le changement politique. Enfin, Johan MACKENBACH et Martin McKEE observent qu’en Europe, les politiques de santé préventive (tabac, alcool, nutrition, santé maternelle et infantile, maladies infectieuses, hypertension, dépistage du cancer, sécurité routière, pollution atmosphérique) se développent généralement lorsqu’un gouvernement social-démocrate est en place depuis plusieurs années.
D’autres paramètres émergent également à la lecture de la littérature « interactionniste ». Herbert OBINGER, Carina SCHMITT et Peter STARKE (2013) montrent ainsi que l’interaction horizontale entre Etats membres peut conduire à un changement de politique sociale par apprentissage, imitation, concurrence ou contrainte. L’apprentissage s’inspire des meilleures pratiques d’autres Etats afin de réduire les conséquences involontaires de nouvelles politiques tout en adaptant ces pratiques à la situation du pays qui les adopte. L’imitation peut résulter d’une tendance politique non contraignante supranationale ou internationale. La concurrence renvoie au besoin, pour un Etat, d’être plus attractif que d’autres en contrôlant, par exemple, le coût de sa main-d’œuvre. La contrainte, enfin, peut résulter d’une directive ou d’un règlement européen impératif.
Cette littérature interroge finalement la définition de l’européanisation de Claudio RADAELLI (2002). Cette dernière est, selon l’auteur, un « processus de (a) construction, (b) diffusion et (c) institutionnalisation de règles formelles et informelles, de procédures, de paradigmes politiques, de styles, de savoir-faire, de normes et de croyances partagées qui sont d’abord définis et consolidés dans les décisions de l’UE puis incorporés dans la logique des discours, des identités, des structures politiques et des politiques publiques à l’échelon national ». Or, les éléments interactionnistes mentionnés ci-dessus ne sont-ils pas également un marqueur d’européanisation ? Quel intérêt y a-t-il à maintenir cette séparation entre instances européennes et convergence spontanée des politiques publiques ? L’auteur trouble lui-même sa propre définition en estimant que le mimétisme entre Etats doit également être un élément constitutif de l’européanisation – que ce mimétisme soit, ou non, initié par le triangle institutionnel de l’UE (HASSENTEUFEL 2011, 279).
Les propositions prolongent donc cette littérature. Elles porteront sur le processus de sélection politique des instruments visant à limiter les dépenses de santé dans l’UE. L’étude peut être une comparaison transnationale portant sur un ou plusieurs instruments dans au moins deux Etats membres. Elle peut également porter sur la sélection de plusieurs instruments dans un même Etat membre à des époques différentes.
How can we understand the choice of policy instruments intended to control health care spending in EU member states? Faced with an increase in health-related spending and an economic recession in the EU, various strategies have been attempted since 2008. Adjusting the cost of care for patients is one type of instrument. Overall payments for hospital care have thus increased in states such as the Czech Republic, Estonia, France, Ireland, and Rumania as have payments for out-patient care in Greece, Italy and Rumania. At the same time, however, other countries have reduced the cost of prescription drugs for lower-income persons (Austria, France, Ireland, Italy) and eliminated all charge for certain types of care (Italy and Hungary) (MLADOVSKY and al. 2012). Adjusting payments to health professionals is another instrument that seeks to control costs by inducing efficiency. Policies assessing performance were put in place before the recession in the Czech Republic (2000), Estonia (1998), Ireland (2001), Lithuania (1998), Norway (1996) and the UK (1998) (SHAW 2005).
