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Responsables scientifiques :
Mickaël Durand (Ined / CEE, Sciences Po) mickael.durand@ined.fr
Camille Masclet (CNRS, CESSP / Ined) camille.masclet@cnrs.fr
Cette section thématique propose de revisiter un questionnement classique de la science politique : celui de la famille comme instance de socialisation politique. À partir d’une conception élargie de la socialisation politique (Maurer, 2000 ; Duchesne et al., 2003 ; Boughaba et al., 2018), elle invite à réexaminer la manière dont l’univers familial contribue à façonner le rapport des individus à la politique institutionnelle mais aussi leur rapport politique au monde social. Elle vise en outre à faire dialoguer le champ de la socialisation politique avec une sociologie de la famille attentive à ses transformations contemporaines (Réguer-Petit, 2016 ; Haegel, 2020).
Trois enjeux seront plus particulièrement au cœur de cette section.
Le premier enjeu consiste à élargir la conception des transmissions familiales du politique. Depuis leurs débuts, les travaux se sont majoritairement intéressés à la transmission des opinions et valeurs, des identifications partisanes ou des positionnements gauche/droite (Hooghe et Boonen, 2015 ; Jennings, Stoker et Bowers, 2009 ; Percheron, Muxel et Mayer, 1993) et, plus récemment, du militantisme (Pagis, 2014). Mais le politique en famille ne concerne pas seulement ce qui relève du champ politique : les appartenances et identifications sociales – de genre, de classe, de race, sexuelles, religieuses, etc. – sont des médiations essentielles du rapport de l’individu au politique (Cramer Walsh, 2016), tandis que les héritages politiques transmis dans les familles se composent aussi de dispositions relatives aux rapports sociaux de domination (Masclet, 2015). On se propose ainsi d’analyser le rôle joué par les socialisations politiques familiales dans ses deux dimensions (rapport à la politique et rapport politique au monde social).
Le deuxième enjeu consiste à ouvrir la boîte noire de « la famille » pour saisir plus finement les agent·e·s et les mécanismes différenciés qui socialisent au politique à l’intérieur de cette sphère. Alors que différents travaux ont cherché à distinguer et évaluer les rôles respectifs des pères et des mères dans le processus de socialisation politique des enfants (Muxel, 2001 ; Zuckerman, Dasovic et Fitzgerald, 2007), il s’agit de poursuivre cette dynamique en étudiant l’action et l’influence socialisatrices de membres de la famille rarement analysés : frères et sœurs, grands-parents, beaux-parents, germains, ou encore d’autres membres de la famille élargie.
Sortir de l’analyse de la socialisation politique familiale primaire pour l’interroger comme instance de socialisation politique secondaire constitue un troisième déplacement à opérer. Dans une perspective de socialisation (politique) continue (Darmon, 2016), ou du modèle de « life-cycle » ou « life-long openness » (Jennings et Niemi, 1978), l’individu est socialisé au politique tout au long de sa vie, et la famille peut continuer à avoir un rôle dans ce processus. Des évènements biographiques familiaux vécus à l’âge adulte (un divorce, un coming-out, etc.) ou des configurations familiales spécifiques (monoparentalité, homoparentalité) peuvent par exemple transformer politiquement l’individu. De la même manière, ce qui se joue dans le couple – une instance qui demeure sous-investiguée en dépit de travaux récents (Muxel, 2015 ; Baloge et Grégory, 2018) – constitue également une entrée pertinente pour saisir des processus de socialisation politique secondaire en famille à des âges variés. Or, l’emboîtement de ces différentes socialisations politiques familiales et de leurs produits au fil de la vie reste à analyser.
La section s’organisera autour de deux axes, consacrés à la transmission et la politisation des appartenances sociales en famille (axe 1) et aux agent·e·s et aux temps pluriels de la socialisation politique familiale (axe 2). Au travers de ces deux axes, la section ambitionne de réinterroger l’objet classique et largement délaissé ces dernières années qu’est la socialisation politique en famille, tout au long de la vie, et au-delà de la stricte dimension institutionnelle et partisane du politique.
