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ST18

Sociologie politique de l’UE et analyse de l’action publique européenne : quels débats, quelles passerelles ?

Political sociology of the EU and the analysis of European policies: controversies or mutual recognition?

Responsables scientifiques
Yves Surel (Université Paris II) yves.surel@aliceadsl.fr
Didier Georgakakis (Université Paris I) didier.georgakakis@univ-paris1.fr

L’objectif de cette section thématique est de faire un état des travaux récents portant sur les politiques publiques en Europe en confrontant deux ensembles de perspectives analytiques souvent vus comme opposés, l’une plutôt issue de l’analyse des politiques publiques, l’autre plutôt attachée à une sociologie politique francophone.
Dans un numéro récent de Politique européenne, Patrick Hassenteufel et Yves Surel (Hassenteufel, Surel, 2015) ont tenté une première revue de la littérature croisant travaux anglo-saxons et francophones en soulignant certaines des principales évolutions dans ce sous-champ de la discipline. Revenant sur un diagnostic antérieur (Hassenteufel, Surel, 2000), ils expriment dans ce papier l’idée d’une dilution des études sur l’action publique en Europe dans des perspectives voisines et/ou alternatives, plus immédiatement centrées sur une sociologie (critique) des acteurs en interaction ou désormais rattachées à d’autres champs d’études (political economy, études comparatives des politiques sociales, etc.). Ce même mouvement s’accompagne toutefois également à leurs yeux, de façon en apparence paradoxale, d’une nouvelle forme de « normalisation », l’analyse des politiques européennes étant devenue un cadre « normalisé » d’études pour les différents courants théoriques en usage.
Ce bilan n’avait pas une prétention à l’exhaustivité. Il peut légitimement susciter des lectures différentes soulignant la place trop limitée laissée à certaines perspectives analytiques plus directement fondées sur des travaux français. Depuis quelques années s’est consolidé en effet un axe de recherche alimenté par une sociologie du droit communautaire et des acteurs juridiques et bureaucratiques, qui permet de voir différemment les processus d’institutionnalisation de l’Europe et de ses modes d’action. Porté notamment par des travaux sur les eurocrates ou sur les acteurs du système juridictionnel européen (entendu au sens large), ces recherches peuvent nourrir pour certains un autre regard sur l’Union européenne, sur les politiques conduites et sur les formes de légitimation associées (Georgakakis, Rowell, 2013 ; Cohen, Vauchez, 2007).
En croisant ces écrits récents et ces perspectives différentes, nous sommes arrivés à plusieurs diagnostics communs. De manière certes inégale, ces travaux d’origines diverses restent tout d’abord assez largement étrangers les uns aux autres. Même si certaines références communes sont parfois employées, elles sont le plus souvent le fruit d’auto-positionnements différents plutôt que le reflet d’une mutualisation réciproque ou d’une recherche d’intégration. Cette méconnaissance partielle reste en outre le plus souvent fondée sur des prémisses implicites qui fonctionnent autour de lignes de polarisation trop simples pour être pertinentes : construction des objets micro/macro ; référence ou révérence tenue pour excessive à l’égard de certains auteurs ou courants ; méthodes quantitatives ou qualitatives ; positions normatives plus ou moins explicitées, etc.
L’ambition de cette section thématique est par conséquent d’expliciter et de mettre en débat certaines de ces lignes de fracture, qui conduisent parfois de notre point de vue à des controverses d’autant répétitives et stériles qu’elles sont biaisées par des logiques théoriques, méthodologiques et positionnelles plus ou moins voilées. Les communications devront donc interroger de manière directe, sur la base d’une confrontation des théories, des méthodes et des résultats empiriques, les points de contact comme les divergences caractérisant ces traditions de recherche.