Policy literature suggests that French policies are the result of dominance by elite decision-makers (GENIEYS and HASSENTEUFEL 2001), and conflicts among policy-making units or individual strategies (HASSENTEUFEL 1997; PALIER and BONOLI 1999). In other cases, such as Finland (TOIVIAINEN, VUORENKOSKI, and HEMMINKI 2010), the Netherlands (VAN DE BOVENKAMP, TRAPPENBURG, and GRIT 2010), the UK (BAGGOTT and JONES 2014; MARSH and RHODES 1992), Austria (FORSTER, BRAUNEGGER-KALLINGER, and KRAJIC 2011), Germany (GEISSLER 2011), Norway and Denmark (OPEDAL, ROMMETVEDT, and VRANGBAEK 2012), greater emphasis is placed on the impact of cooperation among patients’ associations, health professionals, insurers and the pharmaceutical industry. Other studies put more emphasis on the role of ideas at the European level (RUSSELL 2014). Beyond this, however, we note a general lack of research comparing the influence of these parameters with respect either to the identification of problems or the development of policy responses (JONES 1970, 230–231). Should we move from the “3 I’s” (PALIER and SUREL 2005) of the new institutionalism to a broader approach such as that of the “ 5 I’s,” (PETERS and VAN NISPEN 1998) to models of temporal sorting such as the infamous “garbage can,” (COHEN, MARCH, and OLSEN 1972) or to more contextual explanations such as Tuohy’s “accidental logic” (TUOHY 1999). Should we privilege an institutional version of rational choice (KISER and OSTROM 2000) or a sequential analysis (SCHNEIDER and INGRAM 2005)? Are national systems even the appropriate unit of comparison (DEZALAY 2004)? How much importance should we give to the hybridization of instruments and systems (SCHMID and al. 2010)? Looking more generally, do we observe convergence or divergence of instruments in Europe (BENNETT 1991; CLAVIER and al. 2011; HEICHEL, PAPE, and SOMMERER 2005; HOLZINGER and KNILL 2005)?
Among the rare works that seek to evaluate the impact of these parameters, we find those of Mike DENT (2003), Ellen IMMERGUT (1992), or of Johan MACKENBACH and Martin McKEE (2013). The first of these compares successive pairs of cases: Netherlands/Sweden; UK/France; Germany/Italy ; and finally Poland/Greece. By addressing the question of quality control in Sweden and the Netherlands, for example, Dent notes that the absence of constraints in this area is more the result of better quality of life than of longer life expectance in Sweden. He concludes accordingly that the demand for controls is thus lessened, in contrast to the situation obtaining in the Netherlands. In Greece and Poland, clientelism and familialism are dominant forces due to late industrialization but also the relatively low salaries of doctors and nurses. Writing in 1992, Ellen M. IMMERGUT compared a set of parameters such as institutions, the structure of interests, economic organization, ideology, and the level of technology in France, Switzerland, and Sweden. She concluded that institutional structure and the existence of veto points were the variables offering the most direct explanation of observed systemic changes.
Contributions will wonder how instruments are selected to combat the increase in health care costs in the member states of the EU. Approaches will include transnational comparisons focusing on one or more instruments in at least two national cases, or on the choice among two or more instruments in a given national case. We will welcome as well proposals focused on the role of supranational bodies such as the EU.
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Axe 1/ Une nouvelle répartition des finances publiques et son impact sur le modèle des couvertures de santé
Johanna Hornung (Technische Universität Braunschweig, Institut für Sozialwissenschaften, Allemagne) et Nils C. Bandelow (Technische Universität Braunschweig, Institut für Sozialwissenschaften, Allemagne), Comment expliquer les différences entre les stratégies de dépenses dans le secteur de santé après la crise en Europe ?
Discussion : Anne-Laure Beaussier
Anne-Laure Beaussier (Université de Montpellier (CEPEL – UMR 5112) et King’s College de Londres, département de géographie), Maitriser les dépenses de santé en responsabilisant les patients : une comparaison des « politiques centrées sur les patients » en France, au Royaume Unis et aux Etats-Unis
Discussion : Johanna Hornung et Nils C. Bandelow
Axe 2 / L’utilisation du numérique dans le domaine de la santé
Chloé Berut (Sciences Po Grenoble, PACTE – UMR 5194) et Sabine Saurugger (Sciences Po Grenoble, PACTE – UMR 5194), Quand l’Union européenne influence le niveau national malgré tout : L’usage de la soft law dans la construction des politiques d’e-santé
Discussion : Florence Gallois et Amandine Rauly
Florence Gallois (Université de Reims, Regards – EA 6292) et Amandine Rauly (Université de Reims, Regards – EA 6292), La télémédecine face à l’efficience des politiques publiques. Une cartographie de trois pays européens
Discussion : Chloé Berut et Sabine Saurugger
Johanna Hornung (Technische Universität Braunschweig, Institut für Sozialwissenschaften, Allemagne) et Nils C. Bandelow (Technische Universität Braunschweig, Institut für Sozialwissenschaften, Allemagne)
Comment expliquer les différences entre les stratégies de dépenses dans le secteur de santé après la crise en Europe ?