This thematic section aims to revisit a classical question in political science: family as an instance of political socialization. Based on a broad conception of political socialization (Maurer, 2000; Duchesne et al., 2003; Boughaba et al., 2018), it invites to reexamine the way family contributes to shape the individual’s relationship to institutional politics, but also his/her political relationship to the social world. It also aims to bring the field of political socialization into dialogue with a sociology of family attentive to its contemporary transformations (Réguer-Petit, 2016; Haegel, 2020).
Three main issues are at the core of this section.
The first one consists in broadening the conception of family transmissions of politics. Studies of family political socialization have so far been concentrated on the transmission of politival values and opinions, of ideological or partisan preferences (Percheron et al., 1993; Jennings et al., 2009; Hooghe et al., 2015), and, more recently, to that of activism (Pagis, 2014). But politics within the family is not only about the political field: identities or social belongings and identifications – based on gender, race, sexuality, class, or religion – are essential mediations of the individual relationship to politics (Cramer Walsh, 2016), while political heritage transmitted in families are also composed of dispositions related to social dominations (Masclet, 2015). This section proposes to analyze the role played by family political socialization in these two dimensions (individual relationship to the political field, and to the social world).
The second issue consists in opening the black box of the “family” to better understand the different agents and mechanisms that socialize the individual to politics within this sphere. While various studies have sought to distinguish and evaluate the respective roles of fathers and mothers in the process of political socialization of children (Muxel, 2001; Zuckerman et al., 2007), the purpose is to follow this dynamic by studying the socializing action and influence of less studied family members: siblings, grand-parents, step-parents, first cousins, or any other members of extended family.
Examining family as an instance of secondary political socialization constitutes the third move to make. From a continuous (political) socialization perspective (Darmon, 2016), or from the “life-cycle” or “life-long openness” model perspective (Jennings & Niemi, 1978), the individual is socialized to politics throughout his/her life, and the family may continue to play a role in the process. Family biographical events experienced in adulthood (divorce, coming out, etc.) or specific family configurations (single parenthood, homoparenting), for example, can transform the individual politically. In the same way, the couple – an understudied instance of political socialization despite recent studies (Muxel, 2015; Baloge & Grégory, 2018) – is also a relevant approach to grasp secondary political socialization processes within the family at various ages. However, the articulation throughout life of these different political socializations experienced in the family, and their products, remains to be investigated.
This section is organized around two axes, the first one dealing with the transmission and politicization of social identities and belongings within the family, and the second one devoted to the diversity of agents and times of family political socialization. Through these two axes, this section aims at reexamining political socialization in the family, a classical but recently neglected object, with a life-long approach and beyond the strict institutional and partisan dimension of politics.
Références / References
Baloge M., Grégory M.-A., 2018, « Le vote à l’épreuve du couple », Travail, genre et societes, n° 40, 2, p. 69‑84.
Bargel L., Darmon M., 2017, « La socialisation politique », Politika, https://www.politika.io/fr/article/socialisation-politique
Boughaba Y., Dafflon A., Masclet C., 2018, « Introduction. Socialisation (et) politique. Intériorisation de l’ordre social et rapport politique au monde », Sociétés contemporaines, 112, 4, p. 5‑21.
Cramer Walsh K., 2016, The Politics of Resentment. Rural Consciousness in Wisoncin ad the Rise of Scott Walker, Chicago, University of Chicago Press.
Darmon M., 2016, La socialisation, Paris, Armand Colin (128 Tout le savoir), 126 p.
Duchesne S., Haegel F., Braconnier C., Hamidi C., Lefébure P., Maurer S., Scherrer V., 2003, « Politisation et conflictualisation : de la compétence à l’implication », dans Perrineau P. (dir.), Le désenchantement démocratique, La Tour-d’Aigues, Editions de l’Aube (Monde en cours. Série Essai), p. 107‑129.
Haegel F., 2020, « Political Socialisation: Out of Purgatory? », European Journal of Sociology / Archives Européennes de Sociologie, 61, 3, p. 333‑364.
Hooghe M., Boonen J., 2015, « The Intergenerational Transmission of Voting Intentions in a Multiparty Setting: An Analysis of Voting Intentions and Political Discussion Among 15-Year-Old Adolescents and Their Parents in Belgium », Youth & Society, 47, 1, p. 125‑147.