The main objective of this panel is to deliver a state of the art in the field of public policies analysis in Europe by comparing two sets of analytical perspectives which are often seen as opposed. The first one is mainly related to classical analyses of policies, the second one being attached to a so-called “French political sociology”.
In a paper recently published in a special issue of Politique européenne, Patrick Hassenteufel and Yves Surel (Hassenteufel, Surel, 2015) attempted a first review of the literature, using both Anglo-Saxon and French research. Returning to a previous diagnosis (Hassenteufel, Surel, 2000), they developed in this contribution the idea that public policy studies in Europe have been progressively diluted in alternative prospects and/or attached to other fields (political economy, comparative Welfare States studies, etc.). But, in the same time, they consider that this sub-discipline has been characterized over the past few years by a new form of “normalization”, European policies being now largely analyzed according to “standardized” theoretical currents (rational choice, variants of neo-institutionalism, cognitive and normative analysis, discourse analysis, etc.).
This state of the art was by no means considered as an exhaustive one. It could rightly be argued that this contribution put too little emphasis on alternative analytical perspectives more directly based on French recent research. In recent years, one might indeed consider that there has been a sort of consolidation in a body of literature dominated by a sociological analysis of norms and by micro-analyses of bureaucratic actors. For the promoters of these alternatives approaches, theses analyses allow a different understanding of the institutionalization of Europe and of its modes of action (Georgakakis, Rowell, 2013; Cohen, Vauchez, 2007).
Comparing these various perspectives, we reached several common diagnoses. First of all, it is quite clear for us, that these different sets of work are still widely enough strangers to each other. Although some common references are sometimes employed, they are more often than not the result of different auto-positioning choices rather than a commitment for research integration. More importantly, this mutual ignorance is also based on implicit assumptions defined according to very simple cleavages: micro/macro research designs; reference or excessive reverence to specific authors or theoretical currents; quantitative or qualitative methods; more or less explicit normative positions, etc.
The aim of this thematic section is therefore to explain and to debate some of these fault lines and, in doing so, to avoid the repetition of sterile controversies biased by more or less veiled theoretical, methodological and positional dynamics. Accordingly, papers must question directly, on the basis of a comparison of theories, methods and empirical results, the similarities as well as the main differences which characterize these research traditions.

REFERENCES

Cohen A., Vauchez A. (dir.) (2007), Anatomie d’un « moment constituant » européen. Élites, mobilisation, votes, Bruxelles, Presses de l’ULB.
Georgakakis D., Rowell J. (dir.) (2013), The Field of Eurocracy, London, Palgrave MacMillan.
Hassenteufel P., Surel Y. (2000), « Des politiques publiques comme les autres ? Construction de l’objet et outils d’analyse des politiques européennes », Politique européenne, n° 1, p. 8-24.
Hassenteufel P., Surel Y. (2015), « Normalisation ou dilution de l’analyse des politiques publiques européennes ? », Politique européenne, n°50, p. 200-227.

Didier Georgakakis (Université Paris I), Yves Surel (Université Paris II), Introduction

Fabien Desage (CERAPS, Université de Lille), Pauline Ravinet (CERAPS, Université de Lille), L’Europe et la projectification de l’action publique : au-delà des perspectives divergentes, un même angle mort

Cyril Benoit (Université de Rouen), Jeux d’échelles, configurations et champs

Antoine Roger (Sciences Po Bordeaux), Andy Smith (Sciences Po Bordeaux) et Xabier Itçaina, La théorie des champs revisitée : de l’action stratégique à la contingence structurée, le cas de l’industrie du vin

Didier Bigo (Sciences Po Paris), Théoriser le champ de la coopération européenne en matière de sécurité intérieure

Discutants :
Brigitte Gaïti (Université Paris I)
Patrick Le Galès (Sciences Po Paris)

 

Disponibles prochainement

Mercredi 12 juillet 2017 9h00-13h00

BENOIT Cyril
BIGO Didier
DESAGE Fabien
GAITI Brigitte
GEORGAKAKIS Didier
LE GALES Patrick
RAVINET Pauline
ROGER Antoine
SMITH Andy
SUREL Yves