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ST 71

Livres politiques, livres de politiques

Political Books, Books by Politicians

 

Responsables scientifiques :

Christian Le Bart (Sciences Po Rennes et ARENES, Université de Rennes – EHESP – CNRS) christian.lebart@sciencespo-rennes.fr
Eric Treille (ARENES, Université de Rennes – EHESP – CNRS) eric.treille@laposte.net

Sans doute les nouvelles technologies et les réseaux sociaux ont-ils transformé les modalités de la communication politique, mais ces mutations ne doivent pas faire oublier le succès persistant du support écrit. Le livre politique est plus que jamais un vecteur apprécié des professionnels de ce secteur. Doté d’une légitimité qui l’inscrit dans une histoire longue et prestigieuse (cf. les Mémoires de Guerre du général de Gaulle), le livre permet de se distinguer dans la course à la visibilité que constitue désormais la compétition politique. Publier pour exister ? Pour se présidentialiser ? Pour être invité sur les plateaux de télévision, repris dans la presse écrite, commenté sur les réseaux sociaux ? Les personnalités politiques publient désormais autant pour se présenter, dire leur trajectoire, exprimer leur sensibilité, que pour proposer, offrir des solutions et des programmes politiques, exposer une doctrine ou une ligne politique.

Livres de politiques, donc, mais aussi plus largement livres politiques. La catégorie, fort hétéroclite, ne fait guère sens qu’en référence aux classements établis par les libraires, les bibliothécaires, et les commentateurs utilisant le label : on y trouve, outre les ouvrages de politiques, des ouvrages de journalistes, d’essayistes, de proches des personnalités politiques (familles, collaborateurs…), secondairement de chercheurs (en science politique mais pas seulement). Cette production, quantitativement importante et qualitativement inégale, est au final peu analysée. Elle constitue pourtant une modalité importante de fabrication de « la politique » entendue comme activité spécifique.

La science politique entretient avec les livres politiques une relation très distanciée. Qu’ils émanent de journalistes ou, a fortiori, des politiques eux-mêmes, ils sont considérés comme peu fiables et peu dignes de constituer une source sérieuse. Parce qu’ils obéissent aux lois infra-scientifiques du cadrage journalistique (personnalisation et psychologisation, mise en récit et dramatisation…) ou à celles, plus suspectes encore, du plaidoyer pro domo et de la stratégie de communication, les livres politiques se voient rarement octroyer le statut de matériau permettant de contribuer utilement à la sociologie de l’action publique ou même à celle du métier politique.

Un tel discrédit est regrettable. Les livres politiques, quel que soit leur degré de fiabilité (et même, serait-on tenté de dire, si celui-ci est très faible) constituent un objet significatif du champ politique. Ils sont lus, ils sont commentés, ils peuvent constituer des événements politiques : rappellera-t-on à quel point le quinquennat de François Hollande fut impacté par ces deux publications que furent, en 2014, Merci pour ce moment (signé de son ex-compagne Valérie Trierweiler) et, en 2016, Un président ne devrait pas dire ça (de Fabrice Lhomme et Gérard Davet) ?

En érigeant le livre politique en objet redevable d’une analyse sociologique, nous entendons en particulier en interroger tout à la fois les modes de production, les contenus, et les effets politiques. Il s’agit de déconstruire les stratégies des acteurs impliqués : désir de gagner en visibilité et en légitimité chez les politiques ; volonté pour les journalistes d’exercer son métier de façon différente, à l’écart des rédactions et des contraintes d’agenda ; recherche de sujets grands publics et d’auteurs déjà consacrés chez les éditeurs… Il s’agit aussi de voir les conditions concrètes d’écriture (division du travail, voire délégation pure et simple). L’analyse des contenus pourra s’enrichir de comparaisons dans le temps ou dans l’espace (y a-t-il une singularité française en matière de livres politiques ?), selon des méthodologies variables (analyse de l’argumentation, ethos mis en oeuvre, analyse lexicométrique…). Enfin, sera posée la question des modes de circulation, de réception et d’appropriation de ces ouvrages. Premier cercle de la réception par les pairs, par le milieu politique, par les médias ; et second cercle de la réception par le grand public, entre succès plus ou moins attendus et échecs plus ou moins significatifs. Le lecteur est-il aussi électeur ? Peut-on anticiper une performance électorale sur la base des chiffres de vente ?