Jennings K.M., Niemi R.G., 1978, « The Persistence of Political Orientations: An Over-Time Analysis of Two Generations », British Journal of Political Science, 8, 3, p. 333‑363.
Jennings K.M., Stoker L., Bowers J., 2009, « Politics across Generations: Family Transmission Reexamined », The Journal of Politics, 71, 3, p. 782‑799.
Masclet C., 2015, « Le féminisme en héritage ? Enfants de militantes de la deuxième vague », Politix, n° 109, 1, p. 45‑68.
Maurer S., 2000, « École, famille et politique : socialisations politiques et apprentissage de la citoyenneté. Bilan des recherches en science politique », dans CNAM (dir.), Dossiers d’études. Allocations Familiales n° 16, Paris.
Muxel A., 2001, « Socialisation et lien politique », dans Blöss T. (dir.), La Dialectique des rapports hommes-femmes, Paris, Presses Universitaires de France – PUF, p. 27‑45.
Muxel A., 2015, « La politisation par l’intime », Revue française de science politique, 65, 4, p. 541‑562.
Pagis J., 2014, Mai 68, un pavé dans leur histoire, Paris, Sciences Po, Les Presses.
Percheron A., Muxel A., Mayer N., 1993, La socialisation politique, Paris, Armand Colin (Collection U. Série Sociologie), 226 p.
Réguer-Petit M., 2016, Bifurcations familiales et socialisations politiques. Une comparaison des femmes en famille nucléaire, monoparentale et recomposée, Thèse de doctorat en science politique, Institut d’études politiques de Paris.
Zuckerman A.S., Dasovic J., Fitzgerald J., 2007, Partisan Families: The Social Logic of Bounded Partisanship in Germany and Britain, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 224 p.
Axe 1 / Transmissions et politisation des appartenances sociales en famille
Présidente de séance : Camille Masclet (CNRS, CESSP)
Alexandre Dafflon (Université de Lausanne, Crapul), Le « sens civique » comme la transmission d’un rapport politisé à sa condition sociale. La socialisation politique familiale des jeunes des classes populaires en milieu rural en Suisse
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Gauthier Simon (Université de Bordeaux, Institut de recherche Montesquieu), La réception de Laudato si’ chez les jeunes catholiques : la « révélation » d’un habitus écologique issu de la socialisation politique familiale
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Jeanne Toutous (Université de Rennes 1, Arènes), Les soubassements politiques de la transmission familiale des langues régionales et minoritaires. Une étude comparée Bretagne/Lusace
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Discutante : Amélie Beaumont (CESSP, CSU)
Axe 2 / Les agent·e·s et les temps pluriels de la socialisation politique familiale
Président de séance : Mickaël Durand (Ined)
Béatrice Bouillon (Université Paris Dauphine-PSL, IRISSO), Des rapports renouvelés aux inégalités de genre : la monoparentalité́ comme expérience socialisatrice ?
Clémentine Comer (INRAE, Université Paris Dauphine), Bleuwenn Lechaux (Université Rennes 2, Arènes,), Alice Picard (Arènes), La stratification conjugale de la politisation
Jeanne Boudoux (Université Paris Dauphine-PSL, IRISSO), La socialisation politique par la fratrie à l’âge adulte, l’exemple de l’élection présidentielle 2022
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Discutante : Sophie Duchesne (Centre Emile Durkheim / Sciences Po et Université de Bordeaux)
BEAUMONT Amélie beaumont.amelie@gmail.com
BOUDOUX Jeanne jeanne.boudoux@dauphine.psl.eu
BOUILLON Béatrice beatrice.bouillon-minois@dauphine.psl.eu
COMER Clémentine clementinecomer@gmail.com
DAFFLON Alexandre alexandre.dafflon@unil.ch
DUCHESNE Sophie s.duchesne@sciencespobordeaux.fr
DURAND Mickaël mickael.durand@ined.fr
LECHAUX Bleuwenn bleuwenn.lechaux@univ-rennes2.fr
MASCLET Camille camille.masclet@cnrs.fr
PICARD Alice alicepicard@orange.fr
SIMON Gauthier gauthier.simon@u-bordeaux.fr
TOUTOUS Jeanne jeanne.toutous@wanadoo.fr