L’augmentation des dépenses dans le secteur de santé et la pression financière après la crise commençant en 2008 ont créé pour les gouvernements nationaux la nécessité d’agir. Pour répondre à ce problème, les états peuvent choisir la stratégie d’abaisser les dépenses de santé en réduisant les prestations de soins de santé ou, comme alternative, la stratégie d’augmenter les dépenses publiques dans le secteur de la santé. Les deux présentent des instruments possibles pour contrôler les dépenses. Utilisant le cadre théorique de la politique comparée développé par Schmidt (1993), cet article analyse les conditions sous lesquelles des dépenses de santé dans les membres de l’Union Européenne ont changés après la crise. Par ce moyen, la contribution se concentre sur les conditions politiques, historiques, institutionnalistes, socio-économiques et corporatistes. Les données de l’OCED permettent l’analyse du développement des dépenses publiques de santé (comme quote-part des dépenses totales) et des dépenses par personne liée à la parité économique. Cela tient aussi compte d’une corrélation potentielle avec le PIB. À travers l’application de la méthode de Qualitative Comparative Analysis (QCA) (Ragin 2014), les maquettes multiples causales peuvent être identifiées qui pourront aboutir aux politiques de dépenses pareilles et qui expliquent la sélection et utilisation des différentes stratégies dans le secteur de santé après la crise.
How to Explain Country Differences of Health Care Instruments and Outcomes Across Europe?
Increased spending in the health care sector and financial pressure after the economic crisis starting in 2008 created a call for action acting upon national governments. In order to control health expenditures, a strategy of reducing health expenditures accompanied by the reduction of health-related services or, alternatively, a strategy of increased public spending on the health care sector are possible policy instruments to answer this problem. Using the theoretical framework of comparative public policy developed by Schmidt (1993), this paper analyses the conditions under which health expenditures within the EU changed after the financial crisis. It thereby focuses on political, historical, institutional, socio-economic, and corporatist conditions. OECD Health Data allows for analysing the development of public health expenditures (as share of total expenditures) and health expenditures per capita related to purchasing power parity. Thus, a correlation with GDP growth is equally accounted for. Applying the method of Qualitative Comparative Analysis (QCA) (Ragin 2014) enables the identification of multiple causational patterns that may lead to the same expenditure policy and explain the use of different strategies in health policy after the crisis.
Anne-Laure Beaussier (Université de Montpellier (CEPEL – UMR 5112) et King’s College de Londres, département de géographie)
Maitriser les dépenses de santé en responsabilisant les patients : une comparaison des « politiques centrées sur les patients » en France, au Royaume Unis et aux Etats-Unis
Cette communication propose d’examiner la notion de système de santé centré sur le patient en France, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Cette notion, accompagnant aujourd’hui les discours et programmes de réformes des politiques de santé dans ces trois pays, renvoie à la mise en œuvre de politiques cherchant à renforcer la voix des patients dans leur parcours de soin (empowerment) et à davantage responsabiliser les individus face à leur santé. Pour autant, derrière un discours commun promettant de placer le patient au centre, ces initiatives apparaissent comme un ensemble hétérogène d’objectifs et d’instruments de politiques publiques que nous proposons ici d’interroger et d’expliciter. Alors que les systèmes de santé des démocraties avancées doivent faire face à des tensions budgétaires accrues, à un espace fiscal plus contraint, et à un discours politique affichant plus ouvertement un scepticisme quant au bien-fondé de politiques publiques redistributives, la renégociation du contrat social entre l’état, le marché et les individus apparait au cœur des réformes des politiques de santé se donnant les patients pour objet dans les trois pays de cette comparaison. Plus précisément, l’ambition de cette contribution est de décrire l’origine et l’évolution des approches centrées sur les patients dans ces trois pays afin de contribuer à une réflexion plus générale sur les mutations de la protection sociale. Empiriquement, ce projet, à ce jour exploratoire, propose un examen des formes nationales que prennent les politiques centrées sur les patients dans les trois pays. Se fondant sur une analyse de la littérature grise et des débats nationaux entourant les politiques centrées sur les patients, nous proposons de réaliser une cartographie des variétés nationales de politiques centrées sur les patients.
