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Responsables scientifiques :
Jean-Vincent Holeindre (Université Paris 2 Panthéon Assas) jean-vincent.holeindre@u-paris2.fr ;
Marie Robin (Université Paris 2 Panthéon Assas & Université du Sud-Danemark) marie.robin@sciencespo.fr
À la différence de la gastronomie qui fait l’objet de travaux nombreux et d’initiatives diplomatiques (lancement par Hillary Clinton du Partenariat diplomatique culinaire en 2012), l’alcool suscite dans les Relations internationales (RI) un intérêt plus mesuré, qui tient sans doute à son statut ambivalent au sein de la sphère publique. S’il constitue, à l’image de la gastronomie, un outil de partage et d’influence, l’alcool renvoie également à une perte de contrôle, de rationalité et de compétence. Qui ne regarde avec embarras les images de la dernière campagne électorale de Boris Eltsine en 1996 ? Vecteur de socialisation, l’alcool peut être aussi source de tensions, de déstabilisation ou d’affaiblissement d’un adversaire politique.
Sur le plan théorique, l’alcool renvoie à la difficile articulation entre deux modèles : la théorie du choix rationnel, qui insiste sur l’articulation des moyens et des fins sur un plan stratégique ; la psychologie politique, qui confère une place plus grande aux émotions et passions, (Hassner 2015 ; Petersen 2011 ; Nussbaum 2001, Lindemann, 2012 ; Jervis, 1976).
À partir de cette dualité, cette section thématique étudie le rôle joué par l’alcool dans les relations entre les acteurs internationaux, selon trois axes :
Analyser le rôle joué par l’alcool dans les relations internationales informe donc sur les modalités de relations – coopératives ou conflictuelles – qui lient les États et les collectifs à l’échelle mondiale. En examinant les partages, échanges, tensions et stratégies structurant les pratiques et consommation d’alcool, notre objectif est d’éclairer plus largement les recompositions de la scène internationale.
While several scholars and political initiatives (creation of the Culinary Diplomatic partnership by Hillary Clinton in 2012) have focused on gastronomy – alcohol, maybe due to its ambivalent status on the public stage, has comparatively received limited attention in international relations (IR). Alcohol constitutes, like gastronomy, a tool of influence – but it also refers to a loss of control, of rationality, of competence. Who doesn’t look with embarrassment at the images of Boris Yeltsin’s last electoral campaign, in 1996? Albeit a vector of socialization, alcohol can also become a source of tensions, as well as a tool to destabilize or weaken a political opponent. At the theoretical level, alcohol thus links back to the difficult articulation, in international relations, between two theoretical approaches: the rational choice theory, on the one hand, which insists on the articulation between the ends and means, at the strategic level; and political psychology, on the other hand, which pays more attention to the role of emotions and passions (Hassner 2015; Petersen 2011; Nussbaum 2001; Lindemann 2012; Jervis 1976).
Building on this duality, this thematic section studies the role played by alcohol in the relationships between various international actors, following three work axes.
To analyze the role played by alcohol in international relations therefore informs on how relationships – cooperative or conflictual – between states and collectives, are established at the international level. By examining the exchanges, shared experiences, tensions, and strategies which structure alcohol consumption, our goal is to highlight, more generally, the building and maintenance of relationships between political units on the international stage.
Références / References
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Introduction et modération : Jean-Vincent Holeindre (Paris 2) et Marie Robin (Paris 2/ Université du Sud Danemark)
Discutant : Boris Pétric (CNRS) et Thomas Lindemann (UVSQ)
Nicolas Hubé (Université de Lorraine), « À Berlin, on danse, tandis que dans la Ruhr, on souffre » Quand l’état des relations internationales empêche le gouvernement allemand dans ses mondanités (1919-1925)
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Xavier Crettiez (Sciences Po Saint-Germain-en-Laye), Addictions et violence radicale. Une sociologie des engagements alcoolisés
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Pierre Ramond (École normale supérieure), Boire ou ne pas boire au cours des négociations sur le nucléaire iranien (2003-2015) : conflit idéologique ou question stratégique ?
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Sarah Tanke (CERI Sciences Po), Vers une ‘diplomatie du saké’ ? L’alcool comme outil de la diplomatie publique du Japon
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Francesco Tortolero Cervantes (Université nationale autonome du Mexique / UNAM), Géopolitique du vin aux pays du nouveau monde : la réception de la notion de terroir chez les petits producteurs latino-américains
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CRETTIEZ Xavier xavier.crettiez@uvsq.fr
HOLEINDRE Jean-Vincent jean-vincent.holeindre@u-paris2.fr
HUBÉ Nicolas nicolas.hube@univ-lorraine.fr
LINDEMANN Thomas lindemannt21@gmail.com
PETRIC Boris boris.petric@ehess.fr
RAMOND Pierre pierre.ramond@ens.psl.eu
ROBIN Marie marie.robin@sciencespo.fr
TANKE Sarah sarah.tanke@sciencespo.fr
TORTOLERO CERVANTES Francesco ftortolero@gmail.com