 

No doubt new technologies and social networks have transformed the modalities of political communication, but these changes must not make us forget the persistent success of written support. The political book is more than ever a vector appreciated by professionals in this sector. Endowed with a legitimacy which inscribes it in a long and prestigious history (cf The Complet War Memoirs of General de Gaulle), the book makes it possible to distinguish itself in the race with the visibility that constitutes from now on the political competition. Publish to exist? To presidentialize? To be invited on television sets, in print, commented on social networks? Political figures now publish as much to present themselves, to say their trajectory, to express their sensibility, as to propose, offer solutions and political programs, to expose a doctrine or a political line.

Books by politicians, therefore, but also more widely political books. The category, very heterogeneous, makes little sense that reference to the rankings established by booksellers, librarians, and commentators using the label: one finds there, besides the works of politics, works of journalists, of essayists, close relatives of political personalities (families, collaborators …), secondary researchers (in political science but not only). This production, quantitatively important and qualitatively unequal, is ultimately little analyzed. It is nevertheless an important modality of manufacturing « politics » understood as specific activity.

Political science has a very distant relationship with political books. Whether they come from journalists or even from the policies themselves, they are considered unreliable and unworthy to be a serious source. Because they obey the infra-scientific laws of journalistic framing (personalization and psychologization, storytelling and dramatization …) or those, even more suspicious, pro-domo advocacy and communication strategy, the political books are rarely do they grant the status of material that makes a useful contribution to the sociology of public action or even to that of the political profession.

Such discredit is regrettable. Political books, irrespective of their degree of reliability (and even, one would be tempted to say, if this one is very weak) constitute a significant object of the political field. They are read, they are commented, they can constitute political events: will we recall how much François Hollande’s five-year period was impacted by these two publications that were, in 2014, Merci pour le moment (signed by Valérie Trierweiler) and, in 2016, Un président ne devrait pas dire ça (Fabrice Lhomme and Gérard Davet)?

Turning the political book into an object liable to a sociological analysis, we intend in particular to question at the same time the modes of production, the contents, and the political effects. It is about deconstructing the strategies of the actors involved: desire to gain visibility and legitimacy among politicians; willingness for journalists to exercise their profession in a different way, away from writing and constraints of agenda; research of public subjects and authors already devoted to publishers … It is also a question of seeing the concrete conditions of writing (division of labor, even pure and simple delegation). The analysis of contents will be enriched by comparisons in time or space (is there a French singularity in political books?), According to variable methodologies (analysis of the argumentation, ethos put implementation, lexicometric analysis …). Finally, the question of modes of circulation, reception and appropriation of these works will be asked. First circle of peer reception, by the political community, by the media; and second circle of reception by the general public, between more or less expected successes and more or less significant failures. Is the reader also a voter? Can we anticipate an electoral performance based on books sales figures?

Axe 1

Discutante : Adeline Wrona (GRIPIC)

Christian Le Bart, Eric Treill (ARENES-CNRS), Introduction : pourquoi / comment étudier les livres (de) politiques ?

Anne-Marie Pilote (UQAM-CRICIS), L’essai politique comme stratégie de production de soi des candidats aux élections générales québécoises 2018
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François Hourmant (Université d’Angers), Cinquante nuances de ressentiment : les livres de vengeance politique et affective

Eric Treille (ARENES-CNRS), Signer son retour. François Hollande et la tournée de dédicaces de son livre « Les leçons du pouvoir »

Axe 2

Discutante : Caroline Ollivier-Yaniv (Ceditec)

Quentin Shcwanck (Triangle-CNRS), « Le savoir vaut vertu » : politique et instruction populaire dans l’Encyclopédie nouvelle de Jean Reynaud et Pierre Leroux

Antonin Aubert (CESSP), Les idées radicales dans les années 1970 : retour sur une profusion de « livres politiques »
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Nicolas Azam (CESSP), Georges Marchais, auteur : la construction empêchée d’une identité politique singulière
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Romain Mathieu (IRENEE), Du chaos à l’insoumission : revisiter la trajectoire de Jean-Luc Mélenchon au prisme de sa production littéraire

Conclusion générale : Chloé Gaboriaux (Triangle-CNRS)

AUBERT Antonin antoine.aubert21@gmail.com

AZAM Nicolas nicolas.azam@live.fr

GABORIAUX Chloé chloe.gaboriaux@sciencespo-lyon.fr

HOURMANT François francois.hourmant@univ-angers.fr

LE BART Christian christian.lebart@sciencespo-rennes.fr

MATHIEU Romain romain.mathieu@univ-lorraine.fr

OLLIVIER-YANIV Caroline yaniv@u-pec.fr

PILOTE Anne-Marie pilote.anne-marie@courrier.uqam.ca

SCHWANK Quentin quentin.schwank@ens-lyon.fr

TREILLE Eric eric.treille@laposte.net

WRONA Adeline adeline.wrona@celsa.paris-sorbonne.fr