Controlling health expenditure by empowering patients: a comparison of « patient-centered policies » in France, the United Kingdom and the United States
This paper examines the notion of a patient-centered health care system in France, the United States and the United Kingdom. This notion, which accompanies the discourses and programs of health policy reforms in these three countries today, refers to the implementation of policies seeking to strengthen the voice of patients in their care path (empowerment) and the responsibility of individuals toward their lifestyles and health. However, behind a common discourse promising to place the patient at the center, these initiatives appear to date as a heterogeneous set of objectives and policy instruments, which we attempt here to question and explain. While health systems in advanced democracies face increasing fiscal pressures, a more constrained fiscal space, and more openly skeptical political discourses about the merits of economic redistribution, the renegotiation of the social contract between state, market and individuals appears at the heart of the health policy reforms directed toward patients in the three countries of this comparison. More specifically, the aim of this contribution is to describe the origin and evolution of patient-centered approaches in these three countries in order to contribute to a more general reflection on the changes in social protection. Empirically, this project, to date exploratory, proposes an examination of the national forms that patient-centered policies in the three countries take. Based on an analysis of the gray literature and national debates surrounding patient-centered policies, we propose to map out national varieties of patient-centered policies.
Chloé Berut (Sciences Po Grenoble, PACTE – UMR 5194) et Sabine Saurugger (Sciences Po Grenoble, PACTE – UMR 5194)
Quand l’Union européenne influence le niveau national malgré tout : L’usage de la soft law dans la construction des politiques d’e-santé
Le secteur de la santé, et particulièrement celui de l’organisation des soins, est encore aujourd’hui considéré comme l’une des prérogatives les plus profondément liées à la souveraineté des Etats. Afin de contourner cette situation, l’Union européenne (UE), et plus particulièrement la Commission européenne, a mis en place une série de mesures non juridiquement contraignantes (soft law) dans le domaine de l’e-santé, une organisation particulière des soins médicaux, afin d’harmoniser le secteur au niveau international. Cet article s’interroge sur les mécanismes par lesquels l’Union européenne réussit à influencer les politiques nationales dans un domaine où les traités ne lui donnent pas de compétences. Pour comprendre comment et pourquoi les instruments de soft law influencent les politiques publiques nationales, nous comparons deux cas généralement perçus comme opposés dans leur volonté de se conformer aux contraintes européennes : la France et le Royaume Uni. Au centre de cette analyse se trouveront les acteurs nationaux, leurs intérêts, leurs stratégies et les usages qu’ils choisissent de faire du niveau européen.
The use of European Union soft law in the making of eHealth policies: a case of European influence on member states’ reserved domains
Healthcare is still today considered as a key competence of European states. To circumvent this issue of jurisdiction, the European Union (EU) produces non-legally binding measures (soft law) in the eHealth area, a specific healthcare organisation, in order to standardize the sector at the international level. The aim of this paper is to explore how the EU is able to influence domestic policies whereas it does not have any competence assigned by the founding treaties. To understand how and why soft law instruments affect eHealth policies, we chose to compare two cases generally perceived as most different as regards their willingness to comply with European norms: France and the United Kingdom. Domestic actors, their interests, strategies and their use of European instruments are at the core of our analysis.
Florence Gallois (Université de Reims, Regards – EA 6292) et Amandine Rauly (Université de Reims, Regards – EA 6292)
La télémédecine face à l’efficience des politiques publiques. Une cartographie de trois pays européens
La télémédecine est définie par l’OMS comme une activité de production de soins réalisée à distance au moyen des technologies de l’information. En Europe, les stratégies de développement de la pratique ont pour point commun de poursuivre un objectif d’efficience (OMS, 2010). L’efficience est alors entendue dans la littérature télémédicale comme l’efficacité économique de la pratique, mesurée par le biais de calculs coûts-efficacité et coûts-bénéfices (Bergmo, 2012, 2010). L’idée d’un one best way, véhiculée par des institutions supranationales, à l’instar de l’OMS, est alors au fondement des politiques publiques nationales d’aide au développement de la pratique (OMS, 2012).
Toutefois, malgré ces recommandations uniformes, la mise en exergue de trajectoires multiples de développement de la pratique nous a amenée, dans de précédents travaux (Gallois et Rauly, 2016a, 2015, 2016b), à (i) définir ce qu’est un système de télémédecine en tenant compte de son environnement institutionnel, (ii) caractériser les systèmes de télémédecine de différents pays de l’OCDE et (iii) mettre en évidence l’existence d’un lien entre la nature de la politique publique de télémédecine et le niveau de développement de l’activité.
L’objectif de cette communication est d’approfondir l’analyse du lien entre la forme de l’action publique menée en faveur de la télémédecine et le développement (ou non) de la pratique. Pour ce faire, nous retenons trois pays européens, qui se différencient par des stades de déploiement de la pratique divers : le Royaume-Uni, le Danemark et la France. Dans chacun de ces pays, les politiques publiques d’aide au développement sont conditionnées par la recherche d’une efficience théorique des dispositifs télémédicaux, qui apparaît alors comme un prérequis à l’action publique en faveur de l’activité. Cette communication vise donc à analyser, pour chacun de ces trois pays, la façon dont la politique est menée afin de respecter ce critère d’efficience. Cela nous amène alors à mobiliser le concept de référentiel politique et le cadre qui lui est associé en matière d’analyse de l’action publique (Jobert et Muller, 1987).
Pour cela, nous mettons en évidence dans un premier temps que, dans ces trois pays, les actions publiques menées en faveur du développement de la télémédecine s’inscrivent dans les préceptes du New public management. En croisant les travaux de Dunleavy et Hood (1994) avec ceux de Hood et Peters (2004) et de Pyun (2013), nous pointons l’existence de quatre principales formes hybrides du New public management : (i) l’État petit consommateur (l’action publique est tant le résultat de la production du secteur privé que du secteur public et la règlementation qui encadre cette production est faible) ; (ii) la Gouvernance sans pilote (maintien d’une séparation stricte entre le public et le privé dans la production de l’action publique et faible règlementation) ; (iii) la Bureaucratie publique (évolution minimale comparativement à la bureaucratie wébérienne, maintien d’une séparation entre public et privé et niveau élevé de règlementation de la production) ; (iv) le Gros embouteillage institutionnel (faible distinction entre public et privé dans la production, mais forte règlementation). Chacun de ces modèles hybrides peut alors être rattaché à une forme évolutive d’un référentiel politique canonique que nous qualifions de référentiel de marché (Batifoulier, Domin et Gadreau, 2007 ; Muller, 2015).
Suite à la présentation des formes hybrides de New public management, nous cherchons, dans un deuxième temps, à caractériser la politique de télémédecine de chacun des cas d’étude au prisme de ces formes hybrides et du référentiel associé. Nous mettons alors en évidence que la question du partenariat entre les producteurs publics et privés de soins est au centre des préoccupations dans le développement de la télémédecine et permet justement de rattacher chaque étude de cas à une forme particulière de l’action publique. La performance de la télémédecine est alors conditionnée par l’établissement de nouveaux arrangements productifs des soins.
Dans un dernier temps, nous mettons en évidence que dans ces trois pays, le développement de la télémédecine est conditionné d’une part, par la performance des producteurs de soins et d’autre part par celle des producteurs de l’action publique. Leur performance respective étant définie ex ante par le référentiel politique. À partir d’une revue de la littérature, nous mettons en évidence la façon dont les producteurs de soins sont associés, dans chaque pays étudié, à l’effort performatif du système de télémédecine. Nous proposons alors de discuter la notion d’efficience des systèmes de télémédecine et de mettre en perspective la (non) soutenabilité d’un modèle organisationnel unique plébiscité par les institutions supranationales porteuses des préceptes du New public management.
Telemedicine facing efficiency of public policies: a mapping of three European countries
Telemedicine is the use of telecommunication and information technology to provide clinical healthcare from a distance. The strategies for developing this sort of healthcare in European countries have a common characteristic: a goal of efficiency (WHO, 2010). The literature on telemedicine defines “efficiency” as the economic effectiveness, measured through cost-effectiveness and/or cost-benefits (Bergmo, 2012). With this perspective, the idea of an efficient one-best-way is the core of all national public policy for telemedicine development (OMS, 2012).
Nevertheless, our previous researches identified a diversity of level of development. To take this diversity into account, we have (i) defined what a system of telemedicine is; (ii) characterised the telemedicine systems of the OECD’s countries and (iii) identified that there exist a link between the nature of the public policy of telemedicine and the level of development of telemedicine (Gallois et Rauly, 2016a, b).
This communication aims at characterizing and discussing the link between the form of the telemedicine public policy and the level of development/underdevelopment of this sort of medicine. Three European countries, with different level of development of telemedicine are precisely characterised: Denmark, France and United-Kingdom. In each country, the efficiency of telemedicine is a prerequisite to public action. More generally, efficiency is a common goal of New public management’s policies. Nevertheless, new public management differs form one country to the other (Dunleavy et Hood, 1994, Hood et Peters, 2004). This paper analyses how each country develops its own telemedicine policy in order to reach the efficiency.
The first part crosses three typologies of new public management (Dunleavy et Hood, 1994, Hood et Peters, 2004, Pyun, 2013) and identifies four hybrid forms of new public management: (i) Minimal Purchasing State (public action results both of public and private organizations; the regulation’s level is low); (ii) Pilotless governance (strong division between public and private production; the regulation’s level is low); (iii) Public Bureaucracy State (close of the weberian bureaucracy; division between private and public production; high level of regulation) and (iv) Institutional gridlock (few distinction between private and public producers; high level of regulation). Each of these forms constitutes an evolution of the canonical “référentiel de marché” (Jobert, 2003, Muller, 2015).
The second part characterizes the telemedicine national policy within the typology of the forms of new public management. Our characterization strongly relies on the form of partnership between public and private producers of healthcare. The performance of telemedicine is thus influenced by the emergence of new healthcare productive arrangements.
The third part highlights that, in the three studied countries, the level of development of telemedicine is influenced by two factors: (i) the performance of healthcare producers, and (ii) the performance of the public action producers. Their corresponding performance is ex ante defined through the référentiel. A systematic literature review documents how the telemedicine producers are involved in the performance of their national telemedicine system.
The last part discusses the efficiency of telemedicine systems and the (non) sustainability of a sole organizational model as advocated by supranational institutions.
Mardi 11 juillet 2017 9h00-13h00
BANDELOW Nils C. : nils.bandelow@tu-braunschweig.de
BEAUSSIER Anne-Laure : anne-laure.beaussier@kcl.ac.uk
BERUT Chloé : chloe.berut@etu-iepg.fr
GALLOIS Florence : florence.gallois@gmail.com
HORNUNG Johanna : j.hornung@tu-braunschweig.de
MONCADA Marie marie.moncada@ens.uvsq.fr
RAULY Amandine : amandine.rauly@gmail.com
SAURUGGER Sabine : sabine.saurugger@sciencespo-grenoble.fr
SMYRL Marc marcsmyrl@yahoo.com