le portail de la science politique française
Responsables scientifiques :
Myriam Aït-Aoudia (Université de Picardie Jules Verne) myriam.aitaoudia@u-picardie.fr
Clémentine Fauconnier (Université de Haute Alsace) clementine.fauconnier@uha.fr
Alexandra Goujon (Université de Bourgogne) alexandra.goujon@u-bourgogne.fr
Section thématique organisée par le groupe Démocraties, Autoritarismes de l’AFSP.
Le groupe « Démocraties et autoritarismes » a pour objet d’interroger les critères de différenciation et de convergence entre ces deux grands types de régime politique. Ces derniers doivent également être abordés, avec nuances, à travers leurs distinctions internes d’où l’usage du pluriel. Les sciences sociales sont confrontées à une difficulté particulière puisque les concepts qu’elles utilisent font partie du langage courant. Classer est donc à la fois une opération savante et une opération de sens commun. Cette superposition conduit de nombreux chercheurs, particulièrement dans la sociologie politique française, à récuser l’idée même de classification accusée de conforter une vision essentialiste et normative des régimes et d’empêcher de penser leur complexité. Cette posture conduit parfois à des détours rhétoriques peu lisibles tout comme elle rend difficiles les tentatives de montée en généralité et de comparaison entre des cas, cloisonnés dans des aires culturelles différentes. L’objectif du groupe est de prendre au sérieux la catégorisation des régimes et de questionner, dans une perspective pluridisciplinaire, à la fois leurs critères de différenciation et leurs évolutions ainsi que l’hybridité de certaines configurations politico-institutionnelles. Cette réflexion se déclinera ici en deux volets :
Le premier volet portera sur le rôle et la place des élections dans les régimes autoritaires. La compétition électorale pluraliste, libre et équitable est au cœur de l’autodéfinition des démocraties contemporaines. De même elle constitue un pilier dans les politiques de promotion démocratique depuis le dernier quart du XXe siècle. L’extension quasi-universelle d’élections pluralistes impose alors aux spécialistes des régimes non démocratiques, une comparaison explicite ou implicite avec le modèle démocratique et libéral. Peut-on et doit-on alors se dégager d’une approche en miroir déformé ? L’ouvrage classique Des élections pas comme les autres, publié à la fin des années 1970 à une période où les élections n’étaient pas diffusées dans les régimes non démocratiques comme elles le sont aujourd’hui, avait le mérite de traiter cet objet délaissé par la science politique. Nous proposons de le repenser à partir d’observations empiriques dans trois situations nationales particulièrement contrastées selon le degré de pluralisme, l’introduction plus ou moins tardive d’une compétition électorale (donc de l’histoire nationale), et la conception plus ou moins restreinte ou répressive de l’opposition par les autorités en place. La perspective comparée permettra de saisir les similarités et les différences non pas seulement des fonctions liées aux élections, mais également et surtout de leurs modalités concrètes et de leurs usages par les acteurs impliqués.
Le second volet explorera la distinction entre démocratie et autoritarisme au prisme du libéralisme. Il s’agira de retracer, en mobilisant l’histoire, la théorie politique, la sociologie politique et/ou le droit constitutionnel, les couplages et découplages entre libéralisme et démocratie d’une part, entre libéralisme et autoritarisme d’autre part. À quelles conditions le libéralisme et la démocratie forment-ils un tout cohérent et à quelles conditions l’attelage peut-il s’étioler ? L’autoritarisme est-il toujours antinomique du libéralisme ? Dans quelle mesure une démocratie libérale qui progressivement ou brutalement s’éloigne des pratiques sous-jacentes au libéralisme politique change-t-elle de nature ? Pour répondre à ces questions, il s’agira notamment de revenir sur la notion méconnue de « libéralisme autoritaire » forgée dans l’Allemagne du début des années 1930 ainsi que d’interroger celle, récente, de « démocratie illibérale ». L’enjeu ici n’est pas nominaliste : il consiste à mieux circonscrire les variétés de cas, en les plaçant dans un continuum qui suppose des repères typologiques, tout en prenant du recul par rapport à leurs usages polémiques dans les champs politique et, parfois aussi, académique.
The group « Democracies and authoritarianisms » aims to question the criteria of differentiation and convergence between these two types of political regime. The latter must also be approached, with nuance, through their internal distinctions, hence the use of the plural. The social sciences are faced with a particular difficulty since the concepts they use are part of everyday language. Classifying is therefore both a scholarly operation and an operation of common sense. This superposition leads many researchers, particularly in French political sociology, to reject the very idea of classification, which is accused of supporting an essentialist and normative vision of regimes and of preventing us from considering their complexity. This posture sometimes leads to rhetorical detours that are difficult to understand, just as it makes it difficult to attempt to generalize and compare cases that are compartmentalized in different cultural areas. The group’s objective is to take the categorization of regimes seriously and to question, in a multidisciplinary perspective, both their criteria of differentiation and their evolution as well as the hybridity of certain political-institutional configurations. This reflection will be divided into two parts:
The first part will focus on the role and place of elections in authoritarian regimes. Pluralist, free and fair electoral competition is at the heart of the self-definition of contemporary democracies. It has also been a pillar of democracy promotion policies since the last quarter of the 20th century. The quasi-universal extension of pluralist elections imposes on specialists of non-democratic regimes an explicit or implicit comparison with the democratic and liberal model. Can and should we then free ourselves from a distorted mirror approach? The classic work Des élections pas comme les autres, published at the end of the 1970s at a time when elections were not as widespread in non-democratic regimes as they are today, had the merit of dealing with this object neglected by political science. We propose to rethink it on the basis of empirical observations in three particularly contrasting national situations, depending on the degree of pluralism, the more or less late introduction of electoral competition (and therefore of national history), and the more or less restricted or repressive conception of the opposition by the authorities in place. The comparative perspective will make it possible to grasp the similarities and differences not only of the functions related to elections, but also and above all of their concrete modalities and their uses by the actors involved.
The second part will explore the distinction between democracy and authoritarianism through the prism of liberalism. By mobilizing history, political theory, political sociology and/or constitutional law, it will trace the couplings and decouplings between liberalism and democracy on the one hand, and between liberalism and authoritarianism on the other. Under what conditions do liberalism and democracy form a coherent whole and under what conditions can the coupling falter? Is authoritarianism always antithetical to liberalism? To what extent does a liberal democracy that gradually or abruptly moves away from the practices underlying political liberalism change its nature? In order to answer these questions, we will return to the little-known notion of « authoritarian liberalism » forged in Germany at the beginning of the 1930s, as well as questioning the recent notion of « illiberal democracy ». The challenge here is not nominalistic: it consists in better circumscribing the varieties of cases, by placing them in a continuum that presupposes typological markers, while taking a step back from their polemical uses in the political and, sometimes, academic fields.
Références / References
Axe 1 / Comment l’autoritarisme s’accommode-t-il des élections ?
Présidente : Myriam Aït-Aoudia (Université de Picardie Jules Verne)
Discutante : Alexandra Goujon
Assia Boutaleb (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), Compétition électorale et leadership autoritaire, réflexions à partir du cas égyptien
Marie-Laure Geoffray (Université Paris III – Sorbonne Nouvelle), Cuba : des élections staliniennes pas comme les autres
Clémentine Fauconnier (Université de Haute Alsace), Les élections dans la Russie de Poutine : une réappropriation stratégique de la conception procédurale de la démocratie ?
Axe 2 / Le libéralisme permet-il de distinguer les démocraties des régimes autoritaires ?
Présidente : Alexandra Goujon (Université de Bourgogne)
Discutante : Myriam Aït-Aoudia
Gwendal Chaton, (Université Rennes 1), Libéralisme autoritaire et démocratie illibérale : l’ombre planante de C. Schmitt
Laure Neumayer (Université de Picardie Jules Verne), Illibéralisme et régression démocratique en Europe de l’Est
Laurent Francatel (Université de Picardie Jules Verne), Illibéralisme et faillibilité de la démocratie
AIT-AOUDIA Myriam myriam.aitaoudia@u-picardie.fr
BOUTALEB Assia assia.Boutaleb@univ-paris1.fr
CHATON Gwendal gwendal.chaton@univ-rennes1.fr
FAUCONNIER Clémentine clementine.fauconnier@uha.fr
FRANCATEL Laurent Laurent.Francatel@u-picardie.fr
GEOFFRAY Marie-Laure marie-laure.geoffray@sorbonne-nouvelle.fr
GOUJON Alexandra alexandra.goujon@u-bourgogne.fr
NEUMAYER Laure laure.neumayer@u-picardie